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Décisions

CA Paris, 4e ch. A, 18 novembre 1998, n° 1993-14339

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Brother France (SA)

Défendeur :

Mibro SPA (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Duvernier

Conseillers :

Mme Mandel, M. Lachacinski

Avoués :

SCP Teytaud, SCP Varin-Petit

Avocats :

Mes Conti, Jalenques.

T. com. Bobigny, 1re ch., du 1er avr. 19…

1 avril 1993

La société de droit japonais Brother Industries dont l'objet est notamment la fabrication et la vente de machines à coudre industrielles, désirant à compter de 1985 importer celles-ci en Italie, s'est vue contrainte par la réglementation douanière alors en vigueur dans ce pays de dédouaner au préalable ses produits dans un pays de la CEE et d'obtenir des licences d'importation.

Elle a, pour ce faire, utilisé deux filières de distribution indépendantes :

- la société de droit allemand Brother Emmerich qui vendait les machines à la société Matek Srl,

- la SA de droit français Brother France qui agissait de même avec l'entreprise de Francesco Tittoto.

La société Mibro Srl ayant repris l'activité de ce dernier, a, le 29 avril 1987, conclu avec la société Brother France un contrat aux termes duquel :

- la société française concédait à la société italienne l'exclusivité de la distribution en Italie des machines à coudre industrielles et autres produits industriels pour la couture, commercialisés par la société Brother France sous la marque Brother (articles I et III),

- la durée de la convention était fixée à trois ans, du 1er mai 1987 au 30 avril 1990 et renouvelable de plein droit à défaut de dénonciation préalable (article II),

- la société italienne s'engageait à communiquer à sa cocontractante "trois mois au moins à l'avance ses programmes d'approvisionnement de telle façon que les livraisons puissent être organisées et effectuées dans des délais et conditions normaux", le matériel devant être livré "départ des entrepôts de la société Brother France à Aulnay" (article IV),

- le matériel et les pièces devaient être facturés au distributeur sur la base d'un tarif annexé à la convention que la société Brother France se réservait de modifier tous les six mois "pour tenir compte de l'évolution des conditions économiques et des variations du cours du yen", sous réserve de porter cette modification à la connaissance du distributeur trois mois au moins avant son application (article V),

- la société Brother s'engageait à fournir au distributeur les documents, en langue française ou anglaise, concernant les matériels (article VII).

Par acte sous seing privé du 28 janvier 1988, intitulé "Transfert d'exclusivité", la société Brother France a accepté de "transférer l'exclusivité accordée jusque là à la société Titotto Francesco puis à la société Mibro SARL à la société Mibro Spa" (ci-après Mibro).

Ledit acte stipulait que :

- l'engagement prenait "vigueur à partir de ce jour et ce, pour une durée de deux ans, renouvelable par tacite reconduction sauf préavis par LRAR adressée par l'une des parties six mois avant cessation du présent accord",

- l'engagement pris par la société Brother France pour le territoire italien concernait les machines à coudre industrielles que cette société distribuait, "à savoir : tous les modèles de marque Brother",

- le tarif en yen, appliqué au distributeur, avait une validité de six mois, tous changements de prix devant être communiqués au distributeur un mois avant la date d'application effective,

- "étant donné la spécificité de l'Italie et l'obligation de disposer de licences (il n'était pas déterminé) pour le moment de quantité et de valeur d'achats".

Ultérieurement et conformément aux directives européennes sur la libéralisation des marchés, l'Etat italien décida qu'à partir de 1992 l'introduction sur son territoire de produits d'origine japonaise ne serait plus assujettie à l'obtention de licences d'importation.

Cette décision avait pour effet de rendre inutile le recours pour la société Brother Industries aux filières de distribution que constituaient les sociétés Brother Emmerich et Brother France.

Le 22 mai 1992, la société Mibro alléguant que :

- elle s'était vu imposer unilatéralement, au cours du second semestre 1991, le remplacement de son fournisseur, la société Brother France, auquel elle était liée par le contrat du 28 janvier 1988 jusqu'au 28 janvier 1994, par une société de droit italien Brother Macchine Industriali Srl (ci-après Brother Italie), constituée le 14 avril 1989 et filiale à 100 % de la société de droit japonais Brother Industries,

- au cours de la même période, la société Brother France avait abusivement dressé des obstacles à la livraison des produits puis s'était abstenue de toute importation pour la contraindre à accepter le changement susvisé,

- en dépit des négociations engagées, la société Brother Italie avait conclu un contrat avec la société Omac, de Padoue,

a assigné la société Brother France devant le tribunal de commerce de Bobigny à l'effet de voir, avec le bénéfice de l'exécution provisoire :

- juger que la rupture de la convention du 28 janvier 1988 était due à l'inexécution par la défenderesse de ses obligations contractuelles,

- condamner la société Brother France à lui verser la contre-valeur en F français au jour du jugement de trois milliards de lires, à titre de dommages et intérêts et la somme de 50.000 F en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- déclarer valable la compensation réalisée par elle entre les sommes réclamées par la société Brother France et celles dont la défenderesse lui est redevable au titre de l'inexécution du contrat de distribution exclusive.

