Cass. soc., 29 octobre 2002, n° 00-45.966
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Altrad Equipement (Sté)
Défendeur :
Pineau
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Merlin (faisant fonctions)
Rapporteur :
Mme Maunand
Avocat :
Me Odent.
LA COUR : - Attendu que M. Pineau a été embauché par la société Somefran, le 23 juillet 1979, en qualité d'agent technico-commercial ; que, par contrat de travail du 1er janvier 1984, il a acquis le statut de VRP ; que l'article 7 de ce contrat prévoyait que le calcul des commissions s'effectuait sur les commandes acceptées et enregistrées par le siège, le service commercial ayant toute faculté pour refuser la commande ; que la société Altrad est venue aux droits de la société Somefran; que M. Pineau a saisi la juridiction prud'homale le 4 mai 1992, d'une demande en paiement de commissions puis le 29 août 1995 de demandes tendant à voir prononcer la rupture de son contrat de travail, aux torts de son employeur et obtenir le paiement des indemnités afférentes à un licenciement sans cause réelle et sérieuse outre des indemnités de clientèle, au titre de la clause de non-concurrence, des dommages-intérêts et des commissions ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la société Altrad fait grief à l'arrêt attaqué (Bastia, 12 septembre 2000) de la condamner à payer à M. Pineau, des commissions et à lui rembourser des retenues sur rémunérations alors, selon le moyen, que le contrat de travail conclu entre un employeur et un VRP définit librement les conditions du droit à commission de celui-ci; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui, après avoir relevé que le contrat de travail conclu entre M. Pineau et la société Altrad Equipement prévoyait que le droit à commission du salarié était subordonné à l'acceptation des commandes par l'employeur, lequel avait toujours la faculté de les refuser, a ensuite décidé que de tels refus étaient inopposables à M. Pineau, a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu, que la cour d'appel a constaté que les commandes annulées ne provenaient pas de clients douteux et qu'elles n'apparaissaient pas inacceptables, en raison d'une faute du salarié; qu'elle a pu, dès lors, considérer que l'employeur qui, sans motif légitime, avait refusé les commandes prises par M. Pineau, avait abusé du droit de refuser des commandes qu'il tenait du contrat de travail et décidé, que le paiement des commissions réclamées était dû ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société Altrad fait encore grief à l'arrêt de dire que le licenciement de M. Pineau était sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen, que le contrat de travail liant un VRP à son employeur détermine librement les conditions du droit à commission du salarié ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui a fondé sa décision de déclarer le licenciement de M. Pineau sans cause réelle et sérieuse, sur les seuls refus de commissions opposés par l'employeur au salarié en conséquence de commandes annulées, doit voir sa décision censurée sur ce point par voie de conséquence, en application de l'article 624 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, que la cour d'appel ayant décidé que le paiement des commissions était dû en raison du caractère abusif du refus de l'employeur des commandes prises par M. Pineau, en a exactement déduit que le manquement de la société Altrad au paiement des commissions, rendait imputable à cette dernière la rupture du contrat de travail qui s'analysait, dès lors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen : - Vu l'article 1-7° de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie; - Attendu que ce texte énonce que : "l'ingénieur ou le cadre rémunéré essentiellement sur le chiffre d'affaires ou d'après la prospérité de l'entreprise ou de l'établissement, est visé par les clauses de la présente convention collective, à l'exception des représentants de commerce qui ressortissent à une autre convention collective ou au statut légal de VRP" ;
Attendu que, pour allouer à M. Pineau, une somme de 64 137 francs au titre de l'indemnité de préavis et une somme de 128 274,50 francs, au titre de la clause de non-concurrence, la cour d'appel qui a constaté que le salarié avait le statut de VRP, a fait référence aux dispositions des articles 27 et 28 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. Pineau, en sa qualité de VRP, ne pouvait être soumis aux dispositions de cette convention collective, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs: casse et annule, mais seulement en ses dispositions relatives à l'indemnité de préavis et relative à la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 12 septembre 2000, entre les parties, par la Cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence.