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Décisions

CA Paris, 25e ch. A, 28 février 2003, n° 2002-03842

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Besson (SA), Bach (ès qual.)

Défendeur :

Groupe Volkswagen France (SA), Volkswagen Finances (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Canivet

Conseillers :

Mmes Jaubert, Bernard

Avoués :

SCP Moreau, SCP Monin

Avocats :

Mes Seguin, Henry.

TGI Paris, ch. urg., du 2 nov. 2001

2 novembre 2001

Par jugement du 2 novembre 2001, auquel référence est faite pour un plus ample rappel des données du litiges, le Tribunal de grande instance de Paris a dit que la société Besson, radiée du Registre de commerce et des sociétés rétroactivement à la date du 20 octobre 1994, ne bénéficiait plus de la personnalité morale et ne pouvait agir personnellement en justice ; que Me Bach, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Besson n'avait pas qualité pour agir à l'encontre des sociétés Groupe Volkswagen France et Volkswagen Finances, en application de l'article 90 du décret du 27 décembre 1985 ; que Me Bach, au demeurant désigné, non par le tribunal de commerce, mais par ordonnance du Président de ce tribunal, ne poursuivait pas une action précédemment engagée par le commissaire à l'exécution du plan, qu'il ne pouvait introduire lui-même cette action ; qu'enfin Guy Besson, qui n'avait contracté avec les sociétés Volkswagen qu'en qualité de dirigeant de la société Besson n'avait avec elles aucun lien de droit.

Il les a donc déclarés tous trois irrecevables en leur action.

Me Bach ès qualités et Guy Besson, seuls appelants de ce jugement, affirment que le texte du décret susvisé, comme l'article 67 al 2 de la loi du 25 janvier 1985 se bornent à prévoir le sort des instances engagées antérieurement à la désignation du commissaire à l'exécution du plan " sinon d'un mandataire ad hoc ", mais n'interdisent pas pour autant aux dits mandataires l'exercice d'une action nouvelle ; que la désignation du mandataire ad hoc n'est soumise à aucune forme particulière, sous la seule réserve que cette désignation soit faite, comme elle l'a été en l'espèce, par la juridiction devant laquelle s'est déroulée la procédure de redressement judiciaire.

Au fond, reprenant les mêmes moyens et prétentions que ceux développés en première instance, ils soutiennent que la rupture prématurée de la convention souscrite le 26 janvier 1993 entre la société Besson et la société VAG Financement (devenue Volkswagen Finance), qui devait permettre le financement de l'amélioration des infrastructures immobilières imposée par la société VAG France (devenue Groupe Volkswagen France), est la cause de la mise en redressement judiciaire de la société Besson.

Ils ajoutent que Guy Besson est recevable à agir sur un fondement délictuel, les fautes contractuelles des sociétés Volkswagen engageant leur responsabilité à son égard ; dès lors que son engagement de caution s'est ainsi trouvé mis en œuvre.

Ils demandent à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de condamner les sociétés Groupe Volkswagen France et Volkswagen Finance à payer à Me Bach ès qualités la somme de 1 534 490 euros à titre de dommages-intérêts, à Guy Besson la somme de 304 900 euros et à chacun d'eux la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du NCPC.

Intimés, les sociétés Groupe Volkswagen France et Volkswagen Finance concluent :

- à la confirmation des dispositions entreprises du jugement déféré,

- subsidiairement au débouté des appelants de leurs demandes, faisant valoir l'inanité des griefs développés à leur encontre, l'absence de faute dans la résiliation des conventions, et soutenant que même à supposer ces fautes démontrées, il n'en est résulté aucun préjudice direct pour Guy Besson,

- très subsidiairement à la compensation de l'éventuelle condamnation prononcée contre elles avec leurs propres créances au passif de la société Besson,

- et en tout état de cause au paiement par les appelants de la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du NCPC.

Considérant que Me Bach ès qualités reprend sans justification nouvelle les moyens et prétentions que les premiers juges ont à bon droit rejetés par les motifs ci-avant rappelés et que la cour adopte ; que Me Bach, qui n'a pas en tout état de cause été désigné, comme l'exigent les dispositions de l'article 90 du décret du 27 décembre 1985, par jugement du tribunal devant lequel s'est déroulée la procédure de redressement judiciaire de la société Besson, mais par ordonnance du Président de cette juridiction, est irrecevable à intenter une action qu'il n'avait pas engagée ou poursuivie en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette société ;

Considérant que Guy Besson est en revanche recevable à rechercher la responsabilité délictuelle des sociétés Groupe Volkswagen France et Volkswagen Finance, les fautes éventuellement commises à l'égard de la société Besson dont il s'était porté caution, étant susceptibles de lui causer préjudice;

Considérant qu'il est établi par les termes du courrier du 19 juin 1989 de la société VAG France que c'est à la demande expresse de celle-ci, et sous peine de ne pas voir " renouveler " son contrat de concession à son échéance du 31 décembre suivant, que la société Besson a donné son accord à l'établissement d'un projet immobilier dont la société VAG France se disait prête à étudier les divers aspects et notamment la viabilité financière ;

Considérant qu'il est également avéré que la convention de financement souscrite le 26 janvier 1993 auprès de la société VAG financement pour un encours de 5 MF a été résiliée dès le 3 septembre suivant ; que le contrat de concession exclusive conclu le 21 décembre 1989 pour une durée indéterminée a lui-même été résilié le 6 juin 1994 ;

Mais considérant que ne sont pas pour autant démontrées les fautes des sociétés VAG France et VAG Financement dans ces résiliations, et la responsabilité de celles-ci dans la déconfiture de la société Besson ;

Qu'il n'est pas établi que le projet en cause, conçu en période de pleine expansion économique, et qui répondait à la nécessité pour la société VAG France de s'adapter à la concurrence et aux exigences de la clientèle automobile, n'était pas financièrement viable ; que la société Besson qui a décidé en toute connaissance de cause d'opter pour ce développement de sa surface de vente, a obtenu de I'UCB un crédit-bail immobilier pour financer l'acquisition d'un terrain ;

Que la rupture de la convention du 26 janvier 1993, qui n'avait d'ailleurs pas pour but de financer ces investissements immobiliers, mais d'octroyer " diverses possibilités de crédit " pour l'ensemble de l'activité du concessionnaire, est intervenue alors que s'étaient accumulés des impayés ; que cette rupture n'est pas intervenue brutalement mais a, au contraire, été assortie d'un report de l'exigibilité des sommes dues, et même d'une proposition d'abandon partiel de la créance à hauteur de 200 000 F ; qu'il n'est pas démontré que les investissements réalisés seraient à l'origine de ces impayés ; lesquels apparaissent dus à diverses difficultés, à une politique de vente " fondée sur des remises ou conditions de reprise disproportionnées préjudiciables à la situation financière de l'entreprise ", et à des pertes importantes notamment sur le dernier exercice, résultant de la dégradation de la marge commerciale, qui a enregistré une baisse de 2 MF soit près d'un quart de son montant de 1992 ;

Que la rupture de cette convention de financement, et a fortiori celle du contrat de concession qui n'est intervenue qu'en cours de procédure de redressement judiciaire et avec prévis d'un an ne peuvent être la cause de la cessation des paiements de la société Besson, déclarée dès le mois d'avril 1994, laquelle est manifestement résultée de la situation qui vient d'être décrite ;

Considérant en conséquence que les demandes de Guy Besson en réparation du préjudice allégué ne peuvent être accueillies ;

Considérant qu'au regard de la situation économique des parties, il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du NCPC.

Par ces motifs : LA COUR, Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a dit Guy Besson irrecevable en ses demandes ; L'infirme de ce seul chef, Statuant à nouveau, Déboute Guy Besson de toutes ses demandes ; Rejette les demandes des sociétés Groupe Volkswagen France et Volkswagen Finance au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne Me Bach ès qualités et Guy Besson aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.