Le 18 janvier 1993, la société Brother France a conclu à l'irrecevabilité ou au mal fondé de la demande et a poursuivi reconventionnellement la condamnation avec exécution provisoire de la société Mibro au paiement des sommes de :

- 2.341.289,60 F, montant de factures impayées,

- 100.000 F en réparation d'une procédure qualifiée d'abusive,

- 50.000 F pour ses frais hors dépens.

Par jugement du 1er avril 1993, le Tribunal relevant notamment d'une part que la société Mibro "était parfaitement fondée à refuser tout accord avec Brother Italie et à enjoindre à Brother France d'honorer ses obligations contractuelles" jusqu'au 28 janvier 1994, terme de la lettre avenant du 28 janvier 1988, d'autre part, que la défenderesse qui ne pouvait "faire état d'aucune défaillance de Mibro dans l'exécution de ses propres obligations et (était) parfaitement informée de l'état réel des négociations avec les filiales anglaise et italienne du Groupe Brother, au moment de sa décision de rupture, (ne pouvait) soutenir avoir agi de bonne foi", a :

- condamné la société Brother France à payer à la société Mibro les sommes de :

- 3 milliards de lires italiennes à titre de dommages et intérêts pour brusque rupture du contrat de concession exclusive, sous déduction de la contre-valeur en lires de 2.341.280,60 F selon le taux de référence de la Banque de France à la date du dernier jour ouvrable précédant le règlement,

- 35.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- rejeté toutes autres demandes,

- ordonné l'exécution provisoire de sa décision.

La société Brother France a interjeté appel de ce jugement le 25 mai 1993.

La requête présentée par elle à l'effet de voir suspendre l'exécution provisoire attachée à cette décision a été rejetée le 6 août 1993, étant cependant précisé qu'il a été enjoint à la société Mibro de constituer un cautionnement bancaire du montant de la condamnation prononcée.

Sur la demande de l'appelante formulée par conclusions du 21 février 1994, le conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 3 mai suivant, commis en qualité d'expert Marcel Angenault à l'effet de fournir à la Cour tous éléments d'appréciation du manque à gagner ayant pu être subi par la société Mibro du fait de la rupture du contrat de concession exclusive.

L'expert ainsi désigné a déposé son rapport le 29 septembre 1995.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives du 8 février 1997, la société Brother France poursuit la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a constaté qu'à la date du 1er janvier 1992, la société Mibro lui était redevable d'une somme de 2.341.280,60 F au titre du solde impayé de marchandises livrées en exécution du contrat de concession litigieux et son infirmation pour le surplus.

Alléguant que sa résolution de la convention susvisée était légitime au sens de l'article 1184 du Code civil, elle sollicite :

- la restitution, outre de la somme de 2.341.280,60 F susvisée, avec intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 1992 de la somme de 8.728.720 F consignée auprès de la Banca Populare di Ancona, soit en F français, soit en lires, au cours du change au jour du paiement, avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 1993,

- la condamnation de l'intimée à lui verser les sommes de :

- un million de F, en réparation du préjudice économique et commercial résultant des conséquences de la procédure engagée,

- 200.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société Mibro par écritures récapitulatives du 9 décembre 1997, conclut à la confirmation du jugement entrepris en son principe.

Elle demande en outre à la Cour :

- de fixer le préjudice résultant pour elle de la rupture abusive du contrat invoqué à la somme de 5.004.611.775 lires et de condamner l'appelante au paiement de celle-ci, majoré des intérêts au taux de 10 % annuel, en vigueur en Italie et d'un taux moyen annuel de 5,2 %, eu égard à la dévaluation monétaire qui s'est vérifiée entre-temps dans ce pays,

- de condamner la société Brother France à lui rembourser les coûts supportés par la garantie bancaire, soit 50.611.898 lires et les frais des consultations à elle fournies par des cabinets conseils soit 46.127.192 lires,

- de lui allouer une somme de 50.000 F pour ses frais non taxables.

Sur ce,

I - SUR LA DEMANDE PRINCIPALE

Sur sa recevabilité

Considérant que la société Brother France fait valoir que "la société Mibro s'est abstenue de toute loyauté à l'égard du tribunal de commerce non seulement par l'usage du mensonge judiciaire mais encore ne s'abstenant de révéler les éléments économiques et financiers déterminant la solution litige".

Qu'elle en déduit que la demande principale doit être déclarée irrecevable pour fraude au motif que celle-ci et la turpitude des parties forment obstacle à l'action, au regard des dispositions de l'article 31 du nouveau Code de procédure civile.

Mais considérant outre que le texte invoqué vise l'intérêt légitime des parties au succès ou au rejet d'une prétention et non la régularité de leur argumentation devant la juridiction saisie, qu'il convient de rappeler qu'en toute hypothèse, la fraude a pour sanction non pas l'irrecevabilité mais l'annulation laquelle, quant bien même elle entacherait la décision incriminée, autoriserait la Cour, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, à connaître du litige en son entier sans que soit a priori et de seul fait remise en cause la recevabilité de la demande.

Sur la rupture du contrat du 28 janvier 1988

Considérant que la société Mibro expose qu'elle a conclu le 28 janvier 1988 avec la société Brother France un contrat de distribution pour la vente en Italie de machines à coudre industrielles importées par cette société du Japon, lequel, "encore qu'improprement dénommé "Transfert d'exclusivité", constituait un contrat complet et totalement autonome qui régissait intégralement les rapports entre les parties et qui, à l'exception de la référence à l'exclusivité antérieurement consentie à Mibro Srl, ne se référait aucunement aux conditions du contrat conclu en 1987 entre Brother France et Mibro Srl".

Qu'elle ajoute que les rapports qui la liaient à la société Brother France se sont poursuivis sans interruption jusqu'à la seconde moitié de l'année 1991, et ont donné lieu, de sa part, à l'investissement "d'énormes ressources en termes de capitaux, de personnel et de moyens mis en œuvre".

Considérant qu'elle allègue qu'à compter du second semestre de l'année 1991, soit postérieurement à la décision des autorités italiennes de ne plus assujettir à partir de 1992 l'introduction des produits d'origine japonaise à l'obtention de licences d'importation, qui rendait inutile le recours à la double filière mise en place par le Groupe Brother, la société Brother France "sans le moindre préavis ni la moindre justification ... et bien que le contrat de distribution exclusive conclu avec Mibro le 28 janvier 1988 fût encore en vigueur, commença à dresser des obstacles relativement à la livraison à Mibro des produits Brother".

Qu'elle précise qu'une telle attitude avait pour but de la contraindre à s'approvisionner "à des conditions beaucoup moins favorables et commercialement inacceptables pour elle auprès d'une société de droit italien Brother Italie, constituée le 14 avril 1989 par le Groupe Brother et M. Mazzoni, propriétaire de la société Matek Srl, "à savoir la société concurrente de Mibro qui, afin de surmonter les limites de l'importation (précédemment) posées par les autorités italiennes, importait déjà en Italie les produits Brother de la Brother Allemagne", puis acquise à 100 % par le groupe Brother.

Qu'elle fait valoir que "toute tentative de trouver une solution non contentieuse à cette question ayant échoué, face à de nouveaux refus de la part de Brother France de lui livrer les produits commandés depuis plusieurs mois, ce qui avait provoqué des réactions fort négatives chez ses clients, (elle) se vit dans l'obligation d'entamer la présente action pour obtenir l'indemnisation des dommages subis".

Considérant que la société Brother France expose quant à elle que le Groupe Multinational Brother créa dans le cadre de sa politique de diversification territoriale différentes filiales dont elle-même et, en l'absence d'une telle entreprise sur le territoire italien, traita successivement avec la société Mibro Srl puis, après la liquidation amiable de celle-ci, avec la société intimée.

Qu'elle soutient que le Groupe fut confronté à "l'indispensable et légitime nécessité de la restructuration de la distribution des produits Brother sur le territoire italien" :

- pour des raisons d'ordre général et structural tenant au fait qu'il relevait "du bon sens économique qu'une filiale de groupe soit également créée sur le territoire italien à l'instar de ce qui se passait dans les différents pays européens",

- pour des raisons inhérentes à la société Mibro à laquelle il était reproché d'une part, une situation financière "proprement alarmante", susceptible de porter atteinte à l'image de marque des produits Brother, d'autre part, la violation de la clause de non-concurrence visée au contrat de distribution du 29 avril 1987, caractérisée par des approvisionnements illicites et des pourparlers avec le groupe Mitsubishi, "concurrent très direct et très influent des produits Brother".

Qu'elle ajoute que, "pour ces diverses raisons, Brother International Europe Ltd, située à Manchester, décidait d'engager avec Mibro Spa des discussions visant à la restructuration des relations commerciales des parties, ce qui devait passer :

- par la résiliation de la convention de distribution liant Brother France à Mibro Spa,

- et (par) l'instauration de nouveaux liens commerciaux entre la société Brother Italie, nouvellement créée et Mibro Spa".

Qu'elle fait valoir qu'il est incontestable qu'intervint alors un accord définitif (dénommé par elle "accord de Milan") "entre la société de droit anglais représentant le Groupe Brother et la société Brother Italie d'une part, et Mibro Spa d'autre part, sur une extinction des effets du contrat qui liait cette dernière à Brother France et sur un transfert contractuel au profit de Brother Italie dont la novation ainsi constatée autorisait Brother France à prier Mibro Spa de s'approvisionner désormais auprès de la filiale italienne du Groupe Brother".

