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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 4 mars 1999, n° 1995-05442

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Amauger (ès qual.), Parthenay Automobiles (Sté)

Défendeur :

Groupe Volkswagen France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Leclercq

Conseillers :

M. Faucher, Mme Riffault

Avoués :

SCP Roblin Chaix De Lavarene, SCP Barrier Monin

Avocats :

Me Mihailov, SCP Tréard Léger Bourgeon Meresse, SCP Vogel, Vogel.

CA Paris n° 1995-05442

4 mars 1999

LA COUR est saisie de l'appel interjeté par Maître Muriel Amauger, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Parthenay Automobiles, du jugement contradictoire rendu le 15 décembre 1994 par le Tribunal de grande instance de Paris qui, dans le litige l'opposant à la SA VAG France à l'occasion de la résiliation d'un contrat de concession de véhicules automobiles de marque Volkswagen et Audi, s'est déclaré compétent, a fixé à la somme de 2 812 297,47 F, avec intérêts au taux légal à compter du 7 juin 1993 jusqu'au 18 mars 1994, la créance de la société VAG France, l'a déboutée de ses demandes et l'a condamnée à verser au concédant la somme de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Au soutien de son recours et après avoir contesté le compte présenté par la société VAG France qui n'a " jamais fait l'objet d'un solde contradictoire ", l'appelante fait valoir dans des " conclusions récapitulatives " en date du 6 novembre 1998 que :

- les difficultés financières du concessionnaire procèdent directement d'une augmentation, imposée en dépit de la chute généralisée des ventes, d'un volume d'affaires excédant ses capacités de financement, de sorte que la société VAG France ne pouvait de bonne foi se prévaloir des difficultés de paiement rencontrées par la société Parthenay Automobiles pour rompre brutalement le 7 juin 1993 des relations contractuelles de longue durée,

- la société Parthenay Automobiles s'était attachée, à la demande de la société VAG France, à rationaliser son activité et à se restructurer financièrement à partir de 1991, mais la résiliation est intervenue sans avertissement préalable ni préavis, sans qu'il soit tenu compte de l'engagement de sommes considérables dans la concession et pour des motifs en réalité étrangers à l'exécution du contrat, à savoir l'aggravation très sensible de la chute du chiffre d'affaires de la société VAG France au début de l'année 1993 et la mise en application corrélative d'un programme de réduction du nombre des points de vente du réseau,

- la résiliation brutale de la concession a interdit toute possibilité de cession ou reconversion et a eu pour conséquence le dépôt de bilan et l'anéantissement des actifs incorporels.

En conséquence, Maître Amauger ès qualités demande à la cour d'infirmer la décision du tribunal, de débouter la société VAG France de ses demandes et de la condamner, outre au règlement d'une indemnité de 50 000 F au titre de ses frais irrépétibles, à lui payer une somme équivalente au montant de l'insuffisance d'actif ainsi que 784 000 F de complément de dommages-intérêts.

Le concédant réplique que :

- c'est à bon droit que le tribunal a retenu que le montant de sa créance, justifiée par la production de factures et de relevés de comptes, ne pouvait être contesté par le défenderesse,

- la résiliation extraordinaire du contrat en application de son article XV est la conséquence d'impayés apparus dès 1992 et qui se sont répétés en 1993 en dépit tant d'une mise en garde adressée au concessionnaire le 18 février 1993 que de l'aide que la société VAG France lui a apportée dans une situation effectivement difficile,

- Maître Amauger, ès qualités, ne saurait lui opposer ni un excès d'approvisionnement, ni la capacité qu'aurait eu la société Parthenay Automobiles à faire face à ses obligations postérieurement à une résiliation " directement inspirée ", selon elle, " par l'opportunité...de substituer un nouveau concessionnaire à la société Parthenay Automobiles ", alors d'une part que cette société expliquait ses problèmes de trésorerie notamment par un " manque de stock de véhicules neufs ", d'autre part qu'il appartenait au concessionnaire d'opérer les choix nécessaires et enfin que la cause réelle de la résiliation était l'accumulation d'impayés d'un montant total élevé,

- le dommage allégué par l'appelante ne peut en tout état de cause être supérieur à la marge brute qu'aurait dégagé la société Parthenay Automobiles pendant le préavis contractuel de résiliation ordinaire d'un an.

La société Groupe Volkswagen France, nouvelle dénomination de la société VAG France, sollicite la confirmation de la décision du tribunal et la condamnation de Maître Amauger ès qualités, à lui payer une indemnité de 50 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. A titre subsidiaire, au cas où une condamnation serait prononcée à son encontre, elle demande que le montant de celle-ci se compense avec celui de sa créance.

Dans d'ultimes écritures Maître Amauger ès qualités soutient que :

- les parties travaillant en compte courant, aucune ne peut s'estimer définitivement créancière de l'autre sans que les opérations comptabilisées, en l'état invérifiables, aient été contradictoirement soldées,

- si l'approvisionnement n'a peut être pas été excessif compte tenu du potentiel du marché concédé, il l'a été sans aucun doute au regard des moyens financiers de la société Parthenay Automobiles dont le dirigeant, craignant la mise en œuvre d'une résiliation, ne pouvait se permettre de contester les directives du concédant,

- Francis Parthenay qui a personnellement apporté 1 350 000 F de capitaux entre 1991 et 1993, ne s'est pas désintéressé du sort de son entreprise et que des apports plus importants supposaient notamment la vente des murs de la concession et donc l'intervention du concédant,

- la société VAG France a retenu en cours d'exécution du contrat le paiement de sommes dues au concessionnaire pour se payer par compensation, contribuant ainsi à l'appauvrissement de la trésorerie de la société Parthenay Automobiles,

- ses difficultés financières, de nouveau apparues au mois de juin 1993, ont pour cause la chute brutale du marché et des ventes de la marque imputable au constructeur et non la carence du concessionnaire que la rupture brutale des relations contractuelles a privé de la possibilité de poursuivre son activité et de réaliser le volume d'affaires indispensable au paiement de ses coûts fixes.

La société Groupe Volkswagen France réplique à nouveau que :

- le compte dont elle réclame le solde n'était nullement un compte courant mais une addition de factures individualisées et payables à leurs échéances et que les relevés de ce compte, les factures et les justificatifs de sa créance n'ont donné lieu à aucune contestation de la part du concessionnaire, alors que celui-ci se trouvait encore in bonis lors de l'introduction de l'instance,

- l'explication de la défaillance tirée d'un excès d'approvisionnement eu égard aux capacités financières du concessionnaire est nouvelle et inexacte,

- Maître Amauger qui affirme ès qualités que la société Parthenay Automobiles " était parfaitement en mesure de mobiliser des moyens complémentaires si le concédant l'estimait nécessaire ", ne peut que reconnaître que son administrée n'a pas pris les mesures qui s'imposaient puisque les impayés se sont multipliés,

- le relevé des impayés révèle que la compensation légale opérée a diminué la créance certaine et exigible du concédant,

- la société VAG France n'était pas responsable de la diminution du volume des ventes de véhicules neufs et que les difficultés financières de la société Parthenay Automobiles étaient bien antérieures à la résiliation du contrat et ne pouvaient permettre la poursuite de son exécution puisque le concessionnaire sollicitait dans une lettre du 23 octobre 1993 " l'étalement de sa dette sur une période de dix années et sur le capital seulement ",

- en application de l'article 1150 du Code civil ce n'est qu'en cas de dol que la réparation d'un préjudice pourrait excéder le montant des dommages-intérêts prévus ou prévisibles lors de la conclusion du contrat,

- la preuve d'un lien de causalité exclusif entre la résiliation extraordinaire prononcée et le dépôt du bilan n'est pas prouvée car il est vraisemblable que la société Parthenay Automobiles aurait été amené à déposer son bilan même si un préavis d'un an lui avait été accordé.

Sur ce :

Considérant que depuis 1984, par une succession de contrats dont le dernier conclu le 6 mars 1992 pour une durée indéterminée, la société VAG France a confié à la société Parthenay Automobiles la concession exclusive des marques automobiles Volkswagen et Audi sur le territoire de Rochefort sur Mer et de ses environs ;

Qu'invoquant l'absence de paiement par son concessionnaire de factures exigibles, la société VAG France a procédé, par application de son article XVII-2 à la résiliation extaordinaire à effet immédiat du contrat de concession par lettre du 7 juin 1993,et a mis la société Parthenay en demeure de payer la somme de 975 235,83 F, montant des créances échues et celle de 1 558 198,34 F, montant des encours et soldes rendus exigibles par la déchéance du terme résultant de la résiliation ;

Considérant qu'une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société Parthenay Automobiles le 18 mars 1994 ; qu'elle a été convertie en liquidation le 7 octobre suivant ; que la société Groupe Volkswagen France, -nouvelle appellation de la société VAG France, sollicite la fixation de sa créance à la somme de 2 812 297,47 F, ce à quoi s'oppose Muriel Amauger, ès qualités de liquidateur, qui, se portant reconventionnellement demanderesse en paiement de dommages-intérêts sollicite la condamnation du concédant pour brusque rupture des relations contractuelles ;

1) Sur la demande principale de la société Groupe Volkswagen France :

Considérant que la société VAG France a retenu depuis le mois de janvier 1993 le paiement de sommes dues à son concessionnaire, opérant ainsi une compensation avec un arriéré de dettes d'un montant supérieur dont la liquidité et l'exigibilité n'étaient pas contestées ;

Que ce paiement, conforme aux dispositions de l'article 1290 du Code civil, ne saurait à lui seul suffire à caractériser l'existence d'une convention de compte courant entre les parties autorisant le concessionnaire à s'affranchir de son obligation, prévue par l'article 4 a) du contrat, de " s'acquitter au comptant (c'est à dire en espèces, chèque de banque ou certifié) du règlement de toute commande... " ;

Qu'au surplus le compte des opérations ayant existé entre le concédant et le concessionnaire est clos du fait de la résiliation de la concession et de la déclaration de la créance au passif de la liquidation judiciaire ; que le solde en est exigible ;

Considérant que la cour constate que la société Parthenay Automobiles n'a jamais contesté les factures qui lui ont été adressées ; qu'elle n'émet aucune critique concernant le compte produit par la société Groupe Volkswagen France alors que tant son ancien dirigeant qu'à sa suite son mandataire liquidateur disposent des documents comptables lui en offrant la faculté ;

Considérant que la cour ne peut que confirmer la décision du tribunal en ce qu'elle a fixé à la somme de 2 812 297,47 F, augmentée des intérêts au taux légal du 7 juin 193 au 18 mars 1994, le montant de la créance de la société VAG France devenue Groupe Volkswagen France sur la société Parthenay Automobiles en liquidation judiciaire ;

2) Sur la demande reconventionnelle de Maître Amauger, ès qualités :

Considérant que le contrat de concession conclu en dernier lieu le 6 mars 1992 entre les parties n'avait pas de durée déterminée et était résiliable à tout moment avec préavis d'un an ;

Qu'il prévoyait toutefois en son article XV sa résiliation à effet immédiat,

- soit (articleXV-1) pour " carences, infractions ou manquements graves à des obligations essentielles " subsistant après expiration d'un délai d'un mois suivant l'envoi d'une lettre recommandée dénonçant l'infraction et mettant " la partie concernée " en demeure d'y mettre fin ",

- soit (article XV-2) " de plein droit ... sans préavis ni notification préalable " dans des hypothèses multiples dont l'existence de " protêts des effets ou chèques impayés, ou non règlement de tout autre moyen de paiement accepté par le concessionnaire " ;

Considérant que selon les articles 1134 et 1135 du Code civil la convention légalement formée tient lieu de loi à ceux qui l'ont faite, mais les cocontractants sont tenus de l'exécuter de bonne foi et de lui donner les suites que l'équité confère aux obligations qui y sont définies ;

Que la société Groupe Volkswagen France qui se prévaut de l'article XV du contrat, ne peut contester :

- que la convention du 6 mars 1992 pérennisait l'appartenance depuis 1984 de la société Parthenay Automobiles au réseau de distribution des véhicules des marques Volkswagen et Audi qui impliquait, au point de conduire les dirigeants à du concédant à utiliser le terme " partenariat ", dans leurs lettres et leurs communications à la presse versées par Maître Amauger au débats, des obligations réciproques de dynamisme commercial et d'assistance afin d'améliorer la pénétration de ces marques sur le marché français dont le concédant comme le concessionnaire ne pouvaient que tirer profit,

- que la prise en compte du caractère de " partenariat " des relations contractuelles fait obligation au concédant, sauf à enfreindre son devoir de loyauté, de n'utiliser la résiliation à effet immédiat qu'avec une circonspection compte tenu de son impact évident sur la valeur du fonds de commerce du concessionnaire amputé d'un élément incorporel capital qui ne peut être remplacé du jour au lendemain et sans incidence, fut-elle temporaire, sur les résultats d'exploitation,

