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Décisions

CA Basse-Terre, 2e ch., 13 janvier 1997, n° 9500864

BASSE-TERRE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Esso Antilles-Guyane (Sté)

Défendeur :

Caisse Guadeloupéenne de retraites par répartition, Deloumeaux

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Raynaud

Conseillers :

MM. Altenbach, Bertrand

Avocats :

Me Werter, SCP Morton Haynes Nimar Morton.

T. Com. mixte Pointe-à-Pitre, du 7 avr. …

7 avril 1995

Un jugement du Tribunal Mixte de commerce de Pointe-à-Pitre du 7 avril 1995, rétractant une ordonnance d'injonction de payer du 24 mai 1993 ayant condamné Serge Deloumeaux à verser à la Caisse Régionale de retraites et de répartition la somme de 122 096,23 F, a condamné solidairement la Société Esso Antilles Guyane et Serge Deloumeaux à verser à la Caisse Régionale de retraites et de répartition cette même somme avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 1993 en principal et celles de 133,47 F et 723,12 F au titre des accessoires avec l'exécution provisoire et à verser celle de 7 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par déclaration au greffe du 12 juin 1995, la société Esso Antilles Guyane a relevé appel de cette décision. Elle soutient qu'elle ne saurait être tenue solidairement au paiement des dettes de Serge Deloumeaux, car l'article 8 de la loi du 20 mars 1956 ne vise que les dettes contractuelles à l'exclusion des dettes d'origine légale. En outre elle indique que la faute du tiers, en l'espèce la Caisse Régionale de retraites et de répartition qui a laissé une telle dette se former, est de nature à exonérer le bailleur de cette solidarité. Elle demande la condamnation de la Caisse Régionale de retraites et de répartition au paiement d'une somme de 5 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La Caisse Régionale de retraites et de répartition comme Serge Deloumeaux concluent à la confirmation de la décision. Ils soutiennent que la seule condition posée par le texte précité, est que la dette soit née à l'occasion de l'exploitation ce qui est le cas en l'espèce s'agissant d'une dette sociale. La Caisse Régionale de retraites et de répartition réclame la condamnation de l'appelante au paiement d'une somme de 5 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Sur ce :

Il résulte de l'article 8 de la loi du 20 mars 1956 relative à la location-gérance que le loueur de fonds est solidairement responsable avec le locataire-gérant des dettes contractées par celui-ci à l'occasion de l'exploitation du fonds jusqu'à la publication du contrat et pendant un délai de six mois à compter de cette publication.

Il n'est pas contesté que le contrat de location-gérance liant la société Esso Antilles Guyane et Serge Deloumeaux n'a pas été publié.

Il ne peut être contesté que les cotisations dues pour les retraites complémentaires de la station-service exploitée par Serge Deloumeaux sont des dettes liées à l'exploitation du fonds.

Mais le texte précité ne vise que les " dettes contractées ". Ce terme ne saurait signifier les dettes " nées " comme l'ont jugé à tort les premiers juges.

En effet d'une part le mot contracté s'entend de dettes d'origine contractuelle, à l'exclusion des dettes résultant de la loi comme les cotisations sociales. En effet ce texte ne saurait s'étendre aux dettes légales puisqu'en matière fiscale un texte spécial prévoit la solidarité du loueur (article 1684-3 du Code général des impôts).

D'autre part, ce texte est destiné à protéger les tiers ignorant l'existence du contrat de location-gérance ce qui n'est pas le cas de la Caisse Régionale de retraite et de répartition qui recevait les déclarations de Serge Deloumeaux. Il doit être d'interprétation stricte.

En conséquence, la décision sera infirmée en ce qu'elle a déclaré tenue solidairement responsable la société Esso Antilles Guyane. Elle sera confirmée pour le surplus.

La Caisse Régionale de retraites et de répartition qui échoue en ses prétentions supportera les dépens. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande fondée sur l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et condamnée de ce chef à verser à la société Esso Antilles Guyane une somme qu'il est équitable de fixer à 5 000 F.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort, Infirme le jugement rendu par le Tribunal Mixte de commerce de Pointe-à-Pitre le 7 avril 1995 en ce qu'il a déclaré tenue solidairement la société Esso Antilles Guyane. Met hors de cause la société Esso Antilles Guyane. Confirme pour le surplus la décision dont appel. Déboute la Caisse Régionale de retraites et de répartition de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamne la Caisse Régionale de retraites et de répartition à payer à la société Esso Antilles Guyane la somme de 5 000 F (cinq mille francs) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamne la Caisse Régionale de retraites et de répartition aux dépens de première instance et d'appel.