Cass. soc., 28 octobre 1997, n° 94-45.257
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Codisud (Sté)
Défendeur :
Merle (époux)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gélineau-Larrivet
Rapporteur :
M. Desjardins
Avocat général :
M. Chauvy
Avocat :
SCP Lesourd.
LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 26 septembre 1994), que les époux Merle engagés, le 2 octobre 1986, en qualité de gérants non salariés d'une succursale de magasins d'alimentation de détail, située à La Pacaudière (42), par l'Union des coopérateurs de Saint-Etienne, aux droits de laquelle se trouve la société Codisud, ont conclu avec celle-ci, le 13 mars 1991, un autre contrat de gérance concernant une succursale nouvellement créée à Saint-Martin-d'Estréaux, ouverte début avril 1991 ; qu'après avoir prononcé la suspension provisoire de ce contrat de gérance le 16 septembre 1992 et convoqué les époux Merle à un entretien préalable, la société Codisud leur a notifié sa résiliation par une lettre recommandée présentée le 2 octobre 1992 ; que les époux Merle ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un rappel de rémunération et de congés payés et de diverses indemnités ; que, de son côté, la société Codisud a engagé contre eux devant le tribunal de commerce une instance en paiement de la somme égale au déficit d'inventaire constaté ;
Attendu que la société Codisud fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer des indemnités de rupture aux époux Merle, alors, selon le moyen, d'une part, que le contrat de gérance non salariée de succursale de maison d'alimentation de détail, qui emporte l'obligation pour le gérant d'assurer la charge du déficit imputable à sa gestion, fait nécessairement peser sur celui-ci les risques liés à la gestion et à l'exploitation du magasin ; qu'un déficit de gestion important et persistant sur plusieurs mois justifie la qualification contractuelle de faute grave ; que la cour d'appel qui constate l'existence d'un déficit de gestion mis en évidence par un inventaire de cession sans admettre l'existence d'une faute grave a, dès lors, violé les articles L. 122-6 et L. 122-8 du Code du travail ; et alors, d'autre part, que la société Codisud invoquait dans ses conclusions d'appel la nature du contrat de gérance non salariée de succursale de maison d'alimentation de détail en vertu duquel le gérant mandataire est responsable comptablement et est tenu d'assurer la gestion et l'exploitation du magasin ; qu'aux termes de l'article 11 du contrat de gérance mandataire non salariée, un manquant d'inventaire constitue une faute grave de la part du salarié et entraîne la résiliation sans indemnité ni préavis ; qu'un tel manquant entraîne en effet un grave préjudice financier pour la société Codisud ; que la cour d'appel, qui ne répond pas à ce moyen de nature à caractériser l'existence d'une faute grave dans l'exécution du contrat de gérance non salariée, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, si le gérant non salarié d'une succursale peut être rendu contractuellement responsable de l'existence d'un déficit d'inventaire en fin de contrat et tenu d'en rembourser le montant, il doit, aux termes de l'article L. 782-7 du Code du travail, bénéficier de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale ; qu'il en résulte qu'il ne peut être privé, dès l'origine, par une clause du contrat, du bénéfice des règles protectrices relatives à la rupture des relations contractuelles ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a énoncé qu'il appartenait à la juridiction prud'homale, qui n'était pas liée par la définition donnée par la convention des parties des faits susceptibles d'en entraîner la rupture sans préavis ni indemnité, d'apprécier si les faits reprochés aux gérants étaient constitutifs d'une faute grave ;
Et attendu que la cour d'appel, ayant relevé que le comportement des époux Merle ne faisait l'objet d'aucune critique autre que celle tirée de l'existence d'un déficit d'inventaire, a pu décider qu'aucune faute grave ne pouvait être retenue à leur encontre ; - d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.