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Décisions

Cass. soc., 24 mars 1999, n° 96-42.927

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

MACC Bâtiment (SA)

Défendeur :

Logelin

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Roux-Cocheril

Rapporteur :

M. Texier

Avocat général :

M. de Caigny

Avocat :

SCP Gatineau.

Aix-en-Provence, 9e ch. soc., du 31 janv…

31 janvier 1996

LA COUR : - Attendu que M. Logelin a été engagé, le 2 mai 1979, en qualité de VRP exclusif par la société Manufacture d'armes et de cycles de Châtellerault, devenue société MACC Bâtiment; qu'il a été licencié pour faute grave le 29 mars 1991 et a saisi le conseil de prud'hommes en paiement de diverses sommes;

Sur les trois premiers moyens, réunis : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 31 janvier 1996) d'avoir jugé le licenciement de M. Logelin non fondé sur une cause réelle et sérieuse et d'avoir estimé que le motif d'insuffisance de résultat invoqué par l'employeur n'était pas réel, alors, selon les moyens, que le courrier du 5 mars 1991 auquel la cour d'appel faisait référence subordonnait le maintien du salarié dans l'entreprise à certaines conditions que l'employeur jugeait nécessaires à la continuation du contrat et que le salarié devait refuser (modification de secteur, réitération d'engagements de minima contractuels), si bien que la cour d'appel a dénaturé la lettre du 5 mars 1991, violant l'article 1134 du Code civil; alors, ensuite, que le courrier du 5 mars 1991 avait procédé d'une préoccupation humaniste de sauver l'emploi menacé par le comportement du salarié, ce qui lui donnait une toute autre portée que celle admise par la cour d'appel, et qu'en l'ignorant, cette juridiction a encore dénaturé la lettre litigieuse, violant l'article 1134 du Code civil; alors, ensuite, que l'article L. 122-14-4 du Code du travail exige une cause sérieuse au licenciement, mais ne requiert pas qu'elle empêche absolument la continuation du contrat de travail, si bien que la cour d'appel a violé ce texte; alors, ensuite, que la demande de M. Logelin, exprimée par courrier du 11 mars 1991, ne pouvait constituer la cause du licenciement puisqu'elle répondait à l'alternative proposée par l'employeur dans un courrier du 5 mars 1991, d'un maintien sous certaines conditions dans l'entreprise ou d'un licenciement pour des causes déjà connues et exprimées dans son courrier du 5 mars 1991 et dans un courrier antérieur du 28 février 1991, et ayant justifié une convocation à entretien préalable du 5 mars 1991, si bien qu'ainsi, la cour d'appel a dénaturé ces trois courriers, violant l'article 1134 du Code civil; alors, ensuite, que, ne précisant pas sur quelles pièces elle appuyait son jugement, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation à même d'exercer son contrôle sur la décision attaquée (violation de l'article 544 du nouveau Code de procédure civile); alors, ensuite, que, dans ses propres conclusions d'appelant, M. Logelin avait écrit que ces diverses modifications avaient été acceptées par lui et n'étaient pas à remettre en cause, si bien que la cour d'appel, passant outre cet aveu judiciaire, a violé, en statuant comme elle l'a fait, les articles 1134 et 1356 du Code civil; alors, ensuite, que l'insuffisance de résultat, comme la MACC Bâtiment l'avait souligné dans ses conclusions, dénoncée dans la lettre de licenciement, était en réalité un manquement aux obligations contractuelles de minima du représentant qu'il se devait de respecter en toute circonstance, si bien que la cour d'appel a, dans cette perspective, également dénaturé à la fois la lettre de licenciement, le contrat de travail de M. Logelin et les conclusions de la MACC Bâtiment, laissées sans réponse sur ce point, et violé l'article 1134 du Code civil; alors, enfin, que les conclusions de la MACC Bâtiment mettaient en évidence que ces manquements ne touchaient pas simplement le chiffre d'affaires que réalisait M. Logelin, mais également le nombre des visites défini par le contrat de travail, sur lequel des modifications de secteur ne pouvaient avoir eu aucune influence, si bien que la cour d'appel d'Aix-en-Provence a, à cet égard, également dénaturé le contrat de travail de M. Logelin et les conclusions de la MACC Bâtiment et violé l'article 1134 du Code civil;

Mais attendu qu'usant des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, la cour d'appel a relevé, sans dénaturation, que les changements de secteur effectués par l'employeur avaient eu une incidence sur les résultats du salarié et qu'en acceptant de garder le salarié à son service, l'employeur admettait que les griefs précédemment invoqués d'insuffisance de résultats et de refus d'obtempérer aux instructions n'étaient pas incompatibles avec la poursuite des relations contractuelles et a décidé que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse; que les moyens ne sont pas fondés;

Sur le quatrième moyen : - Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt d'avoir alloué à M. Logelin l'indemnité spéciale de rupture qui substitue l'indemnité de clientèle prévue par l'article 14 de la convention collective nationale des voyageurs, représentants, placiers, alors, selon le moyen, que l'employeur peut parfaitement s'opposer et le représentant peut parfaitement renoncer, dans le contrat de travail, à l'indemnité spéciale de rupture de l'article 14 de la convention nationale des voyageurs, représentants, placiers, et qu'elle a dénaturé le contenu de la convention collective, violant encore l'article 1134 du Code civil; et alors que l'arrêt frappé de pourvoi a également omis de répondre aux conclusions de l'employeur qui justifiaient, en toute hypothèse, la privation de l'indemnité spéciale de rupture par la gravité des fautes commises par le représentant, qui devait subsister pour l'analyse des conditions d'octroi de l'indemnité, même si la faute n'était qualifiée que de réelle et sérieuse au regard du licenciement, violant les articles 4, 5 et 455 du nouveau Code de procédure civile; alors, enfin, que l'allocation de l'indemnité conventionnelle de rupture ne pouvant valoir reconnaissance d'un droit à indemnité spéciale de rupture, alors que les deux indemnités ne suivent pas le même régime et ne sont pas de même nature (violation de l'article 1134 du Code civil), et alors que, d'ailleurs, nul ne l'avait soulevé, ce qui faisait que la cour d'appel aurait dû préalablement soumettre l'argument aux parties (violation de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile);

Mais attendu qu'un salarié ne peut renoncer, pendant la durée du contrat de travail, à un avantage qu'il tient d'une convention collective;

Et attendu que la cour d'appel, qui a relevé que le salarié pouvait, s'il remplissait les conditions conventionnelles, réclamer l'indemnité spéciale de rupture qui se substitue à l'indemnité de clientèle, qu'il n'était pas tenu de justifier qu'il avait droit à une indemnité de clientèle et qu'il n'avait pas commis de faute grave, a légalement justifié sa décision; que le moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.