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Décisions

Cass. crim., 3 septembre 2002, n° 01-86.182

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

M. Blondet

Avocats :

SCP Monod, Colin.

TGI Valenciennes, 3e ch., du 15 juill. 1…

15 juillet 1999

LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par Patrick M contre l'arrêt de la Cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 5 juillet 2001, qui, pour publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à un mois d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 121-1 et L. 213-1 du Code de la consommation, 388, 427, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a, après requalification des faits poursuivis, déclaré Patrick M, renvoyé devant le juge correctionnel sous la prévention de tromperie, coupable du délit de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, et l'a condamné à une peine d'emprisonnement avec sursis et à une amende ;

" aux motifs que Patrick M a reconnu que la photo du hachoir était inadéquate puisque, depuis 1996, il importe des hachoirs provenant indifféremment de Tchécoslovaquie ou de Chine ; qu'il soutient que l'infraction n'est pas constituée, dans la mesure où l'origine du produit n'est pas un argument de vente, que la mention du pays d'origine était illisible sur la photo présentée et qu'enfin, ladite photo n'avait aucun caractère contractuel ; que Patrick M a procédé à une rectification du catalogue d'X en septembre 1997 ; que, toutefois, s'il est exact que le catalogue ne mentionne pas dans la partie texte l'origine du produit, l'examen de la photo laisse deviner même si celle-ci n'est pas parfaitement claire, l'inscription " made in Czechoslovaquia " ; que Patrick M ne conteste pas avoir vendu à l'aide de ce catalogue des hachoirs provenant de Chine ; que, compte tenu des faits ainsi relatés et des explications fournies, c'est avec justesse que les premiers juges ont procédé à la requalification du délit reproché ;

" alors, d'une part, que, s'il appartient au juge de restituer aux faits poursuivis leur véritable qualification, il ne peut substituer des faits distincts à ceux de la prévention, à moins que le prévenu accepte expressément d'être jugé sur ces faits nouveaux ; qu'en l'espèce, les éléments constitutifs du délit de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur - et notamment la présence, dans le catalogue de la société X, d'une indication fausse ou de nature à induire en erreur sur l'origine du hachoir à viande présenté à la vente, et la vente par la société X, à l'aide de ce catalogue, de hachoirs à viande ayant une provenance autre que celle indiquée -, éléments constitutifs différents de ceux du délit de tromperie, n'étaient pas compris dans la prévention, laquelle ne faisait pas mention du catalogue de la société X ; qu'en confirmant cependant le jugement qui, après requalification des faits poursuivis, avait déclaré Patrick M coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur sans qu'il résulte ni dudit jugement, ni de son arrêt, ni des pièces de procédure que le prévenu ait expressément accepté d'être jugé sous ce chef, la cour d'appel a violé les textes et principes susvisés ;

" alors, d'autre part, que le délit de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur n'est constitué, en ce qui concerne les mentions portant sur l'origine d'un produit, que lorsque l'indication de l'origine est suffisamment claire sur le support publicitaire et qu'elle y a été apposée pour faire présumer, dans l'opinion de l'acheteur potentiel, une qualité particulière ; qu'en l'espèce, le demandeur soutenait que l'examen de la photographie du catalogue ne permettait pas au consommateur de déceler le lieu d'origine du hachoir à viande présenté à la vente, et que l'origine géographique du produit, non visée dans le texte de présentation, ne constituait pas un élément de la publicité incriminée ; qu'ainsi, en se bornant, pour entrer en voie de condamnation, à relever que l'examen de la photographie " laissait devenir " l'inscription " made in Czechoslovakia ", tout en constatant que cette mention n'était pas parfaitement claire et qu'elle n'était pas reprise dans le texte de présentation du produit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

" alors, de troisième part, que la charge de la preuve appartient à la partie poursuivante ; qu'en l'espèce, Patrick M, tout en reconnaissant que la société X se fournissait en hachoirs à viande aussi bien tchèques que chinois, n'a jamais affirmé avoir vendu des produits chinois grâce au catalogue publicitaire litigieux, dont il soutenait qu'il n'avait été diffusé qu'en région parisienne ; qu'ainsi, en déduisant le caractère mensonger de la publicité litigieuse du seul fait que Patrick M n'aurait pas contesté avoir vendu à l'aide dudit catalogue des hachoirs à viande provenant de Chine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale et inversé la charge de la preuve ;

" alors, enfin, que le lieu de commission du délit de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur est, lorsqu'il s'agit d'un catalogue publicitaire, le lieu de sa diffusion ; qu'ainsi, en condamnant Patrick M pour s'être rendu coupable de ce délit à La Sentinelle (Nord) sans répondre aux conclusions du prévenu faisant valoir que le catalogue incriminé avait été diffusé, selon les constatations mêmes du procès-verbal de la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, à Pont-Sainte-Maxence en région parisienne, et qu'aucun catalogue comportant la photographie litigieuse n'avait été distribué à La Sentinelle, la cour d'appel a privé sa décision de motifs " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société de vente par correspondance X, ayant son siège à La Sentinelle (Nord), a fait éditer et distribuer sur le territoire français un catalogue dans lequel David Maarek, dirigeant des établissements MCT, se disant distributeur exclusif de la marque tchèque Porkert, a relevé une offre de vente, accompagnée d'une photographie, relative à un hachoir à viande mécanique présentant l'apparence du produit qu'il vend sous cette marque, comportant la mention " made in Czeckoslovaquia ", et proposé à un prix très inférieur à celui qu'il pratique ; que David Maarek a commandé ce produit à la société Eurovanadium qui lui a fait livrer un hachoir fabriqué en Chine ; que Patrick M a été cité devant le tribunal correctionnel sous la prévention d'avoir trompé les établissements MCT sur l'origine de la marchandise vendue ;

Attendu que, pour le déclarer coupable de publicité de nature à induire en erreur, après requalification des faits visés à la prévention, la cour d'appel prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors que, selon les mentions de l'arrêt et du jugement qu'il confirme, Patrick M, qui a fait plaider que le délit reproché ne pouvait s'analyser ni en publicité de nature à induire en erreur ni en tromperie, a été mis en mesure de s'expliquer sur toutes les qualifications pénales dont les faits étaient susceptibles, la cour d'appel, qui a déduit de ses constatations souveraines, que la mention d'origine, perceptible sur la photographie du produit proposé à la vente, était de nature à tromper le lecteur du catalogue, a justifié sa décision ;d'où il suit que le moyen, inopérant en sa dernière branche, dès lors qu'il n'est pas contesté que le catalogue contenant l'annonce inexacte a été diffusé auprès du public par la société dirigée par le prévenu à La Sentinelle, où il a sa résidence, et nouveau, mélangé de fait et, comme tel, irrecevable en sa troisième branche, doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme :

Rejette le pourvoi.