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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 11 février 1999, n° 1996-88256

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Fiat Auto France (SA)

Défendeur :

Sofisud (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Leclercq

Conseillers :

M. Faucher, Mme Riffault

Avoués :

SCP Bernabé Ricard, SCP Roblin Chaix de Lavarene

Avocats :

Mes Cocchiello, Bourgeon.

T. com. Paris, 7e ch., du 8 oct. 1996

8 octobre 1996

Considérant que la société Fiat Auto France a fait appel le 9 décembre 1996 d'un jugement contradictoire du 8 octobre 1996 du Tribunal de commerce de Paris qui

- a déclaré abusives les conditions dans lesquelles elle a résilié le contrat de concession la liant à la société Sofisud,

- l'a condamnée à verser à la société Sofisud une provision sur dommages-intérêts de 1 500 000 F sous garantie de caution bancaire, ainsi que 99 695 F sans caution en réparation d'entraves à sa liberté commerciale au cours du second semestre de l'année 1995,

- a réservé les demandes de la société Sofisud concernant la prime MOS 1996 et les frais irrépétibles,

- a ordonné une expertise concernant le chiffrage des dommages-intérêts,

- a rejeté les autres demandes, ordonné l'exécution provisoire de la décision et réservé les dépens ;

Qu'elle expose par conclusions du 9 avril 1997

- que la société Sofisud était concessionnaire Fiat depuis 1984 et disposait d'une exclusivité de représentation dans douze puis seize communes des Hauts de Seine et du Val de Marne,

- qu'elle a résilié le 27 septembre 1995 avec préavis d'un an le contrat de concession à durée indéterminée qui la liait à la société Sofisud,

- que cette résiliation s'insérait dans un programme de réorganisation de son réseau principalement en région parisienne en raison tant d'une chute de ses ventes de l'ordre de 20 % que du coût excessif de l'immobilier à Paris et dans sa banlieue,

- qu'elle avait ainsi élaboré en 1995 un projet appelé " Plan Paris " fondé sur un découpage de la région parisienne en quatorze zones confiées à des tiers disposant de moyens financiers et humains suffisants, ce qui impliquait la résiliation des contrats la liant aux concessionnaires en place ;

- qu'elle n'a trouvé un preneur pour la zone Sud Ouest où se trouvait implantée la société Sofisud que dans les derniers mois de l'année 1995 et a donc notifié le 27 septembre 1995 à cette société la résiliation de sa concession ;

Qu'elle reproche aux premiers juges d'avoir déclaré abusives les conditions d'une résiliation qui avait un juste motif et respectait le préavis minimum contractuel et communautaire d'une année parce qu'elle aurait manqué de loyauté en n'informant pas la société Sofisud de ses intentions dès qu'elle a été en mesure de la faire, en divulguant son plan avant même de prévenir des concessionnaires qu'elle invitait au contraire à redoubler d'efforts, et en ne tenant pas sa promesse publique de procéder à la réorganisation de son réseau au mieux d'intérêts communs ;

Qu'elle dément qu'elle ait été tenue d'une obligation d'information antérieure à la résiliation et soutient que la durée de préavis d'une année qui a été respectée, est suffisante, que le plan qui n'a été arrêté qu'au cours du second semestre de l'année 1995, devrait être tenu secret, que dès l'intervention de la presse spécialisée en mai 1995 la société Sofisud savait nécessairement que sa concession serait résiliée et qu'elle a procédé à la résiliation dès qu'elle a trouvé un repreneur pour la zone dans laquelle la société Sofisud était installée ;

Qu'elle ajoute qu'elle a adressé à la société Sofisud des incitations à l'effort et non à l'investissement tels que l'offre de participer à des programmes de distribution Fiat Linea et Fiat Brava qui n'avaient rien d'anormal et de discriminatoire et dont la privation aurait pu lui être reprochée, et que la société Sofisud a tiré profit des efforts consentis et n'a donné " qu'un simple coup de peinture " rendu nécessaire par un manque d'entretien des locaux ;

Qu'elle conteste que les conditions décriées de la résiliation aient engendré un préjudice, dément que la politique commerciale de la société Sofisud ait été perturbée par une incertitude concernant les critères d'attribution des primes MOS qui ont d'ailleurs été rejetés le 12 juillet 1995 par l'amicale des concessionnaires, et demande à la Cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions lui faisant grief et de lui accorder 30 000 F pour ses frais irrépétibles ;

