Livv
Décisions

CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 16 mai 2002, n° 99-07658

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Parasanté (SARL), Chavane de Delmassy (ès qual.), SCP Michel & Waldmann (ès qual.)

Défendeur :

Biotherm Distribution et Compagnie (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Laporte

Conseillers :

MM. Fedou, Coupin

Avoués :

Me Teynet, SCP Jullien-Lecharny-Rol

Avocats :

Mes Lévi, Henriot Bellargent.

T. com. Nanterre, du 19 janv. 1999

19 janvier 1999

Faits et procédure :

Souhaitant développer son activité dans le secteur de la parapharmacie, la société Parasanté a exprimé à la société Biotherm, à partir de 1989, son intention de commercialiser ses produits ; cette dernière lui a alors précisé par courrier en date du 1er septembre 1989 que la distribution de sa marque ne rentrait pas dans le cadre de la commercialisation de produits dermo-cosmétiques, mais était définie sur la base des critères de la parfumerie de luxe.

Par courriers en date des 21 juin et 17 juillet 1991, le dirigeant de la société Parasanté a formalisé à nouveau son souhait de distribuer les produits Biotherm, aux mêmes conditions commerciales que les autres distributeurs, mettant en avant ses compétences en pharmacie et l'adéquation de l'activité de Parasanté avec le commerce de détail de produits de beauté ; la société Biotherm lui a répondu le 19 juillet 1991 que ses produits n'étaient pas dermopharmaceutiques et que la commercialisation recherchée par Parasanté ne correspondait pas à sa stratégie de vente tournée vers le commerce de luxe.

La société Parasanté a néanmoins passé commande en septembre 1996 auprès de la société Biotherm qui, en réponse, a communiqué ses conditions générales d'agrément et a commis son Directeur des ventes régional pour visualiser onze points de vente Parasanté ; suite à ces visites, la société Biotherm a répondu par lettres recommandées en date du 05 mars 1997 que ces onze points de vente ne remplissaient pas les critères qualitatifs de distribution sélective de cette marque.

Se considérant victime d'une pratique discriminatoire, la société Parasanté a initié en 1998 devant le tribunal de commerce de Nanterre une procédure tendant à l'agrément de ses points de vente et à l'allocation de dommages-intérêts.

Par jugement en date du 19 janvier 1999, cette juridiction, concluant à la validité du refus d'agrément opposé par la société Biotherm, a débouté la société Parasanté de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à payer à la société Biotherm la somme de 20.000 francs (3.048,98 euros) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens.

La société Parasanté a interjeté appel de cette décision le 2 novembre 1999. Par jugement du 04 mai 2000, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé le redressement judiciaire de cette société, dont il a arrêté le plan de cession par décision rendue le 23 novembre 2000.

La SCP Michel et Valdman, commissaire à l'exécution du plan et administrateur judiciaire de la société Parasanté, et Maître Chavane de Dalmassy, représentant des créanciers de cette dernière, sont intervenus à l'instance et ont repris à leur compte les conclusions déposées par Parasanté.

Les appelants ne dénient pas à Biotherm le droit de sélectionner les distributeurs de ses produits, mais ils font valoir que Parasanté répondait aux exigences légalement admissibles en la matière, et satisfaisait notamment au critère essentiel, à savoir la présence systématique d'un pharmacien sur chaque lieu de vente.

En premier lieu, ils contestent la licéité des critères de sélection retenus par les premiers juges pour justifier le refus d'agrément opposé par Biotherm, et notamment le ratio chiffre d'affaires/nombre de préposés à la vente, dans la mesure où l'application de ce critère a, selon eux, pour effet d'exclure a priori et de manière discriminatoire un mode de distribution performant au profit du réseau constitué par les officines pharmaceutiques.

Ils observent que Biotherm ne rapporte d'ailleurs pas la preuve que les pharmaciens distributeurs agréés satisfont au ratio chiffre d'affaire/nombre de préposés à la vente.

Ils rappellent que la jurisprudence des autorités françaises et communautaires de la concurrence s'accorde à considérer que le critère objectif et qualitatif doit en outre être proportionné et être appliqué sans discrimination afin d'assurer l'égalité de traitement entre les revendeurs.

En second lieu, les appelants estiment que le dispositif d'agrément n'a pas été appliqué de bonne foi à la société Parasanté.

Ils affirment qu'il est impossible de mettre en doute la constante détermination, depuis 1991, de la société Parasanté à vouloir diffuser les produits Biotherm, et ils relèvent que cette société a toujours pris soin de donner la liste précise des établissements pour lesquels elle sollicitait l'agrément.

