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Décisions

CA Paris, 25e ch. A, 11 juin 1999, n° 1997-02211

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Leverger (SA)

Défendeur :

Compagnie des Gaz de Pétrole Primagaz (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Briottet

Conseillers :

Mmes Deurbergue, Bernard

Avoués :

SCP Autier, SCP Duboscq-Pellerin

Avocats :

Mes Belzidsky, Ithurbide.

T. com. Paris, 7e ch., du 10 sept. 1996

10 septembre 1996

Par jugement rendu le 10 septembre 1996, le Tribunal de commerce de Paris a dit que la SA Leverger, agent commercial, a droit à indemnisation du préjudice subi du fait de la résiliation de son contrat par la Compagnie des Gaz de Pétrole Primagaz, dit que cette indemnisation s'évaluera par la marge nette sur une année générée par l'activité gaz, transports inclus, augmentée de la rémunération du Président Directeur Général correspondant à cette activité gaz et selon le corps du jugement, et afin d'en déterminer le quantum, a désigné Monsieur Michel Benyamin en qualité d'expert, fixant à 15 000 F le montant de la provision à consigner par la Compagnie des Gaz de Pétrole Primagaz.

La SA Leverger a relevé appel. - Elle soutient qu'en application du contrat de mandataire vrac du 24 avril 1990 qui la liait à la société Compagnie des Gaz de Pétrole Primagaz, ci-après Primagaz, elle répondait à la qualification d'agent commercial définie par l'article ler de la loi du 25 juin 1991. - Elle précise en effet qu'elle était bien un mandataire permanent, agissant au nom et pour le compte de Primagaz, exercant à titre indépendant et chargé de négocier, et de conclure des contrats de vente de gaz de pétrole liquéfiés en vrac. - La SA Leverger fait aussi valoir que son contrat du 24 avril 1990 était en cours au ler janvier 1994 puisque la fin du deuxième renouvellement était fixée au 31 août 1994 et que dès lors elle est en droit de bénéficier des dispositions de la loi de 1991 qui ont reconnu le droit à une indemnité de résiliation pour le mandataire, son contrat ayant été résilié par Primagaz au 31 août 1994. - La SA Leverger indique par ailleurs, que la résiliation étant intervenue à l'initiative du mandant, seule une faute grave du mandataire aurait pu exonérer le mandant de toute indemnisation, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisqu'il résulte de la lettre de résiliation du 2 mai 1994 que Primagaz n'invoque que la faculté de non-reconduction du contrat qui lui était offerte. - Enfin la SA Leverger observe que conformément à l'article 12 alinéa 2 de la loi de 1991, elle a fait valoir son droit à reparation dans le délai d'un an à compter de la cessation du contrat. - La SA Leverger sollicite donc jusque-là la confirmation du jugement entrepris. - En revanche, elle s'élève contre la décision entreprise en ce qu'elle a sous-évalué le préjudice subi en l'estimant à une année d'activité et non à deux années et en énonçant qu'il s'agit d'une année de marge nette et non d'une année de commissions. - La SA Leverger rappelle qu'il est constant que le préjudice subi par un agent commercial du fait de la rupture de son contrat, corresponde au montant des commissions perçues pendant deux années. - Quant à sa situation propre, l'appelante argue d'une part qu'à la date de la résiliation, les deux parties étaient en relations commerciales depuis 20 ans et que la SA Leverger pouvait espérer la poursuite du mandat et des commissions correspondantes et que d'autre part, contrairement à ce qu'a apprécié le tribunal, la modification contractuelle intervenue en 1990, n'a aucune incidence sur le préjudice dont l'indemnisation est réclamée. - La SA Leverger explique que les parties ont signé le 24 avril 1990 un contrat de mandataire vrac qui annulait et remplacait tous les accords antérieurs et que cette convention a modifié son activité mais sans avantage qui puisse s'assimiler à une indemnisation qui serait déjà intervenue. - La SA Leverger demande donc que pour l'appréciation de son préjudice il soit tenu compte de ce que son contrat lui imposait une clause de non-concurrence pendant un an suivant la cessation du contrat, clause qu'elle a respecté alors que Primagaz bénéficiait de la clientèle reprise. - Elle en déduit qu'il est particulièrement justifié dans ces conditions de lui accorder deux années de commissions brutes en réparation du préjudice subi puisqu'elle devra reconstituer une clientèle, qu'elle a dû supporter des dépenses importantes (construction de bureaux, installation et achat de matériel et de mobilier, achat de véhicules, papier à en-tête Primagaz, loyer ...) devenues sans objet, qu'elle devra retrouver un personnel et le former et qu'elle a, au surplus, vu sa notoriété vis-à-vis de sa clientèle, de ses fournisseurs et de ses banques, atteinte par la perte du mandat de Primagaz. - La SA Leverger requiert en conséquence, la condamnation de Primagaz à lui payer la somme de 8 200 000 F augmentée d'une somme de 731 816 F au titre des préjudices et frais divers, la somme globale étant majorée des intérêts au taux légal à compter du 5 mai 1994, date à laquelle la SA Leverger a fait valoir son droit à indemnité, ainsi que la somme de 50 000 F en application de l'article 700 du NCPC.

