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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 9 mai 1997, n° 95-23278

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Inter Meca (Sté)

Défendeur :

Société Coopérative Ouvrière de Production Union des Forgerons

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Leclercq

Conseillers :

MM. Bouche, Breillat

Avoués :

SCP Lecharny-Chevillier, SCP Valdelièvre-Garnier

Avocat :

Me de Langle.

T. com. Corbeil-Essonnes, 5e ch., du 7 j…

7 juillet 1995

La société Inter Meca a interjeté appel du jugement rendu le 7 juillet 1995 par le Tribunal de commerce de Corbeil-Essonnes qui l'a déboutée de sa demande de condamnation de la société Union des forgerons à lui verser la somme de 210 000 F à titre d'indemnité compensatrice de la rupture d'un contrat d'agence commerciale et l'a condamnée aux dépens.

Elle expose que le 1er mars 1993 a été conclu un contrat d'agence commerciale lui confiant la promotion et la commercialisation des produits et services de la société Union des forgerons sur un secteur couvrant douze départements et qu'elle " est intervenue de manière très efficace dans un contexte de concurrence particulièrement difficile " en raison notamment des prix excessifs et des conditions inhabituelles de règlement imposés par la société Union des forgerons qui a mis fin le 26 juillet 1994 à la convention en proposant un dédommagement égal à trois mois de commissionnement mensuel moyen, soit la somme de 8 100 F.

La société Inter Meca soutient que l'article 9 du contrat qui dispose " qu'en cas de rupture abusive...le dédommagement sera égal à trois mois de commissionnement mensuel moyen " doit être réputé non écrit en ce que cette indemnisation contractuelle forfaitaire déroge au principe de l'indemnisation du préjudice réellement subi. Elle reproche aux premiers juges de s'être fondés sur cette clause pour la débouter de ses demandes en constatant que les trois mois de commissionnement dus avaient été réglés dans le cadre du préavis.

Elle évalue son préjudice à deux années de commissionnement soit, d'après ses calculs, 210 000 F, et souligne l'importance des investissements qu'elle a réalisés dans la perspective d'une collaboration à long terme et qui n'ont pu être amortis sur une période aussi brève. Subsidiairement, faisant remarquer qu'en première instance la société Union des forgerons avait offert de régler six mois de commissions, la société Inter Meca demande sa condamnation au paiement de la somme de 52 000 F.

De son côté la société union des forgerons, réclamant l'allocation de 10 000 F de dommages-intérêts pour appel abusif et de 5 000 F pour ses frais irrépétibles, sollicite la confirmation du jugement déféré. Elle prétend que la rupture des relations contractuelles est imputable à la société Inter Meca à laquelle elle reproche sa grande négligence constituant la faute grave privant l'agent commercial de toute indemnité en application de l'article 13 de la loi du 25 janvier 1991 ;

Elle précise que depuis que la société Inter Meca la représentait, son chiffre d'affaires avait baissé de 25 %. Elle lui reproche d'avoir réalisé seulement par téléphone la plus grande partie de la prospection de la clientèle et de " n'avoir jamais répondu aux propositions de formation interne relative à la métallurgie ". subsidiairement la société Union des forgerons prétend que le dédommagement de la société Inter Meca ne saurait dépasser la somme de 8 100 F.

Sur ce, LA COUR,

Considérant que l'article 12 de la loi du 25 juin 1991 dispose " qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi " ; queselon l'article 16 de la même loi est réputée non écrite toute clause ou convention contraire à ces dispositions, comme l'est l'article 9 du contrat du 1er mars 1993 en ce qu'il limite à " trois mois de commissionnement mensuel moyen " un dédommagement qui ne serait dû par ailleurs qu'en cas de " rupture abusive " ;

Considérant que la société Union des forgerons ne peut tirer un argument probant, pour contester leur authenticité, de ce que des renseignements concernant des faits postérieurs à la rupture des relations litigieuses sont consignés sur certaines " fiches clients " produites par la société Inter Meca pour établir la réalité d'une prospection conséquente puisque ces documents de travail ont pu être actualisés sans fraude ; qu'elle n'apporte aucune preuve suffisante d'une faute qu'elle n'a invoquée qu'en appel ; que les insuffisances de prospection reprochées ne sont ni suffisamment établies par les pièces versés aux débats, ni en toute hypothèse d'une gravité telle que l'intimée en serait exonérée du paiement de toute indemnité ;

Considérant que la société Union des Forgerons avait à l'audience du tribunal de commerce proposé " de commissionner la société Inter Meca sur les mois de décembre 1994, janvier 1995 et février 1995, que cette offre faisait une juste appréciation du préjudice subi par la société Inter Meca du fait de la rupture ; qu'il convient, infirmant le jugement déféré, de condamner la société Union des forgerons à payer à la société Inter Meca la somme de 16 200 F ; que la société Inter Meca se voit reconnaître des droits inférieurs au dixième de ce qu'elle réclame ; qu'il est équitable qu'elle conserve la charge de ses frais irrépétibles et de ses dépens ;

Par ces motifs : Infirmant le jugement du tribunal de commerce de Corbeil-Essonnes du 7 juillet 1995 ; Condamne la société Union des forgerons à payer à la société Inter Meca la somme de 16 200 F à titre d'indemnité de rupture ; Déboute les parties de toutes autres demandes ; Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.