CA Lyon, 3e ch., 18 septembre 1998, n° 95-05862
LYON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Jobin (SA)
Défendeur :
Financière Zannier Sofiza (SCF), Zannier (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bailly
Conseillers :
Mme Martin, M. Ruellan
Avocats :
Mes Akroune, Genin.
Faits procédure et prétentions des parties
Le 12 juillet 1985 a été conclu entre la société Financière Zannier Sofiza et la société Jobin ayant son siège 60 cours Lafayette à Toulon un contrat de franchise par lequel la société Zannier accordait à la société Jobin le droit d'utiliser à titre d'enseigne la marque Z et de bénéficier du savoir-faire et de l'assistance technique du franchiseur en matière de distribution de vêtements d'enfants ainsi qu'une exclusivité territoriale, en lui imposant en contrepartie un contrôle de l'aménagement des lieux de vente, une obligation d'approvisionnement auprès des sociétés " Bonneterie Zannier " et " Len Tex Junior " ou auprès de fournisseurs agréés par la société Financière Zannier - Sofiza, selon des quantités déterminées en fonction du chiffre d'affaires prévisionnel de chaque saison et à concurrence de 70% de ce chiffre, une participation de 2% de son chiffre d'affaires au financement d'actions publicitaires locales, le paiement d'une redevance de 0,50 % de son chiffre d'affaires, un contrôle de sa comptabilité par le franchiseur, la commercialisation des articles aux prix conseillés par le franchiseur et des interdictions de concurrence.
Il mettait aussi à la charge du franchiseur diverses obligations, telles que celle d'apporter son concours au franchisé en matière de constitution de dossiers de demande d'emprunts et dans le domaine de la gestion du commerce, de promouvoir la marque concédée par des campagnes publicitaires, d'assister le franchisé dans sa politique d'achat des collections et d'aménagement de son commerce, et de respecter l'indépendance commerciale du franchise.
Le contrat a été conclu pour une durée de dix années, renouvelable pour la même durée par tacite reconduction, sous réserve que le franchisé se conforme aux exigences contractuelles, celui-ci ayant toutefois la possibilité d'y mettre fin moyennant le respect d'un préavis de six mois et le contrat pouvant être résilié de plein droit sans avis ni mise en demeure " si le franchisé commet une faute dolosive notamment l'une des violations du contrat portées au présent contrat comme pouvant entraîner la rupture au gré du franchiseur ".
Le contrat a été exécuté normalement jusqu'en 1992, date à laquelle par lettre recommandée du 2 mars 1992 la société Z Groupe Zannier s'étonnait auprès de la société Jobin de ce que celle-ci n'avait passé aucune commande pour l'hiver 1992 et la mettait en demeure de le faire dans un délai de 30 jours, puis par lettre recommandée du 10 septembre 1992 lui demandait de lui communiquer le bilan et le compte de résultats de l'année 1991, le montant de son chiffre d'affaires hebdomadaire depuis le 1er août 1992 et ses justificatifs de dépenses de publicités locales pour les années 1991 et 1992.
Par la suite, se prévalant de ce qu'elles avaient appris au début de l'année 1993 que la société Jobin offrait à la vente des produits dépourvus de la marque Z ou provenant de fournisseurs non agrées par elles, la société Financière Zannier et la société Zannier SA se sont fait autoriser, selon ordonnance du Président du Tribunal de grande instance de Toulon du 5 février 1993, à pénétrer dans le magasin appartenant à la société Jobin avec l'assistance d'un commissaire de police et à faire recueillir toutes constatations utiles sur l'usage fait par la société franchisée de la marque Z et dresser inventaire de l'ensemble des marchandises non griffées Z.
Constat a été dressé par Me Cibrario le 15 février 1993 jour de fermeture hebdomadaire du magasin (la porte ayant été ouverte par un serrurier) dont il ressort qu'un certain nombre d'articles (de l'ordre d'une vingtaine) ne portaient pas la marque de fabrication Z ni au col ni sur le côté mais qu'y était accrochée l'étiquette en carton avec la taille et le prix au logo de Z, l'huissier de justice ayant également trouvé " des marchandises " (qu'il n'a pas inventoriées et décrites) de fabrication Z mais dont l'étiquette de composition et lavage avait été coupée.
Par lettre du 26 février 1993, le franchiseur se prévalant des fautes dolosives révélées par ledit constat résiliait le contrat de franchise en application des dispositions de l'article 14 a-5.
Par acte du 15 mars 1994, la société Jobin assignait la société Financière Zannier Sofiza et la société Zannier SA aux fins de voir dire et juger que le contrat de franchise a été résilié de manière abusive et voir condamner les deux défenderesses et l'indemniser à hauteur de deux millions de francs du préjudice par elle subi.
La société Zannier SA a présenté une demande reconventionnelle en paiement de factures pour un montant de 159 209,70 F.
Par jugement du 9 mai 1995, le Tribunal de commerce de Saint-Etienne, considérant que l'ensemble des éléments soumis à son appréciation laissait planer un doute sérieux sur la provenance de certains articles mis en vente par la société Jobin qui suivant toute vraisemblance n'avait pas respecté son obligation de fourniture exclusive auprès des fournisseurs agrées par le fournisseur, a retenu que la rupture du contrat ne pouvait être considérée comme abusive et a débouté la société Jobin de ses demandes en la condamnant à verser à la société Zannier SA la somme de 159 209,70 F et 2 500 F en application de l'article 700 du NCPC à chacune des deux défenderesses.
La société Jobin a relevé appel du jugement dont elle sollicite la reformation.
Elle soutient tout d'abord que la violation prétendument invoquée de l'article b-1 figurant et l'article 3 du contrat intitulé Exclusivité ne se trouve sanctionnée par aucune clause résolutoire expresse figurant au contrat de franchise, que la résiliation de plein droit est déjà abusive de ce premier chef, que la société Zannier n'a pas démontré la faute dolosive, faute intentionnelle démontrant l'intention de nuire, que pour ce deuxième chef la résiliation est tout aussi abusive, qu'elle établit par la production de deux constats qu'elle a fait dresser à son tour les 17 février et 31 mars 1993 que la SA Zannier avait l'habitude de livrer des marchandises non griffées voire non référencées et qu'elle n'a pas violé les dispositions de l'article 3 b-1 du contrat et manqué à ses obligations, que la résiliation du contrat a donc été faite de façon abusive et sans qu'ait été caractérisée une faute dolosive à son encontre.
Elle reproche ensuite à la SA Zannier divers manquements à ses obligations contractuelles (quant à l'information préalable, au prix d'achat des marchandises, au prix de vente, au système d'approvisionnement, au système de commandes, à la politique de vente) justifiant selon elle la résiliation du contrat à ses torts exclusifs et la condamnation solidaire des sociétés Financière Zannier Sofiza et Zannier SA à lui payer la somme de deux millions de francs et titre de dommages intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi ainsi que celle de 25 000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
La société Financière Zannier-Sofiza et la société Zannier SA, intimées, ont déposé des conclusions de confirmation du jugement aux termes desquelles elles font valoir que la société Jobin ne saurait contester la validité du constat de Me Cibrario au motif qu'elle n'a pas été informée préalablement des diligences de l'huissier car une telle information aurait ôté tout intérêt à une telle démarche, que le contrat de franchise a été résilié à juste titre pour divers manquements contractuels de la part de la société Jobin et notamment le non-respect par celle-ci de la clause d'approvisionnement exclusif constitutif d'une faute dolosive telle que visée par les dispositions contractuelles.
Elles ajoutent que la société Jobin ne justifie pas de la réalité des griefs formulés à retardement pour les besoins de la cause à l'encontre du franchiseur, que celle-ci n'a d'ailleurs pas usé de la faculté de résiliation dont elle disposait alors que le contrat s'est exécuté du 12 juillet 1985 au 26 février 1993,
Elles exposent encore que la société Zannier SA est créancière d'une somme de 159 209,70 F représentant le montant de factures impayées, que la société Jobin ne justifie pas avoir retourné lesdites marchandises comme elle le prétend, que les commandes étaient réalisées la plupart du temps par voie de minitel et qu'elle ne peut produire de bons de commande, que la société Jobin n'a jamais émis la moindre protestation au reçu des factures qui lui étaient adressées.
Subsidiairement, elles demandent l'institution d'une mesure d'expertise à l'effet de dire si l'application qu'ont fait les parties des clauses litigieuses a pu dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise avoir un effet négatif sur les résultats commerciaux de la société Jobin, dire au moyen de la vérification de sa comptabilité si la société Jobin a respecté la clause d'approvisionnement exclusif prévue au contrat de franchise, chiffrer le préjudice éventuellement subi par la société Jobin par suite de la rupture du contrat de franchise, demande à laquelle la société Jobin a déclaré ne pas s'opposer dès lors que l'expertise prendrait en compte, outre les éléments comptables, toutes les pièces relatives aux envois et livraisons des sociétés intimées ainsi que les pièces relatives au système de commandes informatisé auquel les franchisés étaient soumis.
Le 2 juin 1998, date initialement prévue pour le prononcé de l'ordonnance de clôture finalement repoussée au 9, la société Financière Zannier et la société Zannier SA ont fait signifier des conclusions prétendument récapitulatives par lesquelles en définitive elles demandent à la cour à titre principal la confirmation de la décision entreprise, à titre subsidiaire l'organisation d'une mesure d'expertise, à titre très subsidiaire le prononcé de la compensation entre la créance indemnitaire alléguée et la créance non contestée détenue par la société Zannier SA envers la société Jobin, en toute hypothèse la condamnation de la société Jobin à leur verser la somme de 50 000 F en application de l'article 700 du NCPC.
Par conclusions du 9 juin 1998, la société Jobin a demandé que soient écartées des délais les pièces et écritures communiquées les 2 et 3 juin par les sociétés Zannier de façon trop tardive pour en permettre un examen suffisant.
Motifs et décision
Attendu que les dernières conclusions des intimées dites récapitulatives sont en réalité des conclusions additionnelles en ce qu'elles présentent tant des développements de fait nouveaux (précisions chiffrées tirées de l'étude des bilans, commentaires sur les envois dits " d'office ", remarques sur les différents préjudices invoqués par la société Jobin) qu'une demande de compensation qui n'avait pas été formulée jusque là ;
Que notifiées trop tardivement afin d'en permettre un examen suffisant par l'appelante privée de la possibilité de répliquer utilement, elles doivent être écartées des délais en leur partie additionnelle ;
Qu'il en est de même des pièces qui ont été communiquées le 3 juin 1998 ;
Sur le caractère abusif de la résiliation :
Attendu que la société Sofiza a résilié avec effet immédiat le 26 février 1993 le contrat de franchise de la société Jobin pour divers manquements contractuels et notamment le non-respect par celle-ci de la clause d'approvisionnement exclusif ;
Attendu que la société Sofiza à qui incombe la charge de la preuve entend démontrer la réalité de l'infraction à la clause contractuelle d'exclusivité en s'appuyant sur un constat d'huissier qu'elle a fait établir dans les beaux de la société Jobin, d'ailleurs en l'absence des représentants de celle-ci ;
Mais attendu qu'un tel constat qui se borne à rapporter la présence dans les locaux de la société Jobin de 23 articles non griffés Z auxquels était accrochée l'étiquette en carton avec la taille et le prix au logo de Z ne saurait prouver l'inexécution par la société Jobin de ses obligations contractuelles dès lors que les articles litigieux trouvés sur place étaient en nombre minime et que d'autre part les constatations précises et circonstanciées faites par Me Maurel huissier de justice à la demande de la société Jobin les 17 février et 31 mars 1993 permettent de retenir qu'un certain nombre d'articles livrés par la société Zannier et la société Jobin n'étaient pas revêtus de l'étiquette Z ;
Que, par ailleurs, si Me Cibrario rapporte avoir trouvé des marchandises identifiées comme de fabrication Z dont l'étiquette de composition et lavage était coupée, l'huissier de justice a omis de faire l'inventaire de ces marchandises, ce qui enlève toute portée à ses constatations dès lors que la société Jobin soutient sans pouvoir être contredite qu'il ne s'agissait que d'un ou deux articles ;
Que la baisse du chiffre d'affaires mise en avant par le franchiseur pour confirmer ses suspicions de dol ne peut suppléer les insuffisances du constat sur lequel il s'appuie à titre principal, d'autant que dans sa lettre du 18 septembre 1992 la société Jobin s'expliquait sur cette baisse et les difficultés qu'elle rencontrait (ouverture d'un nouveau point de vente à 7 km de son magasin) ;
Que l'allégation d'un écart existant entre les chiffres d'affaires réalisés par le Groupe Zannier auprès de la société Jobin et le montant total des achats de marchandises de la société franchisée tel qu'il apparaît dans ses voluptés de résultat ne sera pas retenue, celle-ci reposant sur un simple tableau unilatéralement établi par les sociétés Zannier et dépourvu de caractère probant ;
Qu'ainsi la faute dolosive dont s'est prévalue la société Sofiza pour résilier immédiatement le contrat n'apparaît pas caractérisée;
Qu'une mesure d'expertise ne saurait être ordonnée pour suppléer la carence de celle-ci dans l'administration de la preuve ;
Attendu que s'agissant des autres manquements ayant motivé l'envoi de lettres recommandées au mois de mars et septembre 1992, il ressort que ceux-ci ne peuvent constituer des fautes dolosives susceptibles de justifier l'application des dispositions de l'article 14 a-5 du contrat, étant observé qu'après réception de la lettre recommandée du 2 mars 1992 la société Jobin a passé ses commandes comme il lui était demandé et que s'agissant de la communication des documents comptables elle a dans son courrier du 18 septembre 1992 apporté une réponse cohérente à son retard sans opposer un quelconque refus à communiquer les éléments chiffrés qui lui étaient demandés;
Attendu qu'il y a lieu, en conséquence, de reformer le jugement et de dire que la résiliation du contrat de franchise présente un caractère abusif;
Sur les autres griefs développés par la société Jobin à l'encontre des sociétés Zannier :
- Défaut d'information préalable
Attendu qu'au moment de la signature du contrat de franchise en 1985, aucune disposition légale n'imposait au franchiseur de fournir au futur franchisé une information spécifique ;
Qu'il résulte des énonciations du contrat qu'avant de conclure celui-ci la société Jobin a pris connaissance des méthodes et objectifs de la chaîne Z et a été informée par les entretiens qu'elle a eu avec ses animateurs ;
Que de 1985 à 1994, date à laquelle la société Jobin a fait délivrer son assignation, celle-ci ne s'est jamais plainte d'un défaut ou d'un manque d'information ;
Que le grief n'est donc pas fondé ;
- Prix d'achat des marchandises
Attendu que la société Jobin entend invoquer les dispositions de l'article 1129 du Code civil pour prétendre à l'annulation du contrat, faisant valoir que le contrat de franchise ne contient aucune clause afférente à la fixation des prix d'achat des marchandises ;
Mais attendu que l'indétermination dans ledit contrat du prix des commandes à intervenir n'affecte pas la validité de celui-ci, l'abus dans la fixation du prix ne donnant lieu qu'à résiliation ou indemnisation ;
Or attendu qu'entre le 12 juillet 1985, date de conclusion du contrat de franchise, et le 26 février 1993, date de sa résiliation par le franchiseur, la société Jobin n'a jamais émis la moindre protection ou remarque en ce qui concerne le prix des marchandises qui lui étaient vendues par la société Zannier ;
Qu'elle ne démontre aucun abus de la part de cette dernière dans la fixation du prix des marchandises ;
Que ce grief n'est pas fondé ;
- Prix de vente
Attendu que la société Jobin soutient qu'en vertu des dispositions contractuelles le franchisé se trouve dans l'obligation de commercialiser les articles au prix conseillé par le franchiseur ;
Que les sociétés Zannier allèguent de leur côté que la société Jobin franchisée était, nonobstant une rédaction maladroite du contrat sur ce point, libre de fixer les prix de vente comme elle le voulait et que d'ailleurs pendant tout le temps d'exécution du contrat aucun litige n'est survenu entre les parties à cet égard ;
Attendu que la société Jobin ne saurait prétendre avoir été privée de toute autonomie dans la fixation des prix de vente alors que dans le cadre de l'enquête faite par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes M. Jobin a déclaré que la disposition du contrat concernant le prix de vente " public " n'était pas toujours respectée et qu'il était parfois obligé de s'adapter à la concurrence locale et de faire des promotions ou qu'en sens inverse il optait pour une modification dans le sens d'une majoration, le franchiseur ne s'y opposant pas;
Que ce grief ne sera donc pas retenu ;
- Système d 'approvisionnement
Attendu que ce grief formulé a posteriori et dans des termes très généraux n'apparaît pas suffisamment étayé pour engager la responsabilité du franchiseur ;
- Système de commandes
Attendu que la société Jobin se plaint de ce que les pièces les plus vendues de la collection étaient rarement disponibles au titre de l'actualisation, de ce qu'elle s'est vue souvent contrainte d'annuler un nombre très important de références pour retard ou omission de référence, que les retours de fin de saison ont été supprimés et remplacés par un avoir forfaitaire inférieur à la valeur des articles, qu'elle a reçu en novembre 1992 un envoi d'office en partie retourné d'abord refusé par la société Zannier qui l'a enfin accepté ;
Mais attendu qu'à l'exception du dernier grief la société Jobin ne produit pas de justificatif à l'appui de ses allégations qui dès lors ne peuvent être retenues ;
- Politique de vente
Attendu que la société Zannier admet avoir livré à la société Continent un article confectionné dans le même tissu que l'article livré aux franchisés lesquels ont été indemnisés au moyen d'un avoir ;
Que la société Jobin allègue encore que dans plusieurs magasins du groupe Zannier ont été effectués en pleine saison des remises de 25 %, mais qu'elle n'en justifie par aucun document pas plus qu'elle n'établit le préjudice susceptible de résulter pour elle des agissements qu'elle incrimine ;
- " Menaces " de résiliation
Attendu que la société Jobin reproche à la SA Zannier de poursuivre systématiquement le franchisé de ses menaces de résiliation de contrat, entretenant ainsi un climat malsain, mais qu'elle ne démontre ni la réalité de ses assertions ni les conséquences préjudiciables en résultant pour elle ;
- Sur l'exclusivité territoriale
Attendu que s'appuyant sur les constatations du rapporteur telles que celles-ci figurent dans la décision du Conseil de la Concurrence du 28 mai 1996 :
" A l'époque des faits, la densité du réseau de franchise était telle que dans un certain nombre de cas deux magasins franchisés étaient en situation de concurrence, soit qu'ils fussent installés dans la même ville comme à Toulon, soit dans des villes suffisamment proches pour accueillir une clientèle commune ",
la société Jobin prétend que le franchiseur aurait manqué à la clause d'exclusivité de distribution conférée aux franchisés ;
Mais attendu que la clause d'exclusivité stipulée au profit de la société Jobin était " le centre ville de Toulon à l'exclusion des centres commerciaux ", et que les sociétés Zannier exposent sans être contredites que le second magasin Z auquel fait référence le rapporteur près le Conseil de la Concurrence se trouve situé dans un centre commercial extérieur à la ville de Toulon dénommé Grand Var Est qui n'a été ouvert qu'en mai 1991 soit six années après la signature du contrat de franchise ;
Qu'aucune faute ne peut donc être reprochée à ce titre aux sociétés Zannier ;
Sur la clause d'aménagement exclusif des locaux au profit de la société Z'Services et des entreprises agréées :
Attendu que la société Jobin se contente d'invoquer les motivations du Conseil de la Concurrence qui a retenu que cette clause a pu avoir pour effet de restreindre le jeu de la concurrence, mais ne démontre pas quel préjudice serait résulté pour elle de l'intervention de la société Z'Services pour l'aménagement de son magasin en 1985 ;
Sur la clause d'approvisionnement exclusif au profit du franchiseur et des entreprises agréées :
Attendu que la société Jobin ne saurait mettre en cause la validité de cette clause en ce qu'elle porte sur les produits vestimentaires vendus par les sociétés intimées, dans la mesure où, ainsi que l'a relevé le Conseil de la Concurrence, s'agissant d'articles de mode soumis à un renouvellement fréquent, il ne parait pas possible que le franchiseur puisse définir et imposer des spécifications qui permettraient d'obtenir l'uniformisation minimale indispensable pour préserver l'identité du réseau de franchise ;
Qu'en ce qui concerne les autres produits (produits publicitaires et caisses enregistreuses), la société Jobin ne développe aucune argumentation susceptible de fonder une éventuelle action en indemnisation de sa part ;
Que le grief sera donc écarté ;
Sur le préjudice
Attendu que la société Jobin ne peut prétendre être indemnisée que du seul préjudice résultant pour elle de la résiliation abusive intervenue le 26 février 1993 d'un contrat de franchise qui avait été conclu pour une durée de dix années, éventuellement reconductible, le 12 juillet 1985 ;
Que les demandes formulées par l'appelante sont excessives notamment au regard de ses résultats pour les années 1990 à 1993 et si l'on considère que seuls deux ans et demi restaient à courir jusqu'au terme du contrat ;
Qu'en revanche, il est exact que la résiliation brutale et non justifiée du contrat de franchise a occasionné un trouble commercial certain à la société Jobin qui a dû sans préavis rechercher une autre forme d'exploitation;
Que le montant des dommages intérêts à mettre à la charge de la société Sofiza auteur de la résiliation abusive doit être fixé et la somme de 250 000 F ;
Et attendu qu'il est équitable d'allouer à l'appelante une indemnité de 10 000 F en application de l'article 700 du NCPC ;
Sur la demande en paiement de la société Zannier
Attendu que la société Zannier SA est créancière d'une somme de 159 209,70 F représentant le montant de factures impayées afférentes à des livraisons de marchandises ;
Que la société Jobin ne prouve pas qu'il lui serait demandé le paiement de marchandises ayant fait l'objet d'un retour ;
Que d'autre part si la société Zannier ne produit pas les bons de commande correspondants elle explique avec vraisemblance que les commandes étaient réalisées la plupart du temps par voie de minitel, ce qui ne posait pas de problème particulier puisque la société Jobin n'a jamais protesté au reçu des factures qui lui étaient adressées ;
Que s'il est arrivé à la société Zannier de procéder à des envois d'office de vêtements, avec possibilité de retour de la part du franchisé, la société Jobin n'établit pas que les factures qu'elle a laissées impayées correspondraient à des articles livrés d'office et non repris ;
Attendu que, dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal a fait droit à la demande en paiement de la société Zannier SA ;
Que le jugement doit être confirmé sur ce point ;
Par ces motifs : LA COUR, Confirme le jugement en ce qu'il a condamné la société Jobin à payer à la société Zannier SA la somme de 159 209,70 F outre intérêts au taux légal à compter du jugement ; Réformant pour le surplus ; Dit que la résiliation du contrat de franchise par la société Financière Zannier Sofiza a présenté un caractère abusif ; Condamne en conséquence cette société à payer à la société Jobin la somme de 250 000 F à titre de dommages intérêts ; La condamne encore au paiement de la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toutes autres demandes des parties ; Dit que les dépens seront supportés à concurrence d'un tiers par la société Jobin et de deux tiers par la société Financière Zannier Sofiza avec droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause.