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Décisions

Cass. com., 26 octobre 1999, n° 96-20.063

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Total France (Sté)

Défendeur :

Gue (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Grimaldi (conseiller le plus ancien faisant fonction)

Rapporteur :

M. de Monteynard

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

SCP Lesourd, SCP Peignot, Garreau, SCP Ryziger, Bouzidi.

T. com. Paris, 8e ch., du 2 févr. 1994

2 février 1994

LA COUR :- Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 mai 1996), que la compagnie de raffinage et de distribution Total France (société Total), propriétaire d'un fonds de commerce de station-service, en a donné l'exploitation à la SARL Gue (la société) sous forme de location-gérance en ce qui concerne la vente de lubrifiants et d'articles divers et en qualité de mandataire pour la distribution de carburants ; que la société Cofinco, aux droits de laquelle vient la Compagnie générale de garantie (CGG), s'est portée caution de la société envers la société Total et que les époux Gue se sont eux-mêmes portés cautions de CGG ; que le contrat d'exploitation ayant été résilié par la société, la CGG s'est acquittée, auprès de la société Total, du solde de l'exploitation dont elle a demandé le paiement à la société et aux époux Gue ; que ceux-ci ont attrait la société Total en indemnisation des pertes essuyées à l'occasion de la gestion du mandat ainsi qu'en paiement de l'indemnité de fermeture, en réduction de pénalité et en paiement de dommages-intérêts en faisant valoir que le rapport d'expertise judiciaire avait établi que " la commission avait été fixée à un taux beaucoup trop bas ", " le principal paramètre, à savoir le prix d'affichage, étant fixé par le mandant ", et que la société Total avait pris, pour remédier à cette situation, des mesures " insuffisantes pour assurer une rémunération normale du travail des exploitants " ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche : - Vu l'article 2000 du Code civil ; - Attendu que les pertes que le mandataire a essuyées à l'occasion de sa gestion et dont les parties peuvent décider qu'elles seront couvertes par un forfait sont exclusives de celles qui ont pour origine un fait imputable au mandant ;

Attendu que, pour écarter la demande d'indemnisation des pertes essuyées par la société à l'occasion du mandat, l'arrêt énonce que la clause aux termes de laquelle le " versement de la commission exclut la possibilité pour le mandataire de demander une quelconque indemnité supplémentaire au titre de l'application des articles 2000 et suivants du Code civil " est sans équivoque ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans exclure les pertes qui auraient pour origine un élément de l'exploitation dont la maîtrise a été conservée par le mandant et que les parties ne peuvent conventionnellement mettre à la charge du mandataire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche : - Vu l'article 2000 du Code civil ; - Attendu que pour rejeter la demande d'indemnisation des pertes essuyées par la société à l'occasion du mandat, l'arrêt retient encore que le mandataire a commis une faute dans " l'activité d'achat et de revente de véhicule d'occasion " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la faute retenue était étrangère à l'exécution du mandat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches : - Vu l'article 1184 du Code civil ; - Attendu que pour rejeter les demandes de la société consécutives à la rupture du contrat, l'arrêt retient que c'est la société qui en a procédé à la résiliation ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette rupture n'avait pas son origine dans le refus de la société Total d'indemniser la société des pertes essuyées à l'occasion du mandat, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mai 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon.