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Décisions

Cass. soc., 29 janvier 2003, n° 01-40.288

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Chamoulaud

Défendeur :

Abeille-vie (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chagny (faisant fonctions)

Rapporteur :

M. Bailly

Avocat général :

Mme Barrairon

Avocats :

Me Brouchot, SCP Pinwnica, Molinié

Cons. prud'h. Limoges, du 30 nov. 1998

30 novembre 1998

LA COUR : - Attendu que M. Chamoulaud, qui avait été engagé en janvier 1982 par la société Epargne de France, est passé en 1997 au service de la société Abeille-Vie, relevant du groupe Commercial Union, à la suite dune fusion-absorption qu'envisageant une réorganisation de ses services qui devait entraîner une modification des contrats de travail des salariés repris, la société Abeille-Vie a mis en place un plan social et proposé à M. Chamoulaud une modification de son contrat; qu'à la suite du refus opposé par ce dernier, elle l'a licencié le 20 mai 1997 pour motif économique;

Sur le premier moyen : -Vu l'article L. 321-1 du Code du travail, - Attendu que, pour débouter M. Chamoulaud de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a relevé que l'employeur avait précisé dans sa lettre du 7 avril 1997, proposant une modification du contrat de travail, qu'en cas de rupture du contrat consécutive au refus de l'avenant proposé, les mesures alternatives prévues par le plan social, dont un exemplaire était joint, seraient applicables à M. Chamoulaud; que ces mesures prévoyaient en premier lieu un reclassement à l'intérieur du groupe Commercial Union France, en énumérant les 10 postes proposés, dont étaient précisés le lieu de travail, la rémunération, une description des fonctions, la convention collective applicable, avec les indications des personnes à contacter pour faire acte de candidature et leur numéro de téléphone ; qu'il était d'autre part, proposé des mandats d'agent général, avec une liste de 24 mandats réservés au 10 mars 1997, précisant pour chacun le lieu, le montant des commissions, le nombre de polices, la valeur du portefeuille, les conditions requises pour postuler, les modalités de formation préalable et les possibilités d'aide de la société Abeille-Vie pour financer le versement de l'indemnité compensatrice, ainsi que les modalités pour faire acte de candidature ; que la société Abeille-Vie a ainsi satisfait à l'obligation préalable de reclassement qui ne lui imposait pas d'entreprendre des démarches individuelles au profit de son salarié dès lors qu'elle proposait un nombre significatif de postes et fournissait pour chacun d'eux des informations concrètes et précises lui permettant de présenter sa candidature en connaissance de cause ;

Attendu, cependant, que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que si le reclassement de l'intéressé dans l'entreprise n'est pas possible ; que, dans le cadre de cette obligation de reclassement, il appartient à l'employeur, même quand un plan social a été établi, de rechercher s'il existe des possibilités de reclassement, prévues ou non dans le plan social au sein du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, et de proposer aux salariés dont le licenciement est envisagé des emplois disponibles de même catégorie ou, à défaut, de catégorie inférieure, fût-ce par voie de modification des contrats de travail, en assurant au besoin l'adaptation de ces salariés à une évolution de leur emploi;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des constatations et énonciations de son arrêt que l'employeur s'était borné à faire état d'une liste de postes vacants contenue dans le plan social, qui concernait des emplois différents de celui occupé par le salarié, sans faire à celui-ci aucune proposition personnalisée de reclassement, ni prévoir son adaptation effective à des emplois disponibles, la cour d'appel a violé le texte susvisé;

Et sur le second moyen : - Vu l'article 751-1 du Code du travail, - Attendu que pour refuser à M. Chamoulaud la qualification de voyageur représentant placieret le débouter des demandes formées à ce titre, la cour d'appel a retenu que le contrat de travail du 17 octobre 1998 (en réalité, du 17 octobre 1988) précisait que le salarié était autorisé à exercer son activité sans exclusivité sur le territoire de la Haute-Vienne mais que "ce secteur pourra être modifié en fonction des besoins de notre organisation"; que l'existence d'un secteur fixe de prospection est un élément essentiel du contrat de VRP ; qu'aux termes dudit contrat la mission de M. Chamoulaud consistait à rechercher des souscripteurs aux contrats émis par son employeur ; que, dès lors qu'il n'est pas établi que ses démarches engageaient son employeur, qui restait donc libre d'y donner suite ou non, elles ne constituaient pas des prises d'ordres, qui caractérisent l'activité du VRP;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si M. Chamoulaud n'avait pas en fait exercé ses fonctions dans un même secteur jusqu'au jour du licenciement et si les pouvoirs dont il disposait effectivement ne lui permettaient pas de prendre des ordres, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé;

Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 novembre 2000, entre les parties, par la Cour d'appel de Limoges; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers.