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Décisions

CCE, 4 février 1998, n° M.950

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Hoffmann La Roche/Boehringer Mannheim

CCE n° M.950

4 février 1998

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 57, paragraphe 2, point a), vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (1), modifié par l'acte d'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, et notamment son article 8, paragraphe 2, vu la décision prise par la Commission le 2 octobre 1997 d'engager la procédure dans la présente affaire, après avoir donné aux entreprises concernées la possibilité de faire connaître leurs observations sur les griefs retenus par la Commission, vu l'avis du comité consultatif en matière de concentrations (2), considérant ce qui suit:

(1) Le 1er septembre 1997, le groupe Hoffmann-La Roche (Roche) a notifié l'acquisition - par le biais de sa filiale Roche Healthcare Ltd - de l'ensemble des actions de Corange Ltd (Corange), détenues par quatre groupes familiaux; cette opération permet à Roche d'acquérir le contrôle exclusif de Corange, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement (CEE) n° 4064-89 ("le règlement sur les concentrations").

(2) Par décision du 22 septembre 1997, la Commission a ordonné la prorogation du sursis à la réalisation de la concentration notifiée, en application de l'article 7, paragraphe 2, et de l'article 18, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations, jusqu'à ce qu'une décision finale soit adoptée en l'espèce. Le 2 octobre 1997, la Commission a décidé d'engager la procédure en application de l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement sur les concentrations.

(3) Pendant la durée de l'enquête dans la présente affaire, l'accord conclu entre les Communautés européennes et le Gouvernement des États-Unis d'Amérique concernant l'application de leurs règles de concurrence (3) a été appliqué.

I. PARTIES

(4) Roche est essentiellement présente dans la fabrication et la distribution de produits pharmaceutiques, de vitamines et de produits chimiques fins, de produits de diagnostic, d'agents de sapidité et de parfums.

(5) Corange est une société de participation n'exerçant pas elle-même d'activités commerciales, qui contrôle l'ensemble du groupe Boehringer Mannheim (BM) et détient 84,2 % des actions de DePuy Inc. BM fabrique et distribue des produits de diagnostic ainsi que des produits pharmaceutiques et biochimiques. DePuy est un fabricant et un distributeur de produits et de dispositifs orthopédiques.

II. OPÉRATION

(6) L'opération consiste en l'acquisition, par Roche, de la totalité du capital de Corange. Roche prendra le contrôle exclusif de Corange et, partant, de BM et de DePuy.

III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

(7) Le chiffre d'affaires total que Roche et Corange réalisent ensemble sur le plan mondial dépasse 5 milliards d'écus (10,184 milliards d'écus pour Roche et 3,327 milliards d'écus pour Corange). Le chiffre d'affaires que les deux entreprises réalisent individuellement dans la Communauté est supérieur à 250 millions d'écus (4,923 milliards d'écus pour Roche et 1,668 milliard d'écus pour Corange), mais elles ne réalisent pas plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires global dans un seul et même État membre. L'opération notifiée revêt donc une dimension communautaire.

IV. APPRÉCIATION SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE

(8) Les activités de Roche et de Corange (par le biais de BM) se chevauchent en partie dans les secteurs des diagnostics in vitro et des produits pharmaceutiques.

(9) D'après les informations communiquées par les parties, il n'existe aucun chevauchement de leurs activités en ce qui concerne les produits orthopédiques, les parfums, les agents de sapidité, les produits chimiques fins, les produits biochimiques et les vitamines (livrées en grande quantité). Les vitamines en vrac sont vendues en grande quantité aux secteurs de l'alimentation animale, de l'agro-alimentaire, des cosmétiques et des produits pharmaceutiques et ne peuvent pas, en tant que telles, se substituer aux médicaments (composés vitaminés).

A. PRODUITS PHARMACEUTIQUES

1. Marchés de produits en cause

(10) La Commission a examiné à de nombreuses reprises la question de la définition du marché en cause dans le cas des produits pharmaceutiques et, dans les décisions qu'elle a rendues en la matière, elle a posé une série de principes [voir décisions du 10 juin 1991, Sanofi/Sterling Drug (affaire IV-M.072), du 29 avril 1993, Procordia/Herbamond (affaire IV-M.323), du 18 avril 1994, Rhône-Poulenc/Cooper (affaire IV-M.426), du 20 juin 1994, la Roche/Syntex (affaire IV-M.457), du 19 septembre 1994, AHP/Cynamid (affaire IV-M.500), du 28 février 1995, Glaxo/Wellcome (affaire IV-M.555), du 3 avril 1995, Behringwerke AG/Armour Pharmaceutical Co. (affaire IV-M.495), du 22 juin 1995, Hoechst/Marion Merell Dow (affaire IV-M.587), et du 28 septembre 1995, Upjohn/Pharmacia (affaire IV-M.631)]. Dans ses décisions, elle a constaté que les médicaments peuvent être subdivisés en classes thérapeutiques, selon l'"Anatomical Therapeutic Classification" (ci-après dénommée "classification ATC"), qui est reconnue et utilisée par l'Organisation mondiale de la santé. Cette classification permet de regrouper les médicaments en fonction de leur composition et de leurs propriétés thérapeutiques. Le troisième niveau de la classification ATC permet de regrouper les médicaments d'après leurs indications thérapeutiques, c'est-à-dire en fonction de l'usage auquel ils sont destinés, et peut donc être utile pour la délimitation du marché. Toutefois, il ne faudrait pas pour autant négliger les autres niveaux de la classification ATC aux fins de l'analyse.

(11) En outre, les médicaments peuvent être subdivisés en différents segments sur la base d'autres critères, en particulier la demande. On peut par exemple distinguer les médicaments soumis à prescription médicale des médicaments en vente libre, ou bien ceux qui sont remboursés en totalité ou en partie par les systèmes d'assurance maladie et ceux qui ne le sont pas. Ces segments se recoupent en partie. La plupart des médicaments soumis à prescription médicale sont remboursés, alors que ce n'est pas le cas de la majorité des médicaments en vente libre. De surcroît, l'affectation d'un médicament à un segment déterminé est loin d'être définitive, dans la mesure où elle dépend bien plus de décisions des pouvoirs publics, qui peuvent entraîner des transferts entre les différents segments.

(12) Les parties sont d'accord avec la Commission pour considérer que la délimitation des marchés selon le troisième niveau de la classification ATC est généralement la plus appropriée, étant donné que les produits de cette subdivision ont en général le même but thérapeutique et ne sont pas interchangeables avec des produits d'autres classes. De l'avis des parties, l'opération de concentration affectera les marchés de produits suivants: céphalosporines (JID), anti-coagulants, produits non-injectables (B1A), antiacides, antiflatulents (A2A), laxatifs (A6A), immunostimulants (L3A), produits non stéroïdiens (M11A), composés de la vitamine B1 (A11D) et protecteurs hépatiques, produits lipotropes (A5B).

(13) Dans le cas de l'industrie pharmaceutique, l'appréciation des conditions de concurrence exige, pour être complète, un examen des produits qui ne sont pas encore sur le marché, mais qui se trouvent à un stade de développement avancé (et ont nécessité, normalement, des investissements considérables). Les chances que ces produits entrent en concurrence avec d'autres, qui sont soit également en cours de développement, soit déjà sur le marché, ne peuvent être évaluées qu'en tenant compte de leurs caractéristiques et de l'usage thérapeutique auquel ils sont destinés. Il faut songer, en outre, que les entreprises pharmaceutiques n'ont pas pour habitude de partager leurs travaux de recherche et de développement, qu'elles consacrent en priorité à la mise au point de leurs propres substances actives et produits. Dans le domaine de la recherche, la coopération est en revanche plus courante entre les entreprises pharmaceutiques et des organismes publics ou privés de recherche, ainsi que des petites entreprises de biotechnologie, qui, certes, disposent du savoir-faire voulu, mais non des moyens et des équipements nécessaires pour effectuer les essais cliniques nécessaires pour obtenir l'autorisation de mise sur le marché et fabriquer les produits pharmaceutiques. La Commission doit examiner les capacités de recherche et de développement en tenant compte de leur importance pour les marchés non seulement actuels, mais aussi futurs.

(14) Si la recherche et le développement doivent être appréciés sous l'angle de leur importance pour les marchés futurs, il est évident que la délimitation du marché en cause est moins simple que pour les marchés existants. La délimitation du marché ne peut se fonder sur la classification ATC actuelle que si des produits existants doivent être remplacés. Il faudrait sinon se fonder en priorité sur les indications auxquelles s'appliqueraient les produits futurs.

2. Marchés géographiques en cause

(15) Des efforts sont menés en vue d'harmoniser le secteur des produits pharmaceutiques au niveau européen. L'harmonisation des législations techniques dans la Communauté et l'entrée en vigueur de nouvelles procédures d'autorisation pour les médicaments constituent l'aboutissement du programme pour le marché intérieur en ce qui concerne les exigences scientifiques et techniques applicables aux médicaments. Depuis le début de l'année 1995, les entreprises pharmaceutiques ont la possibilité (ou l'obligation, lorsqu'elles fabriquent des produits issus de la biotechnologie) de présenter, pour les nouveaux médicaments, une demande d'autorisation à l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments, qui adresse alors un avis à la Commission, dont la décision ultérieure lie tous les États membres. Actuellement, les médicaments peuvent donc être autorisés dans divers États membres pour différentes indications thérapeutiques.

(16) La vente des médicaments dépend notamment des procédures administratives que les autorités sanitaires des États membres ont instituées et des politiques qu'elles pratiquent en matière d'achat. Certains pays influent directement ou indirectement sur les prix et leur système de sécurité sociale prévoit différents niveaux de remboursement en fonction des catégories de médicaments. Les prix des médicaments peuvent donc varier d'un État membre à l'autre. Il existe, en outre, de fortes disparités entre les stratégies menées en matière de marque et de taille des emballages, ainsi qu'entre les systèmes de distribution. Ces différences soulignent le caractère national de ces marchés.

(17) Dans sa pratique décisionnelle constante, la Commission définit les marchés de produits pharmaceutiques comme des marchés nationaux. Dans leur notification, les parties ont indiqué qu'elles se ralliaient à cette délimitation. Les marchés affectés par l'opération de concentration peuvent donc être considérés comme étant nationaux.

(18) Dans la mesure où ce sont les travaux de recherche et de développement menés actuellement dans certains domaines qui permettront d'envisager ce que seront les futurs marchés de produits, lesdites restrictions nationales n'ont pas le même degré d'efficacité. Les marchés futurs se caractérisent par le fait qu'aucun produit n'a encore été autorisé. Étant donné la dimension globale que revêtent, normalement, les travaux de recherche et de développement, l'examen des marchés futurs devrait donc s'effectuer en considérant au moins le territoire de la Communauté, sinon le marché mondial.

3. Appréciation

(19) L'opération de concentration ne pose aucun problème de concurrence sur la plupart des marchés affectés, étant donné que la part de marché cumulée des parties est inférieure à 25 % et qu'un certain nombre de concurrents puissants sont présents au niveau international.

(20) D'après les parties, les seuls chevauchements d'activité qui déboucheront sur des parts de marché supérieures à 25 % concernent le marché italien des antiinflammatoires non stéroïdiens (M1A), des composés de la vitamine B1 (A11D) et des protecteurs hépatiques, les produits lipotropes (A5B).

(21) Un certain nombre d'autres concurrents internationaux tels que Novartis, Pfizer et Pharmacia & Upjohn exercent une activité sur le marché italien des produits de la classe M1A (BM: [< 30 %) (4), Roche: [< 5 %] et des produits de la classe A5B (BM: [< 30 %], Roche: [< 5 %]).

(22) En Italie, en ce qui concerne les produits de la classe A11D, pour lesquels BM détient [< 20 %] du marché et Roche [< 50 %], la part de marché cumulée des parties atteindra [< 70 %]. Un des produits de Roche (Benerva), qui représente [< 5 %) de part de marché, n'est pas entièrement substituable aux autres produits de BM et de Roche, car il ne s'agit pas d'un composé de vitamines B1, B6 et B12, mais de B1 uniquement. Le principal concurrent est Bioindustria (groupe Pfizer), avec 21,6 % du marché, les autres étant Lepetit (groupe Hoechst), Angelini, Bracco, Guidotti et Menarini. Il s'agit d'un marché de 10 millions d'écus. Hormis Neuraben, le produit de Pfizer, tous les principaux produits existant sur ce marché ont été introduits il y a plusieurs décennies. Au cours des six dernières années, Neuraben a quasiment multiplié par deux sa part de marché et il concurrence fortement les produits Roche et BM. Cette situation ne changera vraisemblablement pas à l'issue de l'opération de concentration. En outre, il importe de noter que tous les produits appartenant à la classe A11D sont génériques et qu'ils ne sont pas remboursés par le système de santé national italien. Le médecin et le patient sont donc libres de choisir d'autres marques. Si BM/Roche voulait augmenter ses prix, les clients pourraient facilement se tourner vers des produits concurrents. Ils seraient incités à le faire puisqu'en Italie les produits de la classe A11D ne sont pas remboursés et que le consommateur doit donc en acquitter le prix intégral. Étant donné que les barrières à l'entrée sont peu importantes, d'autres sociétés pharmaceutiques pourraient facilement démarrer la fabrication de produits A11D ou importer des produits vendus dans d'autres États membres, en cas d'accroissement de la demande de la part des consommateurs ou d'augmentation de prix. Pour l'ensemble de ces raisons, la concentration ne menace pas de créer ou de renforcer une position dominante sur ce marché.

(23) Au cours de l'enquête, certains ont émis l'idée que le chevauchement d'activité entre Roche et BM sur le marché des médicaments utilisés pour le traitement, le suivi et la prévention des infarctus du myocarde (crises cardiaques) pourrait, à l'avenir, poser des problèmes de concurrence. L'enquête a cependant montré que ce problème ne concernait que le marché américain. En Europe, le produit de Genentech (Roche), "Activase", est exploité sous licence par un tiers indépendant (Boehringer Ingelheim). Cette entreprise dispose de sa propre installation de production en Europe et ne dépend pas de Genentech pour son approvisionnement en matières premières ou en produits finis. L'opération de concentration ne modifie donc pas les conditions de concurrence.

(24) Enfin, dans les secteurs des substances actives ainsi que de la recherche-développement, l'enquête n'a révélé aucun chevauchement important, sauf dans le domaine des activateurs tissulaires du plasminogène, utilisés pour la fabrication des médicaments susmentionnés prescrits pour le traitement des crises cardiaques.