Considérant que l'expert a déposé son rapport daté du 30 juillet 1998 ;

Considérant que par conclusions du 22 septembre 1998 la société Sofisud expose quant à elle :

- qu'elle est parvenue à vendre environ 400 véhicules Fiat neufs par an tant que la marque a conservé sa part de marché de 5,5 % à 6 % mais que le recul du marché national durant les années 1991 à 1993 s'est accompagné d'un effondrement de la part de la marque Fiat tombée à 4,2 %,

- que la société Sofisud, concessionnaire depuis 1984, est restée fidèle à la marque d'autant que le groupe Fiat a annoncé qu'il allait investir cent milliard de francs pour renouveler une gamme obsolète et lancer dix huit nouveaux modèles, et que directeur des ventes de la société Fiat Auto France, Olivier Pittet, avait promis de l'associer aux reprises de concessions Fiat de la région parisienne susceptibles de se présenter,

- qu'en 1994 la part de marché de la marque Fiat est remontée à 5,5 % et la société Sofisud qui n'avait vendu que 218 véhicules neufs en 1993, en a vendu 467,

- que la société Fiat Auto France a cependant entrepris en 1994 une modification des conditions de rémunération de son réseau en créant une prime dite MOS attribuée en fonction de critères qualitatifs, et son président directeur général, Jean-Marie Benne, a annoncé en mai 1995 par voie de presse la mise en œuvre d'un plan de réorganisation de la distribution de la marque en région parisienne dit " Plan Paris ",

- que dans le cadre de ce plan la société Fiat Auto France qui disposait en région parisienne de succursales intégrées déficitaires et de concessionnaires indépendants, entendait transférer à des opérateurs indépendants la gestion de ses succursales en élargissant leur territoire exclusif par adjonction des zones d'exclusivité des concessionnaires dont les contrats seraient résiliés et qui se verraient offrir le choix entre trois options : quitter le réseau, devenir agent ou céder leur entreprise,

- que surprise par la soudaineté de cette restructuration et le mode d'information adopté, la société Sofisud s'est inquiétée de son sort et a reçu compte tenu de ses excellents résultats commerciaux, tous apaisements appropriés du directeur régional de la société Fiat Auto France et a rénové en mai 1995 les structures de son service après vente, a adhéré en juin 1995 au système de fidélisation de clientèle Linea, a recruté un nouvel agent en septembre 1995 et a ouvert un nouveau local à l'appui d'une candidature de mandat de " spécialiste de véhicules utilitaires ",

- que la société Fiat Auto Sud [France] a cependant notifié à la société Sofisud le 27 septembre 1995 la résiliation de la concession en lui accordant le préavis minimal contractuel, soit une année, et a annoncé aussitôt la nomination en remplacement en tant que concessionnaire des sociétés SFBA et CAR animées par Manuel Guerreiro, repreneur de ses succursales de Boulogne sur Seine et d'Issy les Moulineaux,

- que la société Sofisud a formulé des réserves dès le 13 octobre 1995, que Nicola Migliore et Jean-Pierre Vaillant, nouveaux président directeur général et directeur général de la société Fiat Auto France, ont reconnu une erreur de communication et exprimé au cours du dernier trimestre 1995 et en janvier 1996 leur intention de prendre en considération les intérêts des concessionnaires évincés mais la société Sofisud a constaté le 13 mars 1996, au cours d'un entretien des deux présidents directeurs généraux organisé soit disant pour permettre à la société Fiat Auto Sud [France] de faire des " propositions concrètes ", que la société Fiat Auto France n'avait rien à proposer, et s'est résolue à l'assigner le 5 avril 1996 à bref délai ;

Que la société Sofisud accuse la société Fiat Auto France

- d'avoir manqué à son obligation de loyauté en dissimulant à ses concessionnaires une décision de restructuration, étudiée dès 1993 et arrêtée en 1994 selon elle, au risque de leur faire perdre des opportunités de reconversion, et à la société Sofisud ses véritables intentions la concernant jusqu'en mars 1996,

- d'avoir procédé à une résiliation abusive en divulguant de façon soudaine à la presse et non à ces concessionnaires un plan de restructuration passant par l'éviction de ces derniers, alors qu'elle savait que cette divulgation les déstabiliserait sur le plan commercial, les placerait en situation d'infériorité dans la perspective d'une négociation avec le nouvel opérateur choisi par le concédant et limiterait leur capacité de reconversion, et qu'elle avait les moyens d'imposer une solution d'équité aux sociétés CFBA et CAR qu'elle contrôlait indirectement sous couvert de sa filiale Intermap ;

- qu'elle demande à la Cour de confirmer le jugement et d'y ajouter, après expertise, la condamnation de la société Fiat Auto France à lui verser 7 850 000 F de dommages-intérêts pour rupture abusive de concession, 272 062 F hors taxes de solde de primes MOS avec intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 1996 et 60 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Considérant que la société Fiat Auto France rejette les critiques qui lui sont faites, dément que la décision de " privatisation " de ses quatre succursales parisiennes ait été arrêtée avant mai 1995, prétend que la société Sofisud était " concernée " mais pas " obligatoirement visée " par la plan de restructuration tant qu'un accord n'était pas trouvé avec un repreneur des succursales de Boulogne sur Seine et d'Issy les Moulineaux, précise que deux seulement des quatre secteurs prévus en région parisienne ont été réorganisés, soutient qu'une information plus rapide n'aurait servi à rien d'autant que la société Sofisud a disposé d'un délai suffisant d'une année pour assurer sa reconversion, et se refuse à devoir assumer les conséquences de " l'incurie " de son concessionnaire ;

Qu'elle conteste au surplus l'existence et le chiffrage du préjudice et précise subsidiairement que celui-ci ne saurait justifier plus de 638 000 F de dommages intérêts ; qu'elle soutient enfin que la société Sofisud a reçu l'intégralité des primes qui lui étaient dues ;

Considérant qu'il résulte des explications fournies en appel par la société Fiat Auto France et des déclarations faites en décembre 1995 et janvier 1996 au Journal de l'automobile tant par son président directeur général, Nicola Migliore, et son directeur général, Jean-Pierre Vaillant, que par le directeur commercial de la société Fiat, Loïc Caperan,

- que le groupe Fiat a réagi à la chute sensible de ses parts de marché due au désintérêt suscité par le vieillissement de ses modèles, en investissant dans l'élaboration d'une nouvelle gamme de véhicules mais aussi en abandonnant la distribution à travers ses succursales intégrées pour se consacrer à la seule fabrication, conformément à un plan européen de restructuration " orchestré " de Turin,

- que la société Fiat Auto France a ainsi décidé de " privatiser " ses quatre succursales parisiennes dont elle ne dément pas qu'elles étaient déficitaires, en les confiant à des opérateurs privés, mais aussi de " résilier dans le cadre de la mise en œuvre de cette politique " d'abandon de l'exploitation directe de ses succursales, un certain nombre de concessions voisines afin de rendre " suffisamment vastes et compétitives les structures des repreneurs " des succursales,

- que la société Fiat Auto France n'avait aucun reproche à faire à la société Sofisud lorsqu'elle lui a notifié le 27 septembre 1995 la résiliation d'une concession qui lui avait été consentie en 1984, et que dès le 31 octobre 1995 l'appelante a diffusé par note de service la nomination des sociétés CFBA et CAR présidées par Manuel Guerreiro en tant que repreneur des succursales de Boulogne sur Seine et Issy les Moulineaux,

- que les concessionnaires de la marque Fiat se sont à juste titre émus et le président de leur groupement a écrit au concédant en ces termes : " Lorsque vous décidez de vendre une succursale à un groupe et d'attribuer un nouveau secteur, vous ne devez pas résilier le concessionnaire car celui-ci se trouve en position de faiblesse pour revendre son affaire. Cela vous arrange peut être pour mieux négocier votre vente, mais nous jugeons cela totalement anormal pour ne pas dire plus " ;

- que le directeur commercial de la société Fiat et les dirigeants de la société Fiat Auto France ont reconnu en décembre 1995 et janvier 1996 qu'il convenait que la restructuration entreprise " se termine au mieux pour les deux parties " par des " discussions entre repreneur et concessionnaires, des reconversions en agence ou tout autre type de partenariat ", et ont précisé que l'avenir des cinq concessionnaires de la région sud ouest de Paris évincés " se négociait désormais " avec le repreneur Manuel Guerreiro qui avait " la responsabilité de couvrir de la manière la plus optimale son territoire " et la charge " de trouver des accords avec les concessionnaires résiliés ",

