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Décisions

Cass. com., 20 octobre 1998, n° 96-15.378

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Godin

Défendeur :

Pingouin (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

Mme Garnier

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

Me Choucroy, SCP Ryziger, Bouzidi.

T. com. Roubaix-Tourcoing, du 10 mars 19…

10 mars 1994

LA COUR : - Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Douai, 21 mars 1996), que la société Pingouin a conclu un contrat de franchisage avec Mme Godin qui n'a pas obtenu dans l'exploitation de son commerce le résultat escompté et a assigné le franchiseur en résolution du contrat et réparation de son préjudice ;

Sur le premier moyen pris en ses trois branches : - Attendu que Mme Godin fait grief à l'arrêt d'avoir écarté des conclusions et d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en statuant de la sorte, sans préciser si la société Pingouin avait été dans l'impossibilité de répondre, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'en s'abstenant au surplus de préciser si elle avait eu connaissance de la date de clôture ou reçu injonction de conclure pour une date antérieure au 29 janvier 1996, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, enfin, qu'en toute hypothèse, la cour d'appel a constaté que la société Pingouin avait déposé des conclusions le 26 janvier 1996 ; qu'en écartant, dès lors des débats les conclusions et pièces déposées et versées aux débats par elle dès le 29 janvier 1996, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que Mme Godin, en possession des conclusions de la société Pingouin depuis le 6 décembre 1994, n'avait conclu que le 29 janvier 1996, soit dix jours avant l'audience en déposant de plus trois nouvelles pièces ; qu'en en déduisant que le principe de la contradiction ne pouvait pas être respecté au profit de la société Pingouin, par suite de ce dépôt tardif de conclusions et de pièces, la cour d'appel n'encourt pas les griefs du moyen ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen pris en ses quatre branches : - Attendu que Mme Godin fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'est nul le contrat de franchise conclu en violation de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1989, qui met à la charge du franchiseur, l'obligation de communiquer au franchisé, vingt jours au minimum avant la signature du contrat, un " document donnant des informations sincères qui lui permettent de s'engager en connaissance de cause " ; qu'en l'espèce, la cour d'appel constate que le document visé par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1989, applicable en la cause, n'a pas été remis au franchisé ; qu'en s'abstenant de tirer les conséquences légales de ses constatations d'où résultait la nullité du contrat de franchise, la cour d'appel a violé la disposition sus-citée ; alors, d'autre part, qu'à supposer même que la fourniture d'un document donnant des informations sincères permettant au candidat de s'engager en connaissance de cause soit exigée par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1989 à titre probatoire, il appartient alors au débiteur de l'obligation de démontrer qu'il a transmis de telles informations ; qu'en se bornant, dès lors, à énoncer qu'elle a bénéficié d'informations, la cour d'appel a procédé par voie de simple affirmation en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de plus, qu'en mettant au surplus à sa charge la preuve de l'inexactitude des informations qu'elle aurait reçues de la part du franchiseur en application de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1989, la cour d'appel a, en toute hypothèse, inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ; alors, enfin, qu'au surplus, la cour d'appel constate, d'un côté, que l'étude prévisionnelle qui lui a été remise tenait compte de l'état du marché du fil à tricoter fin 1989, et d'un autre côté, que les prévisions d'exploitation et de rentabilité faites par le franchiseur ont été trop optimistes en l' état de la conjoncture économique dans le secteur fil à tricoter fin 1989/début 1990 ; qu'elle a ainsi entaché l'arrêt d'une contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que les parties ont été en rapport dès novembre 1989, date de l'étude d'implantation de marché et des prévisions d'exploitation, que la signature du contrat n'est intervenue qu'au terme de plusieurs mois de contacts et de rencontres, enfin que l'étude financière n'a donné lieu à accord que le 17 janvier 1990 ; que la cour d'appel a pu en déduire, par une décision motivée et sans inverser la charge de la preuve, que Mme Godin avait reçu une information pré-contractuelle conformément aux dispositions légales ;

Attendu, en second lieu, qu'après avoir retenu que l'étude prévisionnelle avait été établie en tenant compte de l'état du marché du fil à tricoter tel qu'il existait fin 1989, date dont elle constatait qu'elle était celle du début des relations entre les parties, c'est hors toute contradiction que la cour d'appel, tout en relevant le caractère optimiste des prévisions, a retenu qu'elle avait un caractère sérieux pour décider que le franchiseur avait satisfait à son obligation d'information;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le troisième moyen pris en ses trois branches : - Attendu que Mme Godin fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel estime que le stock de départ, constitué sous forme d'articles inadéquats car hors saison, aurait correspondu à celui commandé par elle ; qu'en se bornant dès lors à exclure toute responsabilité du franchiseur dans la constitution de ce stock, sans rechercher si celui-ci n'avait pas manqué, dans de telles circonstances à son obligation de conseil envers le franchisé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'en énonçant que l'absence de méconnaissance par le franchiseur de ses obligations contractuelles liées à la formation du franchisé résulterait des productions de la société Pingouin, sans préciser sur quels éléments de preuve elle s'est fondée, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, enfin, que, dans ses conclusions d'appel, elle faisait valoir, ainsi que l'admet la cour d'appel, que la cession des contrats de franchise à un franchiseur nouvellement créé et donc dépourvu des qualités inscrites dans le préambule du contrat de franchise justifiait la résolution de celui-ci aux torts du franchiseur ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'en retenant que le stock de marchandises a été constitué sous la seule responsabilité de Mme Godin qui n'était pas ignorante des usages en matière d'approvisionnement, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Attendu, en second lieu, qu'en retenant que la société Pingouin justifiait avoir rempli ses obligations en matière d'assistance technique et de formation, et que Mme Godin ne démontrait pas qu'elle s'était heurtée à une fin de non-recevoir de la part du franchiseur lorsqu'elle avait sollicité une aide ou un conseil, la cour d'appel, en rejetant les conclusions prétendument délaissées, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.