B. DIAGNOSTICS IN VITRO

1. Marchés de produits en cause

a) Vue d'ensemble

(25) L'opération de concentration concerne le domaine de l'analyse diagnostique. Une analyse diagnostique est une procédure destinée à contrôler la condition physiologique d'un sujet. Les procédures d'analyse diffèrent suivant qu'elles visent à analyser l'état de santé général d'un sujet, une maladie précise, une pathologie prénatale ou la réaction d'un sujet à certaines substances.

(26) Les examens diagnostiques peuvent être réalisés in vitro ou in vivo. Les examens in vitro sont menés à l'extérieur du corps et sont utilisés pour identifier et mesurer des substances dans des échantillons de tissus, de sang ou d'urine des patients, permettant ainsi aux médecins de diagnostiquer, de traiter et de surveiller les patients. La méthode in vivo consiste à utiliser des substances diagnostiques directement dans ou sur le corps humain. Pour certaines applications, les deux méthodes se complètent.

(27) Roche et BM sont uniquement présentes dans le secteur des diagnostics in vitro. Ceux-ci sont en majorité vendus, sous forme de systèmes à usages multiples, aux hôpitaux, aux laboratoires privés, aux laboratoires universitaires ou à d'autres organismes. En outre, une part non négligeable des produits de diagnostic in vitro sont des produits jetables destinés aux médecins généralistes, aux collectivités publiques, aux employeurs et autres et, dans certains cas, ils sont même vendus sans prescription sous forme de trousses d'autodiagnostic (tests rapides, tels que tests de grossesse, de diabètes sucrés et de cholestérol). Pour certaines applications, les trousses d'autodiagnostic complètent les trousses de tests à usages multiples.

(28) L'opération de concentration entre Roche et BM concerne en premier lieu les produits de diagnostic in vitro à usages multiples (dont les sondes ADN, voir ci-dessous) qui sont utilisés sur place. Ces produits à usage diagnostique constituent généralement un système composé d'un instrument de mesure destiné à la réalisation automatisée de plusieurs types d'examens, et des réactifs pour cet instrument. Les réactifs, c'est-à-dire les composés et les liquides utilisés pour réaliser les examens, sont fournis sous la forme d'une trousse de réactif qui comprend une substance de contrôle et un sérum-test destiné à vérifier le bon fonctionnement de l'instrument de mesure. Un agent d'étalonnage sert à régler périodiquement - souvent une fois par semaine - les instruments de mesure.

(29) En ce qui concerne les produits multi-usages, l'activité porte principalement sur des gammes de trousses de test adaptées à un système donné. Les principaux fournisseurs proposent pour la plupart une offre globale comprenant un instrument de mesure, un ensemble de trousses de test et un service après-vente complet, dont un contrôle de la qualité. La mise au point d'un nouveau système est relativement onéreuse. Les entreprises qui fabriquent les produits de diagnostic consacrent environ 10 % de leur chiffre d'affaires total à la recherche-développement. La vente des instruments ne représente au plus que 20 % de leur chiffre d'affaires, le reste étant essentiellement obtenu par les ventes de trousses de réactif.

(30) Cette situation explique que la concurrence sur le marché des produits de diagnostic s'exerce surtout sur la vente de réactifs et que les fournisseurs ont fortement intérêt à obtenir des commandes à long terme pour un approvisionnement continu en trousses de réactifs. Pour atteindre cet objectif, les fabricants de produits de diagnostic adoptent diverses stratégies. Les entreprises ont ainsi tendance à commercialiser leurs produits sous forme de systèmes fermés conçus pour être utilisés exclusivement avec leurs réactifs. De même, dans ce secteur, les contrats de livraison avec les clients sont généralement conclus pour plusieurs années. Souvent, les instruments sont seulement loués ou mis à la disposition du client pour un prix très modique, voire gratuitement, à condition que celui-ci achète un certain nombre de trousses de réactif sur une période déterminée (plusieurs années). Il est évident que les clients n'obtiennent pas gratuitement ces instruments puisque leur prix est intégré au prix du réactif. L'enquête de la Commission montre à cet égard que la durée d'amortissement d'un instrument acheté est normalement de cinq ans, alors que les entreprises du secteur des diagnostics calculent une période plus courte pour un contrat de location de réactif. En cinq ans, le client aura donc acquitté pour l'instrument en question un montant plus élevé que celui qu'il aurait payé en l'achetant directement. Si les clients, des laboratoires publics et privés, acceptent des offres de ce type, c'est parce qu'ils préfèrent souvent, pour des raisons budgétaires ou autres, que le coût total du système soit imputé sur leurs coûts d'exploitation plutôt que sur leurs investissements à long terme dans des instruments. Les divers fournisseurs, y compris les parties, ont par conséquent mis au point différentes techniques de vente, dans lesquelles le prix de l'instrument n'est pas facturé séparément, mais est inclus dans le prix des réactifs.

(31) L'enquête a en grande partie confirmé le point de vue des parties, qui considèrent que, techniquement, les réactifs d'un fournisseur donné peuvent être utilisés sur l'instrument d'un autre fabricant, pour autant que les technologies soient compatibles entre elles, et que cela vaut également pour les systèmes fermés, selon les moyens employés pour obtenir la fermeture du contenant (formes particulières du contenant, codes-barres, etc). Il apparaît cependant que pour passer d'un fournisseur de réactifs à un autre, le client doit posséder un certain savoir-faire et être disposé, à cette fin, à investir du temps et de l'énergie. Si certains gros clients ont signalé qu'ils n'étaient pas disposés à devenir dépendants d'un fournisseur donné ou de systèmes fermés, les clients contactés par la Commission ont en majorité déclaré que, d'une manière générale, ils n'avaient pas utilisé de réactifs fournis par des tiers à grande échelle. Ces indications s'accordent avec le fait que les "taux de clientèle captive" des parties, c'est-à-dire la part de réactifs que les fournisseurs de produits de diagnostic continuent à vendre aux clients qui ont acheté leurs instruments, sont généralement élevés. Cela vaut également pour la plupart de leurs concurrents.

(32) Le secteur du diagnostic in vitro peut être subdivisé en cinq segments principaux: chimie clinique, immunochimie, hématologie/histologie, microbiologie (culture) et immunologie infectieuse (5).Cette distinction correspond au premier niveau de la classification dite "de l'EDMA", une classification de produits élaborée par l'Association européenne des fabricants de produits de diagnostic (European Diagnostics Manufacturers Association) qui semble être généralement acceptée par les entreprises et est utilisée pour établir à l'échelle européenne des statistiques sur les ventes des différents réactifs. Au cours de l'enquête de la Commission, les clients ont, en revanche, pour la plupart déclaré ne pas être familiers de cette classification. En ce qui concerne les segments affectés par cette opération, ils ont toutefois confirmé qu'il était rationnel de classifier les produits de diagnostic du point de vue de la demande également. En outre, les sondes ADN, qui permettent des examens dans plusieurs spécialités (maladies infectieuses, oncologie, maladies génétiques et détermination des groupes tissulaires) et connaissent actuellement une forte expansion, seront examinées ci-dessous.

(33) L'opération de concentration entre Roche et BM entraînerait des chevauchements d'activité importants dans les secteurs des produits de diagnostic utilisés en chimie clinique classique et en immunochimie. Elle aurait également des conséquences non négligeables dans le secteur des sondes ADN.

b) Réactifs utilisés en chimie clinique classique

(34) Les produits de diagnostic utilisés en chimie clinique classique servent principalement à déterminer les taux de glucose, de cholestérol, de sodium et autres substances que l'on trouve en concentrations importantes dans le corps. Ces examens sont habituellement réalisés à la fois dans le cadre de visites de routine et dans des cas d'urgence afin d'aider les médecins à comprendre le fonctionnement des fonctions physiques de base.

(35) Le second niveau de la classification de l'EDMA distingue sept groupes de produits différents en chimie clinique classique. Les parties sont toutefois d'avis que la seule distinction pertinente aux fins de la définition du marché est celle entre les tests rapides et les réactifs utilisés en chimie clinique (CC). Les tests rapides sont principalement des tests manuels destinés à contrôler le taux de glucose et ils sont réalisés la plupart du temps par les patients eux-mêmes ou par les médecins. Les réactifs, en revanche, sont utilisés pour effectuer des examens diagnostiques sur des instruments en laboratoire. L'enquête de la Commission confirme que les tests rapides constituent un marché de produits distinct, en raison de différences en ce qui concerne les clients, les circuits de distribution et les conditions de concurrence. Il n'est pas utile de trancher la question de savoir si l'ensemble des tests rapides constitue un seul marché de produits ou s'il s'agit de marchés distincts (par exemple pour les bandelettes utilisées pour les examens de sang et celles utilisées pour les examens d'urine), car quelles que soient les autres définitions du marché retenues, une concurrence effective ne serait pas entravée de manière significative dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

(36) En ce qui concerne les réactifs, les parties ont indiqué dans leur notification que l'ensemble des réactifs CC peuvent être regroupés, du fait qu'ils présentent des caractéristiques communes, que les clients s'approvisionnent régulièrement auprès d'un seul fournisseur pour couvrir la quasi-totalité de leurs besoins concernant ces examens et que, du côté de l'offre, les principaux fournisseurs proposent la même gamme d'instruments et de réactifs. L'enquête de la Commission confirme que les conditions de concurrence sont en effet identiques pour les raisons avancées par les parties et que ces réactifs peuvent donc être regroupés en un seul marché de produits, bien qu'ils ne soient pas, stricto sensu, substituables du point de vue de la demande.

(37) Les parties ont ultérieurement élargi cette définition du marché en indiquant que certains réactifs utilisés en immunochimie, appelés tests immunologiques homogènes (TIH), doivent pour les raisons suivantes, être inclus dans le même marché de produits que les réactifs utilisés en chimie clinique: les clients achètent les réactifs CC et TIH auprès des mêmes fournisseurs, les nouveaux instruments employés en chimie clinique, tels que le Roche Integra, peuvent également être utilisés pour les tests immunologiques homogènes et, enfin, les principaux fournisseurs proposent la même gamme de produits. L'enquête de la Commission a cependant établi que les conditions de concurrence n'étaient pas les mêmes pour les réactifs TIH et CC et que, par conséquent, ils ne devaient pas être classés dans le même marché de produits. Premièrement, en tant que produits, les réactifs TIH présentent des caractéristiques différentes de celles des réactifs utilisés en chimie clinique. Les examens d'immunochimie requièrent une technique de détection plus complexe. Ils permettent de mesurer d'autres substances et peuvent détecter des concentrations beaucoup plus faibles. Les réactifs employés sont par conséquent plus onéreux que ceux utilisés en chimie clinique. Deuxièmement, les contraintes auxquelles les fournisseurs de réactifs utilisés pour les tests immunologiques homogènes sont soumis sous l'angle de la concurrence ne sont pas semblables à celles que subissent les fournisseurs de réactifs en chimie clinique. Même les clients qui peuvent en partie réaliser ces tests sur des instruments de chimie clinique, achètent souvent leurs réactifs TIH auprès de fournisseurs différents de leurs fournisseurs de réactifs CC, c'est-à-dire auprès de ceux qui leur vendent leurs instruments d'immunochimie. Ainsi, par rapport à la situation qui prévaut pour les réactifs CC, les clients ont plusieurs possibilités de réaction en cas d'augmentation minime, mais durable, du prix des réactifs TIH. Ils peuvent s'adresser à des fournisseurs de TIH qui ne sont pas présents sur le marché des réactifs CC (Abbott par exemple) et effectuer ces examens sur leurs instruments d'immunochimie. Les différences dans la répartition des parts de marché pour les réactifs TIH et CC attestent l'importance de ces différentes solutions du point de vue de la concurrence. D'après les parties, BM détient, dans l'EEE, environ 40 % du marché des réactifs CC et plus ou moins 15 % du marché des TIH. Abbott, en revanche, représente moins de 2 % du marché des réactifs CC, mais possède une part de marché supérieure à 15 % pour les réactifs TIH. Troisièmement, du côté de l'offre, les principaux fournisseurs en chimie clinique proposent différentes gammes de tests immunologiques homogènes destinés à être réalisés sur des instruments de chimie clinique. La Commission en conclut donc qu'il existe un marché de produits distinct pour les réactifs utilisés en chimie clinique, qui ne comprend pas les tests immunologiques homogènes.

c) Réactifs utilisés en immunochimie

(38) L'immunochimie concerne l'utilisation d'anticorps ciblés en vue d'identifier et d'analyser des enzymes, des médicaments, des hormones et autres substances contenues dans le corps à des taux de concentration relativement faibles. Selon le facteur contrôlé, il est possible de distinguer un certain nombre d'applications. Si ces applications sont à considérer comme des marchés de produits, des chevauchements d'activités existent, selon les parties, dans les domaines suivants: certains types de protéines, marqueurs tumoraux, hormones de la fonction thyroïdienne, examens liés aux anémies/vitamines, contrôle de substances thérapeutiques, maladies rhumatismales et auto-immunes, normes et contrôles.

(39) Le regroupement des réactifs immunochimiques compris dans les divers groupes du deuxième niveau de la classification de l'EDMA apparaît moins justifié que dans le cas de la chimie clinique. En immunochimie, les différences semblent être sensibles en raison de particularités techniques importantes pour les utilisateurs (6), du fait également que les clients ne s'approvisionnent pas régulièrement auprès d'un seul fournisseur pour couvrir la majeure partie de leurs besoins concernant ces examens et que, du côté de l'offre, les principaux fournisseurs ne proposent pas la même gamme d'instruments et de réactifs. Il conviendrait donc éventuellement de considérer chacun de ces groupes comme un marché en cause. En l'espèce, il n'est toutefois pas utile de trancher cette question, car quelles que soient les autres définitions du marché retenues, une concurrence effective ne serait pas entravée de manière significative dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

d) Instruments utilisés en chimie clinique classique et en immunochimie

(40) Les instruments sont des appareils de mesure utilisés pour réaliser les tests. Ils sont de taille variable et vont des petits instruments aux instruments haut de gamme et de grande capacité. Tous les principaux fournisseurs de réactifs proposent des instruments. La plupart d'entre eux fabriquent leurs propres instruments (Roche notamment), mais certains s'approvisionnent auprès de fabricants indépendants. BM, par exemple, ne produit que certains instruments et réalise la plus grande partie de ses ventes d'instruments en tant que distributeur exclusif des appareils Hitachi en Europe. Ces instruments sont commercialisés en tant qu'instruments "BM/Hitachi".

(41) Jusqu'en 1996, la classification de l'EDMA ne subdivisait pas les instruments en groupes de produits plus différenciés. D'après la notification, cette approche est cependant trop large pour définir le marché, puisque la génération actuelle d'instruments d'analyse ne couvre généralement que des examens diagnostiques dans un des segments de marché susmentionnés (c'est-à-dire en chimie clinique ou en immunochimie). Un instrument utilisé pour réaliser des examens en chimie clinique ne saurait donc être interchangeable avec un instrument utilisé en immunochimie. Ultérieurement, les parties ont cependant fait état de "l'intégration des segments sur le marché des DIV" et notamment de l'intégration des examens de chimie clinique et d'immunochimie dans un seul instrument. À l'heure actuelle, cette tendance se manifeste par l'intégration de certains tests immunologiques homogènes dans de nouveaux instruments de chimie clinique, tels que le Roche Integra. Même si cette tendance devait se renforcer et s'il s'avérait possible d'effectuer davantage d'examens d'immunochimie sur des instruments de chimie clinique, il est important de noter qu'il sera uniquement possible de remplacer partiellement des instruments de chimie classique par des instruments d'immunochimie, mais pas l'inverse. Cette substitution à sens unique sous-entend que le commerce de réactifs de chimie clinique généré par les instruments de chimie clinique ne diminuera pas et que tout pouvoir de marché potentiel détenu par un fournisseur en matière d'instruments de chimie clinique ne sera pas limité par des fournisseurs d'instruments en immunochimie. Ceci laisse toutefois supposer que tout pouvoir de marché potentiel en ce qui concerne les instruments d'immunochimie sera limité par la possibilité dont disposeront les clients de transférer une partie de leurs examens vers les instruments de chimie clinique.

(42) En 1996, l'EDMA a publié une nouvelle classification plus précise en matière d'instruments, qui sera utilisée à l'avenir pour établir des statistiques de ventes; son premier niveau suit la distinction établie entre les segments chimie clinique, immunochimie, hématologie, microbiologie, auxquels la classification ajoute les catégories "autres instruments cliniques" et "systèmes de gestion de données".

(43) Au sein des différents segments, une distinction supplémentaire peut être effectuée en fonction de la taille des instruments, leur capacité pouvant en effet varier sensiblement. Ainsi, en chimie clinique, une segmentation courante dans ce secteur, que reflète la classification de l'EDMA, établit une distinction entre les instruments manuels (capacité inférieure à 50 examens par heure), les instruments automatiques de petite taille (50 à 200 examens par heure), les instruments automatiques de taille moyenne (200 à 450 examens par heure), les instruments automatiques de grande taille (450 à 1 000 examens par heure) et les instruments automatiques de très grande taille (plus de 1 000 examens par heure). Cette segmentation n'est applicable à des fins de définition du marché que pour distinguer les instruments manuels (photomètres) des instruments automatiques. Les instruments manuels sont principalement vendus aux médecins, qui les utilisent pour effectuer des analyses ponctuelles dans leur cabinet; ils répondent donc à une demande différente de celle des instruments automatiques, qui sont surtout destinés aux hôpitaux et aux laboratoires privés. Ces clients ont besoin d'un ou de plusieurs instruments automatiques, selon leur taille, et ils disposent à cet égard d'une certaine marge de manœuvre: ils peuvent, par exemple, choisir d'acheter un instrument de très grande taille ou deux instruments de grande taille. Les préférences exactes des différents laboratoires dépendront de nombreux facteurs, notamment de leur taille, de leur capacité journalière d'examens, de leur charge de pointe, de l'espace disponible et de leurs ressources en personnel. Toute tentative visant à définir des marchés distincts pour certaines tailles d'instruments automatiques utilisés en chimie clinique ne correspondra donc généralement pas aux caractéristiques des différents laboratoires du point de vue de la demande. Au cours de l'enquête, ni les parties ni aucun tiers, n'ont proposé de retenir cette segmentation. La Commission considère de ce fait que les instruments automatiques utilisés en chimie clinique constituent un marché de produits distinct, qui ne doit pas être subdivisé plus avant en fonction de la taille des instruments.

(44) Les activités des parties se chevauchent surtout en ce qui concerne les instruments automatiques utilisés en chimie clinique. Pour les autres types d'instrument, à l'exception des sondes ADN (voir ci-dessous), l'opération de concentration ne créera pas de problème de concurrence. Il n'est pas nécessaire d'examiner s'il convient de distinguer d'autres marchés pour les instruments, y compris les instruments utilisés en immunochimie, car quelles que soient les autres définitions du marché retenues, une concurrence effective ne serait pas entravée de manière significative dans l'EEE ou une partie substantielle de celui-ci.

e) Sondes ADN

(45) Les examens diagnostiques utilisant des sondes ADN sont employés pour détecter des maladies infectieuses ou génétiques et des cellules cancéreuses, au moyen d'une amplification enzymatique d'un acide nucléique déterminé contenu dans un échantillon. Cette technique présente, dans son champ d'application, des avantages non négligeables par rapport aux anciennes méthodes de diagnostic in vitro nécessitant une amplification biologique (croissance en culture). Premièrement, les sondes ADN permettent de reproduire des millions de fois des fragments minuscules de substance génétique, de manière à les obtenir en nombre suffisamment important pour détecter rapidement et d'une manière fiable des maladies infectieuses par exemple, telles que le sida. Les sondes ADN offrent, en tant que telles, une méthode plus rapide, moins coûteuse et potentiellement moins aléatoire que l'amplification biologique. Deuxièmement, les sondes ADN constituent le seul procédé capable de quantifier la charge virale dans un échantillon, ce qui présente l'avantage de permettre une meilleure efficacité de la surveillance et du traitement thérapeutique des patients. De plus, elles offrent des possibilités exceptionnelles en termes de "gestion de la maladie", puisqu'elles permettraient à un fournisseur (Roche par exemple) de proposer conjointement un examen diagnostique et un médicament thérapeutique. Le remboursement du médicament pourrait alors être subordonné à la réalisation d'un examen diagnostique donné. En résumé, les sondes ADN offrent à l'utilisateur final (un laboratoire) des possibilités non négligeables de réaliser des examens qui, en cas d'utilisation d'autres produits de diagnostic, seraient exclus ou ne pourraient être réalisés qu'avec un degré de précision moins important.

(46) Actuellement, les sondes ADN sont essentiellement employées pour détecter le HIV, le virus de l'hépatite C (VHC), la mycobacterium tubercolosis (MTB) et les maladies sexuellement transmissibles (MST), la chlamydia par exemple. Avant que Roche n'introduise le premier instrument automatique permettant d'isoler et de multiplier l'acide nucléique, le Cobas Amplicor, les tests réalisés au moyen de sondes ADN n'étaient disponibles que sous forme de procédures manuelles. Outre ce processus d'automatisation, le marché des sondes ADN connaît pour l'heure une forte expansion et de nombreux projets de recherche sont actuellement en cours, dont l'objectif est d'appliquer les sondes ADN à d'autres domaines pour augmenter les capacités de diagnostic. Les limites pratiques et techniques des sondes ADN sont liées au fait que cette méthode nécessite la présence d'acides nucléiques dans l'échantillon. Par conséquent, le seul secteur des diagnostics in vitro qui, pour des raisons techniques, ne pourra à l'avenir être remplacé par les sondes ADN est celui de la chimie clinique.

(47) Les caractéristiques techniques susmentionnées, ainsi que le fait que les sondes ADN sont les seules à pouvoir fournir certains résultats diagnostiques, donnent à penser que le niveau de substituabilité entre les sondes ADN et les autres méthodes de diagnostic in vitro est très faible. Les données sur les prix communiquées par les parties confirment l'existence d'écarts de prix importants entre les sondes ADN et les autres dispositifs de diagnostic in vitro (le prix des sondes ADN est 30 fois plus élevé). En outre, les informations fournies par les parties laissent supposer que le marché des sondes ADN connaît une période d'expansion très forte (les ventes de Roche dans la Communauté ont doublé entre 1995 et 1996), tandis que les marchés des autres dispositifs de diagnostic progressent à un rythme beaucoup plus lent. La Commission en conclut donc que les sondes ADN constituent un marché distinct.

2. Marchés géographiques en cause

(48) Dans leur notification, les parties ont indiqué que les marchés des produits de diagnostic in vitro étaient mondiaux ou qu'ils couvraient au moins le territoire de l'EEE. Elles ont fait valoir à l'appui de cette affirmation le fait que les réactifs et les instruments sont généralement commercialisés dans toute l'Europe sous une forme, une conception et un étiquetage identiques, que les produits sont fabriqués sur un seul site de production et que les principaux concurrents sont tous présents à l'échelle mondiale.

(49) Même si, du côté de l'offre, la production et la recherche-développement se font à l'échelle européenne, voire mondiale, la Commission est d'avis que la définition du marché en cause doit se fonder principalement sur des facteurs liés à la demande (7). Dans ses décisions précédentes prises dans le secteur des DIV, la Commission a donc établi que les marchés géographiques en cause pour les produits de diagnostic in vitro concernés (surveillance des substances thérapeutiques, tests de toxicomanie, hématologie) restaient essentiellement nationaux, dans la mesure où les clients auraient des difficultés à choisir d'autres fournisseurs, implantés ailleurs (8).

(50) L'enquête de la Commission a, en l'espèce, confirmé ces résultats. Les clients et les concurrents contactés par la Commission ont pour la plupart déclaré qu'ils considéraient les marchés comme nationaux ou ont communiqué des informations allant dans ce sens.

(51) En ce qui concerne les réactifs, les clients indiquent qu'ils n'achètent pas ces produits en dehors de leur État membre, car ils estiment qu'une telle solution n'est pas rentable. La plupart des clients ont également souligné l'importance d'un service rapide et fiable pour garantir une disponibilité permanente des réactifs et des instruments. Seuls des fournisseurs présents localement peuvent, selon eux, assurer un tel service.

(52) De même, la Commission a constaté précédemment des écarts de prix importants entre les États membres en ce qui concerne les réactifs, ce qui a d'ailleurs été confirmé au cours de l'enquête par la plupart des clients et des concurrents.Les différences de prix ont été corroborées par les données sur les prix fournies par les parties, qui font apparaître des différences de prix importantes d'un État membre à l'autre, pouvant aller jusqu'à 200 % pour les mêmes réactifs. Ces différences s'expliquent par la diversité des cultures médicales nationales et notamment par l'hétérogénéité des politiques de santé nationales, des systèmes de sécurité sociale et des techniques utilisées dans les laboratoires. Les différences de taux de remboursement entre les États membres pour le même examen diagnostique jouent à cet égard un rôle particulièrement significatif. Les fournisseurs de DIV semblent définir leurs politiques de prix en fonction de ces niveaux de remboursement, les prix les plus élevés étant pratiqués dans les États membres où le client (c'est-à-dire le laboratoire) peut également obtenir les prix les plus avantageux parce que les remboursements y sont plus importants.

(53) Les autres éléments qui militent en faveur de la dimension nationale des marchés des réactifs sont le fait que la totalité des principaux concurrents disposent de réseaux de distribution nationaux et que les parts de marché des parties varient sensiblement entre des zones géographiques voisines (voir ci-dessous).

(54) En ce qui concerne les instruments, les parties affirment qu'elles sont incapables de fournir une comparaison de prix significative. Les autres raisons exposées ci-dessous montrent cependant que les marchés des instruments sont également nationaux. La disponibilité d'un service rapide et fiable étant particulièrement importante pour réduire la durée d'immobilisation de la machine, les clients achètent les instruments localement. Les différences entre les systèmes de santé nationaux entraînent des différences dans la taille des laboratoires et, partant, dans la technologie utilisée. L'ensemble des concurrents disposent de systèmes de distribution nationaux et les différences dans les parts de marché des parties sont sensibles entre des zones géographiques voisines.

(55) Les réglementations nationales ont certaines répercussions sur les réactifs, ainsi que sur les instruments, mais elles sont moins contraignantes que dans le cas des produits pharmaceutiques. La Commission prépare actuellement une directive en vue d'harmoniser les réglementations nationales en matière de dispositifs de diagnostic in vitro. La directive, qui pourrait être adoptée en 1998, n'entrera toutefois pas en vigueur immédiatement, car un délai de plusieurs années sera accordé pour sa mise en œuvre. Il importe également de noter que les efforts d'harmonisation ne concernent que les questions relatives à l'autorisation du produit et ne portent pas sur l'autorisation de remboursement, qui continuera à être déterminée par chaque État membre. Une étude de marché indépendante, présentée par les parties, relève à cet égard qu'une société pourrait donc être autorisée à vendre un produit dans un pays de l'Union européenne quel qu'il soit, sans pour autant être assurée de réaliser un chiffre d'affaires suffisant, en raison d'une autorisation de remboursement limitée.

(56) Au vu des considérations qui précèdent, la Commission considère que les marchés de produits restent pour l'essentiel nationaux.

3. Appréciation

(57) La Commission conclut que l'opération, telle qu'elle a été notifiée, créerait ou renforcerait des positions dominantes sur un certain nombre de marchés nationaux des réactifs et des instruments utilisés en chimie clinique, marchés qui sont précisés ci-après. En outre, l'opération renforcerait la position dominante de Roche sur le marché des sondes ADN.

a) Chimie clinique classique (réactifs et instruments)

1) Effets de l'opération de concentration

i) Cumul des parts de marché

(58) Les activités des parties se chevauchent dans le secteur des réactifs utilisés en chimie classique (réactifs CC), ainsi que des instruments servant à réaliser les tests. En revanche, il n'y a aucun chevauchement de leurs activités dans les tests rapides sur bandelettes, puisque Roche n'opère pas sur ce marché.

(59) Sur le marché des réactifs CC, les parties ont une part de marché cumulée de [< 50 %] dans l'EEE (BM [< 40 %], Roche [< 5 %]). Au niveau national, tous les États membres constituent des marchés affectés. Le tableau suivant, établi sur la base des données communiquées par les parties, montre leurs parts de marché en 1996:

EMPLACEMENT TABLEAU

(60) En ce qui concerne le secteur des instruments, on ne dispose de statistiques que pour l'ensemble des instruments DIV. Sur cette base, tous les États membres seraient des marchés affectés. D'après les parties, les chevauchements dans le secteur des instruments considérés dans leur ensemble seraient les suivants: Autriche (Roche [< 20 %], BM [< 50 %]), Belgique (Roche [< 10 %], BM [< 30 %]), Danemark (Roche [< 20 %], BM [< 20 %]), Finlande (Roche [< 10 %], BM [< 20 %]), France (Roche [< 10 %], BM [< 10 %]), Allemagne (Roche [< 10 %], BM [< 20 %]), Grèce (Roche [< 10 %], BM [< 20 %]), Italie (Roche [< 10 %], BM [< 20 %]), Pays-Bas (Roche, non indiqué, BM [< 60 %]), Norvège (Roche (< 10 %], BM [< 40 %]), Portugal (Roche, non indiqué, BM [< 30 %]), Espagne (Roche [< 10 %], BM [< 20 %]), Suède (Roche [< 20 %], BM [< 30 %]), Royaume-Uni et Irlande (Roche [< 10 %], BM [< 20 %]).

