Cass. com., 15 octobre 2002, n° 99-15.164
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Mach 1 (SA)
Défendeur :
ITC (SA), Scarfogliero (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
(faisant fonctions) : M. Tricot
Rapporteur :
Mme Tric
Avocats :
SCP Defrénois, Levis, Me Blondel.
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Lyon, 26 mars 1999) que la société Mach 1 ayant été mise en redressement judiciaire, l'administrateur judiciaire a résilié, par lettre du 25 mars 1997, le contrat d'agence commerciale d'une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction la liant à la société ITC ; que le juge-commissaire a prononcé l'admission définitive, à titre chirographaire, des créances de la société ITC pour un montant de 317 258,79 F TTC au titre d'un solde de commissions et de 5 518 347,20 F TTC à titre "d'indemnité de clientèle" ; que la cour d'appel a confirmé la décision, sauf à admettre la créance d'indemnité pour la somme de 5 261 088,59 F HT ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la société Mach 1 reproche à l'arrêt d'avoir été rendu dans la "Composition de la cour lors des débats et du délibéré : M. Karsenty, désigné par ordonnance du 12 décembre 1997 pour présider la chambre commerciale, Mme Robert, conseiller, M. Ruellan, conseiller, Greffier: Mme Pelletier", alors, selon le moyen, qu'il ressort des énonciations de la cour que le greffier a assisté au délibéré des magistrats, d'où il suit que l'arrêt a été rendu en violation des articles 447, 448 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il ne résulte pas de la mention critiquée que le greffier, qui fait partie de la composition de la juridiction, ait participé au délibéré ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses cinq branches : - Attendu que la société Mach 1 reproche encore à l'arrêt d'avoir fixé à la somme de 5 261 088,59 F la créance de la société ITC au passif de la société Mach 1 au titre de l'indemnité de clientèle, alors, selon le moyen : 1°) que la tacite reconduction, reposant sur une présomption de volonté des parties, est exclue dans le cas où l'une des parties a régulièrement manifesté son intention de ne pas renouveler le contrat à son terme ; qu'ainsi, en considérant que le contrat d'agent commercial à durée déterminée conclu le ler septembre 1989 avait été reconduit d'année en année jusqu'au 24 mars 1997, après avoir relevé que le 17 avril 1992, la société Mach 1 avait notifié à la société ITC son intention de ne pas renouveler le contrat à son terme, soit le ler septembre 1992, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; 2°) que la renonciation à un droit ne se présume pas mais doit résulter d'actes clairs et dépourvus de toute équivoque manifestant la volonté de renoncer ; que la cour d'appel, qui a considéré que la société Mach 1 avait renoncé au bénéfice de la dénonciation du contrat d'agent commercial conclu le ler septembre 1989, après avoir pourtant constaté qu'elle avait seulement accepté, postérieurement à cette dénonciation, de poursuivre le mandat confié à la société ITC sans autres conditions financières, a violé l'article 1134 du Code civil ; 3°) qu'en considérant que les parties avaient reconduit le contrat d'agent commercial du ler septembre 1989, après avoir constaté qu'après avoir dénoncé le contrat à son terme, la société Mach 1 avait offert à la société ITC de poursuivre "le mandat" sous réserve d'une réduction du taux de commission et que cette dernière avait accepté cette offre sous réserve que la modification affectant le taux de commission ne soit que temporaire, ce dont il résultait que les parties ne s'étaient pas accordées sur un élément essentiel du contrat à reconduire, la cour d'appel n'a pas justifié légalement son arrêt au regard des articles 1101 et 1134 du Code civil ; 4°) qu'en considérant que postérieurement à la dénonciation du contrat d'agent commercial par la société Mach 1 le 17 février 1992, les parties l'avaient reconduit d'année en année jusqu'au 24 mars 1997, après avoir constaté que la société ITC n'avait pas renouvelé son inscription au registre spécial des agents commerciaux, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et 4 du décret du 27 décembre 1958 ; 5°)que, selon l'article 2 de la loi du 25 juin 1991, sont soumis à cette loi les contrats d'agence en cours au ler janvier 1994 ; qu'après avoir constaté que la société ITC n'avait pas renouvelé son inscription au registre spécial à partir de 1992, la cour d'appel, qui a décidé que les dispositions de la loi du 25 juin 1991 devaient être appliquées au contrat liant les parties au ler janvier 1994, a violé l'article 2 de cette loi ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé qu'après la manifestation de l'intention de la société Mach 1 de ne pas renouveler le contrat d'agence commerciale au-delà de son terme fixé au 1er septembre 1992, les relations entre les parties se sont poursuivies pendant plusieurs années jusqu'à ce que l'administrateur judiciaire y mette fin par lettre du 24 mars 1997, l'arrêt retient que la commune intention des parties, exprimée par leur correspondance et les notes internes, a été de poursuivre le contrat selon les mêmes modalités, la seule modification apportée ayant consisté en la réduction temporaire du taux de commissionnement de l'agent, puis son augmentation; qu'ainsi, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt constate que le contrat s'est poursuivi au-delà de son terme, fixé au 1er septembre 1992, et jusqu'en 1997; qu'il retient, par motifs adoptés, que le renouvellement de l'inscription sur le registre spécial des agents commerciaux était devenu inutile en 1992; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, desquelles il résulte qu'un nouveau contrat a été conclu après l'entrée en vigueur de la loi du 25 juin 1991 qui n'a pas maintenu l'obligation de s'inscrire au registre spécial des agents commerciaux, la cour d'appel a légalement justifié sa décision;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société Mach 1 fait enfin le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen, que dans ses conclusions signifiées le 9 octobre 1998, elle faisait valoir que la cessation des relations contractuelles étant intervenue le 29 mars 1997, il convenait de tenir compte, pour évaluer l'indemnité de clientèle, du montant des deux années de commissions précédant immédiatement la rupture, soit des commissions perçues entre les mois d'avril 1995 et mars 1997, ce qui représentait 3 653 619,29 F ; qu'en retenant le montant des commissions perçues au cours des deux derniers exercices précédant la rupture, sans répondre aux conclusions de la société Mach 1 qui discutaient le contenu de l'usage invoqué par la société ITC pour évaluer l'indemnité de clientèle, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, relevant la durée du mandat, la diminution substantielle du chiffre d'affaires après la cessation du contrat à la suite de la rupture sans préavis et les usages invoqués par les parties, la cour d'appel a fixé souverainement le préjudice subi sur la base des commissions perçues au cours des deux années précédant la rupture, répondant par-là même en les écartant aux conclusions du mandant qui proposait le calcul sur une autre base; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.