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Décisions

CA Douai, 2e ch., 2 décembre 1999, n° 99-05800

DOUAI

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Prodim (Sté)

Défendeur :

Etablissements Jean-Claude Kirker (Sté), Sogecomi (SARL), LIDL (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M.Gondran de Robert

Conseillers :

Mme Schneider, M. Testut

Avoués :

SCP Carlier-Regnier, SCP Cocheme-Kraut-Reisenthel, Quignon

Avocats :

Mes Charlet, Sprimont, Houssain.

T. com. Douai, du 16 juin 1999

16 juin 1999

I - DONNEES DEVANT LA COUR

La société Kirker et la société Prodim ont signé un contrat de franchise Shopi le 18 octobre 1988 pour une durée de 6 ans renouvelable par tacite reconduction. La dernière période de reconduction devait expirer le 21 novembre 2000. En février 1998 la société Kirker a informé la société Prodim de ce qu'elle avait acquéreur pour son fonds de commerce en la personne d'une société Sogecomi. Après achat du fonds la société Sogecomi exploite sous l'enseigne LIDL concurrente de l'enseigne Shopi concédée par la société Prodim.

LA DECISION ATTAQUEE

Par ordonnance de référé du 18 juin 1999, le Président du Tribunal de commerce de Douai au regard d'une clause contractuelle d'arbitrage s'est déclaré incompétent et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

PROCEDURE

La société Prodim a formé appel de cette décision le 20 juillet 1999, puis autorisée le 30 juillet par le Premier Président de céans, a assigné à jour fixe pour le 5 octobre 1999.

LES PRETENTIONS DE L'APPELANT

Par conclusions en date du 5 octobre 1999, la société Prodim demande :

- à voir infirmer la décision entreprise

- à voir ordonner le retrait de l'enseigne LIDL, dans la huitaine de la décision à intervenir, par les sociétés Kirker, Sogecomi et LIDL ainsi que de toutes marchandises dont les marques sont liées à cette enseigne sous astreinte de 100 000 F par jour de retard,

- à défaut pour les intimés d'avoir agi sous huitaine autoriser la société Prodim à faire procéder à ses frais avancés à ces mesures par tel technicien de son choix,

- condamner les sociétés Kirker, Sogecomi et LIDL à lui payer 50.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- les condamner supporter les entiers dépens selon dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

LES PRETENTIONS DES INTIMES

La société Kirker et la société Sogecomi, par conclusions du 27 septembre 1999, demandent à voir :

- confirmer l'ordonnance déférée,

- condamner la société Prodim à leur payer 15.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à chacune et les entiers dépens selon dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

La société LIDL, par conclusions du 28 septembre 1999, demande à voir :

- confirmer l'ordonnance déférée,

- condamner la société Prodim à lui payer 25 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et les entiers dépens selon dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile,

- subsidiairement dire que la société Kirker devra garantir la société LIDL de toute condamnation :

- dans cette hypothèse la condamner aux dépens de l'appel en garantie ainsi qu'à lui payer 25 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

II - ARGUMENTATION DE LA COUR

SUR LA SAISINE DU JUGE DES REFERES

Le premier juge pour se dire incompétent a relevé que l'accord de franchise liant la société Prodim et la société Kirker comportait en son article 11 une clause d'arbitrage relative à l'interprétation et l'exécution de la dite convention.

Il est constant que le tribunal arbitral n'a pas encore été saisi.

L'action engagée par la société Prodim vise à faire cesser ce qu' elle estime être un trouble manifestement illicite.

L'existence d'une clause compromissoire n'exclut pas la faculté de saisir le juge des référés sur le fondement de l'article 873 alinéa 1 du nouveau Code de procédure civile pour obtenir des mesures conservatoires ou de remises en état, seule la saisine du tribunal arbitral pouvant faire obstacle à celle du juge des référés.

La décision déférée sera réformée en conséquence.

SUR L'EXISTENCE D'UN TROUBLE MANIFESTEMENT ILLICITE

Selon la société Prodim, les dispositions de l'article 3.1.1 du contrat de franchise faisait obligation jusqu'au 21 novembre 2000, date d'expiration du dernier renouvellement triennal, à la société Kirker ainsi qu'à son éventuel successeur dans le fonds d'utiliser l'enseigne Shopi et le matériel publicitaire désigné par le franchiseur à l'exclusion de tout autre, l'article 10 du même contrat constituant une clause d'agrément du successeur dans le fonds du franchisé.

Lors de la reprise de son fonds de commerce par la société Sogecomi, la société Kirker a demandé préalablement à la société Prodim de prendre position sur la mise en jeu de son droit de préférence prévu au contrat de franchise, en l'informant de l'identité du cessionnaire et des conditions de la vente. Ce droit n'a pas été exercé dans les 30 jours impartis.

L'article 10 du contrat retient qu'en cas de cession du fonds de commerce le franchiseur aura la possibilité de mettre fin aussitôt à l'accord de franchise, cet accord ne pouvant être cédé sans l'accord du franchiseur.

Il ne peut y avoir trouble manifestement illicite du fait de la dépose d'enseigne par le cessionnaire que si le contrat de franchise lui a été transmis.

Le fait de savoir si le silence gardé par le franchiseur à droit de préférence, permettant alors au franchisé de procéder à la vente du fonds, emporte transmission automatique du contrat de franchise au cessionnaire, éventuellement contre son gré, ou résiliation de ce contrat conclu intuitu personnae nécessite une véritable interprétation de la convention.

Il n'y a donc lieu à référé.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

Les sociétés Kirker, Sogecomi et LIDL ayant du engager des frais irrépétibles, il leur sera alloué à chacune 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

La société Prodim supportera les entiers dépens selon dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

III - DECISION DE LA COUR

Par ces motifs, LA COUR : Infirmant l'ordonnance de référé rendue le 18juin 1999 par le Président du Tribunal de commerce de Douai, - dit n' y avoir lieu à référé - condamne la société Prodim à payer à chacune des sociétés Kirker, Sogecomi et LIDL la somme de 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile - met les dépens à la charge de la société Prodim selon dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.