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Décisions

CCE, 21 décembre 1993, n° M.358

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Pilkington-Techint/SIV

CCE n° M.358

21 décembre 1993

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (1), et notamment son article 8 paragraphe 2, vu la décision prise par la Commission, le 2 septembre 1993, d'engager une procédure dans cette affaire, après avoir donné aux entreprises concernées la possibilité de faire connaître leur point de vue sur les griefs formulés par la Commission, après avoir consulté le comité consultatif en matière de concentrations (3), considérant ce qui suit:

I. OPÉRATION NOTIFIÉE

(1) La présente procédure concerne le projet d'acquisition, par les sociétés Pilkington plc et Techint Finanziaria Srl (Techint), d'une participation de 50 % chacune dans Società Italiana Vetro Spa (SIV). SIV est une société intégrée verticalement, qui produit du verre plat et du verre sécurit pour automobiles, dont les installations de production principales sont situées en Italie. SIV appartient actuellement à l'État italien, mais elle est en cours de privatisation.

Au cours de la procédure, les parties ont informé la Commission qu'immédiatement après l'acquisition, Techint transférera sa participation dans SIV à une filiale nouvellement créée, Vetrotec Limited, qui est détenue à 95 % par Techint et à 5 % par Techint Curaçao NV, filiale à 100 % de San Faustin NV, la société mère de Techint au sommet.

II. PARTIES

(2) Pilkington fabrique essentiellement du verre plat et du verre sécurit pour automobiles, ainsi que des produits d'isolation et des produits optiques. Elle est l'un des principaux producteurs de verre plat d'Europe occidentale et elle opère également dans différents pays tiers, notamment aux États-Unis d'Amérique.

(3) Techint est la filiale italienne d'un groupe qui possède des entreprises dans toute l'Amérique du Sud, particulièrement en Argentine. Le groupe a pour principales activités la production et la transformation de l'acier, l'ingénierie et la construction, la mécanique, le gaz et le pétrole, les services et d'autres activités encore. Aucune des activités de Techint ne se recoupe avec celles de Pilkington ou de la société qui doit être achetée, SIV.

III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

(4) L'opération a une dimension communautaire. Au cours de l'exercice prenant fin au 31 mars 1993, Pilkington a réalisé un chiffre d'affaires total de 3 380,3 millions d'écus dans le monde et de 1 556,7 millions d'écus dans la Communauté. Le chiffre d'affaires total de Techint, calculé en tenant compte du chiffre d'affaires du groupe San Faustin, par lequel elle est contrôlée, s'est élevé à [...] millions d'écus (4) au cours de l'exercice prenant fin au 30 juin 1992, dont [...] millions d'écus dans la Communauté. Le chiffre d'affaires total de SIV s'est élevé à 448 millions d'écus, dont 442 dans la Communauté. Seul le groupe San Faustin réalise les deux tiers de son chiffre d'affaires communautaire en Italie.

IV. ENTREPRISE COMMUNE À CARACTÈRE DE CONCENTRATION

Contrôle conjoint

(5) Une fois la transaction prévue achevée, chacune des parties notifiantes détiendra 50 % de l'entreprise commune. En outre, le conseil d'administration comprendra six membres, chaque partie en nommant trois. Le président du conseil d'administration sera élu par le Conseil parmi les membres désignés par Pilkington pour les trois premières années et parmi les membres de Techint les trois années suivantes, et ainsi de suite. Le conseil élira le directeur général de SIV selon les mêmes modalités, en commençant par un représentant de Techint.

(6) Conformément à l'article 5 du " Bidding and Shareholders Agreement ", certaines décisions commerciales importantes, notamment le budget annuel et les comptes annuels, les acquisitions et les cessions, certains prêts et avances ainsi que les dépenses d'investissement et les emprunts d'un certain montant, devront être approuvés par au moins cinq des six membres du conseil d'administration.

Chaque partie dispose, par conséquent, de droits de veto importants, et on peut donc en conclure que SIV sera contrôlée conjointement par Pilkington et Techint.

Entreprise commune autonome à part entière

(7) L'entreprise commune sera une entité économique indépendante et autonome. SIV est déjà une entreprise d'État à part entière, qui est en cours de privatisation. La société fabrique et vend, en Italie et à l'étranger, une vaste gamme de produits en verre, y compris du verre flotté, du verre pour automobiles et du verre pour le bâtiment.

Immédiatement après l'acquisition des actions, les parties conclueront un accord avec SIV pour la fourniture, moyennant une rémunération appropriée, d'une assistance dans le domaine technique, commercial et administratif ainsi que dans celui de la distribution internationale et de la gestion.

Pilkington passera également avec SIV un accord de fourniture portant sur au moins 80 % des besoins de SIV en verre flotté, dans la mesure où elle ne pourra pas les satisfaire grâce à ses propres installations de production.

Absence de risque de coordination

(8) Pour ce qui est d'une coordination éventuelle du comportement de Techint et de Pilkington ou de Techint et de SIV en matière de concurrence, il faut se rappeler que Techint n'opère pas sur les mêmes marchés que Pilkington ou SIV. Par ailleurs, le fait que Pilkington soit déjà présente sur le marché communautaire du verre plat et du verre de sécurité, de même que sur le marché du verre pour automobiles, signifie qu'elle jouera un rôle majeur dans la gestion de SIV. Comme il n'y a aucun chevauchement des autres activités des sociétés mères de l'entreprise commune, il est peu probable que la création de cette dernière entraîne une coordination de l'action de Pilkington et Techint sur le plan de la concurrence.

Conclusion

(9) Compte tenu de ce qui vient d'être exposé, l'opération notifiée constitue donc une concentration de dimension communautaire tombant sous le coup de l'article 3 du règlement (CEE) n° 4064-89.

(10) L'évaluation qui suit est basée sur des informations fournies par les parties et obtenues au cours de l'enquête de la Commission. Cette enquête a comporté des demandes d'informations écrites adressées aux concurrents et aux clients, ainsi que des rencontres avec les concurrents et les clients.

V. COMPATIBILITÉ AVEC LE MARCHÉ COMMUN

Produit en cause et marchés géographiques de référence

A. Différents types de verre plat

(11) Le verre flotté est de loin le type de verre plat le plus répandu, puisqu'il représente plus de 90 % de la capacité de production de verre plat des économies développées du monde.

Indépendamment du verre flotté, il y a d'autres types de verre plat: le verre à glace, le verre de vitrage, le verre armé poli et le verre à motifs, qui sont fabriqués à partir de processus de production complètement différents. Le verre à glace et le verre de vitrage ne sont plus fabriqués en Europe occidentale en raison de leur qualité moindre et de la faible demande. Bien que pour certains usages, ils puissent se recouper avec le marché du verre flotté, ces chevauchements sont beaucoup trop faibles pour avoir des répercussions sur la concurrence qui règne sur le marché du verre flotté. Cela vaut également pour le verre armé poli et pour le verre à motifs, qui ne répondent qu'à des besoins très spécifiques.

Le marché du verre flotté doit donc être considéré comme un marché distinct de celui des autres types de verre plat.

(12) Le processus de production du verre flotté a été inventé et mis en œuvre par Pilkington en 1959. Le verre flotté a efficacement remplacé le verre à glace et le verre de vitrage, sauf dans les économies moins développées.

Le processus de production du verre flotté consiste à verser en continu du verre fondu d'un four dans un grand bain d'étain liquide de faible profondeur. Le verre fondu flotte sur l'étain, s'étale et forme une surface plane. L'épaisseur dépend de la vitesse à laquelle le ruban de verre en cours de solidification est retiré du bain de flottage. Après une seconde cuisson, le verre se présente sous la forme d'un produit poli au feu offrant des surfaces pratiquement parallèles.

Le verre flotté est produit en différentes épaisseurs qui peuvent varier, selon les applications, de 1 à 25 millimètres. Le verre flotté peut être modifié au cours du processus de production par coloration dans la masse ou enduction sur la chaîne de production. La technique de la coloration, qui consiste à colorer le verre blanc, généralement en vert ou en bronze, est un facteur de plus en plus important pour les constructeurs automobiles lorsqu'ils passent de nouvelles commandes. L'enduction sur la chaîne modifie certaines, voire la totalité, des propriétés de transmission de l'énergie solaire, de couleur et d'isolation thermique du verre flotté. D'après les parties, l'enduction sur la chaîne est moins coûteuse que l'enduction en dehors de la chaîne, et elle présente également des avantages en termes de qualité, de dureté et de durabilité.

B. Marché du verre flotté

(13) Le marché du verre flotté est caractérisé par une forte intégration verticale, notamment pour ce qui est de Pilkington et de Saint-Gobain, et les producteurs s'occupent aussi, à des degrés divers, du traitement et de la distribution. On peut considérer que le marché du verre flotté comprend essentiellement deux niveaux:

- le niveau 1, qui correspond à la production de base de verre flotté brut

et

- le niveau 2, où le verre flotté brut est généralement traité avant d'être vendu à l'utilisateur final. Il convient de noter que le niveau 2 comprend en fait plusieurs sous- niveaux, selon les types de clients ou les différents traitements subis par le verre flotté.

C. Marché du verre flotté - Niveau 1

(14) Selon les informations transmises par les parties dans leur notification, le volume des ventes de verre flotté dans la Communauté en 1992 s'est élevé à 5,36 millions de tonnes pour le niveau 1. D'après les données sur les parts de marché fournies par les parties, plus de 90 % de la demande était satisfaite par six grands producteurs de verre flotté de la Communauté, en l'occurrence Saint-Gobain (chef de file du marché), suivi de Pilkington, des sociétés américaines PPG et Guardian, de Glaverbel (détenue par la société japonaise Asahi) et de SIV.

Il n'y a pas d'autres producteurs possédant des usines de verre flotté dans la Communauté. Le nombre des producteurs possédant des installations dans la Communauté est donc très limité.

Marché des produits en cause

(15) Le verre flotté brut est un produit standard homogène qui, après traitement, est essentiellement utilisé au niveau 2, comme verre de sécurité sur les véhicules automobiles et comme vitrage pour le bâtiment. Pour ces applications, il n'existe aucun produit de remplacement. Les installations de teinture dans la masse et d'enduction sur la chaîne de production prennent de plus en plus d'importance et contribuent à introduire une certaine hétérogénéité dans la production de verre flotté. Toutefois, la Commission estime que ces caractéristiques ne permettent pas de distinguer deux marchés différents, selon que le verre flotté brut est ou non teinté ou enduit au cours du processus de production. La teinture dans la masse se fait en ajoutant, avant la fusion, de petites quantités d'oxyde de métal, afin de colorer le verre. Sous réserve des connaissances techniques nécessaires, la teinture peut en principe être pratiquée sur toutes les chaînes de production de verre flotté. En ce qui concerne l'enduction sur la chaîne même, seul un nombre relativement faible, environ un quart, des chaînes de production de verre flotté sont équipées des installations adéquates. L'enduction peut également se faire après la production et tous les fabricants de verre flotté ne semblent pas partager l'opinion des parties sur les avantages de l'enduction en continu. Voilà pourquoi, aux fins de la présente décision, c'est le verre flotté brut ou primaire qui est considéré comme le marché des produits en cause.

Marché géographique de référence

(16) Bien que des quantités importantes de verre flotté brut soient transportées au-delà des frontières nationales, le verre flotté brut est un produit lourd et volumineux. De ce fait, il est cher à transporter sur de grandes distances (ainsi, à titre d'exemple, le coût du transport par camion représente de 7,5 à 10 % du prix de vente sur une distance de 500 kilomètres). Au-delà de 1 000 kilomètres, le coût du transport par camion devient prohibitif et les quantités de verre flotté transportées au-delà de cette distance sont relativement faibles. Bien que le transport par bateau soit peu utilisé, le coût au kilomètre du transport maritime est inférieur à celui du transport routier.

En conséquence, l'aire géographique naturelle de livraison pour une installation de production de verre flotté donnée peut être représentée par des cercles concentriques dont le rayon est déterminé par le coût relatif du transport. Selon les informations transmises par les parties, de 80 à 90 % de la production d'une usine est vendue dans un rayon de 500 kilomètres, bien que cette distance soit bien sûr parfois dépassée. Ainsi, les différentes aires de livraison peuvent être représentées par une série de cercles se chevauchant, dont le centre se situe au lieu d'implantation de l'usine de production. Il existe au total 36 usines de verre flotté dans la Communauté, plus sept autres usines en Europe orientale et en Scandinavie. Au sein de la Communauté, elles sont relativement concentrées dans deux zones: Royaume-Uni/Benelux/nord de la France et Allemagne d'une part, nord de l'Espagne/nord de l'Italie d'autre part. Dans une certaine mesure, on pourrait dire qu'il y a un marché du nord de l'Europe et un marché du sud de l'Europe. Toutefois, compte tenu de la dispersion des différentes usines et du fait que les aires de livraison naturelles se chevauchent souvent, de telle sorte que les effets peuvent se transmettre d'un cercle à un autre, il semble approprié de considérer la Communauté dans son ensemble comme le marché géographique de référence.

Cela semblerait être confirmé par les données disponibles sur les prix. D'après les informations transmises par les parties pour la Belgique, la France, l'Italie, l'Allemagne et le Royaume-Uni, les prix pour le verre flotté clair de quatre millimètres d'épaisseur se chevauchent et se suivent au sein d'une fourchette étroite.

Bien que les producteurs de verre flotté détiennent généralement leurs principales parts de marché dans les États membres où leurs unités de production sont implantées, les données qu'ils ont transmises à cet égard montrent qu'il existe un degré élevé d'interpénétration au niveau national.

C'est pourquoi la Commission estime que les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes pour que la Communauté dans son ensemble soit considérée comme le marché géographique de référence.

D. Marché du verre flotté - Niveau 2

(17) Au niveau 2, le verre flotté brut a essentiellement deux usages différents, à savoir dans l'industrie automobile et dans les autres secteurs. Dans l'industrie automobile, le verre flotté est vendu après traitement pour être utilisé pour les vitres, les pare-brise, les miroirs, etc., dans les automobiles. Dans le commerce, le verre flotté est vendu aux utilisateurs finals, soit directement par l'intermédiaire du réseau de distribution du producteur, soit par l'intermédiaire de revendeurs et de distributeurs, généralement, mais pas toujours, après traitement, afin d'être utilisé avant tout pour les fenêtres dans le secteur du bâtiment ou pour la fabrication de miroirs. Pour cette raison, le verre vendu dans le commerce est parfois appelé verre de bâtiment. D'après les données fournies par les parties, environ 21 % (en poids) de l'ensemble du verre vendu dans la Communauté en 1992 a été fourni au secteur automobile et 79 % aux autres secteurs. Ces données sont dans l'ensemble similaires à celles calculées par la Commission sur la base des chiffres relatifs à la production européenne de verre flotté qui donnait une proportion de 17 et 83 % respectivement.

Verre destiné à l'industrie automobile

(18) Le verre fourni aux constructeurs automobiles après traitement est appelé verre sécurit, parce qu'il ne vole pas en éclats lorsqu'il est brisé, ce qui pourrait être dangereux pour les occupants du véhicule en cas d'accident. Il existe deux types de verre sécurit: le verre feuilleté, qui est utilisé presque exclusivement pour les pare-brise, et le verre trempé, essentiellement utilisé pour les vitres latérales et arrière.

Le verre feuilleté est fabriqué en liant, à température élevée et sous pression, deux feuilles pliées de verre coupées aux mêmes dimensions, entre lesquelles une couche intermédiaire de plastique est insérée. Le verre trempé est produit en chauffant et en pliant une pièce de verre prédécoupée qui est ensuite refroidie rapidement, afin de compresser la surface du verre. Le verre feuilleté est plus cher que le verre trempé.

Bien que les techniques de production, les prix et les applications spécifiques de ces deux types de verre soient différents, on peut considérer qu'ils appartiennent au même marché, celui du verre sécurit pour automobiles. Tant du côté de l'offre (essentiellement les producteurs de verre flotté) que du côté de la demande (les constructeurs automobiles), les intervenants sont les mêmes. La nature des deux types de verre est complémentaire, car ils sont presque toujours tous les deux nécessaires pour un modèle donné. En outre, les producteurs de verre flotté détiennent des parts de marché comparables pour le verre feuilleté et le verre trempé, si les deux sont considérés séparément. D'après les enquêtes menées par la Commission, il est clair que la distinction entre le verre feuilleté et le verre trempé ne joue aucun rôle pour les constructeurs de véhicules lorsqu'ils doivent évaluer les avantages et les inconvénients respectifs des fournisseurs. C'est pourquoi les conditions de concurrence sur ces deux segments sont comparables, ce qui se traduit par des structures de vente similaires pour les pare-brise et le verre trempé. L'évaluation du point de vue de la concurrence est donc la même pour ces deux segments et pour l'ensemble du marché du verre automobile.

(19) Toutefois, en raison de conditions de concurrence différentes, il convient de distinguer deux marchés séparés: d'une part celui des équipements originaux destinés aux constructeurs automobiles et à leurs réseaux de distribution, d'autre part celui du remplacement sur lequel opèrent des indépendants.

Selon les informations fournies par les parties, en 1991, la valeur totale du marché de l'automobile s'est élevée à 3 264 millions d'écus. Le segment des équipements originaux représentait en valeur 85 % de ce total, celui du verre de remplacement 15 %. Les pare-brise (verre laminé) représentaient en valeur 79 % du segment du verre de remplacement, le verre trempé, destiné au vitrage latéral et arrière des automobiles, 21 %. Les chiffres détaillés figurent dans le tableau suivant:

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Le marché géographique de référence pour le verre automobile destiné aux constructeurs et distributeurs agréés a au moins une dimension communautaire. Les constructeurs automobiles s'approvisionnent fréquemment en verre automobile auprès de fournisseurs situés dans différents États membres, la valeur ajoutée plus élevée du verre automobile résultant d'un coût de transport représentant un pourcentage relativement faible du coût de production. Les investigations de la Commission montrent que le coût de transport est habituellement compris dans une fourchette de 3 à 4 % pour une distance de 1 000 kilomètres. Pour les mêmes raisons, le marché géographique de référence du verre automobile destiné aux indépendants sur le marché de remplacement serait de dimension communautaire.

Verre destiné aux secteurs autres que l'industrie automobile

(20) Dans la Communauté, plus de 70 % du verre flotté brut destiné aux secteurs autres que l'industrie automobile est soumis à des traitements ultérieurs. Le verre non traité est essentiellement utilisé pour le vitrage. La proportion de verre non traité est plus faible dans les États membres où le double vitrage est plus fréquemment utilisé (voir unités scellées ci-dessous) et plus élevée dans les États membres où les conditions climatiques sont moins rigoureuses, ou dans lesquels la réglementation sur l'environnement et la sécurité moins stricte; c'est ainsi par exemple que, en Allemagne, la proportion est plus faible, alors que, en Italie, et particulièrement dans le sud du pays, elle est beaucoup plus élevée.

(21) Pour ce qui est du verre traité, les parties distinguent les marchés suivants:

- verre argenté, essentiellement destiné à la miroiterie,

- verre feuilleté utilisé, comme dans l'industrie automobile, pour des raisons de sécurité,

- verre trempé, également utilisé pour des raisons de sécurité,

- unités scellées (également appelées doubles vitrages ou vitrages multiples), qui comprennent deux ou plusieurs pièces de verre avec une couche isolante intermédiaire d'air immobile ou de gaz inerte. Les unités scellées comportent du verre flotté d'épaisseurs différentes, du verre feuilleté, du verre trempé, des verres enduits ou des combinaisons de ces différents types de verre.

Le fait qu'il y ait différents niveaux de traitement, avec un degré variable d'intégration verticale entre les producteurs de verre flotté et un grand nombre de spécialistes du traitement, généralement de petite taille, rend toute analyse précise du flux du verre traité vers l'utilisateur final difficile. Il introduit également un certain chevauchement entre les marchés de produits décrits ci-dessus. Il n'est donc pas possible de déterminer exactement la proportion de verre utilisée pour chaque application. Dans les grandes lignes, le marché semble se répartir comme suit: unités scellées: 50 %, verre non traité: 25 %, verre feuilleté, trempé et argenté: en dessous ou autour de 10 % chacun.

(22) Les parties n'opèrent pas uniquement dans les quatre secteurs de traitement mentionnés ci-dessus, mais également dans la distribution et la commercialisation de produits en verre, qui est le dernier maillon de la filière de vente du producteur de verre flotté à l'utilisateur final. Selon les informations dont dispose la Commission, c'est Saint-Gobain, suivie de Pilkington et, à un degré moindre, de Glaverbel, qui possède le plus grand réseau de distribution. Toutefois, la position des producteurs varie selon les États membres, les producteurs ayant toujours des positions relativement plus fortes dans les États membres où est concentrée leur production de verre flotté.

(23) En ce qui concerne la dimension géographique, le commerce général du verre semble être subdivisé en deux grands groupes.

Le verre argenté et le verre feuilleté sont des produits à faible valeur ajoutée. Ils sont fournis par un petit nombre de grandes usines desservant plusieurs pays, alors qu'il y a parallèlement également un grand nombre d'unités beaucoup plus petites. Le verre produit par les usines les plus importantes est généralement transporté sur des distances plus longues et ensuite revendu par l'intermédiaire d'un deuxième niveau de distribution.

Le verre trempé, les unités scellées, la vente et la distribution semblent indiquer des marchés nationaux, voire régionaux. Le verre trempé et les unités scellées sont tous deux des produits qui ne peuvent plus être traités, et ils ne sont donc généralement pas stockés. Les économies d'échelle sont moins importantes que dans le cas du verre argenté et du verre feuilleté. Des délais de réponse rapide et la qualité du service local sont considérés comme indispensables pour fidéliser la clientèle.

La Commission a effectué une enquête auprès des producteurs de verre flotté, afin de déterminer quelle proportion du prix de vente les coûts de transport représentent pour les quatre secteurs décrits ci-dessus. Les coûts varient selon le secteur et il y a également des différences entre producteurs. En raison de la valeur ajoutée apportée par les traitements, les coûts de transport sont plus faibles que pour le verre flotté brut, et ils représentent de 3 à 6 % environ du prix de vente pour une distance de 500 kilomètres et de 7 à 10 % pour une distance de 1 000 kilomètres. Il apparaît que les producteurs de verre flotté transportent de grandes quantités de verre destiné aux secteurs autres que l'industrie automobile au-delà des frontières nationales. Toutefois, aux fins de la présente décision, la question du marché de référence géographique exact peut être laissée en suspens car même la définition la plus étroite possible ne modifierait pas l'appréciation du point de vue de la concurrence.

Appréciation du point de vue de la concurrence

(24) Il est clair que le projet de concentration ne conduit pas à une position dominante de Pilkington/SIV seule, ni au niveau 1 ni sur aucun des marchés de référence au niveau 2. Toutefois, il est nécessaire d'examiner si la concentration n'aboutira pas à la création d'une position dominante collective entre les cinq premiers producteurs de verre flotté dans la Communauté. Bien que cette appréciation exige que les deux niveaux de marché soient pris en considération, il conviendrait en premier lieu d'analyser le niveau 1 en raison des caractéristiques de l'industrie du verre flotté, à savoir que le verre flotté brut destiné tant à la construction automobile qu'aux autres secteurs est fabriqué sur les mêmes chaînes flottées et, que, à ce niveau, les cinq producteurs communautaires détiennent collectivement une position particulièrement forte.

Appréciation au niveau 1

i) Parts de marché

Petit nombre d'intervenants représentant un degré élevé de concentration

(25) Selon les informations fournies par les parties dans leur notification, en 1992 les parts de marché (5) dans la Communauté et dans les cinq plus grands États membres, plus la Belgique et le Luxembourg, qui représentent ensemble plus de 90 % du marché communautaire en volume, se répartissent comme suit:

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Il est clair que, après l'acquisition de SIV, le sixième et plus petit producteur de verre flotté de la Communauté, Pilkington restera le deuxième producteur, derrière Saint-Gobain, premier sur ce marché.

Alors que, selon les données chiffrées ci-dessus, Pilkington/SIV et Saint-Gobain détiendront une part de marché combinée de [...] % (6) au niveau communautaire, la Commission considère que ces deux compagnies ne pourront pas exercer une domination conjointe. Ainsi que le confirme l'analyse qui suit, concernant la création possible d'une position dominante collective par un large groupe composé des cinq autres producteurs de verre flotté, Saint-Gobain et Pilkington seront soumises à une concurrence effective par Glaverbel, PPG et Guardian qui possèdent une gamme de produits comparable, sont financièrement puissantes et ont une capacité excédentaire significative pour la production de verre flotté brut, qui peut être traité par la suite par le nombre important de transformateurs indépendants présents au niveau 2.

Ces données montrent aussi que dans les cinq plus grands États membres, les cinq autres producteurs de verre flotté détiendront, après réalisation de l'opération projetée, une part de marché combinée de 89 % ou plus et, au niveau communautaire, une part de marché de 92 %. Il en résulte que 8 % des importations communautaires peuvent être attribuées à des importations effectuées par des concurrents indépendants.

(26) Bien que la part de marché totale qui figure ci-dessus soit très élevée, la Commission considère qu'elle sous-estime la part de marché combinée des producteurs de verre flotté. Ces chiffres ne tiennent pas compte des importations de verre flotté dans la Communauté en provenance d'unités de production que les mêmes producteurs possèdent ou contrôlent à l'extérieur de la Communauté. Les unités sont situées principalement en Europe orientale et en Scandinavie et leur capacité en verre flotté représente environ 10 % de la capacité flottée à l'intérieur de la Communauté. Les importations de verre flotté en provenance de ces unités vers la Communauté sont significatives. Il n'existe pas d'autres unités flottées en Europe à l'exception de deux unités flottées appartenant à la société turque Tuerkye Sise Ve Cam Fabrikalari AS (TSCF).

(27) La Commission a recalculé les parts de marché au niveau 1 en se référant à la production de verre flotté provenant d'usines implantées dans la Communauté, et aux importations provenant d'usines appartenant aux producteurs de la Communauté situées en Europe orientale et en Scandinavie, ainsi qu'à d'autres importations (7). La Commission estime que la base de calcul revue reflète la position sur le marché global de façon plus précise (8).

Les parts de marché individuelles sont, dans l'ensemble, comparables à la part de marché communautaire indiquée par les parties, bien que les producteurs possédant des usines en dehors de la Communauté (c'est-à-dire Pilkington, Glaverbel et Guardian) détiennent probablement une part de marché un peu plus élevée.

Sur cette base, les parts de marché (9) sont les suivantes:

<EMPLACEMENT TABLEAU>

(1) Pour des raisons de confidentialité, les parts de marché ont été indiquées par une fourchette.

Les cinq producteurs restants assurent plus de 96 % des fournitures de verre flotté dans la Communauté.

Parts de marché asymétriques

(28) Saint-Gobain et Pilkington détiennent des parts de marché à peu près comparables, c'est-à-dire respectivement un peu plus et un peu moins de 30 % au niveau 1. Néanmoins, Saint-Gobain reste nettement le chef de file du marché, tant en ce qui concerne le secteur automobile qu'en ce qui concerne les autres secteurs. Les parts de marché détenues par Glaverbel, PPG et Guardian sont beaucoup plus faibles. Chacune détient au niveau 1 une part de marché inférieure d'environ 15 à 25 % à celles de Saint-Gobain et de Pilkington, bien qu'il y ait une différence entre leurs parts de marché respectives.

Au stade communautaire, le niveau d'agrégation est si large qu'il atténue ou masque les changements de parts de marché aux niveaux nationaux, représentatifs de la concurrence dans le passé.

Ainsi, au cours de la période 1990/1992, la part de marché de Pilkington au Royaume-Uni pour le verre plat brut vendu dans les secteurs autres que l'industrie automobile est tombée de 55 à 43 % environ, alors que la part de Saint-Gobain passait de 13 à 18 %. Les principaux facteurs à l'origine de cette évolution des parts de marché sont les suivants:

- d'une part, le cours relativement élevé de la livre sterling par rapport aux autres monnaies communautaires a entraîné une augmentation des importations (Pilkington est le seul producteur possédant des usines au Royaume-Uni),

- d'autre part, l'acquisition par Saint-Gobain de l'un des principaux distributeurs britanniques, Solaglas, a entraîné le remplacement progressif de Pilkington par Saint-Gobain en tant que fournisseur de Solaglas.

De même, au cours de la même période, Pilkington a amélioré sa pénétration sur le marché français (sa part passant de 3 à 6 %).

Guardian semble s'être comporté comme un concurrent agressif dans le passé. Il est le seul des six producteurs de verre flotté existants dont la part de marché communautaire a systématiquement augmenté au cours des trois années passées. Guardian n'est entré sur le marché communautaire qu'en 1981, lorsqu'il a créé son premier bassin de flottage au Luxembourg, sur un site entièrement nouveau. Depuis lors, il a construit d'autres bassins de flottage au Luxembourg et en Espagne. Son deuxième bassin en Espagne devait commencer à produire en novembre 1993.

ii) Production et caractéristiques du marché

Interdépendance structurelle

(29) En raison des caractéristiques structurelles de la production de verre flotté, les principaux intervenants sur le marché sont fortement interdépendants. La production de verre flotté nécessite une forte intensité capitalistique. Le seuil d'efficience d'une nouvelle installation de flottage est d'environ 150 000 tonnes par an, pour un investissement d'environ 100 millions d'écus. Une fois qu'un four a été allumé et que la production démarre, la chaîne de flottage doit fonctionner en continu 24 heures sur 24 pendant environ dix ans. Pour des raisons techniques, l'installation doit tourner pratiquement à pleine capacité; des niveaux de production faibles affectent la qualité et, compte tenu du seuil de rentabilité relativement élevé pour l'utilisation des capacités, l'installation n'est alors plus rentable. Par conséquent, les effets de la mise en route d'une nouvelle unité de production seront nécessairement ressentis par les autres producteurs, puisqu'il n'est pas possible de fonctionner à de faibles niveaux de production. Les différents opérateurs sont donc fortement interdépendants.

Marché arrivé à maturité avec des surcapacités en forte augmentation

(30) Le marché du verre flotté est arrivé à maturité et il est relativement stable; sa croissance à long terme a été lente, mais constante. Il n'y a donc aucune incitation à s'engager dans une concurrence active motivée par la perspective d'une forte croissance du marché.

Tous les producteurs de verre flotté ont des capacités excédentaires. Le taux théorique (11) d'utilisation des capacités varie actuellement entre 78 et 93 %, ce qui correspond à une surcapacité de 7 à 22 % au niveau 1. Si ces chiffres sont relativement faibles par rapport à d'autres secteurs, ils sont importants si l'on se réfère à la norme pour le secteur du verre flotté, notamment si l'on considère les caractéristiques de la demande pour ces produits.

En outre, en ce qui concerne la situation actuelle du marché et celle prévisible dans un proche avenir, la demande de verre flotté est en baisse, en raison de la crise conjoncturelle subie par les secteurs du bâtiment et de l'automobile.

Faible élasticité de la demande

(31) Les consultants financiers des parties ont déclaré ce qui suit:

" À court et à moyen termes, l'élasticité de la demande par rapport au prix est très faible pour une vaste gamme de prix. La demande de verre flotté provient presque exclusivement des secteurs de l'automobile et du bâtiment. Dans ces deux secteurs, le coût du verre ne constitue qu'une petite part des intrants totaux et, de plus, il n'y a aucun produit de remplacement. Pour ces raisons, une augmentation du prix du verre a peu de chance d'entraîner une forte baisse de la demande. Les entretiens que nous avons eus avec des cadres expérimentés de ce secteur laissent à penser que l'élasticité de la demande est très faible, probablement de l'ordre de 0,1 à 0,3 sur l'éventail des variations des prix réels intervenues dans le passé.

Les sociétés fournissent un produit pour lequel l'élasticité de la demande par rapport au prix est faible ( à un prix concurrentiel) peuvent être fortement tentées de constituer une entente ou d'adopter un comportement similaire à celui d'une entente, lorsque cela est possible. "

Sans approuver la gamme exacte citée pour l'élasticité de la demande par rapport au prix, la Commission est tout à fait d'accord avec cette analyse, et notamment avec la conclusion selon laquelle l'élasticité de la demande est très faible et le risque de comportements parallèles très fort.

Pratiques concertées antérieures

(32) La Commission a eu connaissance de deux cas d'entente dans ce secteur:

- en premier lieu, la décision 89-93-CEE de la Commission (12) a infligé une amende à trois producteurs italiens de verre plat pour infraction à l'article 85 paragraphe 1 du traité CE. Cette décision a également établi qu'ils avaient commis une infraction à l'article 86 du traité. Ces trois producteurs étaient SIV, Fabbrica Pisani SpA (FP), filiale du groupe Saint-Gobain, et Varnante Pennitalia (VP), filiale de PPG. Ces trois sociétés ont fait appel séparément de cette décision, et l'affaire a été jugée par le tribunal de première instance. Dans son arrêt du 10 mars 1992 (13), il a confirmé divers aspects de la décision de la Commission concernant l'infraction de FP et SIV à l'article 85 paragraphe 1 du traité. En ce qui concerne VP, le tribunal a annulé la décision de la Commission en faisant valoir que la Commission n'avait pas apporté les preuves suffisantes de la participation de VP à ces pratiques concertées,

- en second lieu, le Bundeskartellamt (office fédéral des ententes) a, dans une décision récente (14), condamné une entente sur les prix et les rabais organisée dans le nord de l'Allemagne pour la distribution de verre plat et de verre scellé. Des amendes ont été infligées à seize compagnies parmi lesquelles des sociétés appartenant aux groupes Saint-Gobain et Pilkington. Aucun appel n'ayant été formé devant les tribunaux allemands, cette décision est devenue définitive.

Prix et rentabilité

Prix nominaux

(33) Dans leurs notifications, les parties ont souligné une forte baisse des prix du verre flotté. Le prix du verre flotté clair de 4 millimètres d'épaisseur a baissé d'environ 30 % au cours des trois dernières années, voire plus si on le compare aux prix très élevés atteints en 1989. Ces baisses de prix ont été corroborées par les autres données en matière de prix recueillies par la Commission. Si une faible partie de ces baisses de prix peut être expliquée par une amélioration de la productivité, la Commission estime qu'elles sont essentiellement dues à une baisse de la demande par rapport à l'offre alliée à une faible élasticité de la demande par rapport au prix pour le verre flotté.

La fin de la dernière décennie a généralement été une période de croissance relativement élevée dans la Communauté, pour plusieurs raisons. L'examen des données du GEPVP (15) transmises par les parties montre que le taux d'utilisation des capacités a été très élevé au cours de cette période. En effet, en 1987 et en 1988, les capacités ont été utilisées à plus de 100 % de la capacité théorique (16). En conséquence, la forte augmentation des prix intervenue à la fin des années quatre-vingt était prévisible, du fait de l'accroissement de la demande.

Au début de cette décennie, en revanche, l'économie communautaire a stagné, avant d'entrer petit à petit en récession. Le climat économique défavorable et le maintien de taux d'intérêt réels élevés ont des effets particulièrement négatifs sur la demande de biens d'équipement, notamment dans les secteurs du bâtiment et de la construction automobile, où la majeure partie du verre flotté est utilisée. Par conséquent, comme il y a eu baisse de la demande, il n'est pas surprenant que les prix aient, eux aussi, fortement baissé. Au milieu de l'année 1993, le prix du verre flotté clair de 4 millimètres se situait, dans les principaux pays communautaires producteurs de verre (Belgique, France, Allemagne, Italie et Royaume-Uni) à un niveau inférieur à celui d'avant 1986, même en termes nominaux. Dans le même temps, la forte intensité capitalistique de la production de verre flotté, qui implique des coûts variables relativement faibles, n'a fait qu'accentuer la baisse des prix. Néanmoins, même avec des prix fortement réduits, les producteurs couvrent leurs coûts variables et peuvent couvrir en partie les frais fixes déjà supportés. En conséquence, le niveau des prix du verre flotté brut apparaît fortement lié au niveau général de l'activité économique.

Prix réels

(34) Les parties ont transmis des données historiques établies par leurs consultants économiques qui montrent que, au cours des vingt dernières années, les prix réels du verre flotté en Europe ont baissé de moitié environ. Les prix réels pour la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont été calculés en ajustant le prix nominal au moyen d'un indice des prix à la consommation. D'après les consultants, ce tableau plaide en faveur de l'absence de position dominante collective des producteurs de verre flotté dans le passé. La Commission voudrait souligner que cette analyse ne tient pas compte des améliorations considérables de la productivité et des processus techniques réalisées par les producteurs de verre flotté au cours de la même période, bien qu'il ne fasse aucun doute que ces gains d'efficience aient aussi bénéficié aux clients.

Rentabilité

(35) À la suite de cette chute des prix, les producteurs de verre flotté ont connu une forte baisse de rentabilité dans les années quatre-vingt-dix. Les chiffres fournis par les consultants économiques des parties montrent que les bénéfices d'exploitation de Saint-Gobain, Pilkington et Glaverbel ont baissé de 27 à 36 % en 1991, par rapport à 1990. Chez Saint-Gobain, ils devraient continuer à baisser en 1992 et en 1993. La diminution de la marge d'exploitation de ces mêmes sociétés a été encore plus forte. Les bénéfices globaux de Pilkington pour l'exercice prenant fin le 31 mars 1993 ont été inférieurs de 75 % à ceux de 1991. Glaverbel a récemment enregistré des pertes importantes pour les six premiers mois de 1993, puisque la société a été dans le rouge pour la première fois depuis 1980. SIV, elle aussi, subit actuellement des pertes. Cependant, la validité du critère de mesure que constituent les bénéfices globaux est affectée par d'autres facteurs et ne peut pas, dès lors, constituer un indicateur définitif de l'absence d'un pouvoir de marché dans le passé. Pour les raisons précédemment exposées, il est probable que la rentabilité soit fortement cyclique.

iii) Transparence du marché

Transparence des prix

(36) Les investigations menées par la Commission montrent que le peu de transparence sur le marché peut s'expliquer à partir de l'étude des barèmes de prix des producteurs. Soit il n'existe pas de barème de prix (voir Guardian), soit quand il existe (voir Pilkington), il a peu de signification car il doit être tenu compte des remises individuelles importantes et variables négociées avec les clients.

Liens entre producteurs

(37) Un certain nombre de liens existent entre les producteurs. Bien qu'ils pussent être facteurs d'accroissement de la transparence sur le marché, leur contribution globale est insuffisante ou disproportionnée pour créer une domination collective.

Liens technologiques

(38) Sur le plan technologique, la méthode de production de base a été mise au point par Pilkington, ce qui a nécessairement conduit à l'octroi de licences aux autres producteurs. Il existe également un certain nombre d'accords de production sous licence entre Saint-Gobain, Pilkington, SIV et Glaverbel.

Livraisons croisées

(39) Les livraisons croisées entre les producteurs se pratiquent depuis longtemps. La Commission a enquêté sur ces livraisons croisées en 1990, en 1991 et en 1992. Parmi les six (17) producteurs, Guardian participe très peu aux livraisons croisées. Pour les autres producteurs, les livraisons croisées varient généralement entre 3 et 7 % du volume produit (tant pour les ventes que pour les achats), à l'exception de Saint-Gobain, dont les achats sont beaucoup plus faibles. Dans le cas de SIV, elles ont été relativement importantes, notamment en 1992, où SIV a acheté à Pilkington et à Saint- Gobain plus de 60 % du verre automobile dont elle avait besoin.

Il existe des raisons techniques qui justifient la passation de petites commandes par souci d'efficacité. L'efficacité d'une chaîne de flottage est compromise lorsque des changements de production ont lieu. Tout comme les changements fréquents d'épaisseur du verre flotté entraînent une baisse d'efficacité, le passage du verre clair au verre teinté ou inversement, peut se traduire par une perte de cinq à sept jours de production. Par conséquent, lorsqu'une petite commande urgente de verre teinté est passée, il peut se révéler plus efficace de l'acheter auprès d'un autre producteur plutôt que de perturber le calendrier de production.

Ce type de commandes peut également être vital lorsqu'une chaîne de flottage doit être réparée à froid, ce qui implique un arrêt total de la production. La réparation à froid d'un four prend environ six mois et elle se fait en moyenne tous les dix ans. Pour maintenir la production en aval, il peut être nécessaire de se fournir auprès d'un autre producteur, en particulier si le premier producteur ne possède qu'un nombre limité d'unités de flottage. C'est SIV qui possède le nombre le plus faible d'unités de flottage. En 1992, une réparation à froid importante a été effectuée à l'usine Flovetro de SIV. Afin de pouvoir maintenir sa production de verre automobile, SIV a dû s'approvisionner auprès d'autres producteurs, le verre en question ne pouvant être livré par les usines SIV de San Salvo et de Porto Marghara. Maintenant que la réparation à froid est achevée, ces commandes ont cessé.

La Commission note également que parallèlement à la baisse de la demande enregistrée ces dernières années, on a constaté une réduction substantielle du volume général des livraisons croisées.

Entreprises communes

(40) Une des trois unités de SIV fabricant du verre flotté est une entreprise commune détenue à 50 % par SIV et 50 % Fabbrica Pisana SpA, sous la raison sociale Flovetro. Fabbrica Pisana SpA est une filiale à 100 % de Saint-Gobain. Grâce à l'acquisition commune de SIV par Pilkington et Techint, des liens de production seront établis entre Saint-Gobain et Pilkington. Toutefois, Flovetro n'a aucun lien avec les trois autres producteurs de verre flotté et il ne semble pas qu'il y ait d'autres liens au niveau de la production dans ce secteur.

