CA Aix-en-Provence, 8e ch. com., 19 juin 2001, n° 97-21508
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Ligne Plus (SARL ), Essege (SA)
Défendeur :
Parc Astier (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Schmitt
Conseillers :
MM. Marcovici, Duloutre
Avoués :
SCP Primout-Faivre, SCP Cohen-Guedj, SCP Ermeneux-Ermeneux-Champly
Avocats :
SCP Debavelaere-Becuwe-Teyssedre, Me Lantelme.
Par contrat sous seing privé en date du 5 avril 1989, conclu à durée indéterminée et résiliable à tout moment par l'une des parties, la société Ligne Plus dénommée le mandant, a confié à la société Parc dénommée l'agent, sa représentation exclusive pour la vente de poêles à pétrole Tosaï dans les départements portant les numéros 04, 05, 06, 13, 30, 83 et 84, à l'exception des clients Unigros et ATM Belloy.
Par courrier en date du 14 septembre 1993 le mandant a dénoncé le contrat sans indemnités en faisant état d'un certain nombre de manquements de l'agent ruinant selon lui l'indispensable confiance réciproque et rendant impossible le maintien des relations.
Le 7 juin 1994 la société Parc a assigné les sociétés Ligne Plus et Essege devant le tribunal de commerce de Marseille afin de voir juger que la rupture du contrat d'agent commercial leur était imputable, et de les voir condamner au paiement d'une somme d'un million de francs à titre de dommages-intérêts.
Un expert désigné par une ordonnance de référé du président de ce tribunal du 19 juillet 1994 pour examiner les comptes du mandant et de l'agent, déterminer le montant des ventes réalisées dans le secteur de l'agent, et chiffrer les commissions non perçues par celui-ci ainsi que son préjudice financier, a déposé un rapport de carence le 4 octobre 1995 en raison de la non-consignation, par la société Parc, d'un complément de provision sur honoraires d'expert mis à sa charge.
La société Parc a été admise au bénéfice du redressement judiciaire le 5 novembre 1995 et a bénéficié d'un plan de redressement arrêté le 8 août 1996. Dans le cadre de cette procédure collective la société Ligne Plus a déclaré diverses créances.
Au fond, et dans le dernier état de leurs conclusions, les parties ont soumis au tribunal de commerce les revendications suivantes :
La société Parc a sollicité la condamnation des sociétés Essege et Ligne Plus au paiement des sommes de :
* 176.403,70 F correspondant à des commissions non perçues sur les ventes conclues avec les clients Auchan et L'Ambroisie situés dans son secteur,
* 472.236 F correspondant à l'indemnité de clientèle chiffrée à deux années de commissions.
* 500.000 F à titre de dommages-intérêts pour préjudice financier.
* 50.000 F au titre des frais irrépétibles.
La société Ligne Plus a sollicité son admission au passif de la société Parc pour les montants suivants:
* 34.266,96 F correspondant à la valeur des matériels qui n'ont pu être récupérés auprès des adhérents de la chaîne Chauffage Confort Gaz.
* 40.000 F à titre de dommages-intérêts pour perte de clientèle.
* 68.160,90 F au titre des factures impayées.
* 50. 000 F au titre des frais irrépétibles.
Statuant sur ces demandes jointes en présence du représentant des créanciers et commissaire à l'exécution du plan, maître Astier, le tribunal, par jugement en date du 10 octobre 1997, a:
- condamné solidairement les sociétés Essege et Ligne Plus à payer à la société Parc les sommes de:
* 4.931.441 F avec les intérêts au taux légal à compter du jugement correspondant aux commissions dues sur les affaires traitées dans le secteur de l'agent avec le client Auchan.
* 472.236 F avec les intérêts au taux légal à compter du jugement à titre d'indemnité de rupture du contrat d'agent commercial.
* 10.000 F au titre des frais irrépétibles.
- admis la société Ligne Plus au passif de la société Parc pour les sommes de:
* 3426696 F au titre du dossier Chauffage Confort Gaz.