Qu'elle précise qu'en dépit de cet accord, l'intimée lui notifia le 13 janvier 1992 la rupture du contrat de distribution du 28 janvier 1988 qui les liait mais "que ce soit au titre de l'application de l'accord de Milan ou à celui du maintien informel des relations nées entre Mibro Spa et Brother Italie, il est constant que tout le nécessaire a été fait pour permettre à Mibro Spa de satisfaire sa clientèle".

Qu'elle oppose ainsi à la demande l'existence et les effets d'un accord synallagmatique définitif dont elle serait "fondée à se prévaloir en application de l'article 1165 du Code civil, ledit accord ayant emporté extinction des effets du contrat d'exclusivité de distribution, par suite d'une novation au sens des articles 1271 et suivants du Code civil".

Qu'elle invoque subsidiairement la légitimité de la rupture du contrat de concession eu égard à la violation par l'intimée de la clause opposable à celle-ci, de non-concurrence contenue au contrat initial du 29 avril 1987 ou, à défaut, de l'obligation de non-concurrence résultant de l'article 1135 du Code civil.

Sur l'existence d'une novation

Considérant que, pour établir une novation au terme de laquelle la société Brother Italie se serait substituée à elle-même, en tant que nouveau débiteur d'un contrat de distribution et l'aurait ainsi déchargée de toute obligation à l'égard de l'intimée, la société appelante se fonde sur trois lettres qui, selon elle, justifieraient de la négociation de "l'accord de Milan" et dans lesquelles la société Mibro aurait "fait état sans aucune ambiguïté ni réserve du respect de (cet) accord".

Considérant que l'intimée réplique que le prétendu "accord de Milan" (qu'elle qualifie de "fantomatique") "a été uniquement la décision de Brother International Manchester, société différente de Brother France, de répartir le marché italien des machines à coudre dans les secteurs de la chaussure/maroquinerie d'une part et du textile d'autre part" entre la société Brother Italie et elle-même et qu'à défaut de son acceptation, cette décision n'est jamais devenue un contrat liant les parties.

Qu'elle fait observer que cet accord aurait été en toute hypothèse, négocié avec une société Brother Manchester - distincte de la société Brother France et n'aurait pas été opposable à celle-ci, "à défaut de son acceptation formelle ou ratification qui n'est, et pour cause, jamais intervenue".

Considérant, ceci exposé, que si l'article 1271 du Code civil dispose que la novation s'opère notamment lorsqu'un nouveau débiteur est substitué à l'ancien qui est déchargé par le créancier, l'article 1275 du Code civil précise que la délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige envers le créancier, n'opère point de novation si le créancier n'a expressément déclaré qu'il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation, l'article 1273 du Code civil ajoutant que la simple indication faite par le débiteur d'une personne qui doit payer à sa place n'opère point novation.

Considérant en l'espèce que la société Brother France fonde l'acceptation par la société Mibro de la substitution de débiteur sur :

- une lettre du 30 octobre 1991 de l'intimée à la société Brother Italie mentionnant :

" .. Je vous envoie la présente télécopie pour vous confirmer notre rendez-vous à 10 h le 31 octobre 1991 à vos bureaux à Casalecchio et je profite de l'occasion pour rappeler que Mibro Spa entend respecter les accords pris lors de la réunion de Milan ..."

- une lettre du 29 novembre 1991 de la même à la société Brother International Europe Ltd :

" ... Nous sommes très dubitatifs : les choses dites un jour sont changées le lendemain ; Nous souhaitons vous renouveler nos demandes .... ;

Considérez-vous encore valable l'accord de Milan ?

Nous l'espérons et souhaiterions que ce qui a été dit à Milan soit consigné par écrit en remplacement de l'actuel contrat qui nous lie à Brother France".

- une lettre du 5 décembre 1991 de la société Mibro à la société Brother Italie :

"Nous avons le sentiment que vous n'avez pas l'intention de respecter les accords de Milan".

Mais considérant, outre le fait qu'aucune preuve de l'existence et du contenu de l'accord invoqué n'est rapportée, l'appelante reconnaissant elle-même que "les parties ont éprouvé quelques difficultés à réitérer cet accord par voie écrite", qu'il convient de relever que la société Mibro a manifesté sans équivoque ni ambiguïté ses réserves puis son opposition au projet de répartition du marché qui lui était proposé :

- dans une lettre du 17 octobre 1991 à la société Brother France ainsi rédigée :

"Je vous envoie la présente télécopie à la suite de la réunion que nous avons eu hier avec Messieurs Tazaki et Mazzoni à Milan dans les bureaux de Brother ...

... Pour notre part, nous devons étudier rapidement les propositions reçues (dans le courant de ce mois) ....".

- dans une lettre non datée à la société Brother Italie :

"par la présente, nous tenons à vous rappeler encore une fois que les points essentiels sur lesquels nous pourrions établir un éventuel accord avec votre maison sont ceux qui nous ont été proposés par M. Tazaki et par M. Mazzoni, respectivement Président et administrateur délégué de la société Brother Macchine Industriali, lors de notre réunion de Milan à savoir :

a) partage du marché italien ..

b) conditions de prix et de paiement identiques à celles qui sont pratiquées par Brother France

c) restitution des machines ...

d) contrat à signer en remplacement du contrat français avec des termes précis de garantie en notre faveur.