Dans le passé, SIV a également créé deux entreprises communes avec Glaverbel: Splintex, pour la production de verre automobile, et Ilved pour la production de verre de miroiterie. En raison d'un désaccord entre les sociétés mères sur les prix de livraison du verre flotté, il a été définitivement mis fin à cette entreprise commune. D'après les informations dont dispose la Commission, Splintex serait à nouveau sous le contrôle exclusif de Glaverbel. En ce qui concerne Ilved, SIV et Glaverbel sont actuellement engagées dans une procédure d'arbitrage à Genève, ainsi que dans des procédures judiciaires à Bruxelles et Vasto (Italie).

Enfin, Saint-Gobain et Asahi (la société mère de Glaverbel) ont récemment créé une entreprise commune (18) chargée de coordonner les activités de recherche et de développement des sociétés mères pour la mise au point de verre sécurit plastifié essentiellement destiné au secteur automobile. Les sociétés mères ont convenu que le produit final, un verre de sécurité feuilleté, serait fabriqué, commercialisé et vendu indépendamment par les parties. La Commission procède actuellement à l'examen séparé de cette affaire.

iv) Coûts de production et hétérogénéité des produits

Coûts

(41) La production de verre flotté est une activité à forte intensité capitalistique. Selon les estimations fournies par les parties, les coûts fixes représentent une partie importante (environ 65 %) des coûts totaux. Dans la mesure où les coûts d'investissement sont identiques et compte tenu du fait que la méthode de production de base est la même, les coûts de production du verre flotté devraient être comparables. De plus, quasiment l'ensemble des producteurs de verre flotté s'accordent pour dire que le seuil d'efficience, pour une unité de production, correspond à une capacité d'environ 150 000 tonnes, soit un investissement d'environ 100 millions d'écus.

En ce qui concerne les coûts variables, la Commission reconnaît que des facteurs tels que la main-d'œuvre, l'énergie, les matières premières (coût et transport vers l'usine) varient. Toutefois, leur impact global sur les prix se trouve atténué par la faible part des coûts variables dans les coûts totaux. Par conséquent, aucun producteur de verre flotté ne semble bénéficier d'avantages substantiels, sur le plan des coûts, par rapport aux autres.

Hétérogénéité des produits

(42) Bien que le verre flotté blanc soit un produit standard homogène, environ 70 % du verre flotté primaire est ensuite soumis à des traitements dans les secteurs autres que l'automobile. La recherche et le développement occupent une place de plus en plus importante, car les producteurs s'efforcent d'étendre la gamme des produits à valeur ajoutée. Il y a ainsi eu des innovations dans le domaine de l'enduction en continu et de la mise au point de nouveaux verres qui permettent d'économiser l'énergie et d'atténuer les rayons solaires. L'innovation conduit à une différenciation des produits, ce qui rend plus difficile l'émergence de comportements parallèles anticoncurrentiels.

Bien que tous les producteurs de verre flotté possèdent la capacité de base nécessaire pour produire des verres de sécurité tant feuilletés que trempés, les verres imposés par la conception des voitures modernes sont de plus en plus sophistiqués. Il y a donc une demande pour des verres de formes et de courbures de plus en plus complexes et ayant certaines propriétés thermiques.

v) Concurrence réelle et potentielle - barrières à l'entrée sur le marché

Concurrence réelle

(43) La Commission n'a pu identifier qu'un autre producteur important de verre flotté qui importe dans la Communauté. Il s'agit de la société turque TSCF. Sa part de marché est insignifiante, environ 1 %. Qui plus est, elle fonctionne actuellement pratiquement à pleine capacité.

Concurrence potentielle

(44) Les entrées potentielles sur le marché communautaire du verre flotté semblent peu probables.

- La production de verre flotté est une activité à très forte intensité capitalistique et l'investissement nécessaire pour atteindre le seuil d'efficience est évalué à 100 millions d'écus. En outre, l'investissement dans une installation de flottage est un investissement qui ne peut pas être récupéré si l'entreprise ne parvient pas à pénétrer sur le marché.

- La situation générale de surcapacité et l'augmentation prévues des capacités inemployées constituent en elles-mêmes un puissant facteur de dissuasion pour une nouvelle entrée.

- Le bon fonctionnement d'une installation de flottage nécessite des moyens technologiques et des compétences que les concurrents n'appartenant pas déjà au secteur du verre flotté peuvent ne pas posséder.

- Même lorsqu'un investisseur dispose des capitaux, de la technologie et de la volonté nécessaires pour pénétrer sur ce marché, il ne peut en aucun cas s'agir d'une opération à court terme. Les délais requis pour la seule construction d'une installation sont déjà d'environ deux ans, mais ce qui est plus important encore, le permis de construire peut être retardé, voire refusé, pour des motifs d'ordre écologique.

Dans la situation actuelle, aucune entrée sur le marché n'est prévisible à moyen terme. De fait, les parties elles-mêmes ont indiqué dans leur notification qu'aucune entrée n'était probable pendant au moins les trois prochaines années et que, pour ce qui est des autres grands producteurs indépendants de verre flotté d'Extrême-Orient, Pilkington ne pense pas qu'ils tenteront de pénétrer sur le marché communautaire par leurs propres moyens.

Répercussions des droits à l'importation

(45) Les importations de verre flotté, laminé et trempé ainsi que d'unités scellées et de verre de miroiterie sont généralement soumises à des droits à l'importation (entre 3,8 et 6,5 %). Pour les pays de l'Association européenne de libre-échange (AELE), la Turquie, la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie et la République tchèque, le taux est de zéro. C'est pourquoi les importations dans la Communauté, à l'exception de celles provenant des pays de l'AELE, de Hongrie, de Slovaquie et de la République tchèque, de Pologne et de Turquie (qui sont incluses dans le calcul des parts de marché tirées des calculs de la Commission) seraient soumises à des droits.

vi) Maintien de comportements anticoncurrentiels parallèles éventuels

Incitation à renoncer à des comportements parallèles tacites

(46) Compte tenu des caractéristiques économiques de la production de verre flotté, c'est-à-dire des coûts variables relativement faibles permettant des bénéfices marginaux élevés en cas de ventes supplémentaires, un producteur peut être fortement tenté de proposer des prix inférieurs à ceux de ses concurrents pour augmenter sa part de marché. Une détection rapide d'un tel comportement étant difficile, les comportements parallèles ne seront pas favorisés, car tout producteur sait que ses concurrents ont de bonnes raisons de renoncer à un éventuel accord tacite sur les prix. Bien que l'élasticité des prix à la demande au niveau du marché global soit faible, l'élasticité des prix individuels à la demande appliqués à une entreprise seule paraît être beaucoup plus élevée.

Intégration verticale asymétrique

(47) Il y a des différences considérables dans le degré d'intégration verticale. Sur les cinq producteurs restants, la plus forte intégration verticale se trouve chez Saint-Gobain, suivie de Pilkington et de Glaverbel, PPG et Guardian sont beaucoup moins intégrées. Compte tenu de l'importance des entreprises de traitement et du caractère fragmenté de la filière de vente, c'est au niveau 1 que les comportements parallèles ont les plus grandes chances de se manifester. Mais dans ce cas, ils se heurtent à des différences de niveaux d'intégration verticale. Il est plus probable que des opérateurs indépendants achètent auprès de PPG et de Guardian alors qu'ils ne sont pas en concurrence avec eux au travers de filiales en aval, comme c'est le cas pour Saint-Gobain et Pilkington.

Incidences des capacités nouvelles

(48) Guardian vient d'implanter une nouvelle chaîne de flottage à Tudela, en Navarre (Espagne). Il s'agit d'une usine relativement grande dont la production devait commencer en novembre 1993. La surcapacité du secteur du verre flotté dans la Communauté s'en trouvera accrue. L'exigence pour Guardian d'écouler cette production supplémentaire fera échouer de manière significative toute tentative de création d'une situation de comportement anticoncurrentiel parallèle.

vii) Entreprise commune Flovetro

(49) L'usine Flovetro est la plus petite des trois usines de SIV; sa production représente environ 2 % des ventes communautaires de verre flotté. L'usine utilise une technologie Saint-Gobain. Les deux représentants de SIV au conseil d'administration de Flovetro se sont engagés, dans une déclaration, à ne pas divulguer cette technologie. Compte tenu du peu de souplesse de la production de verre flotté, il ne semble pas que des considérations d'ordre commercial puissent jouer au niveau du processus de production. En principe, l'entreprise commune fonctionne sur une base 50 %, chaque société mère prenant une part égale de la production. Flovetro s'autofinance avec les bénéfices réalisés sur les ventes aux deux sociétés mères. Elle dispose de capacités de stockage limitées et la production est organisée séparément et enlevée par camion à destination des deux sociétés mères.

L'accord original Flovetro entre SIV et Saint-Gobain a été notifié à la Commission le 31 janvier 1978 et il a fait l'objet d'une lettre administrative de classement datée du 9 août 1979. La durée de validité de l'approbation que comporte cette lettre n'est pas illimitée. La Commission peut revoir le contenu d'une " comfort letter " existante en prenant en considération un changement de situation essentiel.

Appréciation du niveau 2 - Autres secteurs

Caractéristiques du marché

(50) La chaîne " fournisseur à utilisateur final " est extrêmement complexe. La difficulté particulière est que comme le verre circule au travers de la " chaîne fournisseur ", il peut également être traité à différents niveaux. Le meilleur exemple est celui du verre non traité qui peut être trempé ou laminé, les trois types de verre pouvant être utilisés par la suite pour la fabrication d'unités scellées.

La complexité de l'analyse est accentuée par le grand nombre de participants à la chaîne fournisseur. Selon les informations de la Commission, il y a dans la Communauté au moins plusieurs milliers d'indépendants (non liés à un producteur de verre flotté) producteurs d'unités scellées; plus de 100 pour le verre trempé, 20 ou plus, tant pour le verre laminé que pour le verre argenté.

Il est difficile de calculer précisément les parts de marché mais la position collective sur le marché des producteurs de verre flotté est généralement beaucoup moins forte au niveau 2 qu'au niveau 1. Ceci est confirmé par l'information recueillie par la Commission, selon laquelle les six producteurs de verre flotté existants ont une part de marché combinée d'environ 30 % pour les unités scellées, 65 % pour le verre trempé, 60 % pour le verre laminé et 80 % pour le verre argenté, produits dans la Communauté.

Addition des parts de marché

(51) Le chevauchement des parts de marché entre Pilkington et SIV découlant de la concentration est soit inexistante soit insignifiante, à l'exception du verre laminé en Allemagne. Tout d'abord SIV ne produit pas de verre argenté ou trempé pour les secteurs autres que l'industrie. Ensuite, pour les unités scellées, SIV a une part de marché en Italie inférieure à 1 % tandis que Pilkington n'est pas active sur le marché italien. Enfin, concernant les ventes aux utilisateurs finals de verre laminé et non traité, l'addition des parts de marché estimées figure dans le tableau suivant:

<EMPLACEMENT TABLEAU>

À l'exception du verre laminé en Allemagne, les parts de marché combinées ne sont pas importantes. Bien que Pilkington doive maintenant avoir une part de marché estimée à [...] % (19), en ce qui concerne le verre laminé en Allemagne, elle sera soumise à la concurrence de Saint-Gobain et Glaverbel et en particulier des indépendants.

Il est clair que Pilkington/SIV n'acquerra pas une position dominante seule.

Position dominante collective

(52) D'une façon générale, la création d'une position dominante collective au niveau 2 est beaucoup plus difficile et improbable, étant donné la présence supplémentaire des indépendants, spécialistes du traitement, leurs parts de marché importantes et leur facilité à entrer sur le marché. De plus, ceci restera en l'état pourvu qu'il y ait une offre concurrentielle de verre flotté brut à partir du niveau 1. Pour les raisons déjà décrites dans l'analyse du niveau 1, une source concurrentielle du côté de l'offre devrait subsister à l'avenir.

En particulier, en ce qui concerne les ventes de verre non traité aux utilisateurs finals en Allemagne, bien que Pilkington et Saint-Gobain aient une part de marché combinée dépassant [...] % (20), PPG, Glaverbel et Guardian (qui détient une part de marché d'environ [...] % (21) sont toutes présentes sur le marché allemand et limiteront la capacité de Saint-Gobain et Pilkington à imposer des prix plus élevés. Pilkington et Saint-Gobain ont été incapables, au travers des seuls moyens structurels, d'imposer des prix plus élevés en Allemagne par le passé et la part de marché de Pilkington est seulement augmentée de façon marginale par le biais de l'acquisition de SIV.

Évaluation au niveau 2 - Secteur automobile

Caractéristiques du marché

(53) Le secteur automobile est considérablement différent du secteur général en ce qu'il y a au niveau 2, surtout dans le secteur équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés, moins de spécialistes du traitement indépendants. D'une part, cela signifie que le volume des ventes au niveau 1 pour le traitement est limité, mais que, d'autre part, l'évaluation de la concurrence au niveau 1 n'est pas sensiblement différente de celle effectuée au niveau 2, en particulier pour le secteur équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés.

Bien que les six producteurs existants de verre flotté soient actifs dans le secteur automobile, le degré relatif de concentration est beaucoup plus élevé et Guardian n'a pénétré sur le marché que tout récemment. Étant donné les exigences particulières des constructeurs automobiles en termes de qualité de produit et de développement, de volumes et de livraison ponctuelle, l'unique fournisseur important du secteur équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés, en dehors des producteurs de verre flotté est l'entreprise familiale indépendante, Soliver en Belgique.

Dans le secteur verre de remplacement indépendants, il existe beaucoup de fournisseurs plus indépendants tels que Duglass et Rioglass (Espagne), Heywood Williams Group (Royaume-Uni), Troesch (Suisse), Vetro-Sud (Italie), Irda Safety Glass (Grèce), W-Laminated AB (Suède), Lamil AB (Norvège), Lipponen Tarnglass et Jaakko-Tuote (toutes deux en Finlande).

Parts de marché

(54) Selon les données fournies par les parties, les parts de marché calculées sur la base du nombre de pièces de verre sont, pour l'année 1991, les suivantes (22):

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Ces parts de marché sont largement comparables à celles calculées par la Commission, sur la base de la valeur, sous réserve que la part de marché de Pilkington est en quelque sorte sous-estimée et celle de SIV somme toute surestimée, en ce qui concerne le secteur verre de remplacement indépendant, et que Guardian a déjà pénétré dans les deux secteurs équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés et verre de remplacement indépendants, avec des ventes importantes dans ce dernier secteur.

Suite à la concentration, Pilkington améliorera sa position sur le marché, en particulier, dans le secteur équipements originaux pour constructeurs et distributeurs agréés, pour à la fois le verre laminé et le verre trempé. Cependant, il restera clairement encore à la seconde place, derrière le chef de file du marché, Saint-Gobain.

Position dominante collective

Secteur équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés

(55) La part de marché combinée de Saint-Gobain et de Pilkington/SIV sera, après la concentration, d'environ . . . % (25), dans le secteur équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés. La Commission ne considère pas que cela donnera lieu à la constitution d'un duopole pour les raisons suivantes:

Puissance d'achat au niveau de la demande

(56) Les constructeurs automobiles disposent d'une puissance d'achat considérable. D'une part, leur puissance d'achat va en se renforçant compte tenu d'une certaine tendance à adopter une source unique d'approvisionnement pour chaque pièce de verre. Au lieu de recevoir une part variable des commandes des constructeurs automobiles, la source unique opposée à la source multiple implique que les fournisseurs reçoivent toutes ou aucune des commandes, étant ainsi placés sous une pression concurrentielle plus importante s'ils veulent gagner la commande entière. Cette pression concurrentielle est encore plus accentuée par la facilité avec laquelle les constructeurs automobiles peuvent changer de fournisseurs. Même dans les cas où les producteurs possèdent les droits de propriété industrielle correspondants, le renforcement de la puissance d'achat des constructeurs automobiles en relation avec les nouvelles commandes est tel que les derniers peuvent obliger les producteurs existants à concéder des droits aux nouveaux fournisseurs. En même temps, la sophistication de leurs services d'achats permet aux constructeurs automobiles de surveiller étroitement les coûts de production et les prix des producteurs de verre flotté.

Aucun des constructeurs automobiles contactés par la Commission ne s'est montré préoccupé par le projet de concentration. En raison de la gravité de la baisse des ventes d'automobiles dans la Communauté (environ 20 % en 1993), ils ont pu renégocier les contrats en cours et faire établir de nouveaux contrats à long terme en faisant baisser les prix. C'est un exemple des nouvelles techniques d'achat agressives développées dans ce secteur, qui aboutissent à une réduction du prix des fournitures, même en termes nominaux, en cours de contrat. Ce type de contrat est en train de devenir monnaie courante.

Surcapacité

(57) Dans le secteur équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés, les surcapacités sont beaucoup plus élevées au niveau 2 qu'en ce qui concerne la production du verre flotté brut au niveau 1. Sur la base des données relatives à l'utilisation des capacités réunies par la Commission, les surcapacités pour les six producteurs actuels de verre flotté et Soliver sont comprises environ dans une fourchette de 20 à 35 % pour le verre laminé et de 15 à 40 % pour le verre trempé. En particulier, comparé à Saint-Gobain et Pilkington/SIV, Glaverbel et PPG ont de relativement fortes surcapacités. Ceci est également vrai pour Guardian, qui n'a pénétré que récemment sur les marchés équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés et verre de remplacement indépendants dans la Communauté et dont le nouveau site de Grevenmacher au Luxembourg a commencé à produire en février 1993.

Secteur verre de remplacement indépendants

(58) Bien que Pilkington/SIV et Saint-Gobain aient une part de marché combinée de plus de [...] % (26) dans le secteur verre de remplacement indépendants pour ce qui concerne le verre laminé et le verre trempé, la Commission ne considère pas qu'un duopole sera créé dans ce secteur pour les deux raisons suivantes:

Nombre de fournisseurs indépendants

(59) En plus des fournisseurs équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés, il existe un nombre relativement grand de fournisseurs indépendants pour maintenir une concurrence efficace.

Besoin de maintien du secteur verre de remplacement indépendants

(60) Même s'il existe une certaine augmentation de la puissance d'achat du côté de la demande avec le développement de sociétés comme Auto Windscreens (27) et Carglass qui sont en train d'organiser la distribution du verre de remplacement, aux niveaux national et international, et qui mettent en place actuellement des chaînes de centres d'équipement, ceci est encore loin de valoir la puissance d'achat dont jouissent les constructeurs automobiles dans le secteur équipements originaux constructeurs et distributeurs agréés. Cependant, il n'est pas de l'intérêt des producteurs de verre flotté d'affaiblir la position des détaillants en verre de remplacement indépendants. Afin de concurrencer les concessionnaires agréés, les détaillants en verre de remplacement indépendants ont déjà besoin de proposer des prix plus bas au consommateur final. Par conséquent, une telle politique ne servirait qu'à déplacer la demande pour le verre de remplacement du segment verre de remplacement indépendants vers le segment équipements originaux distributeurs agréés. Ceci serait défavorable aux producteurs de verre flotté puisque les prix de l'offre dans le segment verre de remplacement indépendants sont déjà plus élevés que ceux du segment équipements originaux distributeurs agréés et cela augmenterait encore le pouvoir d'achat substantiel des constructeurs automobiles.

VI. CONCLUSIONS

(61) Compte tenu des parts de marché et de la puissance des autres producteurs, l'acquisition de SIV par Pilkington/Techint ne conduira pas à la création d'une position dominante individuelle. Toutefois, la concentration projetée accroîtra encore le degré de concentration d'un secteur déjà fortement concentré et soumis à d'importantes barrières à l'entrée. Les caractéristiques économiques de l'industrie du verre flotté peuvent constituer une forte incitation à l'adoption de comportements parallèles anticoncurrentiels, industrie dans laquelle des ententes ont déjà eu lieu par le passé.

(62) Le marché communautaire du verre flotté souffre actuellement d'une surcapacité croissante, due à une baisse relative de la demande pour ses deux principales applications, c'est-à-dire le verre utilisé dans le bâtiment et le verre sécurit pour l'industrie automobile. De ce fait, les prix ont baissé de plus de 30 % au cours des trois dernières années. La surcapacité devrait continuer à augmenter au cours des prochaines années.

(63) D'après les conclusions et les analyses de la Commission, il n'existe pas de certitude suffisante pour conclure que la structure du marché telle qu'elle se présentera une fois la concentration réalisée facilitera la création de comportements parallèles anticoncurrentiels.

La position des cinq autres producteurs de verre flotté sur le marché présente des asymétries qui rendent difficile un comportement parallèle anticoncurrentiel et la transparence du marché apparaît insuffisante pour permettre un tel comportement. Dans le secteur général, il existe un très grand nombre d'acteurs indépendants et de distributeurs en aval. Dans le secteur automobile, les constructeurs automobiles peuvent exercer une puissance d'achat considérable qui semble s'accentuer. En particulier, Guardian a agi comme un concurrent agressif par le passé et dispose de capacités nouvelles importantes qui arrivent sur le marché.

Dans le même temps, la surcapacité actuelle de ce secteur, les profits marginaux élevés réalisés sur les ventes supplémentaires, ainsi que la transparence insuffisante du marché font qu'il existe de fortes incitations à renoncer à des comportements parallèles anticoncurrentiels tacites. Par conséquent, la création et la stabilité d'un possible comportement parallèle anticoncurrentiel en matière de prix sont constamment menacées.

VII. APPRÉCIATION GLOBALE

(64) La Commission a donc été amenée à conclure que le projet de concentration ne crée ni ne renforce de position dominante susceptible d'entraver de façon sensible une concurrence effective dans le Marché commun ou dans une partie substantielle de celui- ci,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Le projet d'acquisition conjointe de la Società Italiana Vetro SpA par Pilkington plc et Techint Finanziaria Srl est déclaré compatible avec le Marché commun.

Article 2

Pilkington plc, Prescot Road, Saint Helens, UK-Merseyside-WA10 3TT

et

Techint Finanziaria Srl, Corso Venezia 48, I-20121 Milano

sont destinataires de la présente décision.

(1) JO n° L 395 du 30. 12. 1989, p. 1.

(2) JO n° L 257 du 21. 9. 1990, p. 13 (rectificatif).

(3) JO n° C 173 du 25. 6. 1994.

(4) Chiffre omis pour des raisons de secret d'affaires. Le chiffre d'affaires mondial de Pilkington, San Faustin Group et SIV dépasse 5 000 millions d'écus.

(5) Les parties ont présenté des parts de marché basées sur la production de verre flotté brut (dont une part importante est traitée en interne par les producteurs de verre flotté) et donc incluent une production captive.

(6) Supérieur à 50 %.

(7) Les chiffres relatifs aux importations proviennent de la base de données Comext.

(8) D'un côté, la base de calcul sous-estime la part de marché de l'oligopole, dans la mesure où il n'a pas été possible d'identifier toutes les importations des membres du groupe, notamment les importations de PPG et ASF (Asahi/Glaverbel) en provenance des États-Unis d'Amérique. D'un autre côté, les exportations à partir de la Communauté, à proprement parler, devraient être exclues. Néanmoins, la différence est considérée comme négligeable pour l'évaluation.

(9) Pour des raisons de confidentialité, les parts de marché des autres parties sont désignées par une fourchette.

(10) Pour des raisons de confidentialité, les parts de marché ont été indiquées par une fourchette.

(11) Pour des raisons techniques, il existe différentes voies pour calculer la capacité d'utilisation théorique. En général, un taux correcteur reflétant les pertes dues aux réparations à froid, réparations à chaud, changements de production (teinte et épaisseur), problèmes de qualité et rupture de chaîne (incluant bords défectueux et bris), coûts d'entrepôt, doit être appliqué à la capacité théorique de fusion.

(12) JO n° L 33 du 4. 2. 1989, p. 44.

(13) Affaires T-68-89, T-77-89 et T-78-89, SIV et autres contre Commission, Recueil 1992, II/1403.

(14) Décision du 22 février 1993 de la première chambre du bureau fédéral des cartels.

(15) GEPVP: Groupement européen des producteurs de verre plat.

(16) D'après les chiffres du GEPVP, l'utilisation théorique de la capacité pour les producteurs communautaires de verre flotté a été de 100,5 et 101,6 % respectivement en 1987 et en 1988.

(17) Dans ce contexte, SIV est considéré comme un producteur distinct.

(18) JO n° C 111 du 21. 4. 1993, p. 6.

(19) Chiffre omis pour des raisons de secret d'affaires, entre 25 et 50 %.

(20) Chiffre omis pour des raisons de secret d'affaires, plus de 50 %.

(21) Chiffres omis pour des raisons de secret d'affaires, moins de 15 %.

(22) Dans l'intérêt du secret d'affaires, les parts de marché ont été indiquées par une fourchette.

(23) Dans l'intérêt du secret d'affaires, les parts de marché on été indiquées par une fourchette.

(24) Dans l'intérêt du secret d'affaires, les parts de marché on été indiquées par une fourchette.

(25) Chiffres omis pour des raisns de secret d'affaires, plus de 50 %.

(26) Chiffres omis pour des raisons de secret d'affaires, plus de 50 %.

(27) Filiale du groupe Heywood Williams.