Considérant que la création par le constructeur d'un réseau de distribution de ses produits et l'adhésion des concessionnaires à ce réseau à l'essor duquel ils vont contribuer au mieux d'intérêts économiques communs, impliquent de la part du constructeur, propriétaire du réseau, des obligations d'assistance et de conseil qui ne prennent fin qu'après que les concessionnaires auxquels ils n'a pas de reproche à faire, aient quitté le réseau, et lui imposent, par application des articles 1134 § 3 et 1135 du Code civil, de veiller loyalement à ce que ces concessionnaires puissent partir sans perdre le fruit de leur participation à l'effort commun, contrepartie de leur engagement au sein du réseau ;

Considérant que le grief qui peut être fait par la société Sofisud à la société Fiat Auto France n'est pas tant d'avoir tardé à informer les concessionnaires susceptibles d'être concernés d'une décision mise à l'étude en 1993 et arrêtée selon toute vraisemblance à la fin de l'année 1994, ni d'avoir confié à la presse la nouvelle avant toute information des membres du réseau, ni même d'avoir dans un premier temps prodigué des apaisements à la société Sofisud que d'avoir négocié et conclu la reprise des succursales de Boulogne sur Seine et Issy les Moulineaux et l'extension de leur territoire exclusif avec Manuel Guerreiro et procédé parallèlement à la résiliation du contrat de concession de la société Sofisud en pleine conscience du préjudice qu'elle causait à son concessionnaire dont elle amoindrissait les possibilités de négocier la cession de son fonds de commerce à un repreneur déjà assuré du fait de cette résiliation intempestive, de disposer du territoire convoité;

Que la société Fiat Auto France tenue pourtant d'exécuter loyalement des engagements contractuels qui lui faisaient obligation de ne pas diminuer les chances de reconversion du concessionnaire dont elle entendait se séparer dans le cadre d'une politique personnelle de restructuration, peut d'autant moins contester qu'elle a engagé sa responsabilité à l'égard de la société Sofisud, que sa négociation avec Manuel Guerreiro a été nécessairement rendue plus aisée pour elle par une résiliation concomitante de la concession de la société Sofisud qui a été seule à en pâtir, et que ses dirigeants avaient pleinement conscience du dommage engendré par l'anticipation de la résiliation dont ils ont pris l'initiative, sur un accord de substitution quelle qu'en soit la nature, et donc de la déloyauté de leur comportement;

Que la société Fiat Auto France qui a focalisé sa défense sur la durée du préavis qu'elle juge suffisante et sur la nécessité de garder secrète une décision qui n'aurait été prise selon elle qu'en 1995, ne justifie pas qu'elle ait tenté de réparer sa faute en aidant la société Sofisud dans ses pourparlers avortés avec Manuel Guerreiro, seule voie d'indemnisation réellement ouverte dans le délai contractuel de préavis d'un an respecté par la société Fiat Auto France, mais quelque peu amputé par les apaisements fallacieux prodigués par ses responsables à l'efficacité compromise par les négociations ouvertes antérieurement dans les autres réseaux en prévision de l'application de la nouvelle norme européenne portant à deux ans la durée du préavis de rupture ;

Qu'il n'est pas établi en revanche que le procédé discourtois adopté pour l'information des concessionnaires et le retard apporté à la divulgation d'une décision qui paraît avoir été prise plus tôt que la société Fiat Auto France ne veut bien l'admettre, aient engendré un préjudice distinct de celui causé par l'association de la résiliation de la concession à l'attribution du territoire concédé à un tiers qui n'avait plus aucun intérêt à indemniser le concessionnaire évincé ; que la société Fiat Auto France a d'ailleurs reconnu que toutes ses succursales parisiennes n'étaient pas à ce jour " privatisées " et qu'il lui avait fallu attendre de conclure en accord avec Manuel Guerreiro pour décider de résilier la concession de la société Sofisud ;

Considérant que l'expert Michel Benyamin commis par le Tribunal de commerce de Paris a fort justement retenu que la société Fiat Auto France devait réparer les conséquences de la rupture déloyale des accords contractuels sur l'ensemble des activités de la société Sofisud, qu'elle aillent des difficultés de vente des 186 véhicules Fiat du parc de location ainsi que du stock de pièces d'occasion de marque Fiat en l'absence de panonceau correspondant, aux coûts du licenciement de trois salariés que le repreneur aurait pu reprendre à son service, et des travaux de normalisation de locaux qui ne devaient plus être aux normes de la marque Fiat, et à la diminution de la valeur d'un fonds de commerce amputé de son élément essentiel, la représentation de la marque Fiat sur le territoire concédé, que le repreneur de la succursale aurait dû racheter si la société Fiat Auto France ne lui en avait pas fait abandon, au détriment de son concessionnaire résilié ;

