Cass. com., 16 octobre 2001, n° 99-11.932
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Rifobois (SARL)
Défendeur :
Belipa (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
Mme Tric
Avocat général :
M. Jobard
Avocats :
Me Le Prado, SCP Boré, Xavier, Boré.
LA COUR : - Sur les deux moyens réunis, pris en leurs diverses branches : - Attendu, selon l'arrêt déféré (Bordeaux, 24 novembre 1998), que la société Rifobois, agent commercial de la société Belipa depuis 1991, ayant été mise en demeure par celle-ci, par lettre du 4 janvier 1996, de cesser toute activité pour son compte, le contrat qui les liait étant rompu en raison de sa faute grave, l'a assignée en paiement des indemnités de rupture ; que la société Belipa a formé une demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que la société Rifobois reproche à l'arrêt d'avoir dit qu'elle avait commis une faute dans l'exécution de son mandat d'agent commercial, la condamnant à payer la somme de 100 000 francs à son mandant, et la privant de son indemnité de fin de contrat, alors, selon le moyen : 1°) que la société Belipa n'a reproché à la société Rifobois que d'avoir méconnu l'antériorité dont elle aurait bénéficié dans la commercialisation des parquets mélaminés et, dès lors, exécuté des actes de concurrence déloyale à son égard; que la cour d'appel, qui a constaté que le grief allégué n'était pas établi, a, en prononçant condamnation du mandataire pour un défaut d'information très postérieur du mandant, dénaturé les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ; 2°) que l'agent commercial peut représenter en toute liberté des produits non concurrents de ceux de son mandant ; qu'en reprochant à la société Rifobois d'avoir commis une faute pour n'avoir pas informé de la nature de ses autres activités la mandante, en l'état de simples projets de celle-ci et d'une future et possible commercialisation de certains produits qu'elle envisageait, la cour d'appel a violé les articles 3 et 4 de la loi du 25 juin 1991 et 1er et 3-1 du décret du 23 décembre 1958 modifié par le décret du 10 juin 1992 ; 3°) que dans des conclusions demeurées sans réponse, la société Rifobois avait fait valoir que le mandant qui modifie ou étend son activité à des produits jusque là fournis au mandataire par un autre mandant ne peut se prévaloir de la similitude de ces produits pour justifier la rupture du contrat conclu avec son mandataire ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 4°) que la faute privatrice de l'indemnité compensatrice due en réparation du préjudice subi s'entend d'une faute consistant en un manquement caractérisé d'une obligation essentielle découlant du contrat de mandat en cours d'exécution et rendant impossible la continuation de ce contrat ; que la cour d'appel qui n'a pas caractérisé en quoi les manquements reprochés à la société Rifobois présentaient le caractère de gravité requis, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 12 et 13 de la loi du 25 juin 1991 ; 5°) que dans des conclusions d'appel, la société Rifobois avait fait valoir que la société Belipa était parfaitement au courant de la situation que ses projets avaient créée puisqu'elle s'était efforcée pendant plusieurs mois de faire renoncer la société mandataire à commercialiser les produits qu'elle envisageait d'adjoindre à sa propre collection ; que le 7 juillet 1995 -soit avant la réunion prévue pour le 18 juillet suivant- la société Belipa le confirmait d'ailleurs par écrit et déclarait même à M. Riffault, gérant de la société Rifobois, qui souhaitait s'abstenir d'assister plus longtemps, au jour dit, à cette réunion, qu'il pouvait rester" ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas répondu à ces conclusions, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que,sans modifier l'objet du litige et en écartant ainsi les conclusions prétendument délaissées, l'arrêt, qui énonce que le manquement au devoir de loyauté constitue une faute grave, exclusive du versement de l'indemnité de résiliation et de l'indemnité de préavis, relève que, si la société Rifobois est entrée en relation avec les sociétés KTA et EPI avant la société Belipa et ne peut encourir le grief de concurrence déloyale, elle a assisté à deux réunions d'information des 6 octobre 1994 et 18 juillet 1995 organisées par la société Belipa pour informer les différents "commerciaux" intervenant pour son compte qu'elle allait commercialiser des parquets mélaminés; qu'il retient qu'il lui appartenait, dès qu'elle a eu connaissance de cette future commercialisation, d'informer son mandant de ce qu'elle représentait des produits concurrents, quel que soit leur fabricant, et qu'elle a ainsi commis une faute non seulement en omettant de porter ce fait à la connaissance de son mandant, mais aussi en assistant aux réunions au cours desquelles ce dernier mettait au point la stratégie pour la vente de ce produit ; qu'en l'état de ces énonciations et constatations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.