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Décisions

CA Pau, 1re ch. sect. 2, 21 décembre 1989, n° 4058-89

PAU

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Société d'Exploitation Clinique Lampre (SARL)

Défendeur :

Lampre (Epoux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Borthiry

Conseillers :

M. Simonin, Mme Cordas

Avoués :

Me Marbot, SCP Piault-Lacrampe Carraze

Avocats :

Mes Chambeyron, Tandonnet.

TGI Tarbes, prés., du 20 déc. 1988

20 décembre 1988

La SARL d'exploitation Clinique Lampre a relevé appel dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas contestées d'une ordonnance du juge des baux commerciaux du tribunal de grande instance de Tarbes dont le dispositif est le suivant :

accueillons les époux Lampre François, Marie, Jean, Gustave et Trouillet Micheline, Jeanne en leur exception d'irrecevabilité,

Vu l'art. 13 de la loi du 20 mars 1956,

Vu l'art. 33 du décret du 30 septembre 1953,

disons l'action engagée par M. Michel Petit agissant en qualité de gérant unique et statutaire de la société d'exploitation de la clinique Lampre, ayant son siège social 55 rue de la République à Séméac, par acte introductif d'instance du 25 janvier 1988, irrecevable en l'état,

au fond,

déboutons M. Michel Petit, ès qualités, de ses demandes, fins et conclusions,

laissons à sa charge les dépens ;

Au soutien de l'appel, la SARL Clinique Lampre en la personne de son gérant M. Petit demande à la Cour :

dire et juger recevable l'appel interjeté par la société d'exploitation de la clinique Lampre à l'encontre de l'ordonnance du juge des loyers commerciaux de Tarbes du 20 décembre 1988,

dire et juger l'appel bien fondé,

mettre à néant l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau,

dire et juger que l'action en révision du loyer de la gérance introduite par la société d'exploitation de la clinique Lampre en vertu de l'art. 12 de la loi du 20 mars 1956 n'est pas soumise à la prescription prévue par l'art. 33 du décret du 30 septembre 1953,

subsidiairement, dire et juger en tout état de cause que cette action n'est pas prescrite la prescription ayant été valablement interrompue par l'assignation en référé du 23 février 1985,

Encore plus subsidiairement constater qu'en tout cas nouvelle demande en révision a été formée par acte extrajudiciaire le 23 février 1985 et que cette demande n'est en aucun cas prescrite,

évoquer au fond et statuant sur la demande en révision du loyer, fixer le loyer au 1er avril 1984 à la somme de 158.602,68 F hors taxe,

dire et juger que les majorations ultérieures ne pourront être faites qu'en fonction du prix de journée d'un établissement de catégorie D,

subsidiairement ordonner une expertise et désigner tel expert qu'il plaira à l'effet de donner tout renseignement utile sur la valeur locative équitable du fonds de commerce au jour de la demande de révision sans tenir compte des améliorations apportées par les investissements de la société gérante et en fonction de la classification en catégorie D qui était celle du fonds de clinique lorsqu'il a été donné en gérance,

condamner les époux Lampre aux dépens de première instance et d'appel.

Les époux Lampre, par conclusions déposées le 5 septembre 1989, aux motifs que la procédure de révision doit être vêtue dans les formes prescrites par les art. 26 et suivant du décret du 30 septembre 1953; que sur la demande du 14 avril 1984 la SARL Clinique Lampre n'a notifié son mémoire interruptif de prescription que le 24 décembre 1986 ; que l'acte était prescrit ; que la demande réitérée le 23 février 1985 était sans titre ;

a conclu :

rejeter toutes conclusions contraires, confirmer le jugement déféré,

condamner la société d'exploitation clinique Lampre à payer aux époux Lampre la somme de 3.000 F en application de l'art. 700 du nouveau code de procédure civile,

les condamner aux dépens de première instance et d'appel.

Ils ont déposé le 17 octobre 1989 des conclusions au bénéfice de leurs précédentes écritures.

La procédure a été clôturée le 17 octobre 1989.

Sur les moyens tirés de l'appel

1°) Sur le moyen tiré de l'art. 33 du décret du 30 septembre 1953 n'est pas applicable en l'espèce

Attendu qu'en matière de révision des loyers stipulés dans le contexte de location-gérance, l'art. 13 § 2 de la loi du 20 mars 1956 stipule qu'à défaut d'accord amiable, l'instance est introduite et jugée conformément aux dispositions prévues en matière de révision du prix des baux à loyer des immeubles ou locaux à usage commercial ou industriel.

Attendu que contrairement à ce que soutient la SARL Clinique Lampre, la procédure de révision obéit ainsi aux dispositions du décret du 30 septembre 1953 et notamment aux dispositions dudit décret, qui prévoient dans l'art. 33 le délai de prescription ;

Que ce moyen n'est pas fondé ;

2°) Sur les moyens tirés de ce que l'assignation délivrée le 23 février 1985 vaut réitération de la demande de révision du 14 avril 1984 et de toute façon n'intéresse que la prescription.

Mais attendu que la demande de révision a été introduite par la SARL Lampre à l'encontre des époux Lampre conformément aux dispositions prévues par l'art. 13 § 1 de la loi du 20 mars 1956 par lettre recommandée du 17 avril 1984 avec demande d'avis de réception ;

Que par la suite, la SARL Lampre a assigné les époux Lampre devant le juge des référés en désignation d'expert le 23 février 1985 ;

Que les époux Lampre ayant conclu à l'irrecevabilité de cet acte, faute de dépôt du mémoire préalable, la SARL Lampre a fait radier cette procédure ;

Attendu que la SARL Lampre soutient donc vainement que le juge des baux commerciaux était saisi par cette assignation ; que le moyen tiré de la réitération de la demande en révision n'est pas fondé ;

Attendu qu'il convient de rechercher en conséquence si l'exploit du 23 février 1985 est interruptif de la prescription ;

Attendu que la SARL Lampre se réfère aux dispositions de l'art. 2244 du code civil, aux termes duquel une citation en justice même en référé interrompt la prescription ;

Mais attendu que ce texte de procédure est entré en vigueur le 1er janvier 1986 ;

Que jusqu'à cette date, de jurisprudence une assignation en référé n'était pas interruptive de prescription ;

Qu'en déposant ainsi seulement à la date du 24 décembre 1986 son mémoire, la SARL Lampre a laissé passer le délai de prescription de son acte introduit le 14 avril 1984 ;

Que par ces motifs, l'ordonnance entreprise sera confirmée ;

Qu'il convient d'allouer aux époux Lampre au titre des frais irrépétibles qu'il n'est pas équitable de laisser à leur charge la somme de 3.000 F qu'ils sollicitent ;

Que les dépens de l'appel seront à la charge de la SARL La Clinique Lampre.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, Reçoit en la forme l'appel principal et incident des parties, Confirme l'ordonnance entreprise, Condamne la SARL d'exploitation Clinique Lampre à payer aux époux Lampre 3.000 F sur le fondement de l'art. 700 du nouveau code de procédure civile, La condamne aux dépens d'appel, Autorise, conformément aux dispositions de l'art. 699 du nouveau code de procédure civile, la SCP Piault-Lacrampe Carraze avoués associés, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision.