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Décisions

Cass. soc., 12 juillet 1999, n° 97-41.432

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Intexal (Sté)

Défendeur :

Tirroloni

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Merlin

Rapporteur :

M. Texier

Avocat général :

M. de Caigny

Avocats :

Me Luc-Thaler, SCP Gatineau.

Cons. prud'h. Marseille, sect. encadr., …

1 juillet 1994

LA COUR - Attendu que M. Tirroloni a été embauché le 27 septembre 1963 par la société Cogema en qualité de VRP ; qu'il a été licencié le 16 avril 1993 et a saisi le conseil de prud'hommes ;

Sur le premier moyen : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 janvier 1997) de l'avoir condamné à verser à M. Tirroloni la somme de 800.000 F à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que si les juges du fond apprécient souverainement le préjudice subi par un salarié dont le licenciement est considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, les motifs retenus pour évaluer l'indemnité due au salarié doivent être exempts de toute insuffisance ou contradiction ; qu'il appert des propres motifs de l'arrêt qu'en suite de son licenciement prononcé en avril 1993, M. Tirroloni n'a bénéficié d'allocations de chômage que jusqu'à la fin de l'année 1994, avant de percevoir des indemnités journalières de sécurité sociale ; qu'en allouant au salarié une somme représentant près de trois années de salaire à titre de dommages-intérêts, bien qu'il résulte de ses propres constatations que la privation d'emploi postérieure à l'année 1994 était exclusivement due à son état de santé et ne présentait aucun lien avec la mesure de licenciement litigieuse, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale, au regard des dispositions des articles L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a notamment relevé que le salarié avait effectué de nombreuses démarches pour retrouver un emploi et subissait un état pathologique réactionnel à de graves difficultés professionnelles, a apprécié souverainement et sans se contredire l'existence et le montant du préjudice ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à M. Tirroloni une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif intervenu dans des conditions vexatoires, alors, selon le moyen, d'une part, que le simple fait pour un employeur agissant dans l'exercice de son pouvoir de direction de l'entreprise de dispenser un salarié licencié d'effectuer un préavis ne saurait constituer, sauf abus, une mesure vexatoire ouvrant droit à dommages-intérêts ; qu'en statuant ainsi, sans caractériser l'existence d'un comportement désobligeant de l'employeur ou de toute autre circonstance vexatoire, la cour d'appel a violé les articles L. 122-8 et L. 122-14-3 du Code du travail et 1147 du Code civil ; alors, d'autre part, que, pour considérer que durant l'entretien préalable, la société Intexal aurait indiqué à M. Tirroloni que son congédiement serait en réalité dû à son âge, circonstance qui caractériserait l'existence d'un abus dans l'exercice de sa faculté de résiliation unilatérale du contrat de travail, la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur le compte-rendu d'entretien préalable, rédigé par le conseiller choisi par le salarié ; qu'en ne s'expliquant pas sur les raisons pour lesquelles elle a cru devoir écarter toute force probante aux pièces versées aux débats par la société Intexal, desquelles il ressortait que son représentant, lors de cet entretien préalable, n'avait en aucune façon tenu les propos qui lui étaient prêtés par le représentant du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale, au regard des dispositions des articles 1147 et 1363 et suivants du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté, au vu des éléments de fait et de preuve versés par les deux parties, qu'elle a souverainement appréciés, que le licenciement du salarié avait été justifié par son âge, que le départ brusque du salarié, malgré son ancienneté, était de nature à jeter une suspicion sur ses qualités ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à M. Tirroloni une somme à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, alors, selon le moyen, d'une part, que la fixité du secteur de prospection inhérente au statut de VRP n'implique pas une intangibilité absolue ; qu'en l'espèce, il résulte des motifs mêmes de l'arrêt que si une dizaine de modifications ont été apportées au secteur attribué à M. Tirroloni durant les trente années passées au sein de la société Intexal, il ne s'agissait que de légères modifications des contours d'un secteur qui s'est toujours situé globalement dans la région des Bouches-du-Rhône ; qu'en se fondant sur ces seules modifications pour considérer que M. Tirroloni n'avait pas de secteur fixe de prospection, et que, de ce fait, il ne présentait pas la qualité de VRP conduisant à l'application de l'Accord national interprofessionnel des VRP pour calculer le montant de l'indemnité de licenciement qui lui était due, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 751-1 du Code du travail ; alors, d'autre part, que seule une application volontaire, constante, fixe et généralisée de dispositions d'une convention collective peut obliger un employeur ; qu'en considérant que la société Intexal serait tenue d'appliquer les dispositions de la Convention collective nationale des industries textiles pour déterminer le quantum de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la cour d'appel, qui a seulement excipé du fait que cinq salariés auraient vu leur indemnité de licenciement calculée sur la base de ces dispositions conventionnelles, n'a pas caractérisé l'existence d'un usage qui se serait instauré dans l'entreprise de verser au représentant, de manière constante, fixe et généralisée, une indemnité de licenciement calculée conformément à la Convention collective des textiles ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention collective de l'industrie textile ;

Mais attendu que l'existence d'un secteur d'activité déterminé constitue une condition essentielle du contrat de VRP statutaire;

Et attendu que la cour d'appel, qui a relevé que le secteur initial prévu au contrat avait été modifié à de nombreuses reprises, ce dont il résultait que le salarié n'avait pas de secteur fixe de prospection, a, par ce seul motif, n'étant pas contesté que la Convention collective nationale des industries textiles était applicable à l'entreprise, légalement justifié sa décision; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.