Primagaz est appelante incidente. - Elle reproche au tribunal d'avoir dit que la société Leverger était éligible au statut d'agent commercial alors que les parties n'étaient liées entre elles que par un mandat d'intérêt commun, dont le non-renouvellement, dès lors qu'il n'est pas abusif, n'ouvre droit à aucune indemnisation. - Primagaz expose en premier lieu qu'elle a procédé à une restructuration complète de son réseau de distribution en 1990 et que par deux protocoles signés en février, mars 1990 par la SA Leverger comme par d'autres représentants, elle a explicitement mis fin au contrat d'agent commercial desdits représentants pour redéfinir les relations contractuelles en qualité de mandataire régional vrac à partir d'avril 1990. - Elle précise que la SA Leverger a adhéré pleinement aux stipulations du contrat de mandataire vrac signé le 24 avril 1990, déterminées d'après les protocoles, le projet qui lui avait été adressé en mars 1990 ainsi qu'un cahier des charges, et que ce contrat s'est substitué au dernier contrat d'agent commercial signé par la SA Leverger en janvier 1985. - Primagaz ajoute que les avantages retirés en contrepartie par la SA Leverger ont été importants. - En deuxième lieu, Primagaz soutient qu'il ne suffit pas que la convention d'avril 1990 réponde à la définition de la loi de 1991 pour conférer à la SA Leverger un statut d'agent commercial et qu'il faut aussi que ce statut ait été expressément convenu entre les parties, car si tout agent commercial est un mandataire, tout mandataire, n'est pas nécessairement un agent commercial. - Or, Primagaz objecte que la SA Leverger avait renoncé à être " agent commercial Primagaz " dès le mois d'avril 1990 et qu'elle ne peut au prétexte d'un régime plus protecteur de ses intérêts, prétendre revenir à ce statut d'agent commercial.

Primagaz déduit de son argumentation que la cour ne devra se déterminer quant au droit à indemnisation de la SA Leverger qu'à partir du seul régime juridique du mandat commercial d'intérêt commun à durée déterminée voulu par les parties. - Elle affirme en conséquence que la SA Leverger ne peut revendiquer aucun droit à réparation du préjudice allégué, le non-renouvellement par le mandant au terme fixé par la convention, comme c'est le cas de l'espèce, n'ouvrant pas droit à indemnité pour le mandataire sauf si le non-renouvellement est abusif. - Primagaz dit qu'elle n'a pas poursuivi ses relations avec la SA Leverger parce que cette dernière a, à partir de février 1994, manqué à plusieurs de ses obligations contractuelles et qu'elle ne saurait donc se voir exposée à une quelconque condamnation à des dommages-intérêts. - Subsidiairement, en cas de reconnaissance du statut d'agent commercial à la SA Leverger, Primagaz conclut à la confirmation du jugement entrepris quant aux modalités de réparation du préjudice allégué et dans le cadre du pouvoir d'évocation tiré de l'article 568 du NCPC, à l'homologation du rapport Benyamin de décembre 1997, acte lui étant donné de ce qu'elle offre de régler à titre de dommages-intérêts à la SA Leverger la somme de 289 240 F. - En tout état de cause, Primagaz sollicite 25 000 F de frais irrépétibles.

Dans ses écritures en réponse, la SA Leverger répète que la définition de l'agent commercial exprimée dans l'article ler de la loi de 1991 s'applique bien à son activité. - Elle note que la loi de 1991 ne pose pas comme condition pour être éligible au statut qu'elle définit et réglemente, d'être ou d'avoir été agent commercial au sens du décret de 1958. - Elle réitère que la loi de 1991 s'est appliquée aux contrats en cours à compter du ler janvier 1994 et qu'au cours de cette période transitoire, le contrat du 13 avril 1990 est demeuré inchangé. - La SA Leverger conteste enfin expressément avoir renoncé au statut d'agent commercial dans le cadre de ce contrat. - Par ailleurs, l'appelante précise encore son préjudice justifiant selon elle l'allocation d'une indemnité égale à deux années de commissions brutes.

Primagaz réplique à nouveau qu'en signant la nouvelle convention du 24 avril 1990, les parties se sont délibérément placées en marge de la législation applicable aux agents commerciaux et que la SA Leverger ne pouvait être, depuis ce contrat, qualifiée que de représentant mandataire non statutaire dont la protection est assurée, en cas de rupture de la relation contractuelle, à certaines conditions, par la notion de mandat d'intérêt commun. - Primagaz réitère que le principe d'une indemnisation doit être ici écarté puisqu'en avisant son cocontractant le 2 mai 1994 de ce qu'elle ne renouvellerait pas le contrat à son échéance du 31 août 1994 elle n'a fait qu'exercer un droit qu'elle tenait du contrat conclu pour une période déterminée. - Subsidiairement, sur le montant des dommages-intérêts, elle maintient que l'assiette du dommage a été parfaitement cernée par le tribunal et très exactement calculée par l'expert.

Sur quoi,

Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats que la SA Leverger, distributeur des produits Primagaz avait accédé au statut d'agent commercial sous l'empire du décret du 23 décembre 1958 ; - qu'elle justifiait, conformément aux exigences de ce texte d'un contrat écrit d'agent commercial passé le 15 septembre 1982 avec Primagaz, d'une immatriculation au registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce du lieu de son siège social et était chargée dans le cadre de son mandat d'une activité typique d'agent commercial, exercée de façon habituelle et indépendante et, comprenant la prospection de la clientèle des consommateurs de propane et butane exclusivement d'ordre et pour le compte de Primagaz, ainsi que la reprise et la gestion de la clientèle apportée par Primagaz, et ce dans le cadre d'un territoire défini ; - que ce contrat de 1982 à durée déterminée, a été renouvelé par périodes de 2 ans par tacite reconduction jusqu'en 1990 ;

