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Décisions

CA Toulouse, 2e ch. sect. 1, 18 janvier 1999, n° 97-01587

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Gas

Défendeur :

SOCRIDIS

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Foulon

Avoués :

SCP Malet, SCP Nidecker-Prieu

Avocats :

SCP Couderc Gasia, Me Benoît.

T. com. Foix, du 14 nov. 1996

14 novembre 1996

Aux termes d'une convention de fourniture de boissons en date du 14 juin 1993,

- La société SOCRIDIS - fournisseur - s'est engagée à financer des travaux d'aménagements dans le restaurant " Le Don Quichotte " exploité par Jean Christophe Gas,

- Jean Christophe Gas - revendeur - s'est obligé à se fournir exclusivement auprès de SOCRIDIS, pendant une durée de 7 ans, pour une quantité minimum de 65 hectolitres de bière.

Considérant que M. Gas ne respectait pas ses obligations, la SOCRIDIS, par un courrier recommandé avec avis de réception du 5 janvier 1995 a résilié la convention et mis en demeure J.C Gas de lui régler diverses sommes en vertu des stipulations - article 11 - de la convention et de factures restées impayées.

En l'absence de règlement, la SOCRIDIS a fait assigner J.C Gas et, par un jugement réputé contradictoire du 14 octobre 1996, le Tribunal de commerce de Foix a constaté la résiliation et condamné J.C Gas à payer à la SOCRIDIS avec exécution provisoire :

- les sommes de 29 925,31 F TTC, majorée d'intérêts, au titre du solde du financement des travaux et de deux factures impayées,

- la somme de 95 871 F TTC à titre de dommages-intérêts en application de l'article II de la convention,

- la somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles.

Jean-Christophe Gas demande à la Cour de constater que la convention du 14 juin 1993 a fait l'objet d'une novation par changement de débiteur en faveur de la SARL La Table de Don Quichotte et, en conséquence, de le mettre hors de cause.

Subsidiairement, il lui demande de prononcer la nullité de la convention pour indétermination du prix conformément à l'article 1129 du Code civil.

Il sollicite la condamnation de SOCRIDIS au paiement de dommages-intérêts et de frais irrépétibles.

Il soutient que les dispositions de l'article 1129 s'appliquent au prix des fournitures au paiement desquelles il s'est engagé dans la convention et qu'en l'espèce il n'a pas eu connaissance, lors de la conclusion au contrat, du prix de l'hectolitre de bière ; il affirme que la somme de 26 000 F TTC, avancée à l'origine par SOCRIDIS, doit lui rester acquise à titre de dommages-intérêts.

Il soutient que le contrat se rattachait à l'exploitation du restaurant " Le Don Quichotte ", en réalité exploité dès le 1er juillet 1993 par la SARL La table de Don Quichotte et que le bénéfice du contrat a été transféré de manière tacite à cette société, en accord avec SOCRIDIS, le compte client étant ouvert, dans les comptes de SOCRIDIS, sous l'intitulé " SARL La table de Don Quichotte " et le règlement des marchandises étant effectué par la SARL.

Dans des conclusions responsives du 1er septembre 1997, il relève que la clause de fixation postérieure du prix au tarif en vigueur lors de sa livraison a un caractère potestatif qui engendre un abus dans la fixation du prix quand l'approvisionnement est exclusif ; il considère que cette circonstance, par référence à l'article 1134 du Code civil, justifie la résiliation du contrat.

Il ajoute, sur la transmission du contrat à la société La table de Don Quichotte, que s'agissant d'une cession de dette, les formalités de l'article 1690 du Code civil n'avaient pas à être respectées.

La SARL SOCRIDIS demande la confirmation du jugement entrepris, elle sollicite, de manière incidente, l'allocation de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi que des frais irrépétibles.

Sur ce, LA COUR,

Alors que l'appelant ne dépose pas de dossier devant la Cour, l'appréciation de ses demandes ne peut s'effectuer que par l'analyse des pièces produites par l'intimée.

L'article 1129 n'étant pas applicable à la détermination du prix, la clause de la convention de fourniture de boisson faisant référence à la réception et à l'acceptation sans réserve du tarif et des conditions générales de vente pratiquées par le fournisseur n'affecte pas la validité du contrat.

Si l'abus dans la fixation du prix dans les contrats cadre donne lieu à résiliation sur la base des articles 1134 et 1135 du Code civil, l'exclusivité effectivement convenue ne suffit pas à caractériser cet abus;

En l'espèce, la clause litigieuse est habituelle dans le domaine de la fourniture de bière et J.C Gas n'a ouvert aucun débat sur les données économiques du marché et les prix pratiqués par les concurrents de son fournisseur.

Enfin, alors qu'il reconnaît expressément dans la convention qu'il a reçu le tarif et qu'il disposait contractuellement - article 7 alinéa 2 - d'une procédure d'arbitrage à défaut d'accord sur le prix, il ne justifie d'aucune discussion, pendant l'exécution du contrat, sur les prix pratiqués.

Dans ces conditions, la preuve du caractère abusif de la clause litigieuse n'est pas rapportée.

L'appelant soutient que le contrat a été transmis à la société " La table de Don Quichotte ".

Il apparaît que le contrat a été souscrit par J.C Gas le 14 juin 1993, sans indication de son intervention pour le compte de la société, l'article 10 stipulant : " ...le présent contrat a été conclu en raison de la personnalité du revendeur. Le départ de la personnalité du revendeur constituera un facteur de rupture de la présente convention... " et la lecture des statuts de la société (signés le 1er juillet 1993) la société ayant été immatriculée le 21 février 1994, permet de constater, en annexe, que le contrat de bière n'a pas été repris par la société.

La novation peut s'opérer par substitution d'un nouveau débiteur à l'ancien qui est déchargé par le créancier, mais elle ne se présume pas, l'intention de nover devant être certaine, et le créancier doit expressément décharger le débiteur initial. L'acceptation alléguée (mais non établie en l'absence de pièces de l'appelant) d'un paiement effectué par la société La table de Don Quichotte en faveur de la SOCRIDIS n'implique pas, en l'absence de déclaration expresse, que cette dernière ait entendu décharger J.C Gas, le débiteur originaire de sa dette.

Ainsi, la Cour, substituant ses motifs à ceux des premiers juges à l'issue d'un débat contradictoire, confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

La société SOCRIDIS, qui ne fait pas la preuve du caractère abusif de l'appel, est déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

L'appelant qui succombe est tenu des dépens.

L'équité conduit à faire droit à la demande de frais irrépétibles présentée par l'intimée, tenue de suivre la procédure devant la Cour.

Par ces motifs, LA COUR, Déclare l'appel recevable mais mal fondé. Confirme dans toutes ses dispositions, le jugement du Tribunal de commerce de Foix et de l'Ariège en date du 14 octobre 1996. Déboute la société SOCRIDIS de ses demandes de dommages-intérêts. Condamne Jean Christophe Gas aux dépens avec distraction en faveur de la SCP Nidecker-Prieu. Condamne Jean Christophe Gas à payer à la société SOCRIDIS la somme de 6 000 F (six mille francs) en application de l'article 700 du NCPC.