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Décisions

Cass. 3e civ., 27 mars 2002, n° 00-20.732

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Trévisan

Défendeur :

Basquet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Rapporteur :

M. Betoulle

Avocat général :

M. Cédras

Avocats :

SCP Vier, Barthélémy, SCP Baraduc, Duhamel

TGI Agen, du 21 janv. 1999

21 janvier 1999

LA COUR : - Sur le premier moyen : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 12 juillet 2000), que les consorts Trévisan, propriétaires de locaux à usage commercial donnés à bail à la société Climatex, ont renouvelé le contrat de location le 19 août 1979 au profit de la société Confort Service qui, le 16 septembre 1986, a souscrit un contrat de franchise avec la société Conforama ; que le 29 mai 1987, les consorts Trévisan ont notifié à la société Confort service, aux droits de laquelle viennent désormais les époux Basquet, un congé avec refus de renouvellement et offre d'une indemnité d'éviction ; que les locataires ont assigné leur bailleur pour avoir paiement de l'indemnité d'éviction ;

Attendu que les consorts Trévisan font grief à l'arrêt de rejeter l'exception tirée de la péremption d'instance, alors, selon le moyen, que la constitution d'avocat par le demandeur à l'instance n'est soumise à aucune forme particulière ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a expressément constaté qu'un avocat, M. Gonelle, avait, après le décès du conseil des époux Basquet, continué d'assister ces derniers au cours des opérations d'expertise, c'est-à-dire qu'il avait eu des relations suivies avec les avocats des parties adverses, avec l'expert, avec le juge de la mise en état, devait en déduire que M. Gonelle s'était substitué à l'avocat décédé aux yeux des autres parties et de la juridiction saisie, ce d'autant plus qu'au décès de son prédécesseur aucun suppléant n'avait été désigné ; qu'en omettant de tirer les conséquences de ses propres constatations, la cour d'appel a violé les articles 751 et 814 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé, à bon droit, que l'interruption d'instance, causée par le décès de l'avocat des époux Basquet, n'avait cessé que lorsque l'instance avait été reprise, ce qui ne pouvait être fait que par une constitution d'avocat, ou des conclusions contenant constitution d'avocat, notifiées à l'autre partie et remises au greffe de la juridiction, la cour d'appel en a exactement déduit que seules les conclusions de reprise d'instance notifiées à l'adversaire et déposées au greffe du tribunal au mois de juillet 1996 avaient été de nature à faire courir un nouveau délai de péremption de deux ans, de sorte que le moyen d'irrecevabilité soulevé par les consorts Trévisan ne pouvait prospérer ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que les consorts Trévisan font grief à l'arrêt de faire droit à la demande d'indemnité d'éviction des époux Basquet, alors, selon le moyen : 1°) que, pour qu'un locataire franchisé ait un fonds de commerce en propre, il faut qu'il justifie soit qu'il a une clientèle liée à son activité personnelle indépendamment de son attrait en raison de la marque du franchiseur, soit que l'élément du fonds qu'il apporte, le droit au bail, attire la clientèle de manière telle qu'il prévaut sur la marque ; qu'en se bornant à retenir de manière générale que la société franchisée, aux droits de laquelle viennent aujourd'hui les époux Basquet, disposait sur les éléments constitutifs de son fonds de l'"abusus", ce même si l'intuitu personae nécessaire à l'exécution du contrat de franchise avait conduit les parties à stipuler au profit du franchiseur un droit d'agrément ou de péremption en cas de cession de capitaux de nature à modifier le poids des associés sans rechercher ni apprécier en quoi le franchisé avait une clientèle liée à son activité personnelle, indépendamment de son attrait en raison de la marque du franchiseur, ou en quoi l'élément du fonds qu'il avait apporté, le droit au bail, attirait la clientèle de manière telle qu'il prévalait sur la marque, la cour d'appel a violé l'article 1er du décret du 30 septembre 1953 ; 2°) que si les parties ont la faculté de soumettre leurs rapports au statut des baux commerciaux même si le bail ne présente pas de caractère, encore faut-il que cette volonté soit clairement exprimée ; qu'en retenant, pour considérer que les époux Basquet pouvaient réclamer le paiement d'une indemnité d'éviction, que les bailleurs savaient lorsqu'ils ont délivré le congé avec offre de payer une indemnité d'éviction le 29 mai 1987 que la société locataire qui exploitait son fonds à l'enseigne Conforama était liée par un contrat de franchise souscrit au mois de septembre 1986, qu'ils ont, nonobstant ce changement dans la situation de leur locataire, continué de reconnaître à celui-ci le bénéfice du statut du décret du 30 septembre 1953 auquel s'étaient référés tous les actes antérieurs et renouvellement du bail et qu'un accord s'est par conséquent formé entre les parties, sans caractériser de manière précise et détaillée la volonté non équivoque des consorts Trévisan de soumettre le bail litigieux au statut des baux commerciaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du décret du 30 septembre 1953 ;

Mais attendu qu'ayant relevé, à bon droit, d'une part, que si une clientèle est au plan national attachée à la notoriété de la marque du franchiseur, la clientèle locale n'existe que par le fait des moyens mis en œuvre par le franchisé, parmi lesquels les éléments corporels de son fonds de commerce, matériel et stock, et l'élément incorporel que constitue le bail,que cette clientèle fait elle-même partie du fonds de commerce du franchisé puisque, même si celui-ci n'est pas le propriétaire de la marque et de l'enseigne mises à sa disposition pendant l'exécution du contrat de franchise, elle est créée par son activité, avec des moyens que, contractant à titre personnel avec ses fournisseurs ou prêteurs de deniers, il met en œuvre à ses risques et périls,d'autre part, que le franchiseur reconnaissait aux époux Basquet le droit de disposer des éléments constitutifs de leur fonds, la cour d'appel en a déduit exactement que les preneurs étaient en droit de réclamer le paiement d'une indemnité d'éviction et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le troisième moyen : - Attendu que la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef en retenant, sans dénaturation, que les époux Basquet pouvaient prétendre au remboursement des travaux d'agrandissement nécessaires au remplacement des locaux de stockage perdus, chiffrés par l'expert avec l'aide d'un sapiteur à 1 473 000 francs, et au remboursement des frais de déménagement qui se sont élevés à 106 140 francs selon le devis auquel se réfère l'expert ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.