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Décisions

CA Bordeaux, 2e ch., 8 novembre 1993, n° 92003584

BORDEAUX

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

General Motors France Automobiles (Sté)

Défendeur :

Garage Marchese (SARL), Torrelli (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Martin (faisant fonction)

Conseillers :

Mlle Courbin, M. Ors

Avoués :

Me Fournier, SCP Touton-Pineau

Avocats :

Mes Mollet Vieville, Bourgeon.

T. com. Sarlat, du 22 mai 1992

22 mai 1992

Attendu que, par un acte du 5 juin 1992, la société Général Motors a relevé appel d'un jugement du 22 mai 1992, par lequel le Tribunal de commerce de Sarlat l'a condamnée à payer à Maître Torelli, représentant des créanciers de la société " Garage Marchese ", une somme de 520 000 F.

Que cet appel est régulier en la forme et recevable.

Attendu que l'appelante a conclu le 5 octobre 1992 et le 1er septembre 1993 à l'infirmation du jugement dont appel, au débouté de l'intimé et à la condamnation de celui-ci à lui payer 50 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Attendu que l'intimé a conclu le 5 mars 1993 et le 26 août 1993.

Qu'en définitive il sollicite la confirmation du jugement dont appel, la condamnation de l'appelante à lui payer les sommes supplémentaires de 2 276 221 F et 1 949 000 F en principal et 50 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et subsidiairement l'organisation d'une expertise.

Attendu que le tribunal a constaté, en substance :

1) qu'à partir de 1982, le garage Marchese a été concessionnaire de la marque Opel suivant plusieurs contrats successifs dont le dernier couvrait la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1991 ;

2) que l'appelante avait résilié le contrat sans préavis le 17 juillet 1990 ;

3) que le motif de cette décision, à savoir la transmission par le garage de cinq dossiers falsifiés dans le cadre de la campagne de reprise Corsa Kadett et Oméga Argus Plus, était réel, le Tribunal correctionnel de Bergerac ayant sanctionné ce fait par un jugement du 14 mai 1991.

Attendu que le tribunal, constatant par ailleurs que, d'après ce jugement, l'appelante n'avait subi aucun préjudice matériel et que la résiliation avait causé au garage un préjudice gravissime (dépréciation de son fonds et mise en redressement), a estimé que la résiliation était une sanction disproportionnée et a condamné l'appelante à indemniser la partie adverse.

Attendu que l'appelante objecte qu'une clause expresse du contrat, dont le tribunal a constaté l'existence tout en refusant de l'appliquer, prévoyait dans le cas de fraude du concessionnaire la résiliation de plein droit.

Qu'elle fait valoir que, ne s'agissant pas d'une clause pénale, le tribunal n'avait aucun pouvoir d'appréciation sur la sanction et devait constater le jeu de la clause en question.

Que tout cela est incontestable.

Attendu qu'en réponse Maître Torelli fait remarquer qu'en tout cas la clause devait être appliquée de bonne foi (ce qui est certain) et prétend que l'appelante a fait preuve de mauvaise foi en laissant passer, avant de dénoncer le contrat, plusieurs mois après la découverte des fraudes.

Qu'il précise que, contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce retard n'a pas été favorable à la société, celle-ci ayant cru que l'appelante ne prenait pas l'affaire au tragique et n'ayant pris aucune mesure en vue de réorienter son activité, mais au contraire ayant acheté du nouveau matériel.

Attendu que la cour ignore la date précise de la découverte de la fraude par l'appelante, mais constate que celle-ci reconnaît qu'elle a attendu avant de se prévaloir de la clause en utilisant ce délai pour s'informer plus complètement sur ce qui s'était passé.

Attendu que l'intimé conteste cette interprétation dudit retard, mais que la cour doit faire remarquer que l'appelante a attendu le 14 mai 1990 pour porter plainte, ce qui indique bien qu'elle hésitait sur la décision à prendre.

Attendu qu'une telle hésitation était légitime et ne peut être reprochée à l'appelante.

Attendu que Maître Torelli doit en conséquence être débouté.

Attendu que la procédure a contraint l'appelante à engager des frais non taxables qu'il serait inéquitable de laisser entièrement à sa charge.

Par ces motifs : LA COUR, Déclare la société Général Motors France recevable et bien fondée en son appel, Infirme le jugement dont appel et, statuant de nouveau, déboute Maître Torelli, ès qualité, et la société Garage Marchese de leur demande, Les condamne à payer à l'appelante une somme de 10 000 F, Les condamne aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Fournier, avoué à la Cour, conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.