* 68.160,90 F au titre des impayés.
- rejeté le surplus des demandes.
Le tribunal a considéré:
* concernant les demandes de la société Parc, que les griefs mis en avant par le mandant pouvaient justifier une perte de confiance mais non une rupture du contrat sans indemnités, que l'indemnité de rupture devait être calculée sur la base de deux années de commissions, avec pour référence l'année 1992, que le préjudice financier invoqué n'était pas prouvé, qu'aucune commission n'était due sur les ventes réalisées dans le secteur de l'agent avec le client Ambroisie qui avait succédé à la société ATM Belloy, mais qu'elle était en revanche due sur celles réalisées avec le client Auchan qui avait offert à la vente un produit de la marque Tosaï.
* concernant les demandes de la société Ligne Plus, qu'aucune perte de clientèle n'était démontrée, mais qu'étaient en revanche prouvées les créances relatives à des livraisons impayées et à des opérations irrégulières passées par l'agent avec les adhérents de la chaîne Confort Gaz.
Appelantes de ce jugement, les sociétés Ligne Plus et Essege concluent à son infirmation et demandent à la cour de:
- mettre hors de cause la société Essege.
- mettre au passif de la société Parc l'ensemble des créances de la société Ligne Plus telles que déclarées et revendiquées en première instance.
- condamner la société Parc à payer une somme de 50.000 F au titre des frais irrépétibles et à restituer la somme de 252.003,90 F versée en vertu de l'exécution provisoire du jugement attaqué, avec les intérêts au taux légal à compter du 9 août 1999. La société Parc conclut au rejet de l'appel et des demandes des sociétés appelantes, à la confirmation du jugement en ce qui concerne l'indemnité de rupture et les commissions afférentes aux affaires traitées avec le client Auchan, à son infirmation pour le surplus, et, sur appel incident, à la condamnation solidaire des sociétés Essege et Ligne Plus au paiement des sommes de:
- 127.089,29 F avec les intérêts au taux légal à compter de la demande au titre des commissions dues sur les affaires traitées avec le client Ambroisie.
- 500.000 F à titre de dommages-intérêts pour préjudice financier.
- 50.000 F au titre des frais irrépétibles.
Maître Astier demande à être mis hors de cause et, subsidiairement, s'en rapporte à justice.
Vu les conclusions déposées par les appelantes le 18 avril 2001, par l'intimée le 18 mai 2001, et par maître Astier le 19 juin 1998;
DISCUSSION
Attendu que, non critiquée, la recevabilité des appels n'apparaît pas sérieusement discutable en l'état des pièces produites;
Sur la mise en cause de maître Astier.
Attendu qu'en sa qualité de représentant des créanciers maître Astier, qui ne soutient pas qu'il a rendu ses comptes, et qui demeurait en fonction après l'adoption du plan de redressement aux fins, de vérification des créances, a été attrait à juste raison dans la procédure en fixation des créances de la société Ligne Plus ;
Sur la mise en cause de la société Essege.
Attendu que pour solliciter la condamnation solidaire de la société Essege qui n'est pas signataire du contrat d'agence, la société Parc fait valoir que cette société a fait application du contrat en connaissance de cause et est devenue partie prenante; qu'elle en veut pour preuve un certain nombre d'écrits et télécopies;
Attendu que les documents produits, à l'entête de la société Essege, dont l'objet social etait identique à celui de la société Ligne Plus, ont bien trait à des opérations se situant dans le champ du contrat d'agence; qu'ils portent la signature de Serge Goblet, dirigeant des deux sociétés; que plusieurs d'entre eux font cependant expressément allusion aux engagements de la seule société Ligne Plus; que pour le surplus il n'est ni allégué ni prouvé que la société ESSEGE ait exécuté personnellement une seule des obligations découlant des opérations en cause pour le mandant, notamment la livraison de la marchandise vendue et le paiement des commissions;
Attendu que les courriers rédigés par la société Parc et adressés à la société Essege, relatifs à des obligations toutes exécutées par la société Ligne Plus, ne suffisent pas dans ces conditions à démontrer que la première nommée se soit immiscée dans les relations découlant du contrat d'agence en une qualité autre que celle, éventuelle, de mandataire occasionnel; qu'encore que tout écrit soit de nature à prouver l'existence d'un contrat d'agence commerciale il faut en déduire que, comme soutenu par la société Essege, l'utilisation de son papier à entête dans un nombre limité de cas n'est que la conséquence d'une erreur ou d'une commodité administrative, et qu'elle n'est en rien concernée par le litige;
Attendu que le jugement attaqué sera en conséquence infirmé en ce qu'il a prononcé des condamnations à l'encontre de la société Essege; que la société Parc sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel nés de la mise en cause injustifiée;
Sur les demandes de la société Parc.
* sur la rupture du contrat d'agence.
Attendu que le contrat d'agence prévoit:
- la possibilité pour le mandant de confier à l'avenir la vente d'autres produits à l'agent.
- l'entière liberté d'organisation de l'agent sous réserve de l'interdiction d'accepter sans autorisation la représentation d'une entreprise concurrente.
- le versement à l'agent par le mandant, trimestriellement, d'une commission de 6% des ventes HT directes ou indirectes, déduction faite des frais de port et d'emballage, le droit à commission étant acquis après acceptation par le mandant, livraison de la marchandise, et règlement des factures, au prorata de celles-ci.
- le droit à indemnité de l'agent en cas de rupture à l'initiative du mandant, sauf violation du contrat.
Attendu que, conclu avant la promulgation de la loi du 25 juin 1991 relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, et rompu avant le 10 janvier 1994, date d'application de cette loi aux contrats d'agence en cours, le contrat litigieux est soumis aux seules dispositions du décret du 23 décembre 1958 expressément visé; qu'il résulte de l'article 3 de ce texte que le contrat d'agence est conclu dans l'intérêt commun des parties et que sa résiliation par le mandant, si elle n'est pas justifiée par une faute grave du mandataire, ouvre droit au profit de ce dernier, nonobstant toute clause contraire, à une indemnité compensatrice du préjudice subi;
Attendu que le courrier du mandant du 14 septembre 1993, qui emporte résiliation immédiate du contrat d'agence sans indemnité, énumère les griefs suivants:
- la vente de matériel concurrent de marque Fogal.
- une grave détérioration de l'image de marque auprès de la clientèle due à des engagements de la société Parc contraires à la politique commerciale et aux conditions de vente du mandant, notamment à des promesses de reprise de matériel non autorisées qui ont contraint le mandant, soit à les respecter et d'en supporter les frais, soit à les refuser et de voir son image gravement atteinte.
- la perception par l'agent, à l'occasion des transactions ci-dessus, et par le biais de retenues sur des sommes dues dans le cadre de transactions ordinaires, de commissions indues relatives à des matériels dont il savait qu'ils ne seraient pas payés.
- le rachat auprès du client Unic Center de 100 climatiseurs vendus avec un rabais de 500 F à l'unité, afin de les revendre en concurrence et au détriment du mandant qui disposait d'importants stocks invendus dont il supportait les frais, et de détourner le bénéfice que ce dernier pouvait escompter.
Attendu qu'il est établi et reconnu qu'en octobre 1992 la société Parc a vendu trois poêles de marque Fogal distribués par la société Climatec concurrente de la société Ligne Plus, en contravention avec les dispositions du contrat d'agence; que la société Parc légitime cette opération par le souci qu'elle dit avoir été le sien de vérifier si les appareils en cause n'étaient pas munis d'un système contrefaisant un brevet déposé par Serge Goblet;
Attendu qu'aucune preuve de l'existence des vérifications avancées n'est rapportée, étant relevé que la société Ligne Plus ne les a pas réclamées, et qu'elles paraissent à priori peu compatibles avec la chronologie révélée par les pièces, les poêles ayant été facturés à l'acquéreur les 22 et 23 octobre 1992, alors qu'ils n'ont été facturés par le fournisseur à la société Parc que le 26 octobre 1992, et qu'il faut en déduire à priori que la commande n'a été passée que pour satisfaire la demande préalable du client;
Attendu que cette opération ponctuelle d'un montant peu élevé ne revêt cependant pas un caractère de gravité suffisant pour justifier, un an plus tard plus tard et en l'absence de toute récidive, la rupture du contrat d'agence sans indemnités;
Attendu que selon facture du 3 août 1992 la société Parc a racheté à la société Unic Center au prix de 2159,70 F pièces, 100 des 350 appareils dont elle avait pris la commande et qui avaient été facturés à ce client 2051,76 F pièces le 11 mai 1992 par la société Ligne Plus; que cette dernière reproche à son agent d'avoir conclu la vente en dessous du tarif dans le seul but de racheter partie du matériel à un prix extrêmement avantageux, et de détourner ainsi à son profit la marge correspondante;
Attendu que la remise accordée au client a été acceptée par la société Ligne Plus qui a établi sa facture d'après les indications de son agent sans émettre de réserves; qu'il n'est aucunement démontré que la reprise était préméditée dès l'origine, alors que la société Unic Center a averti la société Ligne Plus par courrier du 21 juillet 1992 qu'elle n'avait pas atteint ses objectifs en raison de mauvaises conditions climatiques, et a établi une attestation crédible dans laquelle elle rapporte que pour lui être agréable la société Parc, qui n'avait pas réussi à convaincre son mandant de procéder à la reprise, l'avait en définitive acceptée pour son propre compte;
Attendu que la reprise critiquée ne correspond dans ces conditions qu'à la mise en œuvre d'une saine politique commerciale seule à même de fidéliser les clients et n'est pas constitutive d'une faute grave, peu important la marge réalisée par la société Parc à l'occasion de la revente, ou la limitation de la faculté de refacturation à 50 unités résultant d'une télécopie du 11 mars 1992 de la société Ligne Plus;
Attendu que même si la société Parc ne fournit aucune explication la concernant, ne peut pas davantage être qualifiée de faute grave une unique opération de reprise concernant un client Naja invoquée dans les écrits, relative à un nombre fort limité d'appareils et demeurée sans lendemain, alors qu'il n'est en tout état de cause pas prouvé que la société Parc n'aurait pu voir satisfaite au même tarif une commande personnelle, pour les besoins du négoce direct auquel elle se livrait avec l'autorisation du mandant, sans que des quotas contractuels aient été prévus;
Attendu que la société Parc a obtenu en mars 1993 des commandes de la part des membres d'un groupement dénommé Chaînegaz, neuf adhérents sur dix-sept ayant été livrés par la société Ligne Plus; que des réclamations des acquéreurs ont révélé que la société Parc avait promis la reprise des invendus, alors que les conditions générales de vente de sa mandante dont elle ne pouvait ignorer la teneur la prohibait sauf acceptation préalable;
Attendu que la société Ligne Plus a refusé les reprises et informé directement certains acheteurs de la violation des conditions générales par son agent; qu'elle a néanmoins récupéré la plus grande partie du matériel, les impayés, d'après les justificatifs non contestés versés aux débats, étant actuellement de 29.294,20 F; qu'elle reproche à son agent de l'avoir placée en porte à faux à l'égard des clients et de se trouver à l'origine de la perte du marché qui était susceptible d'être renouvelé;
Attendu que la société Parc ne conteste pas qu'elle a accepté la reprise sans autorisation préalable; qu'il doit cependant être tenu compte, d'une part des termes d'une télécopie faisant suite à la commande qu'elle a fait parvenir au mandant, dont il résulte que les acquéreurs se sont vu proposer les conditions qui leur assuraient la compétitivité la plus importante et dont il peut être déduit que la reprise conditionnait la commande, d'autre part d'un courrier du 16 août 1993 dans lequel elle explique qu'elle a pris le risque de reprise a titre personnel, et propose de se porter caution des impayés;
Attendu que la conquête d'un marché ne peut se faire sans une certaine souplesse; qu'il est indéniable que l'intransigeance dont a fait montre la société Ligne Plus quand elle a eu connaissance de la reprise promise, allant jusqu'à l'annulation de certaines commandes sans égard pour les engagements de l'agent, aurait été dissuasive si elle s'était manifestée d'entrée lors de la négociation des commandes; qu'il peut en être déduit, d'une part que le référencement auprès d'une chaîne comportant 17 adhérents valait une entorse aux conditions générales de vente en prévision de commandes futures, d'autre part que la perte des clients est la conséquence, non de l'initiative de l'agent qui avait permis l'approche de ces clients, mais de l'intransigeance inutile et anti-commerciale de la société Ligne Plus;
Attendu que le mandant reproche enfin à l'agent d'avoir facturé des commissions non exigibles portant notamment sur des factures non encore réglées, et de les avoir compensées d'autorité ; que cependant les factures de commissions, toutes versées aux debats, et quelques relevés d'opérations, permettent de tenir pour certain que le procédé dénoncé in fine par la société Ligne Plus correspond à celui qui a été appliqué dès l'origine pour des raisons de commodité, des régularisations périodiques avec versement de soldes ayant été effectuées par le mandant qui a ainsi accepté l'entorse aux dispositions du contrat et ne peut en faire reproche à l'agent;
Attendu qu'à juste raison dans ces conditions les premiers juges ont retenu que les manquements reprochables à la société Parc ne revêtaient pas un caractère de gravité suffisant pour justifier la rupture du contrat d'agence sans indemnité; qu'ils ont accordé à l'agent une indemnité correspondant au double des commissions HT encaissées en 1992, ce que le mandant conteste aux motifs que l'indemnité ne doit pas excéder le préjudice, et que doit être prise en compte la moyenne des chiffres d'affaires annuels réalisés pendant l'exécution du contrat, calculée au prorata;
Attendu qu'il n'est pas démontré que la société Parc a pu reconstituer sa clientèle dans un délai inférieur à deux ans; qu'il convient de prendre pour base de calcul de l'indemnité la moyenne, calculée sur douze mois, des trois dernières années ayant précédé la rupture, soit 160.069,99 F HT; que l'indemnité doit ainsi être fixée à 320.139,98 F ;
Attendu que la société Parc soutient que la rupture du contrat l'a acculée à la déconfiture et se trouve à l'origine de son redressement judiciaire, alors que les commissions et les ventes directes réalisées avec la société Ligne Plus lui procuraient la majeure partie de son chiffre d'affaires;
Attendu que le compte bancaire de la société Parc est resté constamment créditeur jusqu'au 10 février 1994, à des niveaux comparables à ceux d'avant la rupture; que le 21 mars 1994 elle a informé un autre fournisseur, la Manufacture Sainte Fontaine de Sarreguemines, que sa situation comptable était bonne; qu'il résulte de courriers rédigés entre les mois de janvier et avril 1994 qu'elle a, au cours de la même période, dû affronter de nombreuses défaillances de clients;
Attendu que l'expertise qui aurait éventuellement pu mettre en évidence l'existence d'un lien de causalité entre la rupture du contrat et l'ouverture de la procédure collective de l'agent, plus de deux ans plus tard, n'a pas été menée à son terme pour des raisons qui ne sont pas imputables à la société Ligne Plus; que faute de démonstration concrète convaincante ni le préjudice en ce qu'il excède l'indemnité de rupture, ni son lien de causalité avec la rupture ne sont prouvés; que la demande de dommages-intérêts supplémentaires a daos ces conditions été rejetée à juste raison par les premiers juges;
* Sur les compléments de commissions réclamés par la société Parc.
