Livv
Décisions

CA Agen, 1re ch., 6 avril 1998, n° 97000101

AGEN

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Boutin

Défendeur :

Belprodis (SARL), Leray (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Fourcheraud

Avoués :

SCP Tandonnet, Me Burg

Avocats :

Mes Peres, Michotte.

T. com. Marmande, du 17 déc. 1996

17 décembre 1996

David Boutin a fait appel dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées du jugement rendu le 17-12-1996 par le tribunal de commerce de Marmande, qui sur assignation de la SARL Belprodis, l'a condamné à payer à celle-ci : 3 693 F de factures impayées ; avec intérêts au taux de 18 %, 25 000 F de pénalité contractuelle et 10 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, a constaté la rupture par D. Boutin de la convention de fourniture exclusive de bière et l'a condamné à payer 25 000 F au titre de la contre valeur du matériel qu'il avait l'obligation de restituer ;

Il reproche à son adversaire les fautes qui sont à l'origine de la rupture du contrat et qui conduiront la Cour à infirmer le jugement : contrairement à la convention, la société Belprodis a refusé le renouvellement des verres cassés, elle a cessé de fournir un fût de bière gratuit pour cinq achetés, causant un grave préjudice économique ; elle a cessé d'entretenir l'installation de débit de boissons ; il était donc bien fondé à ne pas payer les deux factures, se trouvant lui-même créancier de 3 200 F de la société, et pouvant lui opposer l'exception d'inexécution ;

Il ajoute que le matériel de la société est à sa disposition et que si le contrat prévoyait une valeur de 25 000 F il prévoyait aussi un amortissement de 5 000 F par an, la contre valeur du matériel ne saurait être fixée ainsi que l'a fait le tribunal à la somme de 25 000 F ; il fait valoir enfin que la convention ne prévoyait pas un taux de 18 % d'intérêts mais de 5 % en plus du taux légal ;

En réformant le jugement la Cour dira que D. Boutin reste créancier de la SARL Belprodis de 1 200 F au titre de la caution versée par lui, de 2 000 F de dommages et intérêts pour inexécution du contrat ; qu'il n'est pas redevable des factures des 2 et 7-04-1996 sur le fondement de l'exception d'inexécution ;

A titre subsidiaire il fait observer qu'à défaut de mise en demeure avec accusé de réception la société ne peut obtenir de dommages et intérêts ou seulement au taux rappelé plus haut ; que l'amortissement prévu au contrat doit être appliqué à la valeur du matériel ;

Après la mise en redressement judiciaire de son adversaire, il produit sa créance au près du représentant des créanciers ;

Maître Leray mandataire liquidateur, liquidateur de la SARL Belprodis, demande la confirmation du jugement au motif que D. Boutin a violé le contrat d'exclusivité qui le liait à la SARL Belprodis et laissé sans suite la mise en demeure qui lui a été faite le 11-06-1996, et il demande 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Les deux parties s'accordent à indiquer que le jugement était entaché d'erreur en ce qu'il désignait D. Boutin comme non comparant alors qu'un avocat de la SCP d'avocats Peres Cosset était présent, et que la SARL était représentée par M. Deneumostier, son gérant ;

Motifs de la décision :

Les deux parties étaient liées par un contrat d'approvisionnement exclusif, la SARL Belprodis s'engageait à fournir de la " bièrbel " à D. Boutin qui s'engageait à ne pas débiter d'autre bière en fût, pour cinq ans ; la société mettait à la disposition du débitant une installation de distribution de bière sous pression, une enseigne, des verres pour une valeur annuelle de 1 000 F ; la résiliation était envisagée en cas de faute du détaillant " soit à titre exemplatif : violation de l'exclusivité, insuffisance d'achats, défaut d'entretien ou de propreté des matériels, non paiement d'une seule facture... " et en ce cas il serait redevable d'une indemnité forfaitaire de 25 000 F ; il était également prévu que toute somme due porterait intérêt au taux légal majoré de cinq points, dès l'envoi d'une mise en demeure ;

David Boutin invoque des manquements de la SARL à ses obligations, mais il n'en rapporte pas la preuve et surtout il n'a pas mis en demeure son cocontractant de respecter telle ou telle obligation ;

Au contraire la SARL a fait délivrer à D. Boutin une sommation interpellative le 11-06-1996 par huissier de justice lui rappelant ses obligations et lui reprochant de vendre une autre bière ; il n'a pas répondu à l'huissier mais a répondu par lettre du 23-06-1996 à la société qu'il avait été obligé de se tourner vers un autre fournisseur car la SARL Belprodis n'assurait pas l'entretien sanitaire de l'installation, ne lui avait pas fourni de verres et avait cessé de lui fournir un fût gratuit pour cinq achetés ; il écrivait que la société avait été la première à manquer à ses obligations ;

D. Boutin reconnaissait ainsi implicitement, mais nécessairement, qu'il avait manqué à son obligation de vendre exclusivement de la bière achetée à la société Belprodis et qu'il ne l'avait pas mise en demeure de respecter l'une ou l'autre de ses obligations, lorsqu'il avait relevé une infraction au contrat;

Le tribunal était donc bien fondé à prononcer la résolution du contrat aux torts de D. Boutin, par contre la clause pénale inscrite dans cette convention était trop sévère et doit être ramenée à 10 000 F; en ce qui concerne la reprise du matériel il peut être donné acte à D. Boutin de son offre de le rendre ; mais selon l'article 8/3 de la convention en cas de résiliation, si Belprodis renonce à la reprise du matériel le débitant sera immédiatement redevable de la valeur de celui-ci déduction faite de l'amortissement acquis, soit 25 000 F - 5 000 F selon l'article 4/6, l'amortissement étant de 5 000 F par an et la convention de mai 1995 pour une rupture en juin 1996 ;

Quant au taux d'intérêt l'appelant est bien fondé à rappeler que l'article 11/1 le fixe à la valeur de l'intérêt légal outre cinq points ; la sommation interpellative valant mise en demeure par lettre recommandée ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant contradictoirement, en dernier ressort et publiquement ; Reçoit l'appel de D. Boutin, Confirme le jugement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat liant les deux parties était imputable à D. Boutin ; Le confirme sur la condamnation au paiement des factures, mais avec des intérêts au taux légal plus 5 % à compter de la sommation interpellative du 11-06-1996 ; Réformant le jugement sur ces deux points, fixe à 20 000 F (vingt mille francs) la contre valeur du matériel d'exploitation, et à 10 000 F (dix mille francs) la pénalité contractuelle ; Condamne l'appelant à payer 3 000 F (trois mille francs) à l'intimé au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne l'appelant aux dépens et autorise Maître J.M Burg avoué, à les recouvrer, par application de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.