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Décisions

Cass. com., 15 juin 1993, n° 91-14.935

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Perez, Sofincuir (SARL)

Défendeur :

Athlète's Foot (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Gomez

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocats :

SCP Defrenois, Levis, Me Capron

T. com. Paris, 9e ch., du 4 oct. 1990

4 octobre 1990

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 mars 1991) que Mme Sylvia Perez a conclu, le 3 mars 1986, avec la société à laquelle s'est, par la suite, substituée la société Marshall, un contrat de franchise de distribution de chaussures et de vêtements de sport dont a bénéficié la société Sofincuir qui exploite un magasin au centre commercial d'Aulnay-sous-Bois ; que Mme Perez et la société Sofincuir ont assigné en nullité du contrat pour inexécution les sociétés Athlete's Foot et Marshall, qui ont, reconventionnellement, demandé le paiement des redevances et la résiliation du contrat ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches : - Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné in solidum Mme Perez et la société Sofincuir, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la société Sofincuir et Mme Perez faisaient valoir dans leurs écritures d'appel que cette dernière, seul signataire du contrat de franchise litigieux, n'était pas gérante de la société et n'avait pas engagé celle-ci en signant le contrat de franchise ; qu'en confirmant le jugement du tribunal de commerce qui a condamné in solidum la société Sofincuir et Mme Perez envers les franchiseurs, sans répondre à ce chef de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, que, pour engager un tiers, le signataire d'un contrat doit agir en vertu d'un mandat ; qu'en condamnant in solidum la société Sofincuir et Mme Perez à exécuter la convention litigieuse et à verser des dommages-intérêts aux franchiseurs, sans rechercher si Mme Perez était titulaire d'un mandat, tacite ou apparent, l'autorisant à engager la société Sofincuir envers les franchiseurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1984 et 1998 du Code civil ; alors, en outre, que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'en s'abstenant de rechercher quelles étaient les parties au contrat litigieux et de préciser le fondement des condamnations prononcées in solidum contre Mme Perez et la société Sofincuir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134, 1165 et 1382 du Code civil ; alors, enfin, que, subsidiairement, seul le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire ; qu'en l'espèce, à supposer même que Mme Perez ait représenté la société Sofincuir en concluant le contrat de franchise, seule cette société aurait été tenue de son exécution ; que la cour d'appel, en condamnant in solidum Mme Perez et la société Sofincuir, a, dans cette hypothèse, violé l'article 1998 du Code civil ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des conclusions que Mme Perez et la société Sofincuir ont soutenu devant les juges du fond que seule Mme Perez avait conclu avec la société Athlete's Foot un contrat de franchise ni que les parties à ce contrat étaient Mme Perez et la société Sofincuir ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable en ses quatre branches ;

Sur le second moyen pris en sa seconde branche : Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de Mme Perez et de la société Sofincuir et d'avoir accueilli celles des sociétés Athlete's Foot et Marshall, alors, selon le pourvoi, que le franchiseur est tenu d'informer le franchisé des éléments essentiels de la franchise avant la conclusion du contrat de franchise ; qu'en l'espèce, Mme Perez et la société Sofincuir ont fait valoir, dans leurs conclusions d'appel, que la société Athlete's Foot n'avait fourni aucun renseignement sur la franchise avant la conclusion du contrat de franchise et ont demandé en conséquence l'annulation de ce contrat ou sa résiliation aux torts exclusifs du franchiseur pour inexécution des obligations lui incombant, ainsi que l'allocation de dommages-intérêts ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'il y a contrat de franchise à la condition que le franchiseur mette à la disposition du franchisé un savoir-faire original qui ne soit pas généralement connu ou facilement accessible ; qu'en l'espèce, pour affirmer la réalité du savoir-faire, la cour d'appel s'est bornée à relever la fourniture par le franchiseur de documents ou matériels et l'adhésion de celui-ci à un groupement professionnel, sans rechercher les arguments économiques, techniques et commerciaux originaux susceptibles, à la date de la conclusion de l'accord, d'améliorer la position concurrentielle du franchisé et de constituer un savoir-faire ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article premier du règlement CEE n° 4087/88 du 30 novembre 1988 et des articles 1131 et 1134 du Code civil ;

Attendu que la cour d'appel a relevé que la société Athlete's Foot avait remis au franchisé des fiches relatives aux méthodes d'organisation et de gestion, des éléments signalétiques et fournitures administratives, et lui avait procuré une assistance continue par le moyen de bulletins de liaison, de réunions et de stages de formation ; que la cour d'appel a pu déduire de ses constatations et appréciations que la société Athlete's Foot avait exécuté les obligations découlant du contrat de franchise et a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen pris en sa seconde branche n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche : - Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu que, dans leurs conclusions devant la cour d'appel, Mme Perez et la société Sofincuir avaient fait valoir que la société Athlete's Foot n'avait pas procédé à un examen de la situation du marché par rapport au commerce envisagé et ne lui avait pas fourni les renseignements qui lui auraient été nécessaires ;

Attendu qu'en rejetant la demande de Mme Perez et de la société Sofincuir tendant au paiement de dommages-intérêts par les sociétés Athlete's Foot et Marshall, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel n'a pas satisfait aux prescriptions du texte susvisé ;

Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de Mme Perez et de la société Sofincuir tendant au paiement de dommages-intérêts par les sociétés Athlete's Foot et Marshall en réparation du préjudice résultant du non-respect par la société Athlete's Foot de son obligation d'information et de renseignements, l'arrêt rendu le 4 mars 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ; Rejette la demande présentée par les sociétés Athlète's Foot et Marshall, sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile .