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Décisions

CA Lyon, 3e ch., 15 janvier 1993, n° 9204713

LYON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Fiat Auto France (SA)

Défendeur :

Pyramide (SA), Garnier (Sté), Sapin (ès qual.), Dubois (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Durand

Conseillers :

Mme Robert, M. Roux

Avocats :

Mes Vitoux, Covillard.

T. com. Lyon, du 27 juill. 1992

27 juillet 1992

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Suivant contrat en date du 23.12.1985 la société Fiat Auto France confiait à la société Garage de la Pyramide implantée à Lyon la concession exclusive de la distribution de ses véhicules et des services accessoires ;

Par exploit en date du 26.04.1991 la société Garage de la Pyramide et la société Civile Garnier son actionnaire majoritaire, assignaient la société Fiat Auto France devant le Tribunal de commerce de Lyon aux fins de voir prononcer la résolution du contrat de concession aux torts de celle-ci pour agissements discriminatoires et violations d'administrateur et de représentant des créanciers ;

Suite à l'ouverture du redressement judiciaire de la société Garage de la Pyramide par jugement du 15.06.1991, Me Sapin et Me Dubois intervenaient volontairement à cette instance en leur qualité respective d'administrateur et de représentant des créanciers ;

Par courrier en date du 11.06.1991 la société Fiat Auto France notifiait à la société Pyramide la résiliation du contrat pour défaut de renouvellement du cautionnement bancaire par la société concessionnaire ;

Ayant opté pour la poursuite du contrat de concession Me Sapin, se heurtant à l'inertie de la société Fiat Auto France, présentait le 13.06.1991 au juge commissaire une requête tendant à voir contraindre celle-ci à en poursuivre l'exécution ;

Par ordonnance en date du 12.07.1991 le juge commissaire, faisant droit à cette requête, enjoignait sous astreinte à la société Fiat Auto France d'assurer la livraison des véhicules commandés et la délivrance des documents administratifs s'y rapportant ;

Refusant d'obtempérer la société Fiat Auto France formait opposition à cette ordonnance devant le Tribunal de commerce de Lyon après avoir, par exploit du 28.06.1991, fait assigner devant le Tribunal de commerce de Paris, désigné au contrat comme juridiction compétente en cas de litige, la société Garage de la Pyramide et ses représentants aux fins de voir constater la résiliation du contrat aux torts de celle-ci ;

Par jugement en date du 08.04.1992, confirmé par arrêt du 28.10.1992, le Tribunal de commerce de Paris, faisant droit à l'exception soulevée par la société Garage de la Pyramide et les organes de son redressement, se déclarait incompétent au profit du Tribunal de commerce de Lyon appelé à statuer sur la poursuite du contrat dans le cadre de la procédure engagée par voie d'opposition à l'ordonnance du juge commissaire ;

Parallèlement le Tribunal de commerce de Lyon, statuant sur l'action en résiliation introduite par la société Garage de la Pyramide et la société Garnier, rendait le 27.07.1992 un jugement aux termes duquel, rejetant les exceptions d'incompétence territoriale et de connexité soulevées par la société Fiat Auto France au profit du Tribunal de commerce de Paris, il se déclarait compétent mais sursoyait à statuer au fond dans l'attente de la décision à intervenir dans l'instance engagée sur opposition à l'ordonnance du juge commissaire ;

Ayant formé contredit à cette décision la société Fiat Auto France, renonçant à son exception de connexité, fait valoir au soutien de ses prétentions tendant à voir renvoyer l'affaire devant la Cour d'appel de Paris et se voir allouer 20.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

- que fondée sur des faits antérieurs à l'ouverture du redressement judiciaire et ne requièrant pas la mise en jeu des dispositions spécifiques aux procédures collectives, l'action en résiliation de contrat introduite par la société Pyramide, bien que reprise par les organes de son redressement judiciaire, relève de la compétence du juge du contrat soit en l'occurrence le Tribunal de commerce de Paris désigné par les parties aux termes de la clause attributive de compétence figurant audit contrat ;

- que présentant un caractère accessoire la demande formée par la société Garnier à laquelle cette clause n'est pas opposable ne saurait faire échec à cette dévolution de compétence ;

La société Garage de la Pyramide, Me Sapin et Me Dubois, es-qualités et la société Garnier, aux termes de leurs conclusions communes tendant à la confirmation du jugement et à la condamnation de la société Fiat Auto France à verser à chacun d'eux une indemnité de 20.000 F pour frais de procédure, font valoir :

- que les dispositions d'ordre public de l'article 174 de la loi du 25.01.1985 attribuant compétence exclusive au Tribunal saisie d'une procédure de redressement sont applicables en l'espèce dès lors que, bien que trouvant sa cause dans des faits antérieurs au jugement d'ouverture, l'action a une incidence directe sur la procédure d'apurement du passif ;

- que la clause attributive de compétence invoquée par la société Fiat Auto France n'est d'ailleurs opposable ni à Me Dubois représentant des créanciers ni à la société Garnier codemanderesse à l'action ;

- qu'il est de surcroît de l'intérêt de l'administration d'une bonne justice de regrouper toutes les procédures concernant la société Fiat Auto France devant le Tribunal du redressement judiciaire qui se trouve saisi de l'opposition à l'ordonnance du juge commissaire ayant enjoint à la société Fiat Auto France d'exécuter le contrat ;

MOTIFS ET DECISION

Attendu que la société Fiat Auto France est bien fondée à soutenir que trouvant sa cause dans les conditions d'exécution du contrat de concession antérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire de la société Garage de la Pyramide le présent litige est étranger à cette procédure et que tendant à la réparation du préjudice né de la prétendue inexécution fautive de ses obligations de concédante l'action en cause est dépourvue par son objet de toute incidence sur les opérations du redressement judiciaire ;

Mais attendu que dans le cadre des opérations de redressement judiciaire le juge commissaire a été amené à rendre une ordonnance qui, ayant pour finalité de contraindre la société Fiat Auto France à poursuivre l'exécution de ses obligations contractuelles et, le cas échéant de sanctionner son refus, est de nature à influer sur l'appréciation des infractions contractuelles imputées à la société Fiat Auto France avant l'ouverture du redressement judiciaire;

Or, attendu que cette ordonnance ayant été frappée d'opposition par la société Fiat Auto France, les défenderesses au contredit sont bien fondées à soutenir que la décision que le Tribunal de commerce de Lyon sera amené à rendre dans cette instance, qui relève de sa compétence exclusive en vertu des dispositions de la loi du 25.01.1985, est de nature à influer sur l'objet de la présente instance;

Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté de son exception d'incompétence la société Fiat Auto France dont le contredit sera en conséquence rejeté ;

Que l'équité commande qu'elle soit condamnée à verser aux parties défenderesses une indemnité globale de 10 000 F en vertu des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Par ces motifs : Déboute la société Fiat Auto France des fins de son contredit de compétence ; Confirme en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a retenu sa compétence ; Condamne la société Fiat Auto France à verser aux parties défenderesses une indemnité de 10 000 F en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toutes autres demandes ; Condamne la société Fiat Auto France aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de Me Verrière, avoué.