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Décisions

CA Paris, 3e ch. B, 4 mars 1993, n° 91-8839

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

MVB Immobilier (SARL), Fimmo (SARL)

Défendeur :

FA 1 (Sté), FA 1 Ile-de-France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Serre

Conseillers :

Mme Garnier, M. Bouche

Avoués :

SCP Fanet, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay

Avocats :

SCP Sardi, Rampazzo, Me Bensoussan.

T. com. Paris, 3e ch., du 2 mai 1990

2 mai 1990

Suite à la résiliation signifiée le 26 janvier 1989 par Monsieur Goudin, gérant des sociétés MVB Immobilier (à Paris 11e) et Fimmo (à Fontenay-sous-Bois) des deux contrats de franchise conclus les 7 avril et 29 octobre 1988 avec le franchiseur la société FA 1 (Paris et Ile-de-France), celui-ci a assigné le 30 août 1989 les deux franchisés en reddition de comptes et en dommages-intérêts pour violation de la clause de non-concurrence.

Par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire moyennant caution, le Tribunal de commerce de Paris, faisant partiellement droit aux demanderesses a condamné le 2 mai 1990 :

- la SARL Fimmo à payer à la SA FA 1 Ile-de-France 17 790 F au titre du droit d'entrée, et à la société FA 1 30 000 F pour concurrence déloyale,

- la SARL MVB Immobilier à payer à la société FA 1 90 000 F pour concurrence déloyale, et les deux sociétés solidairement à payer à la société FA 1 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à supporter la charge des dépens.

C'est de ce jugement que les sociétés MVB et FIMNO sont appelantes.

Les sociétés appelantes soutiennent que les contrats étaient nuls en raison de l'inexistence des prestations du franchiseur, et qu'elles n'ont donc commis aucun abus par leur rupture ; elles réclament une somme de 10 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Dans des conclusions plus étoffées du 17 janvier 1992, elles expliquent cette nullité par l'inexistence du savoir-faire spécifié dans le manuel d'instruction, et par la résiliation du second contrat avant que son agence de Fontenay ait commencé même son activité ; le droit d'entrée spécifié dans le contrat du 29 octobre 1988 n'est d'ailleurs, selon la société Fimmo, que de 15 000 F et non de 17 790 F.

Enfin, elles soutiennent que la clause de non-concurrence est contraire à la réglementation européenne.

Les sociétés FA 1 demandent au contraire la confirmation du jugement en ce qu'il a reconnu la responsabilité de ses nouveaux franchisés, mais sa réformation quant aux conséquences financières qu'il en a déduites ; elles réclament à MVB 290 000 F de dommages-intérêts à titre de clause pénale et 100 000 F de dommages-intérêts pour violation de la clause de non-concurrence, outre l'interdiction pour les deux sociétés d'adhérer au réseau ORPI sous astreinte de 1 000 F par jour à compter de l'arrêt à intervenir et une condamnation solidaire à 10 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA COUR :

Considérant que Monsieur Goudin ne conteste pas avoir eu en sa possession le manuel d'instruction dont il critique la portée, à l'époque où il a choisi, étant déjà depuis longue date agent immobilier, d'adhérer à un réseau de franchises lui accordant une extension de compétences et d'informations sur le marché de l'immobilier ; qu'il s'est d'ailleurs écoulé plus de dix mois entre la signature du premier contrat pour son agence parisienne et celle du second contrat pour son agence de Fontenay, avant de manifester son regret de telles adhésions trois mois plus tard encore, par leur dénonciation le 26 janvier 1989 ;

Considérant que le motif réel de ces résiliations, non précisé dans la lettre sus-évoquée, s'est très rapidement avéré être la préférence de Monsieur Goudin pour un réseau concurrent ORPI, comme en sont la preuve les annonces parues dans les journaux spécialisés en mai 1989 au noms de MVB et de Fimmo sous le sigle ORPI Réseau National Immobilier ; qu'ainsi sous réserve de la validité des franchises FA 1, les deux sociétés appelantes ont commis des actes de concurrence prohibés par l'article 26, dont les dispositions s'appliquent, comme celles de l'ensemble des contrats, dès leur signature (article 22) ;

Or, considérant que Monsieur Goudin n'est pas fondé à soutenir en même temps que la partie du savoir-faire concernant l'ouverture d'une agence FA 1 s'avérait d'aucune utilité et que de par sa propre expérience, il n'avait nullement besoin de conseils en la matière ; qu'il reconnaît lui-même en page 4 de ses conclusions que ce qui l'intéressait avant tout, était les conseils et aides en matière de gestion de cabinet et les avantages d'une publicité de la marque ;

Qu'à ce sujet, il relève l'extrême banalité des procédés préconisés et des observations relatées, qui n'auraient aucune spécificité au point de n'être pas une contrepartie sérieuse des obligations des franchisés ; notamment du versement de la redevance contractuelle de 8,5 % du chiffre d'affaires ;

Qu'au soutien de cette contestation, l'appelant produit une attestation d'un autre franchisé, la société Brébant dont la sincérité peut être suspectée, dans la mesure où le tribunal puis la cour le 16 juin 1992, l'ont condamné à verser la redevance de franchise ;

Considérant que lessociétés FA 1 font cependant état de stages pour l'année 1989, et ont mis leurs techniciens à disposition de Monsieur Goudin, ce que MVB ne conteste d'ailleurs pas, émettant seulement un doute sur leur compétence et la qualité du contenu de leur offre ; qu'en réalité, ce qui en soi n'est pas un obstacle aux capacités du franchiseur, Monsieur Goudin a découvert que le réseau FA 1 était de création récente, n'avait encore à Paris que quelques agences, outre celles plus nombreuses en province, et que l'adhésion au réseau ORPI s'avérerait plus prometteuse ; qu'il ne produit aucune preuve sérieuse d'une défaillance du franchiseur dans le respect et le contenu de ses obligations y compris au niveau de la publicité, sur le court délai d'adhésion de neuf mois ; que le franchiseur, au contraire produit des attestations de franchisés sur l'apport substantiel de son savoir-faire, des exemplaires du journal et du catalogue des offres de vente d'immeubles par son réseau et des publicités parues dans les journaux locaux d'Ile-de-France, de Rhône-Alpes et de Normandie;

Considérant en conséquence que les contrats de franchise ne présentent pas de cause de nullité,et obligent les franchisées à assumer les conséquences financières de la résiliation unilatérale hors du délai contractuel de 120 jours (article 25) et de la violation de la clause de non-concurrence (article 26 "le franchisé s'interdit pendant une durée de trois années à compter de la cessation des relations contractuelles de s'affilier, adhérer, participer directement ou indirectement à un réseau d'agences immobilières national ou régional concurrent") ; qu'il suffit de rappeler, pour écarter l'argument encore soulevé de l'absence de validité d'une telle clause au motif qu'elle interdirait à Monsieur Goudin toute activité professionnelle pendant trois années que celui-ci conserve la possibilité de continuer comme par le passé à travailler "en indépendant", mais s'interdit seulement d'adhérer à un réseau collectif concurrent de FA 1 ;

Considérant que, même non encore ouverte, l'agence Fimmo de Fontenay est redevable du droit d'entrée de 15 000 F outre la TVA dès le jour de la signature du contrat (article 22) ; qu'en revanche, c'est à bon droit que le tribunal, a procédé à des réductions de dommages-intérêts, faisant ainsi bonne mesure de l'application, légalement réductible, de la clause pénale prévoyant en l'article 26 en cas de violation de l'obligation de non-concurrence le versement par le franchisé d'une somme forfaitaire d'une année de chiffre d'affaires ;

Qu'en effet, en fonction de la faible durée d'activité effective de la société MVB dans le réseau FA 1 (4 mois seulement fin 1988), le préjudice réel et prouvé du franchiseur résultant d'une concurrence déloyale n'a pas atteint la somme de 290 052 F correspondant au chiffre d'affaires, mais celle de 90 000 F ;

Que de même en l'absence de toute activité de la société Fimmo l'application de la clause pénale à son encontre correspond à une indemnité inexistante ;

Considérant enfin que les intimées ne sont plus fondées à réclamer en cause d'appel des condamnations sous astreinte contractuelle (article 26) à déposer enseignes, sigles et marques FA 1, alors que l'obligation triennale de non-concurrence est échue, et que les franchiseurs ne prouvent pas que Monsieur Goudin continuerait dans ses deux agences à faire usage de leur nom ;

Considérant qu'il est inéquitable qu'en cause d'appel les intimées qui avaient déjà bénéficié d'une indemnisation de leurs frais irrépétibles en première instance, conservent leurs frais de défense ;

Par ces motifs, Confirme le jugement du 2 mai 1990 en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne la condamnation de la société à responsabilité limitée Fimmo à payer à la société anonyme FA 1 Ile-de-France 30 000 F au titre de la clause de non-concurrence, L'émendant sur ce seul point, Relève la société à responsabilité limitée Fimmo de cette condamnation ; Condamne in solidum la société à responsabilité limitée MVB Immobilier et la société à responsabilité limitée Fimmo à payer aux intimées ensemble une somme de 5 000 F pour leurs frais irrépétibles exposés devant la cour ; Condamne les appelantes aux dépens ; Admet la société civile professionnelle d'avoués, Fisselier-Chiloux-Boulay, au bénéfice du recouvrement contre ces derniers des dépens avancés dans les conditions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.