Cass. soc., 7 janvier 2003, n° 00-46.476
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Merlin
Rapporteur :
Mme Maunand
Avocat général :
M. Duplat
Avocats :
SCP Le Bret-Desaché, SCP Masse-Dessen, Thouvenin
LA COUR : - Attendu que M. X, engagé le 29 mars 1976 en qualité de responsable de magasin par la société la foire aux bonnes affaires, devenue la Foir'fouille, a signé le 13 décembre 1992 un contrat le nommant directeur commercial et prévoyant notamment l'engagement d'investir la somme de 500 000 francs dans la société Financière languedocienne ; qu'ayant été licencié le 31 juillet 1997, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de diverses sommes et notamment une indemnité fondée sur la clause de non-concurrence ;
Sur les premier, deuxième et troisième moyens réunis : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens dont aucun ne serait de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen relevé d'office, les parties ayant présentés leurs observations : - Attendu que l'employeur fait valoir que le moyen relevé d'office tendant à l'application à la présente instance de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation du 10 juillet 2002 relative à la nullité des clauses de non-concurrence qui ne comportent pas de contrepartie financière, porte atteinte au principe de sécurité juridique prescrit par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ;
Mais attendu que la sécurité juridique, invoquée sur le fondement du droit à un procès équitable prévu par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence immuable, l'évolution de la jurisprudence relevant de l'office du juge dans l'application du droit ;
Sur le fond : Vu le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble l'article L. 120-2 du Code du travail ; - Attendu qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives ;
Attendu que pour rejeter la demande de dommages et intérêts pour clause de non-concurrence, la cour d'appel énonce que celle-ci était justifiée dans l'intérêt de l'entreprise et ne portait pas atteinte à la liberté du travail, du fait de sa limitation dans le temps et dans l'espace ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, en déclarant licite une clause de non-concurrence qui ne comportait pas de contrepartie financière, la cour d'appel a violé le principe ci-dessus énoncé et le texte susvisé ;
Par ces motifs : Casse et annule, mais seulement en sa disposition rejetant la demande de dommages-intérêts pour clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 11 octobre 2000, entre les parties, par la Cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Toulouse.