Attendu que de deux courriers de la société Parc du 22 décembre 1992 et du 29 juillet 1993 faisant allusion de manière non équivoque à la distribution de matériel de marque Kero pour le compte du mandant, ainsi que de la réponse de ce dernier du 30 août 1993 fournissant notamment les tarifs de ce matériel et ne comportant aucune contestation, il peut être déduit que l'agent s'en était également vu confier la distribution dans les mêmes conditions que le matériel Tosaï, notamment l'exclusivité qui ne peut être niée en l'absence de mise au point explicite;
Attendu qu'un huissier désigné par une ordonnance du président du tribunal de commerce de Roubaix a déposé un rapport daté du 7 février 1997 dans lequel il rapporte que pour la période du 5 avril 1989 au 31 décembre 1993 le chiffre d'affaires réalisé dans le secteur de l'agent, grâce à la vente de matériel Kero, par les magasins Auchan qui y sont implantés, est de 1.666.988,90 F;
Attendu que la société Parc ne peut pour autant prétendre au versement de commissions sur ce chiffre d'affaires alors qu'elle ne rapporte pas la preuve qui lui incombe et qui ne saurait reposer sur une présomption ténue, que le matériel en cause a bien été fourni par la société Ligne Plus qui se confond en dénégations et dont rien ne demontre qu'elle avait le monopole de la distribution du matériel Kero dans le secteur considéré; qu'il est indifférent à cette démonstration que le magasin Auchan d'Aubagne ait fait en août 1993 de la publicité pour du matériel Tosai, alors qu'à supposer qu'il en ait vendu, sa provenance et le montant des ventes ne sont pas connus; que le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a, de ce chef, accordé une commission à la société Parc;
Attendu que pour refuser à la société Parc les commissions sur le chiffre d'affaires réalisé avec la société l'Ambroisie dont le siège était à Juan Les Pins, la société Ligne Plus soutient que celle-ci a succédé à la société ATM Belloy pour laquelle le contrat d'agence exclut toute rémunération;
Attendu que la société ATM Belloy avait pour objet social les Etudes de protection de l'environnement et la vente de matériel électronique, pour gérant Martine Massena Belloy et pour siège Antibes; qu'elle a été immatriculée au registre du commerce le 22 septembre 1987 et admise au bénéfice du redressement judiciaire le 24 mai 1991 avant d'être placée en liquidation judiciaire le 19 juillet 1991 ;
Attendu que la société l'Ambroisie avait pour objet social la vente de fruits et légumes et d'électroménager, pour gérant Gérard Belloy et pour siège Juan Les Pins; qu'elle a été immatriculée au registre du commerce le 4 janvier 1990 et déclarée en redressement judiciaire le 2 avril 1993 avant d'être placée en liquidation judiciaire le 11 juin 1993;
Attendu que les extraits du registre du commerce font ressortir que la société l'Ambroisie a créé son fonds de commerce et non repris celui de la société ATM Belloy qui exerçait encore son activité; qu'il n'est ni démontré ni soutenu que dans le cadre de la procédure collective de la société ATM Belloy l'universalité du patrimoine de celle-ci aurait été transférée à la société l'Ambroisie; qu'il faut en déduire que, comme soutenu par la société Parc, les deux sociétés sont distinctes tant en fait qu'en droit et que le courrier de Martine Massena Belloy du 31 juillet 1991, qui présente la société l'Ambroisie comme successeur de la société ATM Belloy, ne correspond à aucune réalité juridique;
Attendu que dans un courrier du 10 avril 1993 relatif à la société l'Ambroisie, le gérant de la société Parc a émis l'opinion suivante:"Nous avons consacré beaucoup de temps dans la perspective de défendre au mieux vos intérêts sans but lucratif" qu'en l'absence de reconnaissance non équivoque il ne peut en être déduit que la société Parc a implicitement renoncé aux commissions sur les affaires réalisées avec cette société dont il n'est pas établi par surcroît qu'elle savait déjà qu'elle ne succédait pas juridiquement à la société ATM Belloy;
Attendu que le jugement attaqué sera en conséquence infirmé en ce qu'il a rejeté la demande en paiement des commissions dues sur les ventes réalisées avec la société L'Ambroisie dans le secteur concédé exclusivement à la société Parc; que, le chiffre total des ventes étant de 2.517.721,20 F TTC, mais la société Ligne Plus justifiant d'avoirs de 797.355,17 F ainsi que d'impayés de 315.504,84 F, l'assiette des commissions, déterminée d'après les stipulations du contrat d'agent, est de 1.404.861,19 F TTC et 1.184.537 F HT; que la commission de 6 % due est donc de 71.072,22 F HT;
* Sur les demandes de la société Ligne Plus.
