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Décisions

Cass. com., 26 octobre 1999, n° 96-22.879

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Patrick Einhorn (SA), Segard (ès qual.), Becheret (ès qual.)

Défendeur :

Buron

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Grimaldi (faisant fonctions)

Rapporteur :

Mme Tric

Avocat général :

M. Raynaud

Avocat :

Me Choucroy.

T. com. Nanterre, du 17 mai 1994

17 mai 1994

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 24 octobre 1996), que la SA Patrick Einhorn (la société), qui avait conclu en septembre 1991 avec M. Buron un contrat verbal pour la prospection de ses produits dans la région parisienne, lui a, à l'issue d'une année, rappelé qu'il n'avait apporté aucun client et que son chiffre d'affaires avait baissé et lui a proposé un essai pour une seconde saison avec de nouvelles conditions de rémunération ; que M. Buron a refusé cette offre et a assigné la société en constatation de la rupture du contrat à ses torts et en paiement de commissions ainsi que d'indemnités ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Einhorn reproche à l'arrêt d'avoir jugé que M. Buron avait la qualité d'agent commercial sans répondre aux conclusions qui prétendaient qu'il avait le statut de VRP, ce qui lui interdisait de cumuler ce statut avec celui d'agent commercial, qu'il n'avait jamais adressé les factures afférentes aux commissions qui lui avaient été versées et qu'il n'était pas immatriculé au greffe du tribunal de commerce, violant ainsi les articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que l'absence de factures et l'absence d'immatriculation au greffe du tribunal de commerce n'étaient pas déterminantes, n'était pas tenue de répondre aux allégations de la société relatives au statut de VRP qui n'étaient assorties d'aucun élément de preuve ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que la société reproche encore à l'arrêt d'avoir fixé à 16 579,20 francs la créance de l'agent commercial au titre des commissions dues sur les commandes prétendument passées avec les Galeries Lafayette, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'elle lui contestait tout droit à commission pour des commandes qu'il aurait passées auprès des Galeries Lafayette en soulignant que sa réclamation reposait sur un listing erroné et surtout que, malgré sommation de communiquer, l'intimé n'avait pas versé aux débats les documents prouvant qu'il avait prospecté ce client ; qu'en faisant droit à la demande sans que le demandeur ait rapporté la preuve requise, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ; alors, d'autre part, que l'obligation de motivation posée par l'article 455 du nouveau Code de procédure civile impose aux juges du fond non seulement de mentionner mais également d'analyser les pièces sur lesquelles ils fondent leur décision ; qu'en énonçant, sans même les analyser, pas plus que le tribunal qui a statué "au vu des pièces produites, commandes et bordereaux de facturation", que celui-ci avait justement chiffré la créance de l'agent "au vu des pièces versées" par lui, la cour d'appel a encore violé les articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, que c'est sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, relevé que la société qui avait émis au profit de l'agent commercial, pour la période du 11 janvier 1992 au 21 mai 1992, un compte de commissions pour les Galeries Lafayette au taux de 11 %, ne versait pas aux débats de pièce établissant la preuve d'autres conventions que celles appliquées ; qu'elle a encore relevé que M. Buron produisait un listing sur lequel apparaît ce taux et le secteur d'activité des Galeries Lafayette, sans que la société produise de pièce établissant l'erreur du document présenté par l'agent commercial ;

Attendu, d'autre part, que, par motifs adoptés, la cour d'appel a retenu que les pièces produites par M. Buron étaient des commandes et des bordereaux de facturation ainsi qu'un compte de commissions duquel il résultait un taux de 11 % ; qu'elle a ainsi motivé sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société reproche enfin à l'arrêt d'avoir alloué à M. Buron la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de la résiliation du contrat, alors, selon le pourvoi, qu'elle contestait l'évaluation faite par le tribunal en relevant dans ses écritures que l'agent commercial n'avait travaillé pour son compte que durant un an sans lui apporter le moindre client nouveau ni augmenter le chiffre d'affaires, si bien qu'il ne pouvait prétendre percevoir une indemnité équivalente à celle accordée aux agents commerciaux dont le contrat est rompu après plusieurs années ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce moyen, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que, répondant aux conclusions invoquées, l'arrêt, par motifs propres et adoptés, après avoir relevé que le chiffre d'affaire traité par M. Buron en 1992, seule année de référence, était de 807 000 francs et que le taux moyen de commissions était de 7,5 %, évalue souverainement le montant du préjudice de M. Buron ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.