Ils reprochent à la société Biotherm d'avoir manqué à son devoir de transparence en refusant de communiquer à la société Parasanté sa grille de notation.

Ils contestent les montants unilatéralement retenus par la société Biotherm pour la détermination du ratio chiffre d'affaires/nombre de personnes qualifiées, et ils estiment que la partie adverse a vérifié les critères relatifs à localisation des points de vente, à leur enseigne, à leur aspect extérieur et à leur qualités fonctionnelle et esthétique, sans respecter le principe du contradictoire.

Alléguant que les points de vente litigieux étaient bien situés et bien agencés, ils concluent que la société Parasanté a été victime d'une discrimination illicite justifiant la demande d'agrément sous astreinte à laquelle ils substituent, consécutivement à la cession desdits points de vente, une demande d'indemnisation du trouble commercial subi par cette société, laquelle n'a pu distribuer les produits Biotherm au cours des sept années ayant précédé cette cession.

En conséquence, ils demandent à la Cour, en réformant le jugement entrepris, de condamner la société Biotherm à payer à la société Parasanté les sommes de 2.058.061 euros et de 76.225 euros en réparation des préjudices économique et de notoriété subis par cette dernière, outre celle de 7.623 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société Biotherm Distribution & Compagnie soulève, à titre principal, l'irrecevabilité de l'action de la société Parasanté au motif que les points de vente auxquels a été refusé l'agrément étaient exploités par des sociétés juridiquement indépendantes.

Elle précise que les points de vente ont été vendus à l'occasion du plan de cession, et même auparavant pour certains, et elle ajoute que la demande d'indemnisation, se référant à une activité de revendeur détaillant, ne correspond nullement à un préjudice personnellement subi par Parasanté.

Elle en déduit que la société Parasanté n'a qualité ni pour solliciter l'agrément de magasins qu'elle n'exploite pas, ni pour demander réparation d'un préjudice dont elle ne peut se prévaloir, à défaut d'avoir été exploitant des magasins concernés.

Elle rappelle que les modalités de la distribution des produits Biotherm sont calquées sur celles applicables pour les produits de luxe, de sorte que le critère de la disponibilité du conseil prodigué à une clientèle exigeante constitue l'une des pierres angulaires de la distribution de ses produits.

Elle reproche à la société Parasanté d'avoir manqué à la loyauté et à la nécessaire coopération entre les parties, en cherchant à rectifier a posteriori les informations recueillies par le représentant de Biotherm au cours de la visualisation des points de vente, et en ne fournissant aucune explication sur l'écart entre ses propres allégations et les constatations de Biotherm.

Elle réitère que le critère de disponibilité du conseil à la vente est apprécié de façon objective et de la même manière quel que soit le profil du revendeur qui postule à l'agrément, et elle souligne qu'en l'occurrence cette insuffisance de disponibilité du conseil faisait obstacle à ce que les points de vente litigieux puissent être agréés.

Aussi, en tout état de cause, elle sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à y ajouter la condamnation des appelants à lui payer la somme de 15.244,90 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et la somme de 7.622,45 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 février 2002.

Motifs de la décision

I. Sur la recevabilité de l'action :

Considérant qu'en application des articles 1382 du Code civil, L. 420-1 et L. 442-6 du Code de commerce, toute personne s'estimant victime d'une pratique discriminatoire ayant pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, est recevable à agir devant les juridictions civiles et commerciales à l'encontre de l'auteur de telles pratiques, à condition de justifier d'un intérêt ;

Considérant que tel est le cas d'un distributeur désireux d'intégrer un réseau de distribution sélective à qui est opposé un refus d'agrément revêtant selon lui un caractère discriminatoire ;

Considérant qu'en l'occurrence, il s'infère des documents versés aux débats que la société Parasanté est une SA holding dont l'activité consiste en " prestations de services diverses, exploitation directe ou indirecte de marques et négoce en gros de tous produits para-pharmaceutiques hygiéniques, diététiques et de parfumerie " ;

Considérant qu'il apparaît que cette société est la centrale d'achat du groupe Parasanté, unique distributeur de toutes les sociétés du groupe, et que c'est à ce titre qu'elle a souhaité devenir distributeur agréé des produits Biotherm ;

