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Décisions

Cass. com., 15 juin 1999, n° 97-12.093

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Rival

Défendeur :

Ferrand

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Léonnet

Avocat général :

M. Lafortune

Avocats :

Mes Blanc, Blondel.

TGI Montbrison, du 31 oct. 1990

31 octobre 1990

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 28 janvier 1997) rendu après cassation, que, par acte signé le 28 février 1986 à Saint-Étienne, M. Pierre Ferrand s'est engagé à vendre à MM. Rival, cogérants de la société Transports Rival, une partie de son fonds de commerce de transports routiers et deux ensembles routiers ; que, le même jour, un contrat de location-gérance sur ce fonds de commerce a été signé entre les mêmes parties ; que, le 21 décembre 1989, les consorts Rival ont levé l'option prévue au contrat, à échéance au 31 décembre 1989, et proposé en paiement du prix que la somme de 50 000 francs soit compensée par le dépôt de garantie du même montant versé au titre du contrat de location-gérance ; que M. Ferrand ayant refusé de répondre à cette offre, ils l'ont assigné, le 14 juin 1990, devant le tribunal de commerce en restitution du dépôt de garantie et en dommages-intérêts ; que M. Ferrand est décédé au cours de la procédure qui a été reprise par ses héritiers ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches : - Attendu que les consorts Rival font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en présence de deux contrats distincts conclus entre les mêmes parties, l'anéantissement de l'un n'entraîne pas l'anéantissement de l'autre, sauf si la cause de l'obligation essentielle de l'un est la cause de l'obligation essentielle de l'autre, ou si l'un et l'autre contrats sont indivisibles ; que la cour d'appel, qui a constaté que, juridiquement, la dépendance des deux contrats - le contrat de location-gérance et la promesse synallagmatique de vente du fonds de commerce - n'était pas établie intrinsèquement, l'un ne faisant aucune référence à l'autre pour sa validité et son exécution, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où résultait, peu important qu'économiquement, la location-gérance constituât une garantie matérielle, que la résiliation du contrat de location-gérance n'emportait aucun effet sur la promesse de vente qui demeurait (violation des articles 1131, 1134, 1217 et 1218 du Code civil) ; alors, d'autre part, que la cause de l'obligation dans le contrat de location-gérance était pour le bailleur le versement du loyer et pour les locataires la jouissance de la chose, tandis que la cause de l'obligation, dans la promesse synallagmatique de vente, était pour le promettant la promesse de recevoir le prix et pour les bénéficiaires la promesse de se voir transférer la propriété ; qu'ainsi, la résiliation du contrat de location-gérance ne pouvait emporter la résiliation ou la caducité de la promesse de vente (violation des articles 1131, 1134 et 1184 du Code civil) ; et alors, enfin, que si deux contrats distincts peuvent, en raison d'une indivisibilité subjective, être dépendants l'un de l'autre, encore faut-il que la commune intention et la volonté certaine de l'un et l'autre contractants de considérer les deux contrats distincts comme indivisibles soient caractérisées ; que, ni la circonstance suivant laquelle la location-gérance aurait constitué une garantie matérielle, ni celle suivant laquelle MM. Rival, en levant l'option, eussent proposé, en paiement partiel du prix de vente du fonds, une compensation conventionnelle entre le montant du dépôt de garantie prévu au contrat de location-gérance et le prix dû au titre de la levée de la promesse de vente du fonds de commerce, ne caractérisent la volonté certaine de M. Ferrand et celle de MM. Rival de considérer le contrat de location-gérance et la promesse synallagmatique de vente comme indivisibles (manque de base légale au regard des articles 1134, 1217, 1218 et 1289 du Code civil) ;

Mais attendu que la cour d'appel, après avoir constaté que les deux contrats litigieux avaient été signés le même jour à Saint-Étienne, a, appréciant la portée de ces deux actes, estimé que "la location-gérance constituait, durant la période pendant laquelle les consorts Rival pouvaient lever l'option d'achat, une garantie matérielle évidente dont étaient bénéficiaires aussi bien M. Ferrand que ces derniers" ;qu'elle a relevé, en outre, que "cette commune intention des parties est corroborée par le dépôt de garantie prévu par l'acte de location-gérance qui devait être remboursé en fin de contrat et que les consorts Rival, en levant l'option, ont proposé en paiement partiel du prix de vente par compensation, démontrant ainsi la dépendance juridique des deux contrats ou, du moins, la conviction qu'ils avaient sur cette dépendance" ; qu'en déduisant de ces constatations l'indivisibilité entre les deux contrats et sans avoir, dès lors, à s'interroger sur leurs causes respectives, la cour d'appel n'encourt pas les griefs du moyen; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que les consorts Rival font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande en restitution du dépôt de garantie d'un montant de 50 000 F, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ; qu'ainsi, MM. Rival qui, dans leurs conclusions d'appel (signifiées le 19 mars 1996), avaient demandé la confirmation du jugement sans énoncer de nouveaux moyens, s'étaient approprié les motifs du jugement suivant lesquels "M. Ferrand ne conteste pas que cette somme (caution de 50 000 francs devant être restituée en fin de location-gérance) lui a été versée et ne prétend pas l'avoir restituée ; il y a lieu, en conséquence, de condamner M. Ferrand à payer à MM. Yves et Hervé Rival la somme de 50 000 F", et avaient ainsi formé une demande à ce titre (violation de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile) ; et alors, d'autre part, que celui qui se prétend libéré doit justifier le fait qui produit l'extinction de son obligation ; qu'ainsi, il appartenait à M. Pierre Ferrand, par ses héritiers, de faire la preuve des frais qu'il soutenait avoir exposés pour des réparations et desquels il résulterait l'extinction de son obligation de restituer la somme de 50 000 francs (violation de l'article 1315, alinéa 2, du Code civil) ;

Mais attendu qu'il ne ressort pas des écritures des consorts Rival devant la cour d'appel que ceux-ci aient seulement conclu à la confirmation du jugement déféré ; que la cour d'appel ayant relevé que "les consorts Ferrand, sans être contredits, font valoir que les consorts Rival n'ont satisfait à aucune des obligations concernant l'entretien du matériel pour un montant de 46 744,15 francs pendant la durée de la location et pour un montant de 23 740 francs à l'issue de la location" a pu décider que le montant du dépôt de garantie était acquis au profit du propriétaire du fonds de commerce ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le troisième moyen : - Attendu que les consorts Rival font grief à l'arrêt d'avoir statué ainsi qu'il a fait, alors, selon le pourvoi, que la résiliation du contrat de location-gérance, décidée unilatéralement par le propriétaire M. Ferrand, le 24 mai 1988, ne saurait être valablement justifiée par le non-paiement des loyers en mars, avril et mai 1989, c'est-à-dire postérieurement à la décision de résiliation (manque de base légale au regard de l'article 1184 du Code civil) ;

Mais attendu que c'est par une simple erreur de plume que la cour d'appel a indiqué la date du 24 mai 1988 au lieu de celle du 24 mai 1989, ainsi que les pièces de la procédure l'établissent ; qu'il en découle que le moyen est irrecevable ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.