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Décisions

Cass. com., 14 janvier 1997, n° 95-12.769

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Polyfilla (SA)

Défendeur :

Consortium SPSA (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Grimaldi

Avocat général :

Mme Piniot

Avocats :

SCP Defrenois, Levis, Me Hémery.

T. com. Bobigny, 1re ch., du 13 mai 1993

13 mai 1993

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 25 janvier 1995), que la société Polyfilla a confié à la société Consortium SPSA (société SPSA) la commercialisation de ses produits pour une durée de cinq années, à compter du 1er janvier 1991 ; que l'article 12-2 du contrat stipulait : " Chacune des parties aura le droit de résilier le présent contrat pour une raison importante, par lettre recommandée avec accusé de réception, 15 jours avant la prise d'effet de la résiliation. Une raison importante sera, entre autres : b) Le changement, à la suite d'un ou plusieurs événements ou transactions, de 25% au moins des actions en circulation avec droit de vote du Consortium ou modification importante de ses statuts ; le Consortium s'engage à informer immédiatement Polyfilla de ce changement ; c) Que l'une des parties commette un manquement à l'une des dispositions du présent contrat ou se trouve en défaut, et que le manquement ou la défaillance ne soit pas corrigé dans les 30 jours suivant la notification en ce sens, faite à la partie fautive, et indiquant spécifiquement la nature du manquement ou du défaut " ; que le 8 septembre 1992, la société Polyfilla a, d'un côté, résilié le contrat en invoquant la clause 12-2-b de celui-ci et, d'un autre côté, demandé la résiliation judiciaire du contrat en invoquant diverses fautes de la société SPSA ; qu'en cours d'instance de cassation, la société SEPAM est venue aux droits et obligations de la société Polyfilla et a repris l'instance en ses lieu et place ;

Sur le second moyen : - Attendu que la société SEPAM reproche à l'arrêt d'avoir dit que la résiliation du contrat était abusive, alors, selon le pourvoi, que la résiliation de plein droit, consécutive à la mise en œuvre d'une clause résolutoire, ne constitue qu'une simple faculté pour le créancier qui, plutôt que de s'en prévaloir, peut préférer solliciter la résiliation judiciaire de la convention ; qu'en interdisant, dès lors, à la société Polyfilla, laquelle invoquait subsidiairement la résiliation de la convention sur le fondement de l'article 1184 du Code civil, de se prévaloir de manquements contractuels, pour la raison que celle-ci n'aurait pas satisfait aux formalités prévues pour l'application de la clause résolutoire, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la société Polyfilla invoquait diverses infractions contractuelles pour demander la résiliation judiciaire du contrat, l'arrêt retient exactement, dès lors, que les manquements allégués étaient ceux-là mêmes qui avaient été prévus par la clause résolutoire de plein droit, que cette société " n'a jamais fait valoir ces fautes auparavant, alors qu'en application de l'article 12-2-c, il lui appartenait de mettre en demeure son cocontractant de faire cesser ces manquements dans un délai de trente jours " ; qu'ainsi la cour d'appel a justifié sa décision; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen : - Vu l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article 1184 du même Code ; - Attendu que, pour dire abusive la résiliation du contrat, après avoir exactement énoncé que " la personne des dirigeants, la forme d'organisation, les objectifs sociaux, les alliances, les stratégies et les méthodes de la personne morale peuvent constituer autant d'éléments regardés comme déterminants par ses cocontractants ", l'arrêt retient que la société Polyfilla n'a pas opposé la clause résolutoire de bonne foi puisqu'elle a cherché " à faire écrire " par la société SPSA " des informations qu'elle connaissait déjà ", relativement aux modifications intervenues au niveau du capital de la société SPSA, que la lettre de résiliation a été envoyée le lendemain de l'obtention de ces informations " excluant tout délai de réflexion " et que, " pourtant, l'opération réalisée par la société SPSA renforçait ses moyens financiers, sans pour autant recourir à un concurrent de la société Polyfilla et ne pouvait qu'être bénéfique, à terme, à la commercialisation des produits de celle-ci " ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à caractériser l'abus de la résiliation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;

Par ces motifs : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 janvier 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.