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Décisions

CA Aix-en-Provence, 8e ch. com., 15 mai 2001, n° 00-17907

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Groupe Volkswagen France (SA)

Défendeur :

BBA (Sté), Rafoni (ès qual.), Aillaud (Epoux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Blin

Conseillers :

MM. Duloutre, Marcovici

Avocats :

Me Bricogne, SCP Courtois, Roman.

T. com. Salon-de-Provence, 22 sept. 2000

22 septembre 2000

PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Par une assignation du 8 février 1999, la société BBA, Monsieur Claude Aillaud et Madame Solange Sarpédon ont fait citer le Groupe Volkswagen France pour entendre juger cette société responsable de l'ouverture de la procédure collective de la société BBA et de son échec, pour obtenir sa condamnation au paiement du passif de cette société entre les mains du représentant des créanciers outre 500.000 F au titre de dommages et intérêts et subsidiairement l'entendre condamner à payer à Monsieur Aillaud la somme de 6.000.000 F en sa qualité de caution et la somme de 2.000.000 F à Madame Sarpédon.

Par conclusions postérieures, Me Rafoni est intervenu en sa qualité de mandataire liquidateur de la société BBA, mise en liquidation judiciaire par un jugement du Tribunal de Commerce de Salon de Provence du 5 mars 1999 et a repris l'action engagée par cette société.

La société Volkswagen France a soulevé l'incompétence du Tribunal de Commerce de Salon de Provence au profit du Tribunal de Grande Instance de Paris en l'état d'une clause attributive de compétence existant dans le contrat de concession.

Le Tribunal de Commerce de Salon de Provence, par un jugement en date du 22 septembre 2000, s'est déclaré compétent au motif que le litige n'était pas fondé sur l'interprétation du contrat mais sur la nature commerciale des relations existant entre les parties, toutes les deux ayant la qualité de commerçants.

La société Volkswagen France a régulièrement formé un contredit à l'encontre - de cette décision en exposant que le contrat de concession liant les parties prévoyait la compétence du Tribunal de Grande Instance de Paris, que le litige se rattache à l'exécution du contrat et qu'il importe peu que pendant la durée de la procédure la société BBA ait été mise en redressement judiciaire et que Monsieur Aillaud et Madame Sarpédon présentent des demandes à titre subsidiaire.

Elle demande à la cour de dire que le Tribunal de Commerce de Salon de Provence n'est pas compétent, de renvoyer l'affaire devant le Tribunal de Grande Instance de Paris et de condamner les intimés à lui payer la somme de 10.000 F en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Monsieur Claude Aillaud, Madame Solange Sarpédon et Me Rafoni en sa qualité de liquidateur de la société BBA concluent à la confirmation de la décision déférée par adoption des motifs des premiers juges.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que la société Groupe Volkswagen France, importateur exclusif en France des véhicules de manque Seat a signé le 1er octobre 1996 un contrat de concession avec la société BBA, devenue concessionnaire de cette marque dans la région de Salon de Provence ;

Attendu que ce contrat portait une clause attributive de compétence aux termes de laquelle il était " attribué compétence exclusive au Tribunal de Grande Instance de Paris pour tout litige et action concernant l'interprétation, la validité ou l'exécution du présent contrat de concession et ses suites, et ce également en cas d'appel en garantie " ;

Attendu que cette clause, qui figure de façon apparente au-dessus de la signature des parties, est valable dès lors que les contractants sont commerçants et peuvent en vertu des dispositions de l'article 48 du nouveau code de procédure civile déroger aux règles de compétence territoriale;

Attendu que d'autre part, les parties, même commerçantes ont la possibilité de choisir le Tribunal de Grande Instance, juridiction de droit commun si le litige ne relève pas de la compétente exclusive d'une juridiction d'exception, en l'espèce du Tribunal de Commerce;

Attendu qu'enfin elle est applicable alors que le litige qui oppose les parties a pour origine le contrat de concession en vertu duquel les relations commerciales se sont instaurées entre les parties et qu'il se place dans le cadre de l'exécution de ce contrat, étant précisé qu'il importe peu que Monsieur Claude Aillaud et Madame Solange Sarpédon ne soient pas signataires du contrat de concession dès lors qu'ils agissent dans le cadre des relations contractuelles liant la société Volkswagen France et la société BBA et à titre uniquement subsidiaire ;

Attendu qu'en effet, dans son assignation, les demandeurs sollicitent la condamnation de la société Volkswagen au paiement de dommages et intérêts d'un montant égal au passif en raison de l'attitude de cette société " du fait de la violation des règlements européens, des dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et des violations des règles contractuelles " ;

Attendu que le fait que les demandeurs aient invoqué la nullité du contrat en préambule dans l'assignation en précisant que les parties étaient régies par le règlement des Communautés européennes est sans incidence dès lors qu'elles n'en tirent aucune conséquence et qu'elles précisent le paragraphe suivant que leur action en responsabilité est fondée à la fois sur les dispositions de l'article 1382 du code civil et sur les relations contractuelles ; qu'il convient en outre de remarquer que dès lors qu'ils font référence à une faute commise dans le cadre de l'exécution du contrat liant les parties, les demandeurs ne peuvent invoquer la responsabilité quasi-délictuelle de la société Volkswagen France ;

Attendu qu'enfin l'action qui a pour but de faire reconnaître l'existence d'une faute de la société Volkswagen France ayant entraîné la déconfiture de la société BBA repose sur des faits antérieurs à l'ouverture de la procédure collective et étrangers à cette procédure et ne peut relever de la juridiction compétente pour connaître de cette procédure;

Attendu que le jugement entrepris doit en conséquence être réformé et l'affaire renvoyée devant le Tribunal de Grande Instance de Paris;

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société Groupe Volkswagen France le montant des frais irrépétibles qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance ;

Attendu que Me Rafoni en sa qualité de liquidateur de la société BBA, Monsieur Claude Aillaud et Madame Solange Sarpédon, qui succombent, doivent supporter les dépens du contredit conformément aux dispositions de l'article 88 du nouveau code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, par un arrêt contradictoire, Réforme le jugement entrepris ; Statuant à nouveau, Dit que le Tribunal de Commerce de Salon de Provence est incompétent et renvoie l'affaire devant le Tribunal de Grande Instance de Paris conformément aux dispositions de l'article 97 du nouveau code de procédure civile ; Déboute la société Groupe Volkswagen France de sa demande en paiement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; Dit que les dépens du contredit seront supportés par Me Rafoni en sa qualité de liquidateur de la société BBA, Monsieur Claude Aillaud et Madame Solange Sarpedon.