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Décisions

CA Paris, 1re ch. C, 10 mars 1989, n° 87-6242

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Lybopar (SARL), Lybopar Victor-Hugo (SARL), LSP (SARL), LSG (SARL)

Défendeur :

La Croissanterie (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ancel

Conseillers :

MM. Bergougnan, Brissier

Avoués :

Me Huyghe, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay

Avocats :

Mes Fayon, Thréard, Prat.

T. arb., du 29 janv. 1987

29 janvier 1987

Dans le litige opposant les sociétés Lybopar, Lybopar Victor-Hugo, LSP et LSG (les franchisés) à la société La Croissanterie (le franchiseur), relatif à l'exécution et à la rupture des contrats de franchise conclus entre les parties pour l'exploitation de magasins à l'enseigne " La Croissanterie " commercialisant des produits de boulangerie-patisserie dans la région lyonnaise, un Tribunal arbitral, composé de trois arbitres en vertu de la clause compromissoire stipulée dans les conventions, a rendu le 29 janvier 1987 une sentence en premier ressort aux termes de laquelle ce Tribunal, saisi par les franchisés d'une demande tendant à l'annulation et subsidiairement à la résolution ou à la résiliation des contrats, a statué ainsi :

- dit qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer ;

- dit que les sociétés Lybopar, Lybopar Victor-Hugo, LSP et LSG n'ont pas subi de troubles de jouissance de la marque " La Croissanterie" ;

- constate que La Croissanterie n'a pas manqué à l'essentiel de ses obligations contractuelles jusqu'au 30 avril 1983 ;

- prononce la résiliation du contrat de franchise et de leurs conventions annexes à compter du 30 avril 1983 ;

- condamne les franchisés à payer à La Croissanterie, au titre des redevances contractuelles :

- la société Lybopar : 207 948,14 F

- la société Lybopar Victor-Hugo : 64 637,10 F

- la société LSP : 129 730,54 F

- la société LSG : 109 028,99 F

Les sociétés Lybopar, Lybopar Victor-Hugo, LSP et LSG ont fait appel de cette décision, dont elles poursuivent l'infirmation en demandant à la Cour :

- au principal, de prononcer l'annulation des contrats de franchise pour les motifs suivants :

- défaut de cause et d'objet, en ce que La Croissanterie a méconnu ses obligations de franchiseur, en ne fournissant aux franchisés ni concertation, ni coopération, ni transmission d'un savoir-faire spécifique, et plus généralement en dispensant une assistance très insuffisante, sinon même novice dans certains cas ;

- indétermination du prix, en ce que La Croissanterie a imposé unilatéralement son tarif de vente aux franchisés ;

- caractère restrictif de la concurrence des clauses d'exclusivité territoriale et de fourniture, tant au regard du droit communautaire (article 85-1 du Traité de Rome) que du droit interne de la concurrence (article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986) ;

- subsidiairement, de prononcer la résolution, ou la résiliation, des contrats de franchise aux torts de La Croissanterie, pour inexécution de ses obligations ;

- en conséquence, de condamner La Croissanterie à payer aux franchisés :

- à titre de remboursement des redevances (réduites à 10 % au taux minimum contractuel pour les années 1983, 1984 et 1985, postérieures à la résiliation des conventions) :

- à la société Lybopar : 548 205 F

- à la société Lybopar Victor-Hugo : 110 211 F

- à la société LSP : 305 122 F

- à la société LSG : 109 825 F

- à titre de dommages-intérêts :

- aux sociétés Lybopar, LSP et LSG, à chacune 200 000 F ;

- à la société Lybopar Victor-Hugo, 1 000 000 F ;

- de condamner en outre La Croissanterie à garantir les franchisés du montant des redressements fiscaux intervenus relatifs à la TVA sur les produits consommés sur place ;

La société La Croissanterie a conclu pour demander à la Cour de confirmer la sentence et, y ajoutant, de condamner les franchisés, à lui payer les redevances minima dues pour les années 1983, 1984 et 1985, sans y appliquer la réduction opérée par les arbitres, soit :

- pour la société Lybopar : 125 748 F

- pour la société Lybopar Victor-Hugo : 200 352 F

- pour la société LSP : 184 967,98 F

- pour la société LSG : 194 006 F

En réponse aux moyens invoqués par les franchisés, la société La Croissanterie soutient pour l'essentiel :

- qu'elle a satisfait à ses obligations de franchiseur, en fournissant aux franchisés une assistance suivie, en leur transmettant un savoir-faire original et en assurant leur pleine indépendance, sans jamais leur avoir imposé un prix de vente ;

- que l'article 85 du Traité de Rome est sans application en l'espèce, la clause d'exclusivité territoriale ne pouvant avoir aucun effet sensible sur l'état de la concurrence entre Etats membres de la CEE, et les accords de franchise étant, de surcroît, expressément exclus de cette application selon un règlement de la Commission des Communautés européennes du 30 novembre 1988 :

- que pas davantage ne doit s'appliquer l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, dès lors que n'est établie aucune restriction réelle de la concurrence du fait de la clause d'exclusivité territoriale ;

- qu'enfin les conventions ne contiennent aucune clause imposant une exclusivité de fourniture.

La clôture a été prononcée le 26 janvier 1989, les franchisés ont, le 27 janvier 1989, signifié des conclusions en réponse et communiqué deux pièces (observation du Conseil de la concurrence et étude du professeur Jean-Marc Mousseron), conclusions et pièces qui doivent, en conséquence, être écartées du débat.

LA COUR,

I. - Validité et rupture des contrats

Considérant que pour invoquer la nullité des contrats de franchise pour défaut de cause et d'objet, indétermination du prix, et demander à défaut la résolution ou la résiliation aux torts du franchiseur pour violation de ses obligations contractuelles, les franchisés soutiennent que ces conventions ne comportaient pas de véritable contrepartie à leur avantage et avancent, à cet égard, trois moyens principaux, tirés de la nature spécifique de la franchise qui n'aurait pas été respectée en l'espèce :

- défaut d'assistance du franchisé sous la forme de concertation, coopération, formation et publicité ;

- défaut de transmission d'un savoir-faire spécifique ;

- exigences excessives du franchiseur à l'égard des franchisés et maintien des franchisés dans un état de dépendance.

A. - Défaut d'assistance du franchisé

Considérant que les franchisés font valoir à bon droit que le contrat de franchisage implique la constitution d'un réseau de points de vente, exploité par des personnes indépendantes et l'instauration d'une concertation et d'une coopération réelles entre les franchisés eux-mêmes, appelés à confronter leurs expériences, ainsi qu'entre les franchisés et le franchiseur, qui a l'obligation de fournir aux franchisés son assistance sous la forme spécialement de conseils techniques, d'actions de formation du personnel et de promotion de la marque et des produits ;

Considérant qu'en l'espèce, un extrait produit aux débats de la " Revue technique des hôtels " daté de mars 1987 fait apparaître, dans un tableau établissant le classement des entreprises de restauration rapide, La Croissanterie au 6e rang, avec un " nombre d'unités " en France au 1er janvier 1987 de 79, parmi lesquelles ne figure aucun point de vente exploité en franchise ;

Considérant, certes, que la situation doit être examinée - au regard de la demande d'annulation des conventions - au jour de la formation des contrats (octobre 1981) et - au regard des demandes de résolution/résiliation - jusqu'à la rupture avérée en 1983 et qu'à ces deux titres, il convient de tenir compte des documents établis par le commissaire aux comptes de La Croissanterie faisant état de 19 magasins exploités par des franchisés en France en avril 1986 ;

Considérant qu'il n'en demeure pas moins que ces données de fait font apparaître clairement une désaffection progressive pour le système de la franchise au fil des années, situation peu compatible avec les principes régissant ce mode de distribution et avec le but essentiel de la franchise, qui est de rassembler une clientèle autour d'une marque représentant divers produits originaux, grâce aux efforts conjugués de professionnels réunis dans un réseau homogène ;

Considérant, en ce qui concerne l'assistance technique et la formation, que La Croissanterie produit un certain nombre de " comptes-rendus de visite " des responsables du franchiseur dans les magasins exploités par le franchisés, ces documents contenant le relevé détaillé des anomalies constatées dans l'exploitation de solutions adéquates ;

Considérant que sont également produits les programmes des diverses journées de formation organisées régulièrement par La Croissanterie, notamment à Lyon, siège des appelantes : 23 novembre 1981 pour " faire le point de connaissances acquises, exercer à apprécier les produits aborder le " S " service : 7 janvier 1982 pour expliquer le fonctionnement du " livre de bord " destiné aux responsables de magasins ; et, plus généralement, il est produit pour la période du 6 avril 1981 au 23 février 1983 - recouvrant l'exécution des contrats litigieux - des documents concernant 15 réunions de formation, portant sur divers points (animation des ventes, analyse rapide de la qualité des produits, lancement de diverses opérations de vente exceptionnelles, questions de gestion d'hygiène et de sécurité) à l'occasion desquelles le nom du responsable des magasins de la région lyonnaise (M. Guillon) figure pour les réunions et " séminaires " des 18 janvier, 22 février, 19 avril, 3 mai, 20 septembre et 25 octobre 1982, ainsi que 28 février 1983 ;

Considérant que La Croissanterie verse également aux débats des correspondances attestant de la réalisation de campagnes publicitaires (affichage sur les autobus du réseau de Lyon du 31 décembre 1981 au 6 janvier 1982 ; campagne d'affichage sur la route nationale 7 du 14 au 20 décembre 1985, fourniture d'affiches pour les magasins, notamment de la région lyonnaise, ainsi qu'une documentation intitulée " recommandation " pour les années 1981 à 1983, destinée aux franchisés et contenant l'exposé de la politique de La Croissanterie en matière de communication avec le public) ;

Considérant que si ces divers éléments apportent la preuve que La Croissanterie a mis en place et organisé un système d'échange d'informations et d'interventions techniques, ils établissent également que La Croissanterie avait instauré un contrôle étroit de la gestion et de l'exploitation commerciale des franchisés, dans des conditions de nature à compromettre leur indépendance à cet égard;

Considérant, sur la défense de la marque, que les franchisés n'apportent pas la preuve de faits précis de concurrence déloyale ou d'usage abusif de la marque dans le secteur où s'exerçait leur activité, ni de négligences commises par La Croissanterie à leur préjudice ;

Considérant que de même n'est pas fondé le moyen déduit des relations d'affaires ayant existé entre La Croissanterie et M. Guillon à propos de l'acquisition et de l'organisation du magasin de la société Lybopar Victor-Hugo, ces relations relevant des sujétions propres à la mise en place d'une exploitation commerciale exigeant le recours au crédit, sans faire apparaître, sur ces points, une situation de domination incompatible avec le statut du franchisé ;

Considérant que pour soutenir que le franchiseur imposait un fournisseur exclusif de matière première, les franchisés ne se fondent sur aucune des conventions - qui ne comportent aucune exclusivité de cette nature - mais sur une lettre du 29 avril 1981 adressée par La Croissanterie à la société Lybopar (M. Guillon) de laquelle il ressort que les franchisés devaient s'approvisionner auprès de " fournisseurs référencés " par le franchiseur - " en l'occurrence au nombre de deux : la " Boulangerie de Champagne " et " Blé d'or " - ;

Considérant, cependant, qu'une telle pratique de recommandation de fournisseurs ayant l'agrément du franchiseur n'est pas en elle-même de nature à vicier le contrat de franchise ;

B.- Transmission d'un savoir-faire spécifique

Considérant que les franchisés contestent que La Croissanterie leur ait transmis un savoir-faire original et spécifique, élément essentiel du contrat de franchise, propre à la distinguer d'un simple accord de distribution, et font valoir spécialement à cet effet - outre la carence du franchiseur dans les domaines de l'assistance, de la formation et de la publicité, qui ont été examinés plus haut - le défaut d'innovation et d'initiation à une technique originale ;

Considérant que La Croissanterie verse aux débats en réponse " le manuel des responsables de magasins " contenant la description détaillée des techniques de fabrication et de vente propres au système mis en œuvre, consistant, pour l'essentiel, à préparer ou à réchauffer sur place des produits panifiés (croissants, brioches, feuilletés) pour les proposer chauds à la clientèle, selon une technique particulière de congélation/décongélation permettant, selon le franchiseur, d'assurer le maintien d'une qualité constante, cet élément (" le chaud ") étant présenté comme " un élément-clé de l'image de marque " (norme du 28 décembre 1981) ;

Considérant que ce document a été ensuite remplacé par un manuel technique intitulé " bible exploitation " remis aux responsables de magasins en mai 1982 ;

Considérant que si au regard de ces faits la volonté de La Croissanterie de transmettre au franchisé une technique de distribution nouvelle et originale apparaît certaine, il reste que les modalités d'exécution de cette obligation primordiale du franchiseur n'ont pas été exemptes de défaillances, si l'on considère spécialement le laps de temps important qui s'est écoulé entre la signature des contrats (1981) et la diffusion des documents techniques précis indispensables à la bonne exploitation du savoir-faire transmis, de sorte que, lors de la conclusion des contrats, la formation technique des franchisés demeurait au stade empirique et était insuffisante pour assurer la mise en place et l'animation d'un véritable réseau de franchisés, aptes à développer et à mettre en valeur les techniques transmises par le franchiseur ;

C. - Exigences excessives du franchiseur et maintien des franchisés dans un état de dépendance

Considérant qu'à ce titre, les franchisés font valoir les conséquences défavorables pour la marche de leurs sociétés qu'ont produites les directives adressées par le franchiseur, dans le domaine des prix et des taux de TVA applicables, ayant conduit sur ce dernier point, à des redressement fiscaux importants ;

Considérant, sur les redressements fiscaux subis par les franchisés du fait de l'application à certains produits d'un taux de TVA minoré, que les arbitres ont justement énoncé que La Croissanterie n'avait pas la responsabilité de l'établissement des déclarations fiscales et qu'en outre il appartenait aux franchisés, exploitants indépendants, de veiller à l'application du taux de TVA convenable sur les différents produits mis en vente ;

Considérant, sur les prix, que les franchisés font état de la politique suivie par le franchiseur d'imposer aux franchisés les tarifs applicables pour les fournitures et la revente des produits ;

Considérant sur ce point, les conventions (cahier des charges, article IV, 3) stipulent l'obligation pour le franchisé " de s'inspirer des tarifs fournis par le franchiseur ", ces tarifs ayant " une valeur indicative " et constituant " dans tous les cas un maximum de prix de vente de ses services et produits ";

Considérant que si une telle clause, consistant pour le franchiseur à communiquer au franchisé des barèmes de prix indicatifs est en elle-même licite, il n'en est ainsi que dans la mesure où le franchisé conserve une réelle autonomie dans la fixation du prix de revente;

Considérant que tel n'est pas le cas lorsque le franchisé se trouve, en fait, dans l'obligation d'appliquer le tarif transmis par le franchiseur et que cette tarification, généralisée à l'ensemble du réseau, conduit à l'établissement de prix uniformes caractérisant ainsi à la fois une violation des obligations de concertation et de coopération du franchiseur, une méconnaissance du statut d'indépendance du franchisé et une pratique anticoncurrentielle d'entente illicite;

Considérant qu'en l'espèce, les franchisés produisent aux débats les documents par lesquels le franchiseur leur transmettait le tarif, tant des fournitures que des produits mis en vente, sous la forme de " normes " intitulées " tarif " et présentées dans leur en-tête sous la rubrique " impérative " (les autres rubriques prévues étant : "indicative", "conseillée" et "négociable");

Considérant que sont ainsi versés aux débats une " norme " du 22 mars 1983, relative au tarif de fourniture auprès des deux fournisseurs " référencés ", auxquels se réfère expressément avec le même caractère obligatoire, une lettre du franchiseur en date du 20 juillet 1981 - ainsi que des tarifs de vente (datés des 6 octobre 1981 et 1er novembre 1982) comportant la nomenclature de tous les produits vendus avec leur prix, toujours présenté sous la forme " impérative " ;

Considérant que cette pratique de prix imposés par le franchiseur est confirmée par la production aux débats d'une lettre faisant état d'un contrôle du service de la concurrence de la consommation (lettre du 5 juillet 1983 et procès-verbal du 2 juin 1983 constatant la pratique de prix illicites sur les boissons) ainsi que par jugement correctionnel du Tribunal de Lyon du 28 janvier 1986, concernant des faits de novembre 1982 et février 1983, portant condamnation de M. Guillon, gérant de la société Lybopar pour pratique de prix illicites, le président-directeur général de La Croissanterie étant lui-même retenu dans les liens de la prévention et condamné du chef de complicité de ce délit " pour instructions données en imposant des prix de boissons dans la cadre d'un contrat de franchise " ;

Considérant qu'il apparaît ainsi qu'en l'espèce La Croissanterie, en imposant aux franchisés des tarifs de fourniture et de revente de produits, réduisait à néant l'initiative du franchisé dans la gestion de son entreprise et agissant en véritable propriétaire du fonds, sans concertation avec le franchisé et en méconnaissance des obligations essentielles résultant du contrat de franchise;

Considérant que la situation ainsi caractérisée plaçait le franchisé dans un situation de dépendance économique incompatible avec la nature même du contrat dans lequel le franchisé demeure un commerçant indépendant;

Considérant, en définitive, que les différents éléments retenus :

- désagrégation progressive du réseau de franchise ;

- contrôle étroit de la gestion et de l'exploitation des magasins en franchise ;

- défaillance dans la transmission du savoir-faire ;

- pratique de prix imposés;

caractérisent une immixtion excessive de La Croissanterie dans l'exploitation de leurs commerces par les franchisés, traités dans les faits en simple concessionnaires, et consacrent de la part du franchiseur une méconnaissance de ses obligations contractuelles;

Considérant que l'inexécution ainsi relevée à l'encontre de La Croissanterie, si elle n'est que partielle - en ce que le franchiseur a effectivement fourni certaines des prestations lui incombant, - n'en affecte pas moins les obligations essentielles et spécifiques du contrat de franchise, et a entraîné une véritable dénaturation des rapports entre les contractants;

Qu'elle apparaît d'une gravité suffisante pour priver de cause l'obligation des franchisés, qui n'auraient pas contracté s'ils avaient pu prévoir une telle altération du contrat, de sorte que l'inexécution partielle doit, dans les circonstances de la cause et s'agissant de conventions indivisibles, entraîner la résolution;

II. - Conséquences de la résolution

Considérant que, s'appliquant à des contrats à exécution successive, la résolution n'a pas d'effet rétroactif, toutes les obligations des parties étant éteintes à la date de la dissolution du lien contractuel, que le Tribunal arbitral a, dans les circonstances de l'espèce, justement fixé au 30 avril 1983 ;

Considérant qu'en conséquence, la légitime réparation due aux franchisés pour le préjudice résultant pour eux de l'inexécution - et spécialement de la pratique des prix imposés - doit prendre la forme d'une compensation pécuniaire qui, pour être adéquate, doit tenir compte à la fois de la gravité des manquements imputables à La Croissanterie et des prestations et avantages dont les franchisés ont en fait conservé le bénéfice pendant un certain laps de temps, ainsi que des sommes dont ils étaient redevables envers le franchiseur au titre de diverses factures;

Considérant que c'est en fonction de ces divers éléments d'appréciation que la Cour a fixé les indemnités qui sont mises à la charge de La Croissanterie et qui vont être énoncées au dispositif ci-après ;

Par ces motifs, Réformant la sentence attaquée ; Prononce la résolution des conventions conclues entre la société La Croissanterie d'une part et les sociétés Lybopar, Lybopar Victor-Hugo, LSP et LSG d'autre part ; Condamne la société La Croissanterie à payer, à titre de dommages-intérêts : à la société Lybopar, la somme de 160 000 F ; à la société Lybopar Victor-Hugo, la somme de 200 000 F ; à la société LSP, la somme de 140 000 F et à la société LSG, la somme de 160 000 F ; Met les dépens à la charge de la Sté la Croissanterie et admet Maître Huyghe, avoué, au bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile..