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Décisions

CA Poitiers, ch. corr., 18 novembre 1993, n° 874-93

POITIERS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Ministère Public

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Main

Conseillers :

Mme Descard, M. Daniau

Avocat :

Me Grappin.

TGI Poitiers, ch. corr., du 12 mai 1993

12 mai 1993

Décision dont appel :

Le jugement a :

- déclaré le prévenu coupable des faits reprochés (repris ci-après) ;

- condamné ce dernier à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec suris et 60 000 F d'amende ;

- ordonné l'affichage du dispositif du jugement aux portes de l'entreprise pendant 1 mois, ainsi que sa publication dans les journaux Centre-Presse, La Nouvelle-République et Midi-Libre sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder la somme de 1 500 F ;

- dit que cette peine ne serait pas confondue avec celle de 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 F d'amende prononcée le 27 mai 1991 par la Cour d'appel de Montpellier pour des faits commis courant octobre 1989 au 28 novembre 1989 ;

Appel :

Le prévenu, puis le Ministère Public, ont relevé appel le 4 juin 1993.

Décision :

LA COUR, après en avoir délibéré,

Vu le jugement entrepris, dont le dispositif est rappelé ci-dessus,

Vu les appels susvisés, réguliers en la forme,

Attendu que Louis N est prévenu d'avoir, à Chouheverac, Montpellier, Chambray-les-Tours ou Lisieux, d'octobre à décembre 1988, étant ou non partie au contrat, trompé ou tenté de tromper les contractants sur les qualités substantielles et les risques inhérents à l'utilisation d'animaux en fourrure (lapin, chien) dont l'aspect et la présentation pouvaient entraîner une confusion avec des jouets alors qu'ils n'en respectaient pas les normes de sécurité ;

Attendu que N a interjeté appel dans des conditions de forme et de délai qui ne soulèvent aucune contestation du jugement du tribunal correctionnel de ce siège en date du 12 mai 1993 l'ayant déclaré coupable de tromperie sur les qualités substantielles de marchandises vendues et, en répression, condamné à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 60 000 F d'amende outre l'affichage du jugement ;

Attendu que l'appelant fait conclure à la réformation du jugement à son renvoi des fins de la poursuite ; qu'à titre subsidiaire il sollicite la confusion de la peine à intervenir avec celles prononcées le 13 novembre 1990 et 27 mai 1991 ;

Attendu que le prévenu dirige la SA X à Castelnau-le-Lez ; que l'objet de cette société est double ; que d'une part elle exploite 4 solderies dans la région de Montpellier à l'enseigne Y ; que d'autre part elle consent à d'autres entreprises juridiquement distinctes, dans le cadre de contrats de franchise des avantages économiques en constituant une centrale d'achat et des avantages commerciaux en autorisant l'usage de l'enseigne ; que dans le cadre de son activité à partir du mois d'octobre 1988, ladite société a commercialisé dans ses 4 magasins et a permis à divers franchisés de commercialiser 3 objets en peau de lapin figurant pour 2 d'entre eux des lapins et pour le troisième 1 chien ; que ces objets fabriqués en Chine et importés notamment par la SA Z sous l'appellation d'articles de décoration ou d'ornement se sont révélés ne pas présenter les caractéristiques, notamment quant à la sécurité, de jouets en peluche ; que spécialement ils présentent des parties s'arrachant à des forces inférieures à ce qui conviendrait à des jouets ; que le service de la consommation et des fraudes a alors procédé à la saisie de ces objets aux magasins à ladite enseigne, à Lisieux le 2 décembre 1988, à Chambray-les-Tours le 25 novembre 1988, à Montpellier avenue Bourgues et Route de Toulouse, à Sète et à Béziers le 1er décembre 1988, relevant qu'il s'agissait de jouets en peluche susceptibles de provoquer des accidents aux utilisateurs ; qu'il est avéré néanmoins que ces objets litigieux n'ont été vendus ou exposés à la vente dans des conditions susceptibles de faire naître une confusion dans l'esprit des acheteurs et de leur faire croire qu'il s'agissait de jouets seulement à Chambray-les-Tours ou à Lisieux où il était relevé par les enquêteurs que lesdits objets étaient placés dans les rayons " jouets " ; qu'en revanche N ne saurait être convaincu d'avoir entretenu ou fait naître une telle confusion ; que les saisies opérées dans les magasins soumis à sa direction ne révèlent d'aucune façon que les articles en cause étaient mis en vente ou exposés sous une appellation ou à un endroit laissant croire qu'il pouvait s'agir de jouets ; que la diffusion par laquelle N ès qualité de franchiseur a invité le réseau des franchisés à l'approvisionnement quant à ces objets et définissant les conditions de mise en vente, a utilisé l'appellation " petits animaux en peau de lapin " ; que l'importateur désignait lui-même comme " animaux en fourrure véritable " à titre d'objets de " décoration et de collection " ;

qu'il n'est donc pas établi en quoi le prévenu aurait, en sa qualité de franchiseur, faussement laissé penser à ses co-contractants que les objets en cause entraient dans la catégorie des jouets; que la circonstance que des franchisés aient pu introduire la confusion auprès de leurs clients ne peut signifier qu'ils auraient succombé à une tromperie de N; que d'ailleurs l'erreur ne fut en fait commise que par 2 franchisés du réseau et aucun de ceux qui ont été interrogés n'ont argué d'une méconnaissance de la nature réelle des objets dont s'agit ;

Vu l'article 515 du Code de procédure pénale,

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, sur appel en matière correctionnelle et en dernier ressort, Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau sur la prévention dont N fait l'objet ; Renvoie N des fins de la poursuite.