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Décisions

CA Paris, 14e ch. A, 21 janvier 1998, n° 97-14052

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Dionnet (Époux)

Défendeur :

Elf Antar France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Marais

Conseillers :

M. Charoy, Mme Magueur

Avoués :

SCP Roblin-Chaix-Lavarene, SCP Varin-Petit

Avocats :

Mes Leger, Lardin.

T. com. Paris, prés., du 9 juin 1997

9 juin 1997

Par ordonnance de référé du 9 juin 1997, le Président du Tribunal de Commerce de Paris a :

- ordonné l'expulsion dans la quinzaine de la signification de l'ordonnance, de Monsieur et Madame Dionnet et de tous occupants de leur chef de la station-service située à Fort de France (Martinique), Pont de Chaînes

- condamné Monsieur et Madame Dionnet à payer à la Société Elf-Antar la somme de 5 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Clément et Monique Dionnet ont interjeté appel de cette ordonnance. A l'appui de leur recours, ils soutiennent qu'ils n'ont pas reçu dans le délai prévu au contrat de location-gérance, la lettre de dénonciation de cet acte et que le contrat s'est renouvelé pour une nouvelle période de 3 ans. Ils concluent donc à l'infirmation de l'ordonnance entreprise. Ils demandent de constater que la Société Elf-Antar a commis une voie de fait en cessant la livraison des produits pétroliers et de la condamner sous astreinte à reprendre les livraisons. Ils sollicitent l'allocation d'une indemnité de 15 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Répliquant que les textes invoqués par les époux Dionnet ne sont applicables qu'aux seuls actes de procédure, que la notification de la réalisation du contrat de location-gérance s'inscrit dans un cadre conventionnel et que le salarié qui a signé l'accusé de réception était habilité à le faire, la Société Elf-Antar conclut à la confirmation de l'ordonnance entreprise. Subsidiairement, elle répond que le juge n'a pas le pouvoir de décider que le contrat s'est renouvelé pour 3 ans et que la demande de reprise des livraisons est irrecevable, les époux Dionnet ayant libéré les lieux loués. Elle sollicite l'allocation d'une indemnité de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Sur quoi, LA COUR :

Considérant que la Société Elf-Antar, propriétaire d'un fonds de commerce de station-service situé à Fort de France, en a confié la location-gérance à Monique et Clément Dionnet, suivant contrat du 17 mai 1994 ;

Que par lettre recommandée avec avis de réception du 7 février 1997, la Société Elf-Antar a notifié aux époux Dionnet sa décision de ne pas renouveler le contrat à l'expiration de la période triennale, par application de l'article 3-6-1 du contrat de location-gérance ;

Que par actes d'huissier des 30 avril et 2 mai 1997, elle a notifié aux époux Dionnet une copie de la lettre de dénonciation du 7 février 1997 et l'accusé de réception de ce courrier ;

Que les époux Dionnet ont répondu à l'huissier instrumentaire qu'ils ne connaissaient pas le courrier du 7 février 1997 et qu'ils refusaient de quitter les lieux, à la date indiquée dans cette lettre ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-6-1 du contrat de location-gérance du 17 mai 1994, celle-ci est consentie pour une durée de 3 ans à compter de la date de signature de l'acte ; que le contrat se renouvellera par tacite reconduction pour une durée de 3 ans, sauf dénonciation par l'une des parties par lettre recommandée avec accusé de réception reçue par l'autre partie, plus de 3 mois avant la date d'échéance ;

Considérant qu'invoquant les dispositions de l'article 670 du Nouveau code de procédure civile, les appelants observent qu'ils n'ont pas signé l'avis de réception de la lettre de dénonciation du contrat;

Maisconsidérant que ce texte ne s'applique qu'à la notification des actes de procédure ;

Que la dénonciation du contrat conclu entre la Société Elf-Antar et les époux Dionnet, qui s'inscrit dans un cadre conventionnel, n'est pas un acte de procédure;

Considérant que les époux Dionnet soutiennent ensuite, que le Code des Postes et Télécommunications impose au préposé porteur d'une lettre recommandée avec avis de réception de ne la remettre qu'à son destinataire ou son fondé de pouvoir, et qu'il n'est pas démontré que le signataire de l'avis de réception, Monsieur Lothaire, avait reçu pouvoir de recevoir les plus recommandés ; qu'ils produisent un courrier du chef d'établissement de la Poste de Fort de France déclarant qu'aucune procuration n'avait été enregistrée à leur nom ;

Mais considérant que l'article L9 du code des Postes et Télécommunications visé par les époux Dionnet a trait à la responsabilité de l'exploitant public, qui n'est pas en l'espèce mises en cause ;

Considérant, en outre, qu'il résulte des éléments versés aux débats que la lettre de dénonciation a été reçue par un salarié des époux Dionnet qui apposait régulièrement sur les documents commerciaux relatifs à l'exploitation de la station-service, tels les factures de livraison ou rapports d'intervention ;

Que dès lors la Société Elf-Antar pouvait à l'évidence, en déduire que ce salarié était habilité à recevoir le pli querellé ;

Considérant que la dénonciation du contrat de location-gérance ne se heurte donc à aucune contestation sérieuse ;

Considérant que le contrat ayant cessé de produire ses effets le 17 mai 1997, l'interruption de la livraison des produits pétroliers par la Société Elf-Antar n'est pas constitutive d'un trouble manifestement illicite ;

Que l'ordonnance entreprise sera donc confirmée dans toutes ses dispositions ;

Considérant que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR statuant contradictoirement, confirme, en toutes ses dispositions, l'ordonnance entreprise, y ajoutant, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, condamne les époux Dionnet aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.