Considérant que Primagaz, désirant légitimement restructurer son réseau de distribution pour la région Paris-Nord-Ouest a proposé au début de l'année 1990 à la SA Leverger ainsi qu'à deux autres de ses agents commerciaux un nouveau contrat intitulé "contrat de mandataire vrac" ; - que la SA Leverger a signé ce contrat daté du 24 avril 1990, à durée déterminée d'un an et dont l'article 15 stipulait qu'il annulait et remplaçait tous les accords précédents concernant la distribution dans le domaine du propane et du butane ; - qu'après avoir renouvelé à 3 reprises ce contrat par tacite reconduction d'un an, Primagaz a notifié à la SA Leverger par lettre recommandée avec AR du 2 mai 1994 sa volonté de mettre fin à leurs relations contractuelles à l'arrivée du terme soit le 31 août 1994 ; - que Primagaz soutient, ce qui est l'objet du présent litige, que cette non-reconduction du contrat n'ouvre droit à aucune indemnité au profit de la SA Leverger devenue mandataire non statutaire depuis 1990, tandis que cette dernière prétend d'une part n'avoir jamais renoncé à son statut d'agent commercial, d'autre part, entrer dans le domaine d'application de la loi du 25 juin 1991 par son activité qui peut toujours recevoir la qualification d'agent commercial au sens de l'article ler de la loi, et par le fait que le contrat du 24 avril 1990 était toujours en cours lors de l'entrée en vigueur de la loi du ler janvier 1994 ; - que la SA Leverger allègue en conséquence qu'elle a droit à une indemnité compensatrice du préjudice subi à la suite de la non-réitération du contrat, dès lors que le mandant ne justifie pas d'une faute grave de l'agent et qu'elle s'est prévalue de ce droit à indemnité par une notification à Primagaz dans le délai d'un an à compter de l'expiration du terme ;

Considérant que le tribunal a retenu que le contrat de mandat d'intérêt commun conclu le 24 avril 1990, "décrit Leverger comme éligible aux conditions de l'article ler de la loi du 25 juin 1991" et était en cours au ler janvier 1994 ; - qu'il en a déduit que la SA Leverger pouvait se prévaloir du statut d'agent commercial ; - que cette motivation sommaire mais surtout inexacte ne sera pas adoptée ;

Considérant en effet que le contrat du 24 avril 1990 signé postérieurernent en mai 1990 sans que cette date de signature ne soit litigieuse, devrait obéir pour que la SA Leverger puisse revendiquer le maintien du statut d'agent commercial qu'elle avait avant cet acte, aux dispositions du décret du 23 décembre 1958 relatif au statut des agents commerciaux, texte applicable en 1990; - que le décret exigeait en premier lieu que le contractant réponde à la definition de l'agent commercial donnée en son article 1er, lequel ressemble fort au contenu de l'article ler de la loi de 1991; - que dans le contrat du 24 avril 1990 la SA Leverger qui, cela n'est pas contesté, est demeurée un mandataire d'intérêt commun, satisfait par certains critères de son activité habituelle : le mandat, le secteur, la prospection de clientèle, la négociation des contrats, la défense des intérêts du représenté et l'exclusivité, à cette définition de l'agent commercial; - que toutefois il apparaît nettement à la lecture du contrat et des protocoles qui l'ont précédé, qu'elle a cédé une certaine maîtrise de l'organisation de son entreprise en contrepartie d'un risque commercial moins grand, sa rémunération qui n'est plus proportionnelle dans ses diverses composantes au chiffre d'affaires, lui assurant une marge bénéficiaire calculée à l'avance dans une fourchette minimale; - qu'il s'avère ainsi qu'il n'y a pas une assimilation parfaite entre l'activité de la SA Leverger et celle d'un agent commercial que ce soit sous le décret de 1958 ou sous la loi de 1991;

Considérant qu'en second lieu, au-delà de la définition de ces caractéristiques de l'agent commercial, le décret du 23 décembre 1958 réglementait la profession d'agent commercial et les conditions d'exercice, prévoyant la nécessité d'un contrat écrit, précisant en quelle qualité les parties contractaient, et exigeant l'immatriculation de l'agent commercial sur un registre spécial; - qu'il est constant que sous l'empire du décret de 1958, le défaut d'immatriculation comme l'absence d'indication par écrit de la qualité d'agent commercial entrainaient l'inapplicabilité du statut; - que force est de constater que le contrat du 24 avril 1990 intitulé " contrat de mandataire en vrac " ne mentionne jamais que la SA Leverger a la qualité d'agent commercial ; - qu'elle est dénommée dans l'acte " le mandataire en vrac " où " le mandataire "; - que par ailleurs, la SA Leverger qui était immatriculée depuis 1982 sur le registre spécial visé par le décret, ne justifie pas qu'elle était encore immatriculée en 1990 alors que cette immatriculation devait être renouvelée tous les 5 ans;

Considérant qu'il ne s'évince d'aucune autre pièce que la qualification de mandataire employée dans le contrat du 24 avril 1990 ait été erronée ; - que cette qualification n'est pas non plus démentie par l'économie des rapports contractuels qui ont existé entre la SA Leverger et Primagaz ; - qu'au contraire, de nombreux indices complémentaires du contrat de 1990 permettent d'affirmer que la SA Leverger a perdu son statut d'agent commercial en souscrivant ce contrat ;

Considérant qu'il sera tout d'abord relevé que professionnelle avertie dotée de connaissances juridiques, ayant avec Primagaz des relations commerciales anciennes, et, bénéficiant du statut d'agent commercial depuis 8 ans, la SA Leverger ne pouvait ignorer en 1990 les avantages conférés par le statut et en particulier l'indépendance juridique, la pérennité du contrat et le principe de l'indemnisation de l'agent en cas de rupture de contrat sur l'initiative du mandant, et par conséquent le formalisme contractuel ainsi que la réglementation imposée en contrepartie par le décret de 1958 ; - que la SA Leverger avait en outre, en 1990 une force contractuelle suffisante pour faire respecter, si besoin était, ses intérêts légitimes ; - qu'il apparaît dès lors à l'examen des phases de pourparlers, puis de signature du contrat de 1990, et de l'exécution de ce dernier, que la SA Leverger a, en toute connaissance de cause, accepté la qualité de mandataire non statutaire, qu'elle ne s'est jamais présentée comme exerçant la profession d'agent commercial, ni n'a revendiqué cette qualification jusqu'au terme du contrat de 1990;

Considérant en effet que la SA Leverger a signé successivement les 23 février 1990 et 19 mars 1990 deux protocoles avec Primagaz et les sociétés Coste et Baldit ; - qu'en termes non équivoques le protocole du 23 février 1990 concernant la SA Leverger et la société Coste, indiquait qu'il était envisagé par les trois parties " de mettre fin au contrat d'agent commercial de la société Coste et des établissements Leverger et de confier aux établissements Leverger en qualité de mandataire régional vrac la clientèle Primagaz actuellement suivie par la société Coste en tant qu'agent commercial " ; - que cette distinction très nette entre l'agent commercial et le mandataire était réitérée dans les mêmes termes dans le protocole du 19 mars 1990 signé entre Primagaz, la SA Leverger et la société Baldit ; - que les seules réserves émises par la SA Leverger à la signature desdits protocoles ont trait aux conditions financières du futur contrat de mandataire vrac ; - que bien plus, dans son courrier du 10 mars 1990 adressé à Primagaz, la SA Leverger affirme en préambule : " nous sommes d'accord sur la philosophie de la nouvelle structure pour la distribution du gaz en vrac et conditionné ",

Considérant encore que toutes les négociations que mène la SA Leverger après avoir reçu le 23 mars 1990 le projet du nouveau contrat sont exclusivement axées sur les problèmes techniques et financiers entrainés par ces modifications proposées par Primagaz, mais ne remettent jamais en cause la fin du contrat d'agent commercial annoncée dans les protocoles et admise par la SA Leverger, comme le démontre sa lettre du 16 mai 1990 à Primagaz ; - qu'après la signature du contrat du 24 avril 1990, un échange de correspondances entre Primagaz qui n'utilise que la qualification de mandataire pour désigner la SA Leverger et cette dernière, aboutit à la signature de 4 avenants les 10 août 1992, 15 décembre 1992, 5 mars 1993 et 22 décembre 1993, qui confortent l'assurance que la SA Leverger avait une position économiquement forte pour obtenir les avantages financiers qu'elle désirait et qu'elle aurait donc pu, si elle l'avait souhaité, refuser ou en tous cas discuter l'abandon de son statut d'agent commercial ; - qu'elle ne l'a pas fait et ne se prévaudra de ce statut que par courrier du 2 juin 1994 après avoir reçu la lettre de Primagaz ne reconduisant pas le contrat de 1990 pour une nouvelle année ;

Considérant que pour faire reste de droit à la SA Leverger, il sera noté qu'elle ne justifie d'aucune immatriculation au registre spécial des agents commerciaux, y compris pendant la période transitoire de 1991 à 1994, démarche qu'elle n'aurait pas manqué d'effectuer si elle avait prétendu pendant cette période au statut d'agent commercial, d'autant que cette immatriculation doit être renouvelée tous les 5 ans ; - qu'en outre, la SA Leverger ne produit aucune pièce comptable, fiscale et sociale permettant de vérifier qu'après 1990, elle a continué à être qualifiée d'agent commercial statutaire par les administrations et à se comporter comme tel, notamment en déclarant ses commissions comme bénéfices non commerciaux, en étant soumise à la taxe professionnelle et en restant adhérente du régime "non salariés" de la Sécurité Sociale ;

Considérant qu'il s'avère de la sorte suffisamment démontré que le contrat de mandataire en vrac du 24 avril 1990 n'a ni maintenu ni octroyé à la SA Leverger le statut d'agent commercial ; - que bien qu'en cours au 1er janvier 1994, date d'entrée en vigueur de la loi du 25 juin 1991, ce contrat échappe ainsi à l'application de cette loi; - que contrat de mandat d'intérêt commun à durée déterminée, renouvelable par tacite reconduction, sauf préavis de rupture expressément prévu au contrat, son non-renouvellement par LR avec AR du 2 mai 1994, simple exercice d'un droit contractuel fait dans le respect du préavis de 3 mois, ne peut en conséquence ouvrir droit à la SA Leverger à une quelconque indemnité; - que le contrat du 24 avril 1990 ayant pris fin conformément à la volonté exprimée dans le contrat, il est par ailleurs inutile de s'interroger sur la légitimité de la cause de la rupture et spécialement sur la faute éventuelle de la SA Leverger ; - qu'en tout état de cause, cette non-reconduction du contrat par Primagaz, précédée par un audit en novembre 1993 significatif de la détérioration des relations contractuelles et suivie par un comportement loyal de Primagaz qui a repris et indemnisé le personnel de la SA Leverger affecté à l'activité gaz et a déchargé son ancien co-contractant des contrats de louage de véhicules et de chauffeurs, n'apparaît nullement comme un abus de droit caractérisé ;

Considérant que le jugement entrepris sera réformé en toutes ses dispositions, la SA Leverger étant déboutée de toutes ses demandes et condamnée aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise ainsi qu'au paiement dc la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du NCPC ;

Par ces motifs : Contradictoirement, Réforme le jugement entrepris en toutes ses dispositions; Statuant à nouveau : Dit que les relations entre la Compagnie des Gaz de Pétrole Primagaz et la SA Leverger n'étaient régies depuis le contrat du 24 avril 1990 que par un mandat d'intérêt commun insusceptible d'ouvrir droit à indemnité au profit du mandataire en cas de non-renouvellement à son échéance contractuelle ; Déboute la SA Leverger de toutes ses demandes ; Condamne la SA Leverger à payer à la Compagnie des Gaz de Pétrole Primagaz la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du NCPC ; Condamne la SA Leverger aux entiers dépens de première instance inclus les frais d'expertise et d'appel ; Dit que ces derniers seront recouvrés directement par la SCP Duboscq-Pellerin, avoué, conformément à l'article 699 du NCPC.