Considérant qu'au demeurant, s'il est vrai que la cession des points de vente litigieux au cours de l'instance a fait disparaître tout intérêt à la demande de la société Parasanté tendant à obtenir leur agrément sous astreinte, il doit être observé que les appelants limitent désormais leur prétentions à la réparation des divers préjudices d'ordre économique subis consécutivement à ce refus d'agrément ;

Considérant qu'à cet égard, la société Parasanté indique avoir été privée des profits qu'elle pouvait escompter des ventes réalisées avant leur cession dans les magasins du groupe s'étant vu refuser l'adhésion au réseau de distribution sélective Biotherm ;

Considérant qu'il suit de là que, nonobstant la cession de ses points de vente entreprise en 1999 et achevée par le plan de cession du 23 novembre 2000, la société Parasanté invoque un préjudice qui lui est personnel, caractérisé par l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée, par suite du refus d'agrément, de procéder à l'activité d'achat et de revente des produits Biotherm au sein de son propre réseau ;

Considérant que, dès lors que la société Parasanté justifie de son droit à agir, la fin de non-recevoir soulevée par la société intimée doit être écartée.

II. Sur la contestation du refus d'agrément :

Considérant que pour éviter qu'un réseau de distribution sélective n'entrave l'accès au marché pour une catégorie de distributeurs, le droit communautaire et le droit français veillent à ce que cette forme de distribution ne constitue pas une restriction injustifiée de concurrence, en exigeant que les critères de sélection choisis soient précis et mis en œuvre sans discrimination ;

Considérant qu'il est admis que les réseaux de distribution sélective ne sont pas contraires à l'article L. 420-1 du Code de commerce, dès lors que la sélection des revendeurs s'opère selon des critères objectifs à caractère qualitatif, justifiés par les nécessités d'une distribution adéquate des produits, fixés de manière uniforme à l'égard de tous les distributeurs potentiels, et appliqués de façon non discriminatoire ;

Considérant que le litige soumis à la Cour porte d'une part sur la licéité des critères de sélection revendiqués par la Société Biotherm, d'autre part sur l'application qui en a été faite en la cause par cette dernière ;

- Sur les critères de sélection définis par la société Biotherm :

Considérant que la société Biotherm a choisi de faire évoluer sa marque sur le marché des produits cosmétiques de luxe ;

Considérant que les appelants discutent le caractère luxueux des produits fabriqués par Biotherm, au motif qu'ils se rattachent au traitement et à l'embellissement de l'épiderme comme tout produit dermo-cosmétique ;

Mais considérant que la classification des produits parmi les articles de luxe dépend de la volonté d'un fabricant de conférer une image haut de gamme à sa marque, du niveau de qualité de ses produits et de leur prix relativement élevé ;

Considérant qu'en l'occurrence, cette volonté est caractérisée de la part de la société Biotherm, laquelle explique qu'elle réalise en France plus de 40 % de son chiffre d'affaires en parfumeries et grands magasins alors que ces points de vente ne représentent que 27 % de ses distributeurs agréés, et qu'elle tend à recentrer la commercialisation de ses produits sur les points de vente les plus qualitatifs ;

Considérant qu'il suit de là qu'eu égard à la politique de commercialisation suivie par elle au cours de ces dernières années, la société Biotherm se comporte comme un fournisseur de produits cosmétiques de luxe, qualification que le Conseil de la concurrence n'avait pas contestée lorsqu'il a rendu, le 1er octobre 1996, sa décision relative aux pratiques mises en œuvre dans le secteur des produits cosmétiques et d'hygiène corporelle ;

Considérant que les conditions générales d'agrément de la société Biotherm versées aux débats subordonnent l'admission dans le réseau de distributive sélective de cette marque au respect des critères suivants :

1. un point de vente dont la localisation, l'enseigne, l'installation et l'environnement de marques concurrentes ne doivent pas déprécier l'image de la marque,

2. la qualification professionnelle du distributeur ou de son personnel qui doit résulter soit d'un diplôme d'esthétique, soit d'une attestation de formation professionnelle en parfumerie délivrée par une Chambre du commerce et de l'industrie, soit d'une pratique du conseil et de la vente de marques de soin en distribution sélective pendant au moins 3 ans,

3. le service de conseil et de démonstration, ce dernier étant apprécié à l'époque de la procédure d'agrément sollicitée par la société Parasanté en tenant compte du nombre de personnes réservées à la vente au regard du chiffre d'affaires du magasin ;

Considérant que, d'une part, la localisation et l'agencement des magasins exigés par Biotherm, visant à éviter la vente de ses produits en des lieux inadaptés à leur nature et à leur qualité, constituent des critères dont l'objectivité et le caractère qualitatif ne sont pas discutables ni discutés par les appelants ;

