Cass. 1re civ., 2 décembre 1997, n° 95-15.015
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Brasseur
Défendeur :
Société Française des jeux
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Renard-Payen
Avocat général :
M. Sainte-Rose
Avocats :
Me Guinard, SCP Monod.
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 février 1995), que la société Française des Jeux (la société) a conclu le 14 mai 1988, un contrat dit de " courtier-mandataire " avec M. Brasseur ; qu'aux termes de cet accord, le cocontractant devait diffuser les jeux auprès de certains détaillants, moyennant une commission proportionnelle au montant des enjeux enregistrés par les détaillants et de leur chiffre d'affaires sur la vente des produits loteries ; qu'il était précisé que le contrat était à durée indéterminée et devait cesser de plein droit au 66e anniversaire de M. Brasseur ; qu'après avoir informé ce dernier que l'évolution de sa politique commerciale la conduisait à mettre fin à ce contrat, la société a confirmé cette rupture par lettre du 3 juin 1992, avec effet au 4 septembre 1992 ;
Attendu que l'arrêt attaqué, a jugé qu'il s'agissait d'un contrat d'intérêt commun à durée indéterminée dont la rupture ne reposait pas sur un motif légitime et alloué à M. Brasseur une indemnité de 4 029 000 F, sous déduction d'une somme de 1 155 003 F déjà versée ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal pris en ses 2 branches : (sans intérêt) ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident : - Attendu que la société Française des Jeux fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer des dommages-intérêts à M. Brasseur alors que la circonstance que la rémunération du mandataire soit proportionnelle au chiffre d'affaires réalisé par le mandant ne suffit pas à caractériser le mandat d'intérêt commun ; que le courtier mandataire n'a pas de fonds de commerce et ne fait que rapprocher la Française des Jeux des détaillants potentiels et répercuter ses instructions auprès des détaillants existants, lesquels ne sont eux-mêmes que des intermédiaires entre la Française des Jeux et le public ; que le rôle des courtiers mandataires n'est donc pas de créer ou développer une clientèle commune, mais seulement de développer et de surveiller le réseau de détaillants qui commercialisent les produits de la Française des Jeux ; qu'en décidant cependant que le mandat était d'intérêt commun, la cour d'appel, qui a relevé que M. Brasseur avait pour mission de diffuser les jeux auprès des détaillants, a violé l'article 2004 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a infirmé le jugement de première instance que sur le montant des réparations, a, par motifs adoptés, relevé que M. Brasseur disposait d'une clientèle constituée par le réseau de détaillants qu'il était chargé de prospecter et qu'au vu des pièces produites, le courtier mandataire comme le mandant avaient un intérêt commun à l'essor de l'entreprise par le développement de la clientèle existante et la création d'une clientèle nouvelle; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi principal et le pourvoi incident.