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Décisions

Cass. com., 24 mars 1998, n° 96-10.421

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Rosello

Défendeur :

Sodepap (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Gomez

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, SCP Lesourd.

T. com. Toulouse, du 10 mars 1994

10 mars 1994

LA COUR : - Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Toulouse, 9 novembre 1995), que M. Rosello est entré en relation avec la société Sodepap en vue de la conclusion d'un contrat de franchisage pour l'exploitation d'une boutique ; qu'après de nombreux échanges et la signature d'un bail commercial par M. Rosello qui entreprenait quelques travaux, la société Sodepap ne donnait pas suite à cette opération après l'échec de l'obtention du financement nécessaire ; que M. Rosello a assigné la société Sodepap en réparation de son préjudice ;

Sur le premier moyen : - Attendu que M. Rosello fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré partagée la responsabilité alors, selon le pourvoi, que la cour d'appel qui avait retenu le caractère brutal et unilatéral de la rupture de la convention formée entre le franchiseur, la société Sodepap et lui-même n'était pas en droit pour diminuer l'indemnisation du franchisé, de retenir sa légèreté blâmable sans rechercher, comme elle y était invitée par lui dans ses conclusions, si par ses exigences, à savoir la conclusion d'un contrat de bail préalable à la formation d'un contrat de franchise, l'aménagement des locaux par son architecte selon des normes précises et le contrôle financier de l'opération par son propre banquier, la société Sodepap qui était informée de ses capacités financières limitées n'avait pas été, par son comportement, la cause exclusive du préjudice subi, a, en statuant ainsi, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir retenu que M. Rosello a engagé d'importants travaux bien qu'il n'ait pas reçu de l'organisme financier l'aval qui devait finalement lui être refusé pour le financement de l'opération, qu'il a fourni, sans l'assistance d'aucun comptable, des données financières ayant conduit la société Sodepap à faire successivement deux plans de financement, et qu'il a poursuivi ses travaux bien qu'il n'avait pas encore reçu en retour et signé le contrat de franchisage, c'est sans avoir à procéder à de plus amples recherches que la cour d'appel a décidé, alors même que la société Sodepap pouvait se voir reprocher une rupture brutale du contrat, qu'il avait par sa légèreté fautive contribué à l'aggravation de son préjudice qu'il devait supporter; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen, pris en ses quatre branches : - Attendu que M. Rosello fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en réparation de son préjudice matériel alors, selon le pourvoi, d'une part, que conformément à l'article 1149 du Code civil, les dommages dus au créancier sont en général de la perte qu'il a faite, ce qui inclut, dans le cas de dettes à terme les sommes d'argent dues par le créancier de l'obligation inexécutée, celles-ci n'auraient-elles pas été encore acquittées ; que la cour d'appel qui, pour décider qu'il n'avait subi aucun préjudice matériel du fait de la rupture brutale du contrat de franchise imputable à la société Sodepap a relevé qu'il n'était pas établi qu'il avait payé les sommes constituant ce préjudice sommes dont elle constatait que le paiement en était réclamé a, en statuant ainsi, violé la disposition susvisée ; alors, d'autre part, que, dans des conclusions restées sans réponse, il faisait valoir qu'il avait subi un préjudice matériel comprenant, outre la somme de 780 000 F, celle de 252 480 F correspondant au montant des loyers impayés au paiement desquels il avait été condamné par ordonnance du tribunal de grande instance de Toulouse du 8 juillet 1992 ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions pour apprécier l'existence du préjudice matériel subi par lui, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, en outre, qu'il a produit aux débats l'ordonnance de référé du 8 juillet 1992 l'ayant condamné au paiement à la société Etoile Prony de loyers restés impayés et ayant constaté la résolution du contrat de bail commercial par l'effet de la clause résolutoire insérée au contrat de bail et que la cour d'appel ne pouvait, pour rejeter sa demande en réparation de son préjudice matériel, relever que celui-ci était resté propriétaire du bail commercial ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation des articles 4, 5, 7 et 12 du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 1134 du Code civil ; et alors, enfin, que, conformément à l'article 1149 du Code civil, les dommages-intérêts dus au créancier sont déterminés en considération du gain dont il a été privé ; que la cour d'appel qui a constaté le caractère unilatéral et brutal de la rupture du contrat formé entre la société Sodepap et lui mais qui n'a pas estimé devoir imposer à la société Sodepap la réparation du préjudice matériel subi par lui et constitué par le gain dont celui-ci avait été privé par la faute de la société Sodepap a, en statuant ainsi, violé la disposition susvisée ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt, après avoir constaté que M. Rosello, dans ses conclusions, réclamait la somme de sept cent quatre vingt mille francs, retient que, si l'appelant a fait allusion au montant des loyers qu'il avait été condamné à payer, il n'en a tiré, dans les mêmes écritures, aucune conséquence ; que dès lors, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à un simple argument ;

Attendu d'autre part, qu'après avoir retenu que M. Rosello n'apportait pas la preuve de l'existence de son préjudice, la cour d appel, qui n'a pas méconnu les termes du litige, dès lors qu'elle n'était pas saisie par les conclusions du moyen tiré de la résolution du contrat de bail commercial, a pu statuer ainsi qu'elle a fait ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.