Considérant que, d'autre part, le critère lié à la qualification professionnelle des revendeurs présente également un caractère qualitatif et objectif ;

Considérant que sa mise en œuvre est à l'origine d'un malentendu entre les parties, puisque la société Biotherm indique exiger des revendeurs une spécialisation en esthétique, alors que, selon les appelants, la qualification requise est celle de diplômé en pharmacie et impose la présence systématique d'un pharmacien sur le lieu de vente ;

Considérant qu'il n'est toutefois pas contesté que la société Biotherm agrée des officines pharmaceutiques qui distribuent les produits de cette marque sur les conseils de docteurs en pharmacie ;

Considérant que la divergence sur ce point entre les parties est sans incidence sur l'application de ce critère, dès lors que, pour l'attribution des agréments, l'intimée assimile un pharmacien à un diplômé en cosmétique et parfumerie ;

Considérant qu'au demeurant, la licéité du critère relatif à la qualification professionnelle du distributeur ou de son personnel n'est pas davantage discutée par les appelants ;

Considérant que ces derniers contestent en revanche la légalité du dernier critère au motif que le ratio chiffre d'affaires/nombre de préposés à la vente est un élément d'appréciation purement abstrait et comptable ayant pour effet d'exclure par nature la parapharmacie, qui est une forme de distribution particulièrement compétitive, au profit du réseau des officines de pharmacie ;

Mais considérant que l'intimée relève à juste titre que la disponibilité du conseil est essentielle pour des produits de soins ayant une image de luxe et répondant aux besoins d'une clientèle particulièrement exigeante ; qu'il s'ensuit que ce critère correspond aux nécessités d'une distribution adéquate des produits en cause ;

Considérant que le critère tiré de la disponibilité du conseil revêt un caractère objectif puisqu'il est apprécié en rapprochant le chiffre d'affaires annuel d'un magasin du nombre de personnes qualifiées à la vente des produits ; que ce critère objectif présente un caractère qualitatif indéniable et qu'il n'est pas en soi de nature à exclure certaines formes de distribution, telles que les grands magasins ou les parapharmacies ;

Considérant qu'il ressort de cet examen qu'aucun des critères auxquels est subordonné l'agrément des distributeurs Biotherm n'encourt le grief d'illicéité.

- Sur l'application de ces critères à la société Parasanté :

Considérant que, conformément aux règles applicables en matière de distribution sélective, il convient de rechercher si la Société Biotherm a régulièrement appliqué ses critères de sélection aux onze points de vente dépendant du Groupe Parasanté et candidats à l'agrément pour la distribution des produits de la marque Biotherm ;

Considérant qu'en l'occurrence, la société intimée justifie son refus d'agréer la Société Parasanté comme distributeur de ses produits dans onze de ses points de vente, en produisant aux débats les rapports relatifs à la visualisation de ces magasins réalisée dans le courant du mois de novembre 1996 ;

Considérant qu'il est établi que, dans chacun des points de vente visités, Biotherm a constaté une insuffisance du nombre des personnes affectées à la vente de produits de soin au regard du chiffre d'affaires de l'établissement ;

Considérant qu'il apparaît également que, dans certains magasins, la société intimée a relevé la non conformité du niveau de formation d'une partie du personnel à son exigence de qualification professionnelle ainsi que des carences en termes d'aménagement du point de vente ou de son environnement ;

Considérant que, spécialement en ce qui concerne l'application du ratio chiffre d'affaires/nombre de vendeurs, la Société Parasanté et ses mandataires judiciaires font valoir en premier lieu que Biotherm a renseigné à sa seule initiative la rubrique chiffre d'affaires de sa grille de notation sans respecter le principe du contradictoire ;

Mais considérant que la société intimée justifie avoir apprécié le critère de disponibilité du conseil à la vente, à partir des éléments de fait et des données comptables recueillis par elle auprès des responsables des magasins visualisés ;

Considérant qu'elle démontre avoir maintenu ses appréciations antérieures au vu des précisions apportées par la Société Parasanté dans son écrit en date du 22 juillet 1997 ;

Considérant qu'elle établit en outre avoir, par courrier du 12 septembre 1997, vainement invité le Conseil de Parasanté à justifier le niveau de qualification de préposés à la vente ainsi que l'écart entre les chiffres d'affaires annoncés initialement et ceux rectifiés ultérieurement par l'appelante dans sa lettre du 22 juillet 1997 ;

Considérant qu'au demeurant, aucune disposition du droit communautaire ou du droit français ne faisait interdiction à la société intimée d'établir sa propre grille d'évaluation et de noter es points de vente candidats à l'agrément ;

Considérant que, dès lors, il apparaît que la Société Biotherm s'est conformée à la procédure d'agrément, en procédant à la visualisation de chacun des points de vente demandeurs, et en informant la Société Parasanté, par écrit en date du 05 mars 1997, des raisons pour lesquelles ses magasins ne respectaient pas les critères de sélection préalablement établis ;

Considérant qu'il suit de là que, sur la base du barème d'évaluation du critère de la disponibilité du conseil à la vente, la société intimée a pu légitimement conclure que tous les points de vente concernés dépassaient le ratio de 1.500.000 F (228.673,53 euros) par vendeur qualifié, faisant obstacle à l'attribution de l'agrément ;

Considérant qu'en second lieu, la société appelante et ses mandataires judiciaires font grief à la Société Biotherm d'avoir fait usage de pratiques discriminatoires en imposant à Parasanté le respect de critères, ceux de la distribution en parfumerie, qu'elle n'exige pas du réseau officinal ;

Considérant qu'elle précise que la société intimée n'a pas hésité à livrer un ancien point de vente Parasanté, en l'occurrence le fonds de commerce exploité dans l'Usine Center de Paris Nord, devenu entre-temps une officine pharmaceutique, au seul motif qu'il s'agissait désormais d'une pharmacie ;

Mais considérant qu'il ne s'infère nullement des documents produits aux débats qu'à l'époque à laquelle elle a procédé à la visualisation des points de vente litigieux, puis refusé les agréments au vu des résultats de cette visualisation, Biotherm aurait agréé des officines de pharmacie pour la distribution de ses produits alors même que le ratio chiffre d'affaires/vendeur atteint par ces officines n'était pas conforme au critère de disponibilité au conseil à la vente ;

Considérant qu'au demeurant, aux termes de son constat du 30 septembre 1998, l'huissier de justice commis par ordonnance du 02 septembre 1998 à l'effet de se faire présenter par Biotherm les dossiers d'agrément des deux années précédant son constat et de procéder par sondages à la vérification des fiches de notation utilisées pour évaluer la conformité d'un point de vente avec les critères de sélection de la société intimée, a pu observer que ces fiches de notation sont les mêmes, que le postulant soit parfumeur, pharmacien d'officine ou autre ;

Considérant qu'il s'ensuit qu'à défaut d'éléments mettant en évidence que Biotherm aurait agréé des établissements présentant des caractéristiques identiques à celles des points de vente litigieux, c'est sans abus de droit que la société intimée a refusé l'agrément des magasins de la Société Parasanté au motif que ces derniers ne remplissaient pas les critères qualitatifs exigés par elle pour la distribution sélective de la marque Biotherm ;

Considérant qu'il y a donc lieu, en confirmant le jugement déféré, de débouter la Société Parasanté et ses mandataires judiciaires de l'ensemble de leurs demandes.

III. Sur les demandes annexes :

Considérant que, dès lors qu'il n'apparaît nullement que la procédure dont la Société Parasanté a pris l'initiative caractérise un abus du droit d'ester en justice, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a débouté la Société Biotherm de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Considérant que l'équité commande d'allouer à la société intimée une indemnité complémentaire de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant qu'il n'est cependant pas inéquitable que la Société Parasanté et ses mandataires judiciaires conservent la charge de l'intégralité des frais non compris dans les dépens exposés par eux pour assurer leur défense ;

Considérant que la Société Parasanté, qui succombe dans l'exercice de son recours, doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, déclare recevable l'appel interjeté par la Société Parasanté, le dit mal fondé ; rejette la fin de non-recevoir soulevée par la Société Biotherm ; confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ; Y ajoutant : Condamne la Société Parasanté, assistée de la SCP Michel & Valdman, en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et d'administrateur judiciaire, et de Maître Chavane de Dalmassy, en sa qualité de représentant des créanciers de cette société, à payer à la Société Biotherm une indemnité complémentaire de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procécure Civile ; condamne la société Parasanté, assisté de la SCP Michel & Valdman, en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et d'administrateur judiciaire, et de Maître Chavane de Delmassy, en sa qualité de représentant des créanciers de cette société, aux dépens de l'appel, et autorise la SCP Jullien-Lecharny-Rol, société d'Avoués, à recouvrer directement la part la concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.