Que l'expert a conclu à des indemnisations d'1 400 000 F pour ce qu'il a appelé les préjudices directs et de l'ordre d'1 400 000 F à 1 800 000 F pour la diminution de valeur du fonds de commerce sur la base de moyennes des années 1993 à 1996 qui présente, ainsi que la société Sofisud le souligne, l'inconvénient de faire supporter à la société Sofisud le poids de l'effondrement des ventes de 1993 imputable à une désaffection du marché pour des modèles dont l'obsolescence incombe au constructeur et non à ses distributeurs, et de priver à l'inverse la société Sofisud du bénéfice de ses efforts pour reconquérir en 1995 et 1996 les parts de marché perdues ;

Que les marges nettes sur les ventes, la valeur de productivité et la capacité d'autofinancement sont respectivement en 1996 de 245 %, 278 % et 369 % supérieurs aux moyennes retenues par l'expert ; que la société Fiat Auto France ne saurait opposer à ces constatations un résultat annuel net moyen de 112 000 F sur quatre années qui tient compte des pertes de 1993 constituerait en 1996 un passé largement révolu ; que la société Sofisud justifie enfin de frais de licenciement beaucoup plus élevés que ceux retenus par l'expert, mais n'établit pas qu'elle les aurait tous évités si sa concession avait été rachetée par Manuel Guerreiro ;

Qu'il apparaît raisonnable de chiffrer le dommage que la société Fiat Auto France doit réparer à la somme de 4 600 000 F à la date du présent arrêt, ce qui correspond, compte tenu du temps écoulé, guère plus à la moitié de ce que valait le fonds de commerce en 1996 selon l'expert ;

Que la société Sofisud ne justifie pas de ce que l'incertitude dans laquelle elle s'est trouvée sur l'attribution effective des primes MOS sur la base de critères illicites auxquels la société Fiat Auto France a fini par renoncer, ait en quoi que ce soit perturbé ses ventes ; qu'il convient que les primes lui soient versées pour les années 1995 et 1996 en fonction des engagements souscrits ; que la Cour ne dispose pas des éléments nécessaires à la vérification des calculs qui lui sont proposés ;

Considérant au surplus qu'il est inéquitable que la société Sofisud conserve la charge de ses frais irrépétibles ;

Par ces motifs : Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré abusives les conditions dans lesquelles la société Fiat Auto France a résilié le contrat de concession la liant à la société Sofisud, ordonné une expertise et accordé à la société Sofisud une provision d'1 500 000 F, L'infirmant pour le surplus et statuant après expertise, Condamne la société Fiat Auto France à verser à la société Sofisud 4 600 000 F de dommages intérêts sur lesquels s'imputera la provision susvisée ainsi que 60 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, La condamne en tous les dépens liquidables à ce jour en ce compris les frais d'expertise, Admet la SCP Roblin Chaix de Lavarene, avoué, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ; Ordonne un complément d'expertise à l'effet de fournir à la Cour les éléments lui permettant de se prononcer sur le chiffrage des primes MOS 1995 et 1996 susceptibles de demeurer dues, Commet à nouveau Michel Benyamin, expert près la Cour d'appel de Paris 285 rue de Vaugirard 75 015 Paris, Dit que la société Sofisud devra consigner au greffe de la Cour la somme de 10 000 F à valoir sur les honoraires avant le 10 mars 1999 ; Dit que cette somme devra être versée au régisseur d'avance et recettes de la Cour d'appel de Paris, 34 quai des Orfèvres 75055 Paris Louvre SP ; Dit que dans les deux mois, à compter de sa saisine, l'expert indiquera le montant de sa rémunération définitive prévisible afin que soit éventuellement ordonnée une provision complémentaire dans les conditions de l'article 280 du nouveau Code de procédure civile et qu'à défaut d'une telle indication le montant de la consignation initiale constituera la rémunération définitive de l'expert ; Dit que l'expert devra déposer son rapport en double exemplaire au service de la mise en état de la Cour d'appel dans les 4 mois de sa saisine.