(61) Dans la mesure où les parties n'ont que de faibles parts de marché dans les secteurs de l'immunochimie, de l'hématologie et de la microbiologie, leurs parts de marché cumulées sont inférieures à celles qu'elles détiennent sur le marché des instruments utilisés en chimie clinique.Compte tenu des liens étroits qui existent entre la vente d'instruments et celle de réactifs, la Commission estime que les parts de marché des parties dans le secteur des instruments devraient être très proches de celles qu'elles possèdent dans le secteur des réactifs. S'il devait y avoir un écart entre ces parts, il devrait en toute logique se traduire par des parts plus élevées dans le secteur des instruments, dans la mesure où opèrent sur le marché des réactifs de petits fournisseurs qui ne vendent pas d'instruments, mais dont les produits sont utilisés sur les instruments des grands concurrents. Ces concurrents pourraient donc grignoter la part de marché des parties dans le segment des réactifs, mais pas dans celui des instruments. Les parties ont aussi soutenu dans leur notification qu'il devrait exister une étroite correspondance entre les parts de marché détenues dans le secteur des instruments et les parts détenues dans celui des réactifs. C'est l'opinion que défendait aussi Dade Behring dans sa notification dans l'opération IV-M.954. La Commission estime, par conséquent, que les parts de marché qui reviennent aux parties dans le secteur des réactifs CC et qui sont indiquées plus haut sont représentatives de celles qu'elles possèdent dans le secteur des instruments utilisés en chimie clinique. Les parties n'ont pas contesté cette hypothèse de départ au cours de la procédure.

(62) Ainsi qu'il ressort du tableau présenté ci-dessus, BM détient des parts de marché élevées et constitue la première entreprise du secteur dans tous les États membres. Elle se heurte à un certain nombre de concurrents, qui sont aussi bien des entreprises internationales présentes dans la plupart des États membres que de petits producteurs de réactifs comptant moins de dix employés et opérant exclusivement dans leur pays d'origine. La part de marché de ces concurrents varie d'un État membre à l'autre. Les concurrents globalement les plus importants sont, en termes de parts de marché, Johnson & Johnson (J& J), Beckman, Bayer, Dade Behring, Merck KGaA (Merck) et Olympus.

(63) Si l'on considère l'ensemble de l'EEE, la part de marché de BM est beaucoup plus élevée que celle de ses concurrents. Elle est égale à la part de marché cumulée de ses cinq concurrents immédiats. Si l'on prend ces concurrents séparément, la part de BM est plus du triple de celles de J& J et de Beckman et plus de cinq fois celles de Bayer, de Dade Behring et de Merck. La part de marché d'Olympus n'atteint que la moitié de celles des concurrents précités. La part de marché détenue par Roche est plus faible que celles de J& J, de Beckman et de Bayer, mais elle équivaut plus ou moins à celles de Merck et de Dade Behring.

(64) L'analyse du tableau présenté ci-dessus révèle la position des concurrents sur les différents marchés géographiques et l'importance des parts de marché cumulées qui résulteraient de l'opération de concentration.

(65) En Autriche et en Allemagne, la part de marché de BM est supérieure à 50 %. L'écart par rapport à la part de marché de son concurrent immédiat (Autriche: >60 %, Allemagne: >40 %) indique à lui seul qu'aucun concurrent n'est capable de menacer la position de BM sur ces marchés. En ce qui concerne le marché allemand, cet état de fait est reconnu par Roche qui, dans un plan marketing 1997/1999 (Roche Diagnostics Chemistry Laboratory Systems International Marketing Plan 1997/1999), déclare que BM est en position dominante. L'opération renforcerait encore cette position en Autriche, dans la mesure où elle éliminerait du marché le deuxième grand concurrent. En Allemagne, le cumul des parts de marché accentuerait l'écart entre BM et ses concurrents.

(66) En Espagne, BM a déjà une part de marché quatre fois plus importante que celle de son concurrent le plus proche. L'une des spécificités de ce marché réside dans le fait que l'entreprise propriétaire d'Instrumentation Laboratory est aussi celle qui distribue les produits J& J dans ce pays. Il n'en reste pas moins que la part de marché cumulée de ces deux entreprises ne représenterait qu'un tiers de celle de BM. Aucun concurrent ne constitue donc une menace pour la position de BM sur le marché espagnol. L'adjonction de la part de marché de Roche ne pourrait qu'accentuer ce déséquilibre.

(67) Au Portugal également, BM a une part de marché près de quatre fois plus élevée que celles de ses concurrents immédiats. L'apport de la part de marché de Roche ([< 10 %]) augmenterait cette avance et éliminerait l'un des cinq plus importants concurrents de ce marché.

(68) En Finlande, la part de marché de BM est plus du double de celle de son concurrent immédiat. Avec Roche, la part de marché cumulée serait proche de 50 % et plus forte que la part cumulée de leurs trois concurrents immédiats.

(69) En Suède, BM détient une part de marché qui est plus du double de celle de J& J, son concurrent le plus direct. Roche renforcerait cette position de tête avec ses [< 10 %]. Ensemble, Roche et BM seraient aussi fortes que leurs cinq concurrents immédiats réunis.

(70) En Italie, la part de marché de BM est presque le double de celle de son concurrent immédiat. Avec Roche, la part de marché cumulée atteindrait près de 50 % et serait plus importante que celle de leurs deux concurrents immédiats considérés ensemble.

(71) Au Danemark, la situation est un peu différente dans la mesure où la part de marché de BM est plus faible que celle qu'elle possède, en moyenne, en Europe, mais Roche y détient, en revanche, une part de marché particulièrement élevée. Le cumul des parts de marché de Roche et de BM en ferait le numéro un incontesté de ce marché, avec une part de marché qui serait plus du double de celle de leur concurrent immédiat.

(72) En Norvège, BM détient une part de marché plus forte, mais elle se heurte à deux concurrents qui, ensemble, ont une part de marché plus élevée que Roche et BM réunies.

(73) En Belgique, aux Pays-Bas, en France, en Grèce, au Royaume-Uni et en Irlande, aucun problème n'a été relevé, au cours de l'enquête de la Commission, sous l'angle de la concurrence, puisque les parts de marché cumulées des parties y sont comparativement plus faibles et que certains de leurs concurrents y détiennent des parts de marché comparables.

ii) Cumul des parcs installés

(74) Outre des parts de marché élevées, l'enquête révèle que, à l'issue de l'opération, Roche et BM disposeraient d'un atout de taille au regard de l'importance de leur parc d'instruments installé, c'est-à-dire du nombre d'instruments vendus et encore en usage. Le parc installé revêt un intérêt particulier (plus que le nombre d'instruments installés au cours d'une année donnée) pour deux raisons essentielles: d'une part, il détermine, dans une large mesure, le volume des ventes de réactifs associés pendant la durée de vie de l'instrument considéré (normalement, de cinq à huit ans); d'autre part, il influe beaucoup sur l'installation future d'instruments, puisqu'il est plus facile à un fournisseur d'installer un instrument chez un de ses clients actuels pour la chimie clinique, dont il connaît tous les décideurs ainsi que les besoins en termes de remplacement des équipements, que chez un client avec lequel il n'entretenait auparavant aucun rapport. Dans la mesure où, souvent, les personnes compétentes pour prendre des décisions en matière d'instruments utilisés en chimie clinique ne sont pas celles qui décident des achats d'autres instruments de DIV, même un fournisseur disposant d'un parc installé important pour ces autres instruments, tel qu'Abbott, n'a pas un accès comparable à la clientèle en chimie clinique.

(75) Le choix, par un client, d'un instrument donné tend à produire un effet de verrouillage, indépendamment du fait qu'il l'achète à un fournisseur ou le reçoive en contrepartie de la conclusion d'un contrat de fourniture de réactifs. Cet effet de verrouillage résulte autant des engagements contractuels pris que de considérations économiques liées à la gestion d'un laboratoire. Si un client achète un instrument, il ne remplacera pas ce dernier, normalement, avant la fin de la période d'amortissement (en général, cinq ans). Si le client a reçu un instrument, le contrat de fourniture de réactifs qu'il a signé en échange avec Roche ou BM est normalement conclu pour une durée de cinq ans. Pendant la durée du contrat, le client s'engage à s'approvisionner en réactifs (en respectant soit une certaine valeur annuelle, soit un nombre minimal de trousses de test) auprès du fournisseur de l'instrument en question pendant plusieurs années. Les contrats types communiqués par Roche ne prévoient aucune possibilité de résiliation anticipée du contrat. Cette obligation d'achats annuels est calculée individuellement pour chaque client, en fonction de sa consommation annuelle prévue. En outre, les clients ont un intérêt économique à réaliser le plus grand nombre possible de tests sur un instrument déterminé, dans la mesure où c'est le moyen le plus direct de réduire leurs coûts par examen (utilisation optimale du capital investi, réduction au minimum du coût de formation du personnel, etc). Le prix total qu'ils doivent payer comprend aussi la redevance pour la location de l'instrument. Le calcul de cette redevance tient compte du prix initial de l'instrument, de la durée du contrat, de la valeur de l'instrument à l'issue de cette durée et des frais financiers. En général, le contrat prévoit également la fourniture de services complémentaires, tels que la formation du personnel du client, la maintenance et la fourniture de produits à usage unique.

(76) En comptant un parc installé de quelque [< 9 000] instruments dans le secteur de la chimie clinique ([< 6 200] pour BM et [< 2 400] pour Roche), le parc total installé des parties dans l'EEE serait au moins trois fois supérieur à celui de leurs concurrents immédiats (J& J et Bayer, qui ont toutes deux un parc installé inférieur à 2 300 instruments) et dépasserait celui de leur concurrent le plus important dans tous les États membres. Le tableau suivant montre le parc total installé des parties et celui de leurs principaux concurrents dans les États membres où le cumul des parts de marché suscite des préoccupations sous l'angle de la concurrence:

EMPLACEMENT TABLEAU

(77) L'importance du parc installé, avec le nombre de clients correspondant, renforcerait la position des parties sur les marchés. À cet égard, l'une des pièces justificatives produites par Roche avec la notification contient la déclaration suivante: "... compte tenu de l'importance de son parc installé et de son volume élevé de production de réactifs, BM est en mesure de réaliser des économies d'échelle considérables et des marges d'exploitation très élevées en ce qui concerne la chimie clinique ([...]), la répartition de ses activités entre les ventes d'instruments et celles de réactifs est excellente (75/25) [75 % pour les réactifs] et, bien qu'il s'agisse d'un système ouvert, la qualité des réactifs de BM est telle qu'elle assure à l'entreprise un taux de clientèle captive élevé pour les instruments installés, ce qui permet à BM de maintenir ses marges."

(78) Il est important de souligner que l'opération n'aurait pas seulement pour effet de cumuler numériquement les deux plus grands parcs installés d'Europe; les activités des deux sociétés sont aussi très complémentaires, en ce sens qu'elles créeraient une gamme de produits exceptionnelle, couvrant toutes les tailles d'instruments. En effet, alors que BM est traditionnellement axée sur les instruments de taille moyenne et de grande taille, Roche détient une position plus forte dans le segment des instruments de petite taille (avec le "Gobas Mira"). Les difficultés des concurrents actuels pour rivaliser avec la position de force de Roche et BM réunies, que ce soit de manière générale sur l'ensemble du marché des instruments ou seulement sur certains de ses segments, n'en seraient qu'accrues.

(79) La comparaison du parc installé de BM et de Roche avec celui de leurs six principaux concurrents en Europe (à savoir J& J, Beckman, Bayer, Dade Behring, Merck et Olympus) montre de quels atouts les parties bénéficieraient, à l'issue de leur fusion, dans les États membres où leur part de marché cumulée laisse présager que Roche/BM détiendrait une position dominante. La comparaison porte essentiellement sur deux aspects: d'une part, le parc total installé de tous les instruments, indépendamment de leur taille, ce qui donne une indication du nombre de clients et des contacts d'un fournisseur; d'autre part, le parc installé par taille d'instrument, ce chiffre donnant une idée du volume des achats de réactifs associés déterminé par taille d'instrument et assurant la comparabilité des divers instruments.

(80) En Autriche, BM dispose du plus grand parc total installé, Roche se plaçant en deuxième position. Leur parc total cumulé serait près de trois fois supérieur à celui de leurs six concurrents immédiats considérés ensemble. BM compte également le plus grand parc installé dans chacun des segments du marché des instruments, à l'exception des instruments de petite taille, pour lesquels Roche arrive en tête. Dans chacun de ces segments, le parc installé cumulé des parties serait beaucoup plus étendu que celui de leurs six concurrents réunis.

(81) En Allemagne, BM possède aussi le premier parc installé, suivi de celui de Roche. Leur parc total cumulé installé serait près du double de celui de leurs six concurrents réunis. En outre, c'est BM qui a le plus grand parc installé dans chacun des segments du marché des instruments. Avec Roche, son parc dans chacun de ces segments serait supérieur au parc installé cumulé de leurs six concurrents, à l'exception du segment des instruments de taille moyenne où le parc cumulé de la concurrence dépasse celui de Roche/BM.

(82) En Espagne, BM a, globalement et dans chacun des segments du marché des instruments, sauf celui des instruments de petite taille, le plus grand parc installé. Roche est en position de force sur le segment des instruments de petite taille et se place au quatrième rang sur celui des instruments de grande taille. Ensemble, les parties auraient un parc aussi important que le parc cumulé de leurs six concurrents sur l'ensemble du marché et sur tous ses segments, à l'exception des instruments de taille moyenne.

(83) Au Portugal et en Finlande, BM détient, globalement et sur chacun des segments du marché, le premier parc installé par ordre de grandeur. Roche vient en deuxième position (presque exclusivement pour les instruments de petite taille). Ensemble, les parties auraient un parc supérieur à celui de leurs six concurrents sur chacun des segments du marché.

(84) En Suède, Roche est la première entreprise en termes de parc installé pour les instruments de petite taille, tandis que BM figure au premier rang pour les instruments de taille moyenne et de grande taille. Bayer est le seul fournisseur sur ce marché à avoir installé un instrument de très grande taille. Le parc cumulé de Roche/BM serait au moins aussi grand que celui de la concurrence, tant sur l'ensemble du marché que sur chacun de ses segments, à l'exception de celui des instruments de très grande taille.

(85) Au Danemark, Roche compte le plus grand parc installé, BM arrivant en troisième position (derrière Bayer). Le parc cumulé des parties serait le plus important, tant sur l'ensemble du marché que sur chacun de ses segments, dépassant celui de leurs six concurrents réunis sur chacun des segments du marché, sauf celui des instruments de taille moyenne où c'est J& J qui en a installé le plus grand nombre.

(86) En Italie, le parc installé de BM est le plus important, Roche se plaçant au troisième rang. BM arrive également en tête sur chaque segment du marché, à l'exception de celui des instruments de taille moyenne (où le numéro un est Beckman). Le parc cumulé de Roche/BM dépasserait celui de ses concurrents pris séparément, mais pas le parc cumulé de ses six concurrents immédiats.

(87) En Norvège, Roche possède le premier parc installé pour les instruments de petite taille. Le parc de J& J est aussi grand que celui de Roche/BM dans les segments des instruments de taille moyenne et de grande taille, Bayer ayant un parc plus important que le parc cumulé de Roche/BM pour les instruments de très grande taille. Si l'on considère l'ensemble du marché, le parc installé cumulé de Roche/BM ne dépasserait pas celui de J& J et Bayer réunies.

(88) Cette comparaison montre donc que, dans les pays où BM est déjà en position dominante avant la réalisation de l'opération de concentration (à savoir, l'Autriche, l'Allemagne et l'Espagne), cette entreprise contrôle indubitablement la majorité du parc installé. Cette position serait encore renforcée par l'apport du parc de Roche dans le segment des instruments de petite taille. Au Portugal, en Finlande, en Suède et au Danemark, les parcs installés cumulés de Roche/BM seraient au moins aussi importants que ceux de leurs six concurrents considérés ensemble. En Italie, le parc cumulé des parties serait aussi grand que le parc cumulé de leurs quatre concurrents immédiats. Dans le cas de la Norvège, la comparaison des parcs installés révèle que Roche/BM ne détiendra aucune position dominante, puisque J& J et Bayer seront en mesure de lui faire efficacement concurrence.

(89) Il y a donc lieu de conclure que, en ce qui concerne tant les réactifs que les instruments, le cumul des parcs installés de Roche et de BM renforcerait la position dominante détenue par cette dernière entreprise en Autriche, en Allemagne et en Espagne, et faciliterait la création d'une position dominante au Portugal, en Finlande, en Suède, au Danemark et en Italie.

iii) Élimination de Roche en tant que concurrent

(90) L'opération de concentration éliminera Roche du marché en tant que concurrent. En Autriche et au Danemark, cette élimination constitue en soi une diminution notable de la concurrence, puisque Roche comptait parmi les plus grandes rivales de BM sur ces marchés (en tant que numéro deux en Autriche et numéro trois au Danemark).

(91) Sur les marchés où Roche ne figure pas parmi les trois premiers concurrents, il faut tenir compte du fait que Roche a été, ces dernières années, l'un des concurrents les plus dynamiques du secteur des DIV. Une étude de marché réalisée par un cabinet indépendant et communiquée par les parties note que Roche était au nombre des entreprises ayant enregistré la plus forte progression pour les DIV, ses recettes ayant augmenté, dans le secteur de la chimie clinique en Europe, de 7 % entre 1995 et 1996. La force concurrentielle de Roche dans la chimie clinique a été accentuée par le succès du lancement de sa nouvelle famille d'instruments, Roche Integra. Même si l'entreprise s'est spécialisée, par le passé, dans les instruments de petite taille, elle a lancé en 1995 ce nouvel instrument de grande taille, grâce auquel elle a pu commencer à concurrencer BM dans un segment qui constituait jusque-là la spécialité de cette dernière.

iv) Possibilités accrues de regroupement des produits

(92) Roche a clairement admis l'importance que revêtent, sous l'angle concurrentiel, l'offre d'une gamme de produits étendue et la possibilité qui en résulte de regrouper les produits de différents domaines de l'industrie des DIV. Le chef de la division des diagnostics de cette entreprise a déclaré à cet égard: "Nous pensons que l'établissement d'une position de premier plan dans un large éventail de disciplines du secteur des diagnostics présente des avantages: d'une part, en effet, il nous met en mesure de regrouper les produits et les services proposés à une même clientèle; d'autre part, il permet d'offrir une solution globale aux besoins des laboratoires...".

(93) Le chef de division précité a également reconnu les possibilités exceptionnelles que Roche/BM a de parvenir à ces résultats. Évaluant les avantages que présenterait l'acquisition d'un autre concurrent que BM, il a conclu que, en s'associant avec cette dernière, Roche serait "... la seule entreprise, à l'exception de BMD [BM], à pouvoir associer avec succès chimie et immunochimie".

(94) Cette opinion selon laquelle BM est actuellement le seul fournisseur en mesure de réussir à associer chimie clinique et immunochimie est confirmée par la faiblesse des positions détenues par tous ses autres concurrents actuels dans le domaine de la chimie clinique et par le fait qu'Abbott, numéro un de l'immunochimie, n'exerce encore aucune activité dans le secteur de la chimie clinique. De plus, Roche/BM serait dans une position exceptionnelle en étant le seul concurrent à pouvoir associer avec succès la chimie clinique classique et/ou l'immunochimie avec les sondes ADN (voir ci-après).

2) Possibilités de concurrence

(95) L'enquête de la Commission a révélé que ni les concurrents actuels ou potentiels, ni un quelconque contrepoids du côté de la demande ne sauraient être considérés comme capables, pour les raisons exposées dans les points qui suivent, de disputer à Roche/BM sa position dominante.

i) Concurrents existants

(96) Les parts de marché des concurrents les plus importants ont déjà été analysées dans les points précédents, dans le cadre de l'examen des parts de marché de Roche/BM. Il a alors été indiqué que les principaux concurrents des parties étaient J& J, Beckman, Bayer, Dade Behring, Merck et Olympus. Il est également important de noter, en ce qui concerne l'analyse de l'impact des concurrents, que, en plus de la position de faiblesse de ces entreprises (en termes de parts de marché et de parc installé), deux des cinq plus grands concurrents européens, à savoir Bayer et Merck, n'ont cessé de reculer sur le marché. Même l'engagement de J& J dans l'industrie des DIV est mis en doute par des observateurs spécialisés.

(97) Comme indiqué plus haut, les parties font valoir que toutes les entreprises de premier plan dans le secteur des diagnostics ont développé ou développent actuellement des systèmes d'instruments modulaires d'une nouvelle génération, qui couvriront la chimie clinique, l'immunochimie et l'immunologie infectieuse (9). Les parties estiment que cela pourrait constituer une menace sérieuse pour la position dominante détenue par BM sur le marché de la chimie clinique.

(98) Les parties soutiennent que, outre elles-mêmes, Abbott, Beckman, Dade Behring et Bayer développent aussi des "systèmes d'instruments intégrés" de ce type. Même s'il est vrai que certains projets de développement de cette nature sont en cours, la Commission n'est pas convaincue par cet argument des parties. Ainsi que l'adjectif "modulaire" l'indique, ces instruments d'une nouvelle génération comporteront plusieurs modules adaptés pour fonctionner ensemble en tant que système. Il y aurait donc un module destiné aux tests de chimie clinique, un autre aux tests d'immunochimie, et ainsi de suite.

(99) Aucun de ces systèmes d'instruments modulaires n'a encore été mis sur le marché dans l'EEE, ni d'ailleurs dans une autre région du monde. Il semble que le premier système du genre à pouvoir être qualifié de modulaire, à savoir le "RXL" de Dade Behring, n'intègre pas encore de module pour les tests d'immunochimie hétérogènes. L'autre module, qui couvre la chimie clinique et les TIH, a été commercialisé aux États-Unis d'Amérique. Les parties n'ont avancé aucun argument expliquant en quoi l'éventuel lancement du RXL en Europe renforcerait de manière notable la position de Dade Behring sur le marché de la chimie clinique. Elles n'ont pas non plus montré en quoi les éventuels systèmes d'instruments modulaires que pourraient lancer, dans l'avenir, Beckman, Bayer ou toute autre entreprise opérant déjà sur le marché de la chimie clinique amélioreraient leur position sur le marché. C'est pourquoi, sans exclure le lancement futur de systèmes d'instruments modulaires sur les marchés européens, la Commission est d'avis que les parties n'ont pas démontré la probabilité que cette évolution modifie sensiblement les caractéristiques du marché de la chimie clinique, à savoir l'importance que revêt la possession d'un parc installé étendu, de nature à garantir les ventes futures de réactifs et le remplacement futur des instruments(voir ci-dessus). De surcroît, les allégations des parties concernant les systèmes d'instruments modulaires ne tiennent pas compte de la possibilité que les clients ne soient pas tous intéressés par ces nouveaux systèmes, même s'il devait être facile de se les procurer sur le marché dans un avenir prévisible. C'est ce que montrent les réponses des clients aux demandes de renseignements de la Commission, ainsi que le fait, qui ressort clairement du parc installé existant en chimie clinique, que les clients ont des besoins très divers en termes de taille, de menus de test et de débit des instruments. Enfin, et ce n'est pas la moindre raison, la thèse des parties sur l' imminence des effets des systèmes d'instruments modulaires semblerait être en contradiction avec les motifs à l'origine du projet d'acquisition de BM par Roche. Si ces nouveaux instruments devaient effectivement constituer une menace pour la position de BM, comme les parties le prétendent, comment ne pas trouver absurde que Roche consacre 11 milliards de dollars des États-Unis à l'acquisition de BM, puisque sa force principale réside dans la chimie clinique. Ce qui précède donne donc à penser que le lancement éventuel de systèmes d'instruments modulaires ne modifiera pas fondamentalement, dans un avenir prévisible, les grandes caractéristiques des marchés des dispositifs de diagnostic utilisés en chimie clinique (réactifs et instruments).

(100) Il y a donc lieu de conclure que, dans les pays où l'opération de concentration menacerait de créer ou de renforcer une position dominante, les concurrents existants ne sont déjà pas en mesure, si l'on considère leurs parts de marché et leur parc installé, de disputer réellement et efficacement à Roche/BM sa position de numéro un. On ne saurait non plus espérer d'un développement et d'une commercialisation éventuels de systèmes d'instruments modulaires par l'une ou l'autre de ces entreprises concurrentes qu'ils puissent améliorer de manière notable la capacité de celles-ci à menacer la position dominante de Roche/BM.

ii) Puissance d'achat

(101) La demande peut être segmentée selon plusieurs critères, les plus importants d'entre eux étant le régime de propriété (publique ou privée) des laboratoires, l'exigence de volume/capacité (petits laboratoires par rapport aux grands laboratoires) et la nature du client (laboratoires hospitaliers, laboratoires spécialisés et cabinets de médecins). Le nombre et la taille de ces clients varient d'un État membre à l'autre et dépendent de l'organisation du régime national de soins de santé. Dans certains États membres, on note une certaine concentration de la demande avec le regroupement des achats des laboratoires publics. Ces achats centralisés ne s'effectuent jamais, cependant, à l'échelon national. Ils reposent plutôt sur une combinaison de la demande des autorités locales ou régionales. De ce fait, dans tous les États membres, indépendamment des spécificités nationales, la demande est beaucoup plus dispersée que l'offre.

(102) D'après la notification, cette dispersion de la demande se reflète dans la clientèle de Roche et de BM. Le plus gros client de l'une ou l'autre partie ne représente en aucun cas, dans aucun des pays où l'enquête a relevé des problèmes au regard de la concurrence, une partie substantielle des ventes de réactifs CC de cette entreprise. La plus forte proportion observée (13 %) concerne les ventes de Roche en Finlande et au Portugal. Autrement, le premier client de BM se situe dans une fourchette de 1 à 8 % des ventes dans ces États membres. Le chiffre correspondant pour Roche est de 1 à 10 %.

(103) Les parties n'ont donc pas pour interlocuteurs des clients puissants qui concentreraient un important pourcentage de la demande totale, quel que soit le pays considéré. Par conséquent, même les plus gros clients ne peuvent exercer aucun contrepoids. Cette opinion est corroborée par le fait que même le propriétaire du plus grand groupe de laboratoires privés de l'EEE (qui a son siège en Allemagne) estime ne pas être en mesure de disputer à Roche/BM son pouvoir de marché.

(104) Le recours aux appels d'offres ne renforce pas beaucoup la puissance compensatrice des clients. Les parties soutiennent que les appels d'offres ne jouent un rôle notable (en représentant plus de 20 % de la demande totale en volume) qu'en Italie, en Espagne, au Portugal, en Grèce et au Royaume-Uni. Dans ces deux derniers pays, l'opération de concentration n'aura pas pour effet de créer une position dominante et, dans les autres pays cités, les appels d'offres ne sauraient contrebalancer la position de Roche/BM. Ce ne pourrait être le cas que s'il y avait un nombre limité de gros appels d'offres, qui seraient lancés par des centrales d'achat. Or, en Italie, les grandes entreprises spécialisées dans les diagnostics ont participé à quelque 2 000 appels d'offres lancés, en 1996, par plusieurs autorités régionales. Durant la même période, au Portugal et en Espagne, Roche a pris part à un nombre d'appels d'offres situé entre 150 et 200 (entre 300 et 600 pour BM), dans chacun de ces pays. Moins de 3 % de ces procédures de passation des marchés étaient le fait d'autorités centralisées.

(105) Les remarques précédentes amènent donc à conclure que, compte tenu de facteurs structurels, la position des parties sur les marchés ne saurait être limitée par une puissance d'achat compensatrice du côté de la demande.

iii) Concurrence potentielle

(106) Les barrières à l'entrée sur le marché des produits de diagnostic utilisés en chimie clinique sont importantes. Pour pouvoir y entrer à une échelle suffisamment grande, il faudrait engager de lourds investissements.Les coûts de développement d'un nouveau système (instrument et réactifs correspondants) se situeraient, d'après les estimations de l'association allemande des fabricants de produits de diagnostic (dont Roche et BM sont toutes deux membres), dans une fourchette de 25 à 150 millions d'écus. Selon une étude de marché réalisée par un cabinet indépendant et communiquée par les parties, ces coûts seraient même supérieurs à 250 millions d'écus. Il faudrait ajouter à ces coûts ceux de création et de mise en place, par le nouvel arrivant, des organisations de vente et de service après-vente nécessaires. Les documents produits par les parties font aussi apparaître l'existence d'économies d'échelle très importantes. En outre, le nouveau venu sur le marché se heurterait au fait que ses clients potentiels sont liés, dans une large mesure, par un effet de verrouillage de leur parc installé existant et sont donc réticents à remplacer ces instruments avant leur amortissement total.

(107) Le fait que le seul nouveau concurrent de poids qui ait réussi à entrer sur le marché européen au cours des cinq dernières années semble être Olympus témoigne de l'importance de ces barrières à l'entrée. Il faut néanmoins noter que, avant d'entrer sur le marché en tant que fournisseur d'une ligne complète de produits, Olympus fabriquait depuis vingt ans déjà des instruments que Merck et Eppendorf écoulaient sur les marchés.

(108) Les parties font valoir qu'Abbott, le numéro un mondial de l'immunochimie, est sur le point d'entrer sur le marché de la chimie clinique. Abbott n'a actuellement qu'une présence très limitée dans le secteur de la chimie classique, avec des instruments qu'elle a installés dans les années 1970 et au début de la décennie 1980. II a été confirmé qu'Abbott s'apprête effectivement à revenir sur le marché, en concluant une alliance avec le fabricant d'instruments japonais Toshiba (pour les instruments de grande et de très grande taille) et en procédant à l'acquisition du fabricant d'instruments français Alcyon (pour les instruments de petite taille). Les parties ont également avancé un argument qui a déjà été examiné plus haut, en ce qui concerne le lancement par Abbott de systèmes d'instruments modulaires d'une nouvelle génération.

(109) Il faut cependant savoir que, dans un premier temps, Abbott entrera sur le marché, non en lançant un système modulaire, mais en proposant les instruments de chimie clinique d'Alcyon. Alcyon n'a actuellement qu'une position très limitée sur les marchés européens de la chimie clinique, quels qu'ils soient. L'alliance avec Toshiba a pour objet la production d'un module du projet de système "Architect" d'Abbott, qui servira pour la chimie clinique et sera une combinaison de ces instruments avec ceux qu'Abbott fabrique pour l'immunochimie. Le lancement du module pour la chimie clinique n'est toutefois pas prévu avant, au plus tôt, l'an 2000.

(110) Même si Abbott dispose d'une clientèle et des ressources financières suffisantes pour tenter de surmonter les barrières à l'entrée, elle ne saurait rivaliser, à court ou moyen terme, avec la position dominante que détiendra Roche/BM. Abbott assurera dès le départ la vente des instruments de petite taille d'Alcyon. Même si, grâce à son poids financier, Abbott est susceptible de faire progresser quelque peu les ventes de ces instruments, l'effet de cette progression devrait être relativement limité. L'instrument de grande taille, et peut-être modulaire, de Toshiba sera lancé ultérieurement. Abbott ne devrait donc pas s'attendre à conquérir des parts de marché très élevées (>5 %) dans un avenir prévisible.

(111) Il y a donc lieu de conclure que, à l'issue de l'opération de concentration, la concurrence potentielle ne pourrait limiter efficacement le comportement de Roche/BM sur le marché.

3) Conclusion

(112) La fusion des activités de Roche et de BM dans le secteur de la chimie clinique classique aura pour effet la création de positions dominantes au Portugal, en Finlande, en Suède, au Danemark et en Italie, ainsi que le renforcement des positions dominantes actuelles de BM en Autriche, en Allemagne et en Espagne. Cette conclusion s'appuie non seulement sur l'importance des parts de marché cumulées de Roche/BM, mais aussi sur les atouts dont les parties disposent quant à leur parc installé, à leur portefeuille de produits inégalé, à la faiblesse relative de leurs concurrents actuels, au contrepoids insuffisant du côté de la demande et aux barrières élevées à l'entrée sur le marché.

b) Immunochimie (réactifs et instruments)

(113) Sur un marché qui regrouperait l'ensemble des diagnostics d'immunochimie, les parties auraient une part de marché cumulée dans l'EEE de [< 20 %] (BM [< 20 %], Roche [< 10 %]). En partant de cette hypothèse, les marchés affectés seraient ceux des pays suivants: Autriche (part de marché cumulée: [< 40 %], dont [< 30 %] pour BM et [< 10 %] pour Roche), Norvège (part de marché cumulée: [< 30 %], dont [< 30 %] pour BM et [< 10 %] pour Roche), Allemagne (part de marché cumulée: [< 20 %], dont [< 20 %] pour BM et [< 10 %] pour Roche) et Espagne (part de marché cumulée: [< 20 %], dont [< 20 %] pour BM et [< 10 %] pour Roche). Sur tous ces marchés, de gros concurrents sont présents, notamment Abbott, première entreprise mondiale d'immunochimie, qui dispose de parts de marché comparables à celles de BM dans ces pays, Dade Behring, avec des parts de marché très supérieures à celles de Roche, mais inférieures à celles de BM, et Beckman.

(114) Si l'on prend le deuxième niveau de la classification de l'EDMA, l'opération notifiée entraîne des chevauchements très importants dans certains groupes de produits spécifiques du domaine de l'immunochimie. Le tableau suivant indique les groupes de produits pour lesquels des problèmes pourraient se poser sous l'angle de la concurrence, sur la seule base des parts de marché cumulées des parties:

EMPLACEMENT TABLEAU

(115) Le tableau montre que Roche/BM obtiendrait, dans certains segments de l'immunochimie, des parts de marché comparables à celles qui ont été indiquées en ce qui concerne le marché de la chimie clinique. Cette position n'est toutefois pas aussi figée que leur position sur le marché de la chimie clinique. Comme il a été précisé plus haut, il existe de gros concurrents sur la plupart des marchés, qui pèseront sur le comportement de Roche/BM. Même sur les deux marchés où les parties disposent d'une part de marché particulièrement élevée (maladies rhumatismales et maladies auto-immunes, normes et contrôles en Autriche), les résultats de l'enquête confirment que l'opération ne posera pas de problèmes sous l'angle de la concurrence. Aucun de ces deux produits n'est utilisé dans des instruments spécialisés dans les tests de dépistage de ces maladies. La capacité des parties à exploiter leur position de force dans ces segments sera donc limitée par la position beaucoup plus faible qu'elles détiennent pour d'autres réactifs utilisés en immunochimie dans le même instrument. En outre, même si les marchés des diagnostics en immunochimie restent essentiellement de dimension nationale, Dade Behring, qui possède des parts de marché comparables à celles des parties pour les maladies rhumatismales et les maladies auto-immunes dans l'EEE et en Allemagne, et qui est déjà présente dans une mesure non négligeable en Autriche, pourrait réagir si Roche/BM tentait d'exploiter sa position en Autriche. Dade Behring dispose d'une capacité de production et d'une force de vente suffisantes pour contrecarrer le comportement de Roche/BM.

(116) Il y a donc lieu de conclure que Roche/BM se heurtera à des concurrents puissants dans l'ensemble du secteur de l'immunochimie. Ces concurrents (essentiellement Abbott, Dade Behring et Beckman) sont également très actifs dans les produits de l'immunochimie cités dans le tableau ci-dessus. Pour cette raison, l'enquête confirme que l'opération de concentration n'aura pas pour effet de créer ou de renforcer une position dominante sur l'un ou l'autre marché des diagnostics en immunochimie.

c) Sondes ADN

1) Structure du marché

(117) En ce qui concerne les sondes ADN, on ne dispose pas de statistiques EDMA exhaustives, dans la mesure où la classification ne contient pas encore de chapitre particulier répertoriant l'ensemble de ces tests. C'est pourquoi les parties n'ont pas été en mesure de fournir des données sur les parts de marché ventilées par État membre. Les données agrégées pour l'ensemble de la Communauté qui ont été transmises montrent que la valeur totale du marché s'est élevée, en 1996, à 76 millions d'écus, soit une augmentation de 42 % par rapport à 1995 (au cours de la même période, les ventes de Roche ont presque doublé). Ces données montrent également que Roche détient une position très forte, avec une part de marché de [< 70 %] pour les quatre principaux domaines d'application [sida, hépatite C (VHC), mycobacterium tuberculosis (MTB) et maladies sexuellement transmissibles (MST)].En 1996, ces quatre applications ont représenté [< 80 %] de l'ensemble du marché des sondes ADN ([< 60 %] en 1995). Ce sont plus particulièrement les tests relatifs au sida et à l'hépatite C qui ont fortement augmenté au cours de cette période ([< 400 %] pour le sida et [< 50 %] pour l'hépatite C).

(118) Roche est la seule société qui soit en mesure de fournir des réactifs pour ces quatre grandes applications et c'est donc elle qui offre la plus large gamme de tests. En outre, elle a été la première à lancer un test pour la mesure quantitative de la charge virale (quantité de virus) dans le sang d'un patient. Elle a également été la première à introduire un instrument automatique pour les tests avec sonde ADN, le Cobas Amplicor. Cet instrument permet de réaliser vingt tests en une heure. Du point de vue des clients, ces instruments sont donc avantageux, dans la mesure où le temps de réalisation des examens est beaucoup moins long qu'avec les tests manuels. En outre, ils présentent l'avantage supplémentaire de réduire le risque de contamination de l'échantillon. D'autres instruments ont ensuite été développés par d'autres sociétés (Abbot Lcx and Organon Nasba QR), mais aucun d'entre eux ne propose une gamme de tests aussi étendue que l'Amplicor.

(119) Il semble que le taux d'utilisation des tests avec sonde ADN et leur niveau d'automatisation varient fortement d'un État membre à l'autre. C'est ainsi que l'Allemagne, l'Autriche, l'Italie, l'Espagne et la France enregistrent un nombre relativement élevé de systèmes automatiques installés, alors que certains autres États membres (Royaume-Uni, Irlande et Grèce) n'en possèdent encore aucun. L'une des explications de ce phénomène est que, ainsi que nous l'avons exposé ci-dessus, les systèmes nationaux de remboursement ont un impact important sur le développement du secteur des diagnostics in vitro dans son ensemble. Toutefois, même en ce qui concerne les États membres où les sondes ADN n'ont pas encore atteint un niveau élevé d'automatisation, les parties n'ont pas indiqué que leurs parts de marché étaient très différentes des chiffres transmis pour la Communauté dans son ensemble. C'est pourquoi, aux fins de la présente appréciation, la Commission considère que la part de marché actuelle de Roche dans tous les États membres atteint le même ordre de grandeur que dans la Communauté prise dans son ensemble.

2) Position des parties

i) Roche

(120) Ainsi que nous l'avons déclaré ci-dessus, la position de Roche sur le marché des sondes ADN est très forte. Cette position est basée sur l'important portefeuille de brevets que la société possède dans le domaine de la principale technologie reposant sur les sondes ADN, la technique de la réaction de polymérisation en chaîne (PCR), qui est devenue la norme industrielle de référence pour les applications tant scientifiques que commerciales. Roche a acheté la technologie PCR à la société américaine Cetus en 1991 et, au cours des six dernières années, elle l'a utilisée dans un nombre d'applications commerciales en augmentation constante. En plus des trois brevets de base délivrés aux États-Unis d'Amérique entre 1987 et 1990, Roche possède un grand nombre d'autres brevets (au moins 81) couvrant les améliorations apportées à cette technologie, les principales enzymes utilisées, les agents pathogènes spécifiques, les méthodes de détection, les informations clés sur les cellules cancéreuses, etc. Un grand nombre de ces brevets supplémentaires ont été délivrés dans la seconde moitié des années quatre-vingt-dix. Ainsi, en novembre 1996, l'Office européen des brevets (OEB) a délivré à Roche un brevet portant sur les principales enzymes utilisées dans le cadre de la technologie PCR (Taq polymerases). D'après Roche, ces enzymes jouent un "rôle extrêmement important dans la technique de la PCR" et la décision de l'OEB "renforce de façon sensible le portefeuille de brevets déjà puissant de la division dans le domaine de l'amplification de l'ADN". On peut donc en conclure que Roche continuera à détenir, bien avant dans le XXIe siècle, une importante protection industrielle sur la technologie de la PCR.

(121) Depuis qu'elle a acquis cette technologie, Roche a non seulement commercialisé avec succès un certain nombre de tests PCR, mais elle a également réussi à très bien diffuser cette technologie dans les milieux de la recherche, en accordant plus de 450 licences de recherche dans le monde entier (dont 150 en Europe). Ces licences ont été accordées tant à des organismes de recherche (universités, etc.) qu'à des fabricants concurrents de diagnostics (tel que BM) (10). Du fait que la PCR a été la première technologie basée sur les sondes ADN qui ait été commercialisée avec succès et que Roche a pratiqué une politique d'octroi extensif de licences de recherche, nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation où la majorité de la documentation publiée sur les sondes ADN concerne essentiellement la PCR.L'ensemble de la documentation publiée transmise par les parties au cours de l'enquête confirme l'opinion selon laquelle la PCR continuera, dans un proche avenir, à être la technologie basée sur les sondes ADN de loin la plus importante sur le plan commercial. Cet avis a d'ailleurs été confirmé par d'autres sociétés de DIV au cours de l'enquête de la Commission.

(122) Les licences de recherche mentionnées ci-dessus ne donnent à leurs titulaires aucun droit de commercialiser des produits ou des équipements utilisant la technologie PCR brevetée. Roche a fait respecter activement, et avec succès, cette limite imposée à ses licences de recherche, le cas échéant en entamant des actions en justice contre certains titulaires de licences. On peut donc en conclure qu'aucune des sociétés possédant une licence de recherche sur la PCR ne sera en mesure, à partir de cette licence, de commercialiser ses propres produits basés sur les sondes ADN et de contrecarrer ainsi la puissance de Roche.

ii) BM

(123) Depuis 1993, BM possède une licence Roche pour la PCR dans le domaine de la recherche et elle a produit et vendu les enzymes de base mentionnées ci-dessus utilisées dans cette technologie (Taq polymerases) à des laboratoires de recherche. En dehors de ces activités, les parties ont déclaré dans la notification que BM n'opérait pas sur le marché des sondes ADN et ne possédait aucun produit en cours de développement.

(124) Toutefois, l'enquête a révélé qu'avant l'opération projetée, BM avait engagé des efforts substantiels pour se positionner sur ce marché. Ces efforts ont été faits à la fois indépendamment de Roche et en collaboration avec celle-ci.

(125) Les activités indépendantes de BM comprennent un programme dans le cadre duquel elle a développé et acquis un important portefeuille de brevets (au moins 126) dans le domaine des sondes ADN. Dans une liste transmise à la Commission, ces brevets ont été répartis en trois groupes (46 brevets mis au point pour tourner la technologie de la PCR, 60 brevets généraux relatifs à des formats liés à certains analytes ainsi qu'à des améliorations du processus d'amplification et de la préparation de l'échantillon, et enfin 20 brevets relatifs à une technologie de remplacement, la "PNA", achetée à une société danoise en 1994).

