Cass. soc., 15 octobre 2002, n° 00-42.364
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Noël France (SA)
Défendeur :
Vessot
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Sargos
Rapporteur :
Mme Quenson
Avocat général :
M. Bruntz
Avocats :
SCP Peignot, Garreau, SCP Vier, Barthélemy
LA COUR : - Attendu que M. Vessot a été engagé le 16 août 1989 en qualité de VRP par la société Noël France ; que la rémunération était constituée d'un fixe, d'une indemnité forfaitaire par journée de déplacement, d'une indemnité forfaitaire par journée de participation aux salons et journées d'achat, et de commissions ; qu'il a été licencié le 6 juillet 1995 pour motif économique ; qu'il a saisi le conseil de prud'hommes en paiement de diverses sommes notamment le remboursement de la retenue effectuée par l'employeur sur le bulletin de salaire de juillet 1995, des indemnités spéciales et conventionnelles de licenciement ;
Sur le premier moyen : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Pau, 28 février 2000) d'avoir retenu une novation contractuelle portant sur le mode de rémunération du VRP, et en conséquence dit que la retenue opérée par la société Noël France à hauteur de 61 799,76 F était sans fondement, que M. Vessot avait bénéficié d'un salaire régulier à hauteur de 17 000 F et de l'avoir condamné à lui payer diverses sommes alors, selon le moyen : 1°) que la novation ne se présume point et doit résulter d'actes positifs non équivoques ; que si les juges du fond apprécient souverainement l'intention des parties de nover la convention qu'elles ont conclue, ils doivent cependant relever les éléments d'où résulte sans équivoque la volonté de nover ; qu'en décidant que les conditions contractuelles de rémunération avaient été définitivement novées par le seul fait que l'employeur n'avait pas procédé aux régularisations nécessairement imposées du fait du statut de VRP, sans même constater ni la volonté certaine de l'employeur de transformer par novation l'avance versée au salarié en rémunération fixe, ni même la commune intention des parties de procéder à une telle novation, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'intention certaine et non équivoque de l'employeur de nover le contrat de travail, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1273 du Code civil ; 2°) que si la volonté de nover peut être tacite, elle doit donc être certaine et résulter d'actes positifs non équivoques ; qu'il résulte des bulletins des salaires versés au VRP jusqu'à la date de son licenciement, jamais contestés jusqu'à cette date parle salarié et régulièrement produits aux débats, que la somme de 17 000 F versée mensuellement l'était à titre d'avance ; qu'en estimant néanmoins, implicitement mais nécessairement pour justifier sa décision, que la volonté de l'employeur de transformer par novation l'avance payée au salarié en rémunération fixe était certaine, la cour d'appel a violé l'article 1273 du Code civil, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que si l'intention de nover ne se présume pas, il n'est pas nécessaire qu'elle soit exprimée en termes formels dès lors qu'elle est certaine et résulte des faits de la cause ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que depuis le début des relations contractuelles le salarié percevait mensuellement une somme fixe et qu'aucune régularisation des commissions n'avait eu lieu au cours de l'exécution du contrat, alors qu'elle aurait dû être réalisée chaque trimestre, a estimé, sans encourir les griefs du moyen et dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation de la commune intention des parties, qu'une novation du mode de rémunération était intervenue ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en ses première et deuxième branches ; - Vu l'article 4° du préambule et les articles 13 et 14 de l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 : - Attendu que, par application du premier de ces textes, l'indemnité spéciale de rupture pourra se substituer à l'indemnité de clientèle pour les représentants rémunérés à la commission ; qu'aux termes du deuxième de ces textes, l'indemnité conventionnelle de rupture qui n'est cumulable ni avec l'indemnité légale de licenciement ni avec l'indemnité de clientèle, sera calculée sur la seule partie fixe convenue de cette rémunération, lorsque l'intéressé bénéficiera également de l'indemnité spéciale de rupture prévue à l'article 14 ; qu'aux termes du troisième de ces textes, l'indemnité spéciale de rupture qui n'est cumulable ni avec l'indemnité légale de licenciement ni avec l'indemnité de clientèle est calculée sur la rémunération moyenne mensuelle des douze derniers mois, à l'exclusion de la partie fixe convenue de cette rémunération ; qu'il en résulte que le VRP qui perçoit une rémunération fixe ne peut prétendre qu'à l'indemnité conventionnelle de rupture non cumulable avec l'indemnité de licenciement;
Attendu que la cour d'appel, qui a fait droit aux demandes du salarié au titre de l'indemnité conventionnelle de rupture et de l'indemnité spéciale de rupture, alors qu'elle avait dit que M. Vessot bénéficiait d'un salaire régulier à hauteur de 17 000 F mensuels, a violé les textes susvisés ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la troisième branche du second moyen : Casse et Annule, mais seulement en ses dispositions relatives aux indemnités conventionnelles et spéciales de rupture, l'arrêt rendu le 28 février 2000, entre les parties, par la Cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Agen.