- que l'article XV-2 dont la rédaction témoigne que la convention est un contrat d'adhésion imposé, refuse au concessionnaire la moindre faculté de sauver la concession, élément substantiel de son patrimoine, dans des hypothèses aussi surprenantes que l'ouverture d'un redressement judiciaire ce qui contrevient aux dispositions d'ordre public de l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985, apparition d'une mesure conservatoire concernant un élément du patrimoine du concessionnaire qui peut procéder d'un simple litige et s'avérer infondée, ou encore modification de la répartition du capital social du concessionnaire ou décès de l'un de ses dirigeants pour n'en citer que quelques une des plus significatives, qui ne sont tout de même pas les " carences, infractions ou manquements graves à des obligations essentielles " pour lesquels un sursis d'un mois est accordé afin d'y remédier,

- que le rejet d'un titre de paiement qui peut procéder d'une absence d'avis ou d'une erreur bancaire, ne témoigne pas nécessairement d'une défaillance du débiteur surtout s'il s'agit d'un refus de paiement d'une traite ou d'un ordre de prélèvement émis par le créancier ;

- que le chiffre d'affaires de la concession dépassait la trentaine de millions de francs, que le " relevé d'impayés " versé aux débats par la société Groupe Volkswagen France comporte pour la période du 19 janvier au 3 juin 1993 dix huit débits d'un montant total de 2 034 454,34 F compensés partiellement par vingt sept crédits d'un montant total de 924 221,04 F, et que le solde n'a atteint la somme de 2 467 682,91 F qu'après débit ultérieur de nombreux " prélèvements " qui n'étaient pas exigibles lors de la notification de la résiliation avec effet immédiat ;

- que les compensations opérées par la société VAG France rendaient quelque peu incertains pour le concessionnaire les montants susceptibles d'être appelés par des ordres de prélèvements qu'elle émettait ;

Qu'avant de se prononcer sur l'abus de droit reproché à la société VAG France désormais Groupe Volkswagen France, la cour ne pouvait pas ne pas relever le caractère éminemment critiquable de la clause appliquée dont la nullité aurait été inévitablement prononcée si la législation consumériste avait été applicable ; qu'il convenait, à défaut de nullité de cette clause entre entreprises commerciales, que le concédant, parfaitement conscient du dommage que sa décision allait engendrer, adopte au moins une solution conforme au " partenariat " qui était l'essence même de la commune intention des parties ;

Considérant que pour motiver la rupture le 7 juin 1993 sans préavis et à effet immédiat du contrat de concession la société VAG France a expressément fait référence à l'article XV-2 de la convention et invoqué l'état du compte de la cession en ses livres " faisant ressortir au 7 juin 1993 l'enregistrement d'impayés pour 975 235,83 F " ; qu'il s'agit là du seul grief fait à la société Parthenay Automobiles ;

Considérant que la société Parthenay Automobiles était concessionnaire exclusif Volkswagen et Audi depuis 1984; qu'elle justifie de ce qu'avec l'aide du concédant, elle avait constamment développé sa concession, en particulier pour les derniers investissements par l'acquisition d'un ordinateur Nixdorf en 1989, par l'agrandissement de ses locaux en 1990 et par la création d'un " service express " extérieur implanté à Echillais en 1991 et qu'elle était parvenue à des chiffres d'affaires satisfaisants lui procurant un classement fort honorable au sein du réseau de la société VAG France;

Considérant qu'afin de se conformer aux normes prescrites par le concédant et de faire face à des difficultés de trésorerie dues à la conjoncture du marché, la société Parthenay Automobiles a contracté un emprunt de 800 000 F; que son capital social a été porté en 1991 de 100 000 F à 750 000 F ; que Francis Parthenay avait apporté en compte courant 450 000 F en 1992 et la société Parthenay Automobiles venait en 1993 de céder un actif immobilier de 250 000 F et de contracter un emprunt de 750 000 F ;

Considérant que la société VAG France en avait pris acte en 1992 puisqu'en dépit d'un première série " d'impayés " des mois d'avril et mai 1992, son directeur général des opérations écrivait aux animateurs de la société Parthenay Automobiles le 28 septembre 1992 : " Notre entretien m'aura permis d'apprécier les efforts que vous faites pour mener à bien vos activités, en particulier au plan financier. En souhaitant un grand succès à la mise en œuvre d'une bonne collaboration dans le meilleur esprit de partenariat, je vous prie de croire... " ;

Considérant que la société VAG France avait certes informé le 18 février 1993 son concessionnaire de ce qu'elle ne pouvait plus " accepter de constater, pour quelque raison que ce soit, le moindre incident de paiement "; qu'elle relevait néanmoins que la société Parthenay Automobiles avait pu " mettre enfin en place la restructuration de l'entreprise " préconisée et demandait que le concessionnaire assure un suivi au jour le jour de sa trésorerie; que rien ne permettait alors d'envisager une rupture à effet immédiat; que la mise en garde ne se référait alors nullement à l'article XV-2 du contrat;

Considérant que la société Groupe Volkswagen France ne peut contester que les ventes en France des véhicules de la marque Volkswagen et plus encore ceux de la marque Audi, déjà en baisse sensible durant les années 1991 et 1992 " grises ou noires " selon les déclarations de son président de l'époque, se sont effondrées au cours des premiers mois de l'année 1993, mettant en difficulté de très nombreux concessionnaires contraints de subir au surplus une contraction de leur marge, au point que la société VAG France mettra en œuvre en 1993, mais trop tard pour la société Parthenay Automobiles, des mesures salvatrices de distribution des primes sans obligation de réalisation des quotas de ventes et d'amélioration des marges afin de cesser de faire peser sur les concessionnaires l'incapacité du concédant à répondre aux besoins du marché que révélait l'effondrement susvisé ;

Considérant que dans ce contexte qui engageait sa responsabilité ou mieux celle de sa société mère, la société VAG France n'a tenu aucun compte des efforts financiers considérables de la société Parthenay Automobiles et de son principal animateur et a mis en œuvre la procédure de résiliation exceptionnelle en prenant pour prétexte une défaillance qui n'apparaissait ni imparable ni irrémédiable selon les bilans produits, et à laquelle elle avait quelque peu contribué par le déclin de l'intérêt suscité par les modèles insuffisamment renouvelés de ses gammes de véhicules;

Qu'elle ne pouvait ignorer qu'une résiliation de concession sans préavis privait le concessionnaire de toute possibilité de trouver un repreneur susceptible d'apporter le complément de trésorerie indispensable au franchissement du cap difficile rencontré et de toute chance réelle, compte tenu de l'impact de la résiliation à effet immédiat sur l'exploitation, de prendre les mesures indispensables à sa reconversion;

Qu'il n'est certes pas absolument certain que sans cette rupture brutale la société Parthenay Automobiles aurait échappé au dépôt de bilan; qu'elle a pour le moins perdu cependant une chance très sérieuse de l'éviter; qu'au surplus, sans cette précipitation, l'administrateur judiciaire aurait pu échafauder un plan salvateur de continuation ou de cession ; que la société Groupe Volkswagen l'admet implicitement puisqu'à titre subsidiaire elle demande à la cour de n'accorder à Maître Amauger ès qualités que des dommages-intérêts équivalent à l'année de marge brute qu'aurait procuré une résiliation ordinaire ;

Que le préjudice dépasse sensiblement la perte d'une année d'une marge brute qui était en 1992 de 2 504 403,65 F mais aurait été sensiblement inférieure en 1993 sauf bénéfice des mesures d'assistance dont la société Parthenay Automobiles a été privée ; que la brutalité de la rupture a perturbé l'exploitation ; que l'ouverture de la procédure collective n'a pu qu'aggraver très sensiblement le passif par rapport à celui qui aurait été pris en compte à l'occasion d'une cession de l'entreprise à un repreneur susceptible de recevoir l'agrément du concédant ; que la société Parthenay Automobiles aurai dû pouvoir éviter l'essentiel des pertes engendrées par la privation de sa marge ; que le produit de la vente de son fonds de commerce s'en serait trouvé très sensiblement accru ;

Que la cour est à même d'évaluer sur ces bases à 3 800 000 F le préjudice subi par le concessionnaire ;

Considérant que la créance de la société Groupe Volkswagen France et celle de la société Parthenay Automobiles trouvent leur origine dans une même convention et sont par conséquent unies par un lien de connexité ; qu'il y a donc lieu à compensation ;

Considérant qu'eu égard à la solution adoptée, il convient de laisser à la charge de chacune des parties le montant de ses frais irrépétibles et de ses dépens ;

Par ces motifs : Confirme le jugement déféré en ses dispositions non contraires au présent arrêt, L'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau, Condamne la société Groupe Volkswagen France à payer à Maître Amauger, ès qualités, la somme de 3 800 000 F avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, Dit que les créances respectives des parties doivent se compenser, Dit que chacune des parties supportera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.