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Décisions

Cass. crim., 16 décembre 1998, n° 97-85.158

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

Mme Mazars

Avocat général :

M. Launay

Avocats :

SCP de Chaisemartin, Courjon.

TGI Angers, ch. corr., du 21 juin 1996

21 juin 1996

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par L Hervé, contre l'arrêt de la cour d'appel d'Angers, chambre correctionnelle, en date du 11 février 1997, qui, pour complicité de tromperie sur la qualité de marchandises vendues, l'a condamné à 40 000 francs d'amende ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 213-1, L. 215-1, L. 216-2 et L. 226-2 du Code de la consommation, 111-3, 121-1, 121-6 et 121-7 du Code pénal, 5 de la loi du 24 juillet 1996, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que, l'arrêt attaqué a déclaré Hervé L, en qualité de président directeur général de la société Y, coupable du délit de complicité de tromperie sur les qualités substantielles des cuirs et l'a condamné en répression à la peine de 40 000 francs d'amende ;

" aux motifs qu'Hervé L conclut à sa relaxe au motif que sa société, franchiseur, n'est à aucun moment intervenue dans le processus d'acquisition et d'étiquetage des salons litigieux, les fiches techniques ayant, selon lui, été établies par la société " Z " centrale de référence[ment], sans passer par l'intermédiaire de la société Y " Master franchisé " ; qu'en admettant même que le processus décrit par Hervé L soit exact, alors que les fiches techniques ne portent pas d'autres indications de provenance que la marque " A ", il résulte du contrat de franchise conclu entre la société X, franchisé et Y, franchiseur dont le siège est à Paris, que le franchisé était tenu de se fournir exclusivement en mobilier sélectionné par le franchiseur auprès de fournisseurs agréés par lui, de vendre au tarif de référence fixé de même par lui, moyennant un droit d'entrée et un pourcentage sur le chiffre d'affaires annuel dus au franchiseur ; que celui-ci, aux termes du contrat, était censé avoir acquis " une grande expérience " et " des connaissances spéciales " en matière de salons en cuir, notamment sur le plan technique ; qu'il s'engageait, par ailleurs, à apporter au franchisé une " assistance permanente " ; qu'en application de ce contrat, le franchiseur signataire de la convention était tenu d'apporter au franchisé, celui-ci dans un lien étroit de dépendance à l'égard du franchiseur, les moyens nécessaires, notamment techniques, dans l'exercice de son commerce ; qu'Hervé L ne saurait, pour dégager sa responsabilité, se fonder sur la circonstance que sa société n'avait aucun rôle, selon lui, dans l'établissement des fiches techniques litigieuses et leur transmission au franchisé, alors que ces fiches constituaient le premier moyen pour le franchisé d'apprécier la qualité des cuirs des modèles imposés par le franchiseur, et que celui-ci avait en conséquence l'obligation, à l'égard du franchisé, de lui assurer un service technique fiable, et de veiller à ce que ledit franchisé ait à sa disposition des fiches techniques conformes à la qualité réelle des cuirs fournis par les fabricants agréés par lui, compte tenu de la réglementation en vigueur en France ; qu'il s'ensuit que les fiches techniques, mêmes fournies par le service d'une société étrangère membre du groupe auquel appartenait le franchiseur et dont il était solidaire, auraient dû, en vertu du principe même des contrats de franchise, pouvoir être vérifiées par Maryvonne B grâce à " l'assistance permanente générale " que lui devait son franchiseur et qui, en l'espèce, a fait défaut ; que, dès lors, Hervé L ayant concouru à la réalisation des infractions, sa culpabilité sera confirmée pour les seuls délits retenus par le premier juge, mais la Cour, considérant la gravité de la défaillance de l'intéressé, réformera sur la sanction en portant l'amende à 40 000 francs " ;

" alors, d'une part, que la complicité par aide et assistance suppose l'accomplissement d'un acte positif et ne peut s'induire d'une simple abstention ; qu'en l'espèce, aux termes de la citation à comparaître du 17 novembre 1995, Hervé L était prévenu de s'être rendu complice du délit de tromperie sur les qualités substantielles des cuirs composant divers salons, en fournissant à Maryvonne B, son franchisé, sans en vérifier la teneur, des étiquettes comportant de fausses indications ; que, dès lors, en déduisant la complicité d'Hervé L de sa seule défaillance à fournir au franchisé l'assistance lui permettant de vérifier l'exactitude des fiches techniques fournies par la société de droit belge Z, ce qui s'analysait en réalité en une simple abstention du prévenu, la cour d'appel n'a, en violation des textes susvisés, relevé aucun acte positif caractérisant le délit de complicité objet de la poursuite ;

" alors, d'autre part, que la cour d'appel ne pouvait déclarer punissable Hervé L à raison de faits commis exclusivement par la société Z, sur le fondement d'une prétendue solidarité entre ladite société mère et la filiale française qu'il dirigeait ; qu'en estimant pourtant le contraire, la cour d'appel a de nouveau violé les articles susvisés ;

" alors, enfin, et subsidiairement que, conformément au principe selon lequel nul n'est responsable pénalement que de son propre fait, l'article L. 213-1 du Code de la consommation, qui incrimine la tromperie sur les qualités substantielles de la chose, ne peut justifier des poursuites pénales qu'à l'encontre de celui qui a participé à la perpétration de l'infraction ; qu'en affirmant, au contraire, que la responsabilité pénale d'Hervé L se trouvait de ce chef engagée en sa seule qualité de représentant légal de la société Y, chef de file sur le territoire français du réseau de franchisés dirigé par la société de droit belge Z, nonobstant la circonstance que la société Y n'avait joué aucun rôle dans l'établissement et la diffusion des fiches techniques litigieuses relatives à la qualité des cuirs utilisés pour la fabrication des modèles vendus, lesquelles avaient été directement conçues, rédigées et transmises aux franchisés par la société Z, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article 121-1 du Code pénal " ;

Attendu qu'Hervé L représentant légal de la société " Y " est poursuivi pour s'être rendu complice de Maryvonne B, prévenue d'avoir trompé les consommateurs sur les qualités substantielles du cuir de sièges salons vendus dans un magasin franchisé sous l'enseigne " A " en fournissant, sans en vérifier la teneur, des étiquettes comportant de fausses indications ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable des faits reprochés et répondre à ses conclusions, la cour d'appel se prononce par les motifs repris au moyen ; qu'elle relève notamment que, selon les déclarations de Maryvonne B, les fiches techniques mensongères lui avaient été fournies par le franchiseur;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations exemptes d'insuffisance et de contradiction, abstraction faite d'un motif surabondant critiqué par la deuxième branche du moyen, les juges ont caractérisé en tous ses éléments la complicité de tromperie imputée au demandeuret justifié leur décision au regard des articles L. 213-1 du Code de la consommation et 121-7 du Code pénal ; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.