Cass. soc., 13 novembre 2002, n° 00-46.705
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Morlot
Défendeur :
Neofeu (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Finance (faisant fonctions)
Rapporteur :
Mme Maunand
Avocat général :
M. Fréchède
Avocats :
SCP Masse-Dessen, Thouvenin, SCP Delaporte, Briard.
LA COUR : - Attendu que M. Morlot a été engagé à temps complet par contrat du 1er mars 1981, en qualité de représentant à titre exclusif, par la société Néofeu ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de la rémunération minimale forfaitaire prévue à l'article 5-1 de l'accord national interprofessionnel des VRP et en résiliation de son contrat de travail en raison du non-respect par l'employeur de ses obligations contractuelles;
Sur le premier moyen: - Attendu que M. Morlot fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 24 octobre 2000) de le débouter de sa demande de rappel de salaires et de congés payés y afférents, de dire que la rupture de son contrat de travail n'était pas imputable à la société Néofeu et de l'avoir, en conséquence, débouté de ses demandes d'indemnités liées à la rupture ainsi que de ses demandes de documents liées au contrat et à la rupture alors, selon le moyen, que la modification de la rémunération contractuelle du salarié, serait-ce une diminution de l'assiette contractuelle de cette rémunération, constitue une modification du contrat de travail ; que si le contrat de travail de M. Morlot prévoyait une diminution du taux de commissionnement en cas de remise de 2 à 40 %, il n'était stipulé aucune diminution de ce taux en cas de remise supérieure à 40 % ; qu'en affirmant qu'au-delà de ce taux de remise, l'absence de commissionnement était contractuellement prévue et avait été acceptée par le salarié, en sorte que les remises de plus de 65 % étant prévues, le contrat n'avait pas été modifié par la mise en œuvre de ce taux, la cour d'appel a dénaturé les termes du contrat et violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a, sans dénaturation, fait application de la clause du contrat de travail prévoyant le taux résiduel de commission en cas de remise et a pu considérer que le contrat de travail de M. Morlot n'avait pas été modifié par l'application de ladite clause à des remises de 65 % accordées à l'initiative du salarié; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur la première branche du second moyen: - Vu le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, les articles L. 120-2 et L. 751-1 du Code du travail, l'article 5-1 de l'accord national interprofessionnel des VRP ; - Attendu que la clause selon laquelle un salarié s'engage à consacrer l'exclusivité de son activité à un employeur porte atteinte à la liberté du travail; qu'elle n'est valable que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise et si elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché; qu'il en résulte qu'un salarié qui s'engage à travailler pour un employeur à titre exclusif ne peut se voir opposer qu'il travaille à temps partiel et interdire de se consacrer à temps complet à son activité; qu'un VRP, s'il est engagé à titre exclusif, a droit à la rémunération minimale forfaitaire prévue par l'article 5-1 de l'accord national interprofessionnel sans que l'employeur puisse prétendre qu'il n'exerce son activité qu'à temps partiel;
Attendu que pour rejeter les demandes du salarié tant en ce qui concerne la rémunération que la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a dit qu'il n'était pas établi que M. Morlot avait exercé une activité effective suffisante pour pouvoir prétendre au salaire minimum conventionnel alors qu'en sa qualité de VRP exclusif, il devait consacrer tout son temps à visiter la clientèle et rendre compte de son activité à la société Néofeu, qu'ainsi la rupture du contrat de travail ne pouvait pas être imputée à l'employeur;
Attendu, cependant, que la cour d'appel a constaté que le salarié avait été engagé à temps complet en qualité de VRP à titre exclusif;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le salarié avait droit à la rémunération minimale forfaitaire prévue par l'accord national interprofessionnel des VRP, la cour d'appel a violé les textes susvisés;
Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du second moyen : casse et annule, mais seulement en ses dispositions relatives au paiement de la rémunération minimale forfaitaire prévue par l'accord national interprofessionnel des VRP, l'arrêt rendu le 24 octobre 2000, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.