Attendu qu'il est démontré par les pièces produites et non sérieusement contesté qu'au titre des ventes faites aux adhérents du groupement Chaînegaz la société Ligne Plus reste créancière de 29.294,20 F; que la société Parc, qui a accordé sa caution et violé le contrat à l'occasion de la prise de commande, en doit paiement; que sont prouvés et ne font pas l'objet du moindre moyen, les impayés de 58.269 F afférents aux ventes directes; que la société Ligne Plus peut, jusqu'à l'ouverture de la procédure collective de la société Parc, prétendre aux intérêts de retard que les conditions générales dont l'opposabilité n'est pas critiquée font courir de plein droit à compter de l'exigibilité au taux légal augmenté de cinq points;
Attendu que, le calcul des intérêts n'étant pas remis en cause, le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a admis les créances de la société Ligne Plus au passif de la société Parc respectivement pour 34.266,96 et 68.160,90 F;
Attendu que la société Ligne Plus demande à être admise en sus pour la somme de 400.000 F correspondant au préjudice engendré par la perte, du fait de la société Parc, de la clientèle des adhérents du groupement Chaînegaz; que cette demande a été rejetée à juste raison, alors que les commandes n'avaient pu être prises que moyennant les concessions reprochées à faute à la société Parc, et que la société Ligne Plus ne doit la perte déplorée qu'à son intransigeance, comme relevé ci-dessus;
Attendu que, le montant des condamnations prononcées à l'encontre de la société Ligne Plus excédant celui des paiements qu'elle a faits en vertu de l'exécution provisoire, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de restitution;
* Sur les dépens et les frais irrépétibles.
Attendu que compte tenu de l'issue du litige il convient de partager les dépens non encore liquidés, tant de première instance que d'appel, à raison d'un cinquième à la charge de la société Parc, et de quatre cinquièmes à la charge de la société Ligne Plus; qu'il est équitable, pour les deux instances, d'accorder à la société Parc le remboursement de ses frais irrépétibles à concurrence de 25.000 F;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Déclare les appels recevables, dit que maître Astier a été mis en cause à juste raison en sa qualité de représentant des créanciers. Au fond, confirme la décision attaquée en ce qu'elle a - rejeté les demandes respectives de dommages-intérêts des sociétés Parc et Ligne Plus, - fixé les créances de la société Ligne Plus au passif de la société Parc. La réforme pour le surplus et, statuant à nouveau, - met la société Essege hors de cause et condamne la société Parc aux entiers dépens de première instance et d'appel nés de la mise en cause injustifiée, -déboute la société Parc de sa demande en paiement de commissions au titre des ventes de matériel Kero ou Tosaï réalisées dans son secteur par la société Auchan SMS, - condamne la société Ligne Plus à payer à la société Parc : * la somme de 320.139,98 F au titre de l'indemnité de rupture du contrat d'agence, avec les intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement attaqué, * la somme de 71.072,22 F au titre des commissions dues sur les ventes réalisées avec la société l'ambroisie, avec les intérêts au taux légal à compter de l'assignation, - fait masse des dépens de première instance et d'appel non encore liquidés et les partage à raison d'un cinquième à la charge de la société Parc et de quatre cinquièmes à la charge de la société Ligne Plus, - admet les avoués des sociétés Essege et Parc, ainsi que celui de maître Astier, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du NCPC, -condamne la société Ligne Plus à payer à la société Parc une somme de 25.000 F au titre des frais irrépétibles de dernière instance et d'appel.