(126) L'enquête a en outre révélé quelques autres exemples de la volonté de BM de se mettre en position d'opérer une entrée indépendante sur le marché des sondes ADN, tant pour les réactifs que pour les instruments.En ce qui concerne les réactifs, BM a conclu des accords de collaboration avec dix parties indépendantes différentes, dont toutes développent actuellement pour BM des produits dans le domaine des sondes ADN. Tous ces accords de coopération ont trait à des applications tant dans le domaine de la recherche que dans le domaine commercial, et cinq d'entre eux confèrent à BM des droits exclusifs sur le produit concerné. En outre, BM mène actuellement aussi des travaux sur le développement de tests sur sondes ADN, notamment pour le dépistage du sida. En ce qui concerne les instruments, BM a signé un accord avec une société américaine, Idaho Technologies, aux termes duquel BM distribuera à des laboratoires de recherche un instrument pour sondes ADN. BM a également mis sur pied, dans ses propres murs, un programme de production d'un instrument pour sondes ADN. Les parties ont fait savoir qu'il serait mis un terme aux projets de développement de BM si l'opération projetée était réalisée.

(127) II est possible de conclure de ce qui précède qu'avant l'opération projetée, BM avait engagé plusieurs projets destinés à lui permettre d'entrer indépendamment de Roche sur le marché des sondes ADN. Toutefois, il est aussi important de noter que BM, parallèlement à ces préparatifs indépendants en vue d'une pénétration sur ce marché, a entre autres également investi quatre années de recherche et de développement sur le marché des sondes ADN dans la technologie de la PCR. Cela confirme non seulement la force de la technologie par rapport aux technologies concurrentes (voir ci-dessous), mais montre également que BM, si l'opération projetée n'est pas réalisée, devrait très probablement soit trouver un accord avec Roche pour obtenir une licence de commercialisation des produits PCR, soit poursuivre ses efforts en vue de développer ou d'acquérir une technologie concurrente. De fait, le chef de la division "diagnostics" de Roche a confirmé qu'avant l'opération projetée, un accord de principe avait été conclu en vue d'octroyer à BM une licence lui permettant de commercialiser des produits utilisant la technologie PCR et que c'est uniquement en raison de la concentration qu'il n'avait pas été signé.

(128) Ainsi, contrairement à ce qui a été déclaré par les parties dans la notification, on est amené à conclure qu'avant l'opération projetée, BM possédait d'importants projets en cours de développement dans le domaine des sondes ADN et qu'elle aurait pénétré sur ce marché si Roche n'avait pas fait de proposition d'acquisition.

3) La faible position des autres technologies

(129) Les parties ont fait valoir qu'Abbott, Chiron, Organon, Genprobe et un groupe de sociétés regroupées sous la dénomination "Autres" opèrent sur le marché des sondes ADN, en fournissant des produits qui "bien qu'ils soient différents par certaines caractéristiques et du point de vue de la facilité d'utilisation, sont essentiellement équivalents". Toutefois, l'enquête a montré qu'aucune de ces sociétés n'était actuellement en mesure de fabriquer des produits liés aux sondes ADN équivalents à ceux fabriqués par Roche (ainsi que le confirme la part de marché détenue par cette dernière, mentionnée ci-dessus).

(130) Abbott, Organon et Genprobe détiennent chacune une part de marché globale inférieure à 5 % de l'ensemble du marché des sondes ADN dans l'EEE. Elles ne proposent qu'un nombre limité de tests et les technologies sur lesquelles ceux-ci sont basés sont considérées, par la plupart des spécialistes de ce secteur, comme inférieures à la technologie de la PCR. On doit donc en conclure que ces sociétés ne sont actuellement pas en mesure de remettre sérieusement en cause la position de Roche sur le marché des sondes ADN. En outre, rien ne permet de penser qu'elles pourraient le faire dans un avenir prévisible.

(131) Chiron est une société américaine dont l'essentiel de l'activité est traditionnellement axé sur le diagnostic des maladies infectieuses. Sa technologie basée sur les sondes ADN est appelée "Branched DNA" (ADN ramifié). D'après la notification, les activités de Chiron sur le marché des sondes ADN concernent exclusivement le HIV et l'hépatiteC (VHC), deux domaines dans lesquels Chiron détient des droits importants issus de ses brevets. Dans ces deux domaines, la position de Chiron dans l'EEE est relativement forte (23 % et 25 % respectivement sur ces deux segments). Sur l'ensemble du marché des sondes ADN, Chiron détient une part totale de 14 % (20 % si l'on exclut les tests non automatisés compris dans le groupe "autres tests", voir ci-dessous). Bien que le rôle de Chiron sur le marché des sondes ADN ne soit pas négligeable, elle souffre d'un inconvénient de taille dû au fait qu'elle ne possède pas d'instruments pour la réalisation automatique de ses tests. En outre, le fait qu'elle ne soit pas présente dans deux des quatre grands domaines du marché des sondes ADN [mycobacterium tuberculosis (MTB) et maladies sexuellement transmissibles (MST)] limite plus encore sa capacité à entraver de façon sensible la puissance de Roche sur le marché. Cela est confirmé par le rapport d'un consultant transmis par Roche, qui contient l'évaluation suivante de la technologie de l'ADN ramifié de Chiron "[elle] est bien adaptée pour certains seuils de signal d'application, mais ses perspectives d'expansion dans le domaine des applications de DIV adaptées à l'amplification de l'acide nucléique, sont limitées".

(132) Enfin, le groupe des "autres tests" qui, d'après les données fournies par les parties, représentent environ 30 % de l'ensemble du marché des sondes ADN, comprend essentiellement des paramètres de diagnostics représentant beaucoup moins de ventes que les quatre grands tests compris dans l'instrument Roche Amplicor. Il comprend des tests viraux, tels que HTLV I/II ou l'Enterovirus, des tests génétiques et des tests de dépistage du cancer. En outre, cette catégorie comprend également les ventes d'instruments et de produits jetables. À l'exception de Roche, aucune des quatre sociétés mentionnées ci-dessus ne réalise de ventes dans cette catégorie. D'après les parties, plus de 80 % des produits de cette catégorie sont basés sur la technologie Roche de la PCR. Les instruments et les produits jetables devraient constituer la majeure partie des 20 % restants.

(133) C'est pourquoi, dans la mesure où ces "autres tests" en sont pour la plupart encore au stade de la recherche et sont distribués par un grand nombre de petites sociétés ou d'organismes de recherche ayant obtenu une licence de recherche de Roche, on doit en conclure qu'aucun d'entre eux ne pourrait être commercialisé sans la participation de Roche.

(134) Ainsi que nous l'avons mentionné ci-dessus, le fait que la plupart des travaux de recherche sur les sondes ADN sont effectués à partir de la technologie Roche de la PCR montre bien que cette technologie est devenue la norme industrielle de référence. Le fait que tous ces travaux de recherche soient réalisés à l'aide de la technologie de la PCR est d'une grande importance pour Roche, car elle sera ainsi seule en mesure de participer à la commercialisation des produits issus de ces activités. Comme les produits relevant de cette catégorie, du fait qu'ils sont liés à des activités de recherche, devraient être inclus dans le calcul des parts détenues sur le marché des sondes ADN, il serait logique d'inclure ces activités dans la part de marché de Roche, dans la mesure où cette dernière, par l'intermédiaire des droits issus de ses brevets, peut contrôler toute action de commercialisation de ces produits. Si ces "autres tests" devaient être inclus dans le marché et dans la part que Roche détient sur celui-ci, la part de marché de Roche serait encore plus élevée que celle estimée précédemment (66 %).

4) Dynamique du marché

(135) Comme les sondes ADN constituent un marché relativement jeune, avec de forts taux de croissance, il est nécessaire de déterminer si la position dominante de Roche est susceptible de durer. À cet égard, les parties ont fait valoir que le marché des sondes ADN se trouve actuellement dans la phase initiale d'un marché en développement et que les chiffres relatifs aux parts de marché n'ont donc qu'une faible valeur de preuve quant à la situation de la concurrence. La Commission admet que sur les marchés où le progrès technologique joue un grand rôle, il convient d'analyser soigneusement l'évolution probable de la dynamique du marché. Toutefois, une telle évaluation montre clairement que l'avenir de la position de Roche sur le marché est assuré, pour les raisons évoquées ci-dessus.Contrairement à d'autres affaires dans lesquelles la Commission a estimé que des parts de marché élevées seraient par la suite érodées par la concurrence (11), le marché des sondes ADN n'a pas connu de fluctuations des parts de marché et Roche n'a cessé d'y occuper la première place depuis qu'elle a acquis la technologie de la PCR en 1991. L'enquête ne permet pas non plus de penser que la structure du marché évoluera de façon fondamentale à l'avenir. Bien au contraire, tous les documents transmis par les parties, ainsi que par des tiers, montrent que tous les acteurs du secteur considèrent que la PCR continuera à être la technologie dominante du futur. C'est ainsi, par exemple, que selon l'une des études de marché transmises par les parties, la part de marché détenue par la technologie PCR devrait passer à 75 % d'ici 2002 et à 80 % d'ici 2005. On doit donc en conclure que le marché, bien qu'il croisse à un rythme rapide, n'en est plus à sa phase initiale, dans laquelle il ne serait pas encore possible de déterminer avec précision quelle technologie deviendrait la norme industrielle. La Commission en conclut donc que la position de Roche sur le marché des sondes ADN ne sera pas érodée par la dynamique du marché dans un avenir prévisible.

(136) Compte tenu de ce qui précède, il faut conclure que Roche jouit d'une position dominante sur le marché des sondes ADN dans tous les États membres, et aussi qu'aucune des autres technologies disponibles ne sera en mesure de constituer un concurrent sérieux pour la technologie de la PCR dans un avenir prévisible.

5) Effets de l'opération prévue

(137) Avant la présente concentration, Roche avait étudié, au cours des trois dernières années, un certain nombre d'autres candidatures possibles pour une acquisition (pratiquement toutes les grandes sociétés de fabrication de diagnostics in vitro, à l'exception d'Abbott). Il ressort clairement des documents transmis par Roche que la stratégie à l'origine de cette opération était axée sur la possibilité d'accéder à une force de vente plus importante, afin de maximiser la commercialisation des produits PCR et de trouver la possibilité de regrouper avec succès les ventes dans les secteurs de la chimie clinique, de l'immunochimie et des sondes ADN.

(138) La situation de BM, qui est le principal fournisseur européen de produits du secteur de la chimie clinique et l'un des principaux fournisseurs dans celui de l'immunochimie, puisqu'elle est présente dans la plupart des laboratoires et dispose d'une organisation des ventes et du marketing adaptée à ces activités, répond à ces objectifs. On peut donc supposer que si elle a la possibilité d'accéder directement aux réseaux de vente et de commercialisation de BM, Roche pourra consolider et renforcer sa position dominante sur le marché des sondes ADN.

(139) Même si, d'un point de vue technique, il ne sera pas possible, dans un avenir prévisible, de réunir des sondes ADN et des tests de chimie clinique sur un même instrument, il ressort clairement des documents transmis par Roche qu'elle considère que le regroupement des ventes dans le secteur de la chimie clinique, de l'immunochimie et des sondes ADN est réalisable et avantageux. On peut donc penser qu'après avoir acquis BM, Roche adoptera une stratégie de commercialisation allant en ce sens. Bien que Roche, ainsi que nous l'avons exposé ci-dessus, soit déjà présente dans les secteurs de la chimie clinique et de l'immunochimie, la très forte position détenue par BM, notamment dans le domaine de la chimie clinique, accroîtrait considérablement les possibilités de regroupement avec les produits liés aux sondes ADN. Cet effet de l'opération prévue consoliderait et renforcerait de façon sensible la position dominante de Roche sur le marché des sondes ADN.

(140) Enfin, il est clair que BM, si l'opération prévue n'avait pas lieu, s'introduirait sur le marché des sondes ADN, de façon indépendante et/ou par l'intermédiaire d'une licence Roche. L'intérêt qu'aurait BM à agir en ce sens ressort du fait que le marché des sondes ADN est le seul marché dans le domaine des diagnostics in vitro qui soit en expansion rapide. En tant que l'un des principaux acteurs dans ce secteur, BM aurait eu un très grand intérêt à pénétrer sur ce marché, dans la mesure où toute stratégie la maintenant, à long terme, à l'extérieur du marché des sondes ADN, pourrait éroder ses positions actuelles sur d'autres marchés. Si BM avait suivi une stratégie d'entrée indépendante sur le marché des sondes ADN, on peut supposer que, pour les raisons mentionnées ci-dessus (force de vente et clientèle actuelles, capacité à regrouper les produits proposés), elle aurait été le concurrent potentiel le mieux placé de Roche sur les marchés européens. On doit donc en conclure que l'acquisition de BM consoliderait et renforcerait la position dominante de Roche sur le marché des sondes ADN, en éliminant le nouvel arrivant potentiel sur les marchés européens qui serait le mieux placé.

(141) Les clients et les concurrents de Roche et de BM ont dans l'ensemble confirmé que l'opération prévue se solderait probablement par les résultats mentionnés ci-dessus. Un certain nombre de clients et de concurrents se sont notamment déclarés inquiets du fait que l'opération pourrait renforcer la position déjà dominante de Roche sur le marché des sondes ADN. À titre d'exemple d'une exploitation possible de la puissance de Roche sur ce marché, différents clients ont mentionné le système unique mis en place par Roche, qui consiste à facturer à ses clients (les laboratoires) un pourcentage fixe de leur chiffre d'affaires sur les tests PCR à titre de "redevance", et ont déclaré que l'accès de Roche au réseau de ventes BM et les possibilités accrues de regroupement des produits qui en résulteraient, faciliteraient le recours à des pratiques similaires.

(142) En conclusion, dès avant la réalisation de l'opération prévue, Roche détient déjà [< 70 %] du marché des sondes ADN dans l'EEE, ce qui lui confère, notamment si l'on considère la faiblesse des autres technologies liées aux sondes ADN, une position dominante sur ce marché. L'acquisition de BM renforcerait cette position en donnant à Roche un meilleur accès au marché pour ses produits du secteur des sondes ADN, grâce à l'organisation actuelle de BM, et aussi en lui permettant de regrouper avec succès les produits des deux sociétés. En outre, la disparition de BM en tant que concurrent potentiel le plus probable de Roche sur les marchés des sondes ADN dans la Communauté, contribuerait à consolider et à renforcer la position dominante de Roche.

V. CONCLUSION

(143) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est parvenue à la conclusion que l'opération de concentration prévue entraînerait la création ou le renforcement d'une position dominante entravant de façon sensible une concurrence effective, au sens de l'article 2, paragraphe 3, du règlement sur les concentrations, sur les marchés suivants: réactifs et instruments du secteur de la chimie clinique en Autriche, en Allemagne, en Finlande, au Portugal, en Espagne, en Suède, au Danemark et en Italie; sondes ADN dans tous les pays membres de l'EEE.