Tous les autres points éventuellement à discuter doivent partir de ces données ; dans l'attente donc de propositions conformes avec ce qui a déjà été dit et non différentes d'une fois à l'autre, nous vous présentons nos salutations distinguées".

- dans une lettre du 9 janvier 1992 à la société Brother Italie :

" ... Nous estimons toute réunion inopportune, compte tenu de l'indisponibilité dont vous avez fait preuve jusqu'à ce jour et des variations incessantes des propositions que nous avons reçues, contraires aux promesses qui nous avaient été faites ...".

Considérant qu'il s'en déduit comme le fait valoir l'intimée que "la décision de Brother Manchester ne devint jamais un contrat obligeant les parties".

Considérant qu'il s'en déduit comme le fait valoir l'intimée que "la décision de Brother Manchester ne devint jamais un contrat obligeant les parties".

Que l'argumentation de la société Brother France relative à l'existence d'une novation sera en conséquence rejetée.

Sur la légitimité de la rupture du contrat de concession pour cause de violation d'une clause de non concurrence.

Sur la rupture fondée sur la violation d'une clause insérée à la convention du 29 avril 1987

Considérant que la société Brother France allègue que les obligations contenues dans la convention signée le 29 avril 1987 par la société Mibro Srl et elle-même ont été transférés à la société Mibro Spa (l'intimée) à l'occasion de la signature du contrat du 28 janvier 1988 au demeurant intitulé "transfert d'exclusivité" et que ce transfert impliquait nécessairement l'application de la clause de non concurrence, insérée à l'article IX de la convention du 29 avril 1987.

Que reprochant à la société Mibro d'avoir "ouvertement violé (ladite clause) en organisant dès l'année 1989 une totale diversité de ses approvisionnements", elle conclut que doit être déclarée légitime la résolution de la convention d'exclusivité de distribution sur le fondement de l'article 1184 du Code civil.

Mais considérant qu'il convient de lui objecter que la convention par elle conclue le 28 janvier 1988 avec la société Mibro ne se réfère au contrat du 29 avril 1987 qu'en ce qu'elle manifeste son intention de conférer à l'intimée l'exclusivité accordée précédemment à une autre société.

Qu'elle n'en reprend, pour le surplus, ni les termes ni les conditions notamment relatives à la durée et ne comporte, contrairement à la convention invoquée, ni procédure d'arbitrage ni clause résolutoire.

Qu'enfin et surtout elle ne mentionne aucune clause de non-concurrence, telle que figurant à l'article IX du contrat Brother France-Mibro Srl.

Qu'il en résulte que celui-ci, conclu avec une personne morale distincte de l'intimée et selon des modalités différentes, ne peut, par l'effet relatif attaché aux conventions, être invoqué à l'encontre de cette dernière.

Sur la rupture fondée sur la violation de l'article 1135 du Code civil

Considérant que la société Brother France fait valoir que tous les contrats de distribution commerciale "associent systématiquement à la clause d'exclusivité la clause de non-concurrence qui en constitue l'essence, la cause et le bon sens économique".

Qu'elle soutient que la société Mibro a manqué à son égard à cette obligation au motif que l'expertise ordonnée en cause d'appel, révèle que "le pourcentage dans le chiffre global de Mibro Spa des ventes des produits autres que Brother" est passé de 205 millions de lires pour l'année 1991, à 1.645 millions de lires pour 1992 et 1.221 millions de lires pour l'année 1993.

Mais considérant que si l'article 1135 du Code civil dispose que les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation selon sa nature, le seul fait que la société Mibro ait augmenté ses ventes d'autres produits et, par voie de conséquence, son chiffre d'affaires alors qu'elle ne s'était nullement engagée vis-à-vis de l'appelante à ne pas traiter de tels produits que rien, en l'état, ne permet au surplus de qualifier de concurrents des produits Brother et ce, sans que soit rapportée à son encontre la preuve d'agissements contraires à la loyauté ou aux usages du commerce, ne constitue pas une infraction au texte invoqué de nature à engager sa responsabilité.

Considérant ainsi, que le Tribunal a exactement retenu que la société Brother France, en refusant de vendre à l'intimée les matériels régulièrement commandés par celle-ci le 27 novembre précédent avait délibérément rompu le contrat de concession exclusive.

Sur le préjudice

Considérant que la société Mibro évalue la réparation du dommage résultant pour elle de la rupture du contrat qui l'unissait à la société Brother France à la somme de 5.004.611.775 lires.

Que l'appelante réplique que "s'il advenait que la Cour estime que Brother France a engagé sa responsabilité civile contractuelle à raison de la rupture fautive du contrat de concession, elle n'en débouterait pas moins Mibro Spa de ses demandes à raison de l'absence de démonstration d'un préjudice économique, commercial et financier".

Qu'elle conteste tant la régularité de l'exécution de la mesure d'instruction ordonnée en cause d'appel que l'analyse des faits et les conclusions de l'expert.

Sur l'exécution de l'expertise

Considérant que la société Brother France fait grief à l'expert d'avoir "violé ouvertement les articles 15, 16 et 276 du nouveau Code de procédure civile" en obligeant son conseil à répondre pour le 15 septembre 1995 à un pré-rapport adressé le 21 août précédent et en déclarant recevables les commentaires technique rédigés par l'expert-comptable de l'intimée mais irrecevables les siens.

Qu'elle ajoute que "la prétendue violation du principe de confidentialité de l'instruction" reprochée à son conseil et à son commissaire aux comptes constitue des dénonciations et insertions injurieuses qui doivent être retranchées des débats judiciaires en application de l'article 24 du nouveau Code de procédure civile.

Considérant, ceci exposé, que l'ordonnance du 3 mai 1994 donnait notamment pour mission à l'expert désigné de communiquer aux parties ses premières conclusions sous la forme d'un pré-rapport et de leur impartir un délai suffisant pour formuler leurs observations.

Or, considérant que l'expert note (chapitre IV, page 60) :

"Ce pré-rapport d'expertise a été transmis aux avocats conseils des parties le 18 août 1995 ...

... Ces parties étaient invitées à me faire connaître leurs observations pour le 15 septembre 1995 ...

La société appelante Brother France sollicite une extension du délai de réponse le 14 septembre 1995 ...

Avec mon autorisation et l'accord de la société Mibro, le dire de Brother France formulant ses observations est déposé le 20 septembre 1995".

Considérant qu'il en résulte que la société Brother France a disposé d'un délai supérieur à un mois pour répondre au pré-rapport et a pu d'autant mieux le faire qu'elle a alors versé au dossier d'expertise "un mémoire de 44 pages formulant 49 observations".

Considérant que si l'expert précise à ce propos qu'était joint à celui-ci "un nouveau rapport de 70 pages avec les annexes, établi le 18 septembre 1995 par un cabinet d'expertise comptable dénommé Européenne d'Audit et de Conseil EAC", il observe à juste titre que "ce cabinet n'a jamais été présent aux réunions d'expertises" est un tiers, s'étonne à juste titre que "l'avocat-conseil de Brother France se soit ainsi affranchi du principe de confidentialité de l'instruction en diffusant son pré-rapport d'expertise judiciaire à ce cabinet" et écarte à bon droit le rapport de ce dernier en observant "qu'en raison de son dépôt tardif, cette pièce ne (pouvait) pas être soumise au principe du contradictoire, c'est-à-dire à l'examen de Mibro Spa".

Qu'il convient d'observer, au demeurant que la société Mibro ayant versé en annexe à son dire du 15 septembre 1995 de nouvelles pièces justificatives comptables, celles-ci ont également été écartées et pour la même raison.

Que les prétentions de ce chef de la société Brother France seront donc rejetées.

Sur la demande en dommages et intérêts

Considérant qu'il convient d'apprécier le manque à gagner éventuellement subi par la société Mibro, du fait de la rupture du contrat de concession exclusive conclu le 28 janvier 1988 et résultant de la perte du chiffre d'affaires qu'elle aurait réalisé sur le territoire italien par l'importation et la commercialisation des produits Brother France.

Considérant que, pour déterminer l'étendue de la période à prendre en compte et l'importance du préjudice, la société Brother France fait valoir qu'il convient :

- d'une part, d'examiner la période d'appréciation de l'éventuel préjudice revendiqué,

- d'autre part, "de savoir s'il échet de considérer l'année 1991 comme une année conventionnelle normale, dont les résultats doivent servir de comparaison, en suite de la rupture du contrat, consommée le 13 janvier 1992".

Considérant, sur le premier point, qu'elle soutient que le contrat ne précisait pas le délai des périodes renouvelées mais que le bail des produits Brother ayant une validité de six mois ce délai "est le nécessaire parallèle du délai de six mois pour mettre un terme à la convention dans l'hypothèse où de nouveaux tarifs n'auraient pas reçu l'approbation de Mibro Spa qui avait ainsi la faculté de se désengager du contrat pour motif d'augmentation non acceptée des prix de vente".

Qu'elle en déduit que "la période d'appréciation de l'éventuelle indemnisation requise par Mibro Spa ne saurait contractuellement dépasser une période de six mois".

Considérant, cependant que la convention du 28 janvier 1988 stipulait expressément :

"L'engagement prend vigueur à partir de ce jour et ce, pour une durée de deux ans, renouvelable par tacite reconduction sauf préavis par LRAR adressée par l'une des parties six mois avant cessation du présent arrêt".

Qu'il en résulte que la convention, en l'absence de preuve d'un préavis tel que susvisé, s'est poursuivie du 28 janvier 1988 au 28 janvier 1990, s'est tacitement renouvelée à cette date pour une durée égale à la durée initiale, en l'absence de toute disposition expresse contraire, puis à nouveau jusqu'au 28 janvier 1994, date retenue à juste titre comme échéance contractuelle par le Tribunal qui observe, au surplus, que "la société Brother France n'a pas contesté dans le débat (ce) terme".

Que la période à prendre en considération est donc de 25 mois et non de 6 mois.

Considérant, sur le second point, que la société Brother France fait grief à l'expert d'avoir, au motif qu'il s'efforçait dans son rapport "de dégager le profit d'exploitation normal que Mibro Spa était normalement et raisonnablement en droit d'attendre du contrat de concession", écarté l'année 1991, de la période de référence du résultat d'exploitation de l'intimée parce que présentant "des caractères d'anormalité en raison des tensions existant entre, d'une part, le Groupe Brother et d'autre part, Mibro Spa".

Qu'elle soutient que les causes de la baisse du résultat d'exploitation pour 1991 sont strictement indépendantes de la rupture du contrat.

Mais considérant que le rapport d'expertise établit que dès 1991, des difficultés sont effectivement apparues entre les cocontractants quant aux approvisionnements de la société Mibro Spa auprès de la société Brother France.

Qu'ainsi, ces approvisionnements ont été en 1991 d'un montant de 1.915.814.360 lires contre 2.788.562.151 lires en 1989, soit une réduction de plus de 31 %.

Que l'expert précise que, dès 1991, la société Mibro :

"sur le plan des approvisionnements, se trouve de facto coincée entre Brother France qui freine ses expéditions de produits concédés à Mibro Spa et entre Brother Italie qui accepte de les lui vendre plus cher.

Sur le plan commercial, se trouve handicapée dans les actions commerciales de ventes et de présence auprès de la clientèle par le départ de plusieurs grands responsables auprès de la concurrence (dont Antonio Gallo, directeur commercial qui, le 1er septembre 1991 quitte la société Mibro pour devenir conseiller du président de la société Brother Italie et entraîne plusieurs "commerciaux et techniciens").

Sur le plan financier, ne peut se préparer dès 1991 à un redéploiement d'activité plus réduite malgré l'existence de charges exceptionnelles".

Qu'il en résulte que l'expert a pertinemment retenu comme période triennale de référence du résultat d'exploitation (profit ou perte) 1988-1989-1990 et exclu l'année de "turbulences" 1991.

Considérant que le résultat d'exploitation cumulé des ventes et achats de produits Brother pour cette période triennale était bénéficiaire de 403.486.119 lires (soit une moyenne annuelle de 134.495.364 lires et mensuelle de 11.207.947 lires).

Que le rapport en déduit que la société Mibro était normalement et raisonnablement en droit d'attendre du contrat de concession passé avec la société Brother France :

. en 1991, un profit de 134.500.000 lires au lieu d'une perte d'exploitation de 157.000.000 lires

. en 1992, un profit de 134.500.000 lires

. en 1993, un profit de 134.500.000 lires

. en janvier 1994 (25ème mois), un profit de 11.200.000 lires.

Considérant que la société Mibro fait valoir que la rupture du contrat l'empêcha "d'amortir les énormes investissements effectués en vue de commercialiser les produits Brother", tenant tant au personnel, qu'à la publicité, aux études de développement aux coûts de stockage et autres qu'elle évalue à un montant global de 5.004.611.775 lires.

Considérant que l'expert lui oppose à juste titre que ne sont normalement couverts par la marge de concession que les frais de licenciement de personnel, les frais de sureffectifs, la dépréciation des produits livrés en Italie par la société Brother France et restant en stock fin 1991, 1992 ou 1993, ou réexpédiés par la clientèle italienne de l'intimée au motif que le service après-vente risquait de devenir aléatoire si la société Mibro s'effaçait devant la société Brother Italie.

Qu'au vu des différents éléments d'information et justificatifs produits, il a ainsi retenu :

- pour les frais de licenciement du personnel, une somme de 21.189.956 lires

- pour les frais de sureffectif ou coût du personnel excédentaire non immédiatement licencié, une somme de 386.150.000 lires

- pour les restitutions de matériel, une somme de 99.550.000 lires.

Considérant que, pour évaluer la perte du chiffre d'affaires qui aurait été réalisé sur le territoire italien avec les produits importés fournis par la société Brother France, du 1er janvier 1992 au 28 janvier 1994, l'expert après avoir noté, la "montée en puissance" des ventes des produits Brother en Italie (de 348.773.274 lires en 1987 à .384.111.394 lires en 1991), en déduit qu'il y avait "une quasi certitude pour que, toutes choses égales par ailleurs, les ventes aient été de 3.800.000 lires en 1992 et en 1993", mais qu'il lui a paru "prudent de traduire la crise qui sévissait dans la profession par une réduction des ventes prévisionnelles c'est-à-dire non réalisées de 45 %".

Que, relevant qu'en 1992, les ventes de produits Brother se sont élevées à 1.045.695.143 lires, il évalue la perte du chiffre d'affaires à 1.500.000.000 lires (100 % - 45 %) x (3.800.000.000 lires - 1.045.695.143 lires) et pour l'année 1993 à 2.000.000.000 lires (100 % - 45 %) x 3.800.000.000 lires).

Considérant que, pour estimer la perte de marge commerciale brute de concession, telle que définie au plan comptable général français, comme la différence entre les "ventes de marchandises" et le "coût d'achat des marchandises dont doivent être exclus les "frais commerciaux" invoqués par l'intimée, il retient à juste titre un taux moyen de marge brute de concession de 33,13 % du chiffre d'affaires, révélant sur une période de 25 mois, une perte de 1.215.000.000 lires.

Qu'il conviendrait ainsi d'évaluer le manque à gagner de la société Mibro à la somme de 1.756.350.000 lires soit :

- 134.500.000 lires, au titre du profit d'exploitation que l'intimée aurait dû normalement retirer du contrat en 1991,

- 406.850.000 lires, au titre des dépenses exposées en pure perte,

- 1.215.000.000 lires, au titre de la perte de marge brute.

Considérant que l'expert propose de majorer la somme ainsi dégagée "d'une indemnité de dommage causé au réseau de vente et de discrédit auprès de la clientèle de 10 % du chiffre d'affaires annuel moyen de 1989, 1990 et 1991", soit de 350.000.000 lires.

Considérant qu'il relève en effet avec pertinence que les départs de plusieurs salariés dont le directeur commercial ont amputé "Mibro Spa de sa force de pénétration et de percutions commerciale sur le marché italien, surtout quand la presse professionnelle s'en fait l'écho, auprès de la clientèle".

Que le rapport d'expertise devant être entériné, la somme globale allouée à titre de dommages et intérêts à la société Mibro sera, en conséquence, fixée à la contre-valeur en F français à la date du présent arrêt de la somme de 2.206.350.000 lires.

Que ladite indemnité, allouée par une juridiction française portera intérêts au taux légal français et non italien, étant précisé que la Cour, en vertu du pouvoir d'appréciation que lui confèrent les dispositions de l'article 1153.1 du Code civil fera courir lesdits intérêts de la date du jugement de première instance.

Considérant que la société Brother France sera en outre condamnée à rembourser à la société Mibro la contre-valeur en F français de la somme de 50.611.898 lires, montant du coût de la garantie bancaire, exposé par l'intimée, étant précisé que ladite somme portera quant à elle intérêts de droit à compter de la demande qui en a été faite.

Qu'en revanche, la société Mibro ne saurait revendiquer le paiement des consultations qu'elle a cru devoir recueillir auprès d'un cabinet-conseil au terme d'une initiative personnelle et extrajudiciaire.

II - SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE

Considérant que la société Brother Italie sollicite à bon droit la condamnation de la société Mibro à lui payer une somme de 2.341.280,60 F au titre de factures impayées, ladite demande n'ayant été au demeurant contestée ni devant les premiers juges qui y ont fait droit ni devant l'expert.

Que ladite somme portera intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 1992, date du refus de son paiement.

Qu'il n'y a lieu à l'inverse, d'ordonner la restitution de la somme de 8.728.720 F consignée à la Banca Populare di Ancona en exécution de la décision de première instance, après compensation entre le montant de la condamnation prononcée par les premiers juges et celui des factures susvisées, le principe de la condamnation étant confirmé.

Considérant enfin que son appel étant rejeté, la société Brother France ne saurait invoquer au soutien d'une demande en dommages et intérêts les conséquences abusives de la présente procédure.

III - SUR LES FRAIS NON TAXABLES

Considérant que la société Brother France qui succombe sera déboutée de la demande par elle fondée sur les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Mais considérant qu'il est équitable d'allouer à ce titre à la société Mibro une somme de 50.000 F.

Par ces motifs : Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit la demande de la société Mibro Spa recevable et bien fondée et condamné la société Brother France aux dépens de première instance, Le réforme pour le surplus, et statuant à nouveau, Condamne la société Brother France à payer à la société Mibro Spa la contre-valeur en F français au jour du présent arrêt : - de la somme de 2.206.350.000 lires avec intérêts au taux légal à compter du jugement déféré, - de la somme de 50.611.898 lires, avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 1997, date de la demande, Condamne la société Mibro Spa à payer à la société Brother France la somme de 2.341.280,60 F avec intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 1992, Dit que la compensation entre les sommes susvisées s'opérera de plein droit, Condamne la société Brother France à payer à la société Mibro Spa la somme de 50.000 F en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Rejette toutes autres demandes. Condamne la société Brother France aux dépens d'appel qui comprendront notamment les frais d'expertise, Admet la SCP Varin et Petit, titulaire d'un office d'avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.