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Décisions

Cass. com., 23 février 1993, n° 91-11.205

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Société d'Importation Pétrolière Édouard Leclerc (Sté)

Défendeur :

Parfums Christian Dior (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Léonnet

Avocat général :

M. Curti

Avocats :

SCP Tiffreau, Thouin-Palat, Me Capron.

TGI Paris, du 28 nov. 1984

28 novembre 1984

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches : - Attendu que selon l'arrêt attaqué (Lyon, 3 décembre 1990), rendu sur renvoi après cassation, la société des Parfums Christian Dior, qui fabrique et distribue des parfums de luxe sous différentes marques, faisant valoir qu'elle les commercialisait par un réseau de distribution, et alléguant une atteinte aux droits de la marque et des faits de publicité mensongère, a demandé que soit condamnée la société d'importation pétrolière Édouard Leclerc (SIPLEC), intermédiaire non agréé, pour l'importation et la vente des produits en cause ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné la société SIPLEC, alors selon le pourvoi, d'une part, qu'il incombe au fabricant invoquant le bénéfice d'un réseau de distribution sélective dérogatoire aux principes de liberté du commerce et d'interdiction du refus de vente de rapporter la preuve, non seulement de la licéité mais également de l'étanchéité de ce réseau, en démontrant d'une part, n'avoir vendu ses produits qu'à des distributeurs agréés et, d'autre part, avoir pris les mesures propres à empêcher la revente de ses produits à des tiers au réseau ; que dès lors, en se bornant à déclarer que la société anonyme des Parfums Christian Dior aurait rapporté la preuve de la licéité de son réseau, sans rechercher si, ce qui était contradictoire avec l'affirmation qu'un ou plusieurs revendeurs agréés avaient enfreint leurs obligations contractuelles, le fabricant démontrait avoir pris les mesures propres à empêcher la revente de ses produits à des tiers au réseau, sans lesquelles ne pouvait être tenue pour rapportée la preuve de l'échantéité de celui-ci, comme l'avait soutenu la société SIPLEC dans ses conclusions, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'en imputant à la société SIPLEC un acte de concurrence déloyale, au seul motif que l'acquisition des produits par la société SIPLEC s'est faite en violation du réseau de distribution sélective de la société Dior dont un ou plusieurs revendeurs agréés ont enfreint leurs obligations contractuelles, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; alors au surplus, qu'en postulant que l'acquisition des produits par la société SIPLEC s'est faite en violation du réseau de distribution sélective de la société Dior dont un ou plusieurs revendeurs agréés ont enfreint leurs obligations contractuelles sans avoir constaté la conclusion de contrats précis avec un ou plusieurs distributeurs agréés déterminés, et après avoir relevé, ce qui était contradictoire, que cette acquisition avait été réalisée par l'intermédiaire de la société Becklodge Limited extérieure au réseau de distribution sélective du fabricant, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; alors en toute hypothèse, qu'en s'abstenant de rechercher si, à supposer que la SIPLEC se fût approvisionnée dans des conditions fautives auprès d'un ou plusieurs distributeurs agréés de la société des Parfums Christian Dior, cette dernière avait rapporté la preuve de la prise de mesures propres à assurer l'étanchéité de son réseau et la discipline de ses membres, faute de quoi le fabricant aurait été à l'origine de son prétendu dommage en ayant offert l'occasion et les moyens de l'acte qualifié de concurrence déloyale, la cour d'appel a privé de base légale son arrêt au regard de l'article 1382 du Code civil ; et, alors enfin, qu'en imputant à la société SIPLEC un acte de concurrence déloyale, pour avoir mis sur le marché des produits authentiques portant la mention " ne peut être vendu que par des distributeurs agréés ", au motif d'ailleurs inopérant tiré de l'emploi d'un procédé de nature à favoriser la vente de marchandises sur la fraîcheur desquelles la clientèle se trouvait entièrement rassurée, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté que la société Christian Dior établissait la licéité de son réseau de distribution sélective, et sans que cette dernière ait également à faire la preuve de l'étanchéité de son réseau, la cour d'appel a pu, hors de toute contradiction, au vu des éléments de preuve qui étaient soumis à son appréciation, retenir que les acquisitions de parfums par la société SIPLEC s'étaient faites en violation de son réseau de distribution sélective dont un ou plusieurs revendeurs agréés avaient enfreint leurs obligations contractuelles;

Attendu, en second lieu, qu'abstraction faite de tout autre motif, la cour d'appel a pu décider qu'en mettant sur le marché un produit portant la mention " ne peut être vendu que par des distributeurs agréés ", la société SIPLEC avait commis une faute constitutive de concurrence déloyale;d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches :

Par ces motifs : rejette le pourvoi.