VI. ENGAGEMENTS SOUMIS PAR LES PARTIES

(144) Afin d'éliminer les problèmes susceptibles de se poser sur le plan de la concurrence, Roche a proposé de prendre les engagements suivants:

A. RÉACTIFS ET INSTRUMENTS DU SECTEUR DE LA CHIMIE CLINIQUE

(145) En ce qui concerne les réactifs et les instruments du secteur de la chimie clinique, Roche s'engage à céder ses activités liées aux produits "Gobas Mira" en Autriche, en Allemagne, au Danemark, en Finlande, en Suède, en Italie, au Portugal et en Espagne. L'acquéreur aura également la possibilité d'acquérir ce secteur d'activité en Norvège et d'étendre la portée géographique de l'opération à tous les États membres de la Communauté. Les actifs inclus dans cette transaction comprendront les titres et droits de propriété des instruments Gobas Mira, pour autant qu'ils n'aient pas déjà été cédés aux clients, le fichier clients, tous les accords de fourniture relatifs aux réactifs et aux produits jetables, tous les accords de services après-vente y afférents, un stock de pièces de rechange, ainsi que tous les logiciels et outils nécessaires au service après-vente. De même, l'acquéreur se verra attribuer, sur demande, une licence non exclusive portant sur les droits conférés par les brevets de Roche et l'ensemble du savoir-faire établi (y compris le savoir-faire en matière de conception, tels que les plans) que Roche utilise pour fabriquer les instruments Gobas Mira. En outre, Roche serait prête à vendre à l'acquéreur de nouveaux instruments Gobas Mira, les pièces de rechange nécessaires et, le cas échéant, des réactifs, le tout à un prix de cession favorable.

(146) Roche fera tout son possible pour vendre ce secteur intégralement à un seul acquéreur, qui sera un concurrent viable dans le secteur de la chimie clinique et indépendant de Roche, le respect de ces conditions étant soumis à l'approbation de la Commission. S'il n'est pas possible de trouver un acquéreur unique pour l'intégralité du secteur d'activité, Roche demandera à la Commission l'autorisation de le vendre, à l'échelon national, à des acquéreurs différents.

(147) Roche s'engage à mettre tout en œuvre pour réaliser cette cession dans un délai de [...] à compter de la décision de la Commission. À l'issue de ce délai de [...], un mandataire, qui devra être accepté par la Commission, sera autorisé à vendre ce secteur d'activité au meilleur prix, dans un délai supplémentaire de [...]. Dès les [...] premiers [...], le mandataire s'assurera que Roche maintient ce secteur en activité, en assurant sa viabilité, et qu'aucune mesure susceptible d'avoir une incidence négative importante sur ce secteur n'est prise.

B. SONDES ADN

(148) En ce qui concerne les sondes ADN, Roche s'engage à donner accès à la technologie de la PCR pour toutes les applications de diagnostic in vitro, et ce à tous les opérateurs intéressés. Étant donné que les besoins et les ressources des titulaires de licences potentiels ne sont pas identiques, Roche proposera à la fois des licences globales et des licences ciblées. Elle offrira trois catégories de licences globales. La première ("Option A") concerne les brevets de base de la PCR. La deuxième ("Option B1") y ajoute la totalité du portefeuille actuel de brevets détenus par Roche en matière de PCR. Enfin, dans le cadre de l'"option B2", le titulaire de licence pourra, outre les brevets de base de la PCR, choisir, en fonction de ses besoins, des brevets supplémentaires dans le portefeuille actuel de brevets de Roche. Cette dernière est également disposée à accorder, à chaque titulaire, des licences sur ses futurs brevets dans le secteur de la PCR. De surcroît, Roche offrira des "licences ciblées", pour des paramètres individuels, à ceux de ses concurrents qui ne sont intéressés que par une maladie particulière, dont les besoins médicaux n'ont pu jusqu'à présent être satisfaits, par exemple le HLA ou la mucoviscidose.

(149) Roche proposera ces licences, à des conditions non discriminatoires, à tous les tiers intéressés. Afin de garantir un traitement non discriminatoire de tous les titulaires de licence, Roche appliquera à chacun d'eux une clause "du client le plus favorisé". En outre, Roche accepte la nomination d'un mandataire, qui devra être accepté par la Commission, auquel chaque accord de licence conclu sera communiqué et que chaque titulaire de licence pourra contacter afin de s'assurer du respect du principe de non-discrimination. Ce mandataire transmettra ses conclusions à la Commission.

(150) Afin de garantir le respect de son engagement dans les délais requis, Roche s'engage à conclure des accords de licence contraignants avec au moins un titulaire pour une licence globale ("Option B1"), dans un délai de [...] à compter de la décision adoptée par la Commission dans la présente affaire. En outre, Roche s'engage à conclure un accord de "licence ciblée" contraignant dans un délai de [...] à compter de cette même date.

(151) Afin d'assurer que Roche n'ait pas accès à des informations commerciales sensibles sur les activités des titulaires de ses licences, Roche accepte de garantir que les données, en volume et en valeur, relatives aux ventes effectuées par les titulaires ne lui soient pas communiqués avant expiration d'un délai de

[...] à compter de la fin de la période couverte par ces chiffres. Pour pouvoir calculer et réviser le montant des redevances au cours de cette période de [...], les titulaires de licences communiqueront les chiffres concernés à un commissaire aux comptes indépendant, qui devra être agréé par la Commission et qui sera tenu de ne pas divulguer ces chiffres à Roche avant l'expiration du délai de [...].

VII. ÉVALUATION DES ENGAGEMENTS

A. RÉACTIFS ET INSTRUMENTS DU SECTEUR DE LA CHIMIE CLINIQUE

(152) L'engagement proposé par Roche en ce qui concerne la gamme d'instruments "Gobas Mira" aura des répercussions sensibles sur l'augmentation, à l'issue de l'opération de concentration, du parc d'instruments installé et atténuera sensiblement l'accroissement de la part de marché de BM concernée par la concentration.

(153) La gamme d'instruments Gobas Mira représente la partie la plus importante de l'ensemble du parc installé de Roche. Dans les États membres où la concentration aurait posé un problème sur le plan de la concurrence, elle ne se traduira ainsi que par l'addition d'un nombre limité d'instruments au parc installé de BM. En Allemagne, en Espagne et en Italie, ce sont [< 100] instruments qui seront ajoutés, en Autriche, en Suède et au Danemark, [< 50] en Finlande et au Portugal, [< 20]. Ces chiffres doivent être comparés au parc installé important que BM contrôle déjà dans ces pays (voir ci-dessus). De ce fait, Roche/BM ne verra pas ses avantages augmenter en termes d'accès à la clientèle, dans la mesure où la plupart des clients Roche utilisent la gamme Gobas Mira. En outre, l'engagement garantit que la concentration n'aboutira pas à une combinaison de la puissance de Roche dans le domaine des petits instruments et de celle de BM dans les autres segments, dans la mesure où la puissance de Roche dans ce segment était entièrement basée sur la gamme d'instruments Gobas Mira. Il sera donc facile aux concurrents de s'opposer à Roche/BM sur certains segments du marché, comme c'était le cas avant la concentration.

(154) En ce qui concerne le marché des réactifs, l'acquéreur serait en mesure, grâce à l'accès à ce parc installé, d'entrer effectivement en concurrence sur ce marché, en proposant ses propres réactifs pour l'ensemble du parc d'instruments installé. Étant donné que Gobas Mira est un instrument ouvert, l'acquéreur peut fournir ses propres réactifs sans frais et sans avoir à adapter ses produits. Il peut par conséquent approvisionner immédiatement tous les clients qui utilisent la gamme Gobas Mira.

(155) En outre, l'engagement pris par Roche de vendre les nouveaux instruments Gobas Mira à l'acquéreur permettra immédiatement à ce dernier de fournir une gamme complète (instruments et réactifs) dans le segment des instruments de petite taille. L'acquéreur pourra donc déjà proposer à ses clients des instruments neufs ou de remplacement, avant d'être capable de fournir son propre instrument (qu'il fabriquera lui-même ou qu'il sous-traitera). L'engagement de lui accorder une licence non exclusive couvrant l'ensemble des droits conférés par les brevets et le savoir-faire nécessaires à la fabrication des instruments Cobas Mira permettra même à l'acquéreur de commencer à produire ce type d'instrument déterminé.

(156) Pour ces motifs, la Commission estime que l'engagement proposé par les parties résout les problèmes de concurrence évoqués ci-dessus sur les marchés des réactifs et des instruments du secteur de la chimie clinique.

B. SONDES ADN

(157) L'engagement d'accorder des licences pour l'utilisation de la technologie PCR à tous les concurrents intéressés devrait garantir l'arrivée de plusieurs grands producteurs de DIV sur le marché. Ces sociétés, qui ont déjà déclaré, au cours de la procédure, que l'obtention d'une licence commerciale pour la PCR les intéresserait, seront incitées à pénétrer sur ce marché à forte croissance du secteur des DIV pour les mêmes raisons que BM avant la concentration.

(158) L'ampleur du programme d'octroi de licences, ainsi que la différenciation entre des licences globales et des licences ciblées pour des paramètres spécifiques, devraient également garantir l'arrivée sur ce marché non seulement de concurrents puissants, mais également de petites sociétés intéressées par une maladie particulière, dont les besoins médicaux n'ont jusqu'à présent pas pu être satisfaits, mais qui ne sont pas intéressées par l'ensemble des applications de la PCR. Jusqu'à présent, ces petites sociétés, qui effectuaient des travaux de recherche et de développement sur de nouveaux tests en utilisant une licence de recherche de Roche, ne pouvaient pas commercialiser elles-mêmes ces tests, mais devaient vendre les résultats de leurs travaux à Roche ou à une autre société détenant une licence commerciale pour la PCR.

(159) L'engagement pris par Roche d'accorder au moins une licence globale et une licence ciblée dans les délais susmentionnés garantit que ces entrées sur le marché se feront rapidement.

(160) Étant donné que les licences globales seront accordées à des fournisseurs qui sont déjà présents dans le secteur des DIV, l'engagement pris écartera également toute crainte que Roche soit la seule à pouvoir regrouper des sondes ADN et d'autres dispositifs de DIV. L'engagement mettra les titulaires de licences sur un pied d'égalité avec leurs concurrents en ce qui concerne la capacité de proposer des sondes ADN combinées avec d'autres dispositifs de DIV.

(161) La Commission estime que ces engagements permettront d'éviter effectivement le renforcement, mentionné ci-dessus, d'une position dominante sur le marché des sondes ADN consécutif à l'opération de concentration notifiée.

(162) Afin de pouvoir traiter rapidement les demandes de Roche relatives à la cession de l'activité liée aux produits "Gobas Mira", comme indiqué au considérant 146, ainsi que les demandes liées à la nomination d'un mandataire et d'un commissaire aux comptes, comme indiqué aux considérants 147, 149 et 151, et afin de ne pas mettre Roche dans une situation trop difficile, la Commission devrait utiliser la procédure de non-opposition. Roche devrait fournir à la Commission tous les renseignements nécessaires prouvant l'indépendance, selon le cas, du mandataire, du commissaire aux comptes ou de l'acquéreur proposé. Roche devrait également démontrer, preuves suffisantes à l'appui, que le candidat proposé comme acquéreur sera un concurrent viable dans le secteur de la chimie clinique. Si, dans un délai de deux semaines à compter de la proposition de Roche, la Commission ne s'est pas opposée à la demande ou n'a pas exigé d'informations supplémentaires, celle-ci est réputée avoir approuvé la demande.

VIII. CONCLUSION FINALE

(163) La Commission en conclut donc que, sous réserve du plein respect des engagements pris par Roche, tels qu'ils ont été définis dans sa lettre à la Commission du 19 janvier 1998, et dans les considérants 145 à 151, la concentration prévue ne créera ni ne renforcera une position dominante ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Sous réserve du plein respect des engagements pris par F. Hoffmann-La Roche Ltd, tels qu'ils sont exposés dans les considérants 145 à 151 de la présente décision, l'opération de concentration par laquelle le groupe Hoffmann-La Roche prend le contrôle de l'intégralité de la société Corange Ltd est déclarée compatible avec le Marché commun et avec le fonctionnement de l'accord EEE.

Article 2

Lorsque, conformément à ses engagements, F. Hoffmann-La Roche Ltd soumet à l'approbation de la Commission une proposition relative à un mandataire, à un commissaire aux comptes ou à un acquéreur pour le secteur d'activité "Gobas Mira", elle fournit à la Commission tous les renseignements nécessaires prouvant l'indépendance, selon le cas, du mandataire, du commissaire aux comptes ou de l'acquéreur proposé. En ce qui concerne l'acquéreur proposé, F. Hoffmann-La Roche Ltd doit également démontrer, preuves suffisantes à l'appui, que le candidat proposé sera un concurrent viable dans le secteur de la chimie clinique. Si, dans un délai de deux semaines à compter de la présentation de la demande, la Commission ne s'y est pas opposée ou n'a pas exigé d'informations supplémentaires, celle-ci est réputée avoir approuvé la demande.

Article 3

F. Hoffmann-La Roche Ltd

Grenzacherstraße 124

CH-4070 Bâle

est destinataire de la présente décision.

(1) JO L 395 du 30.12.1989, p. 1. JO L 257 du 21.9.1990, p. 13. (rectificatif).

(2) JO C 264 du 21.8.1998.

(3) JO L 95 du 27.4.1995, p. 47.

(4) Dans le texte de la présente décision destiné à la publication, certaines informations ont été omises (ou remplacées par des approximations), conformément à l'article 17, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 4064-89 concernant la non-divulgation des secrets d'affaires.

(5) Affaires IV-M.457 - Roche/Syntex et IV-M.954 - Bain/Hoechst - Dade Behring.

(6) Voir, par exemple, affaire IV-M.954 - Bain/Hoechst - Dade Behring, au considérant 24.

(7) Voir communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO C 372 du 9.12.1997, p. 5, point 13).

(8) Affaires IV-M.457 - Roche/Syntex et IV-M.954 - Bain/Hoechst - Dade Behring.

(9) La première étape de ce processus d'intégration s'observe avec la réalisation d'immuno-essais homogènes dans les instruments utilisés en chimie clinique. L'effet limité de cette évolution sur les conditions de concurrence dans la chimie clinique a été souligné dans les points consacrés à la définition des marchés. Il est donc inutile de revenir sur cette question.

(10) En outre, Roche a accordé à BM et à 22 autres sociétés des licences leur permettant de produire et de vendre des Taq polymerases, ainsi que d'autres réactifs pour le processus PCR, dans le domaine de la recherche.

(11) Voir, par exemple, les affaires IV-M.057 - Digital/Kienzle, point 20, ou IV-M.354 - American Cyanamid/Shell, point 33.