Cass. crim., 17 septembre 2002, n° 01-88.137
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
Mme Agostini
Avocat général :
M. Di Guardia
Avocats :
SCP Bouzidi, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez.
LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par X Franck, Y Dominique, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes, 3e chambre, du 18 octobre 2001, qui, pour publicité de nature à induire en erreur, les a condamnés chacun à 100 000 francs d'amende, a ordonné une mesure de publication, et a prononcé sur les intérêts civils ; Joignant les pourvois en raison de leur connexité ; Vu les mémoires produits en demande ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Franck X, pris de la violation des articles L. 121-1 et suivants, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6 et L. 213-1 du Code de la consommation, 121-2, 121-3 du Code pénal, 485 et 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif a dit le demandeur coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur ;
" aux motifs que l'opération dont s'agit avait, selon les déclarations même des intéressés, un caractère incitatif et permettait de constituer des fichiers de clientèle ; que les prospectus ou bons de participation présentaient un message publicitaire visant à attirer les consommateurs quels que soient les consommateurs ou les modalités présentées ou offertes ; que le message publicitaire doit se suffire à lui-même à l'exclusion de toute référence à un document extérieur qui préciserait son objet ; que le fait que le règlement de la loterie ait été plus ou moins clairement affiché à proximité des urnes est indifférent, d'autant que la plupart des clients indiquent n'avoir jamais lu le règlement ; que les bulletins indiquaient " gagnez une salle de bains " ou " gagnez une cuisine " et se trouvaient à disposition du public dans les magasins franchisés à l'enseigne " Z ", " A " ou " B " commercialisant tant des placards et meubles divers que des appareils ménagers et éléments sanitaires ; que le consommateur moyen pouvait légitimement penser que le lot à gagner comprenait une cuisine ou une salle de bains complète d'autant que dans plusieurs magasins (Lens, Mulhouse, Vineuil...) les bulletins comportaient la photographie soit d'une cuisine où apparaissaient un four, une hotte aspirante et un plan de cuisson, soit d'une salle de bains avec miroir et lavabo ; qu'en cas de gain, le client se voyait offrir un maigre mobilier composé de quelques placards sur une largeur de moins de 3 mètres pour la cuisine ne permettant pas de considérer qu'il s'agissait d'une cuisine non équipée ; que le message publicitaire dont s'agit comportait des indications de nature à induire en erreur le client portant sur la nature et la composition du bien offert ;
" et aux motifs adoptés qu'il est établi que dans plusieurs magasins exploités et franchisés sous l'enseigne Z ont été diffusés à l'intention de la clientèle des écrits portant l'inscription " gagnez une salle de bains " ou " gagnez une cuisine " ; que ce document a le caractère d'une publicité ; qu'il vise en effet à attirer les consommateurs ; qu'il est, dès lors, indifférent qu'il ait eu pour objet de susciter la participation à une loterie gratuite et encore qu'il ait été diffusé exclusivement à l'intérieur du magasin ; que le message publicitaire doit se suffire à lui-même à l'exclusion de toute référence à un document extérieur qui définirait plus précisément son objet ; qu'ainsi, en l'espèce, les documents doivent être analysés abstraction faite du règlement affiché par les magasins ; que l'expression " gagnez une salle de bains " ou " gagnez une cuisine " est de nature à induire en erreur ; qu'en effet, le consommateur peut légitimement se convaincre qu'il peut se voir attribuer tout le mobilier de l'équipement sanitaire ou électroménager dans la mesure où ils constituent des éléments nécessaires et indissociables ; que cette conviction sera d'autant plus forte que dans certains magasins, à Lens, à Mulhouse, à Vineuil, le bulletin reproduit une photographie, que sur la photographie de la cuisine apparaissent un four et une hotte aspirante et que sur la photographie de la salle de bains un miroir, une rampe lumineuse, un lavabo ; qu'en cas de gain, seul le mobilier était offert à l'exception de l'électroménager et des éléments sanitaires ; que, dès lors, la publicité comporte des indications ou présentations de nature à induire en erreur portant sur la nature et la composition du bien offert ; que l'infraction est ainsi constituée en ses éléments matériels ;
" alors, d'une part, que le demandeur était prévenu d'avoir " effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur grâce au matériel élaboré pour une loterie annonçant l'attribution d'une cuisine ou d'une salle de bains alors qu'il ne s'agissait que des meubles à l'exclusion de tout électroménager, de robinetterie et d'évier, lavabo, baignoire ou douche, constituant le délit de publicité mensongère ", le demandeur faisant valoir que la citation ne visait pas le bulletin de participation au jeu mais le matériel élaboré pour une loterie, c'est-à-dire l'ensemble des informations sur les lots à gagner et non pas seulement le bulletin de participation, mais également le règlement (page 13 et 14), ledit matériel étant composé du règlement, d'une publicité sur les lieux de vente constituée par l'affichage du règlement et par l'annonce du jeu, d'une urne sur les parois de laquelle figurait l'annonce du gain d'une cuisine ou d'une salle de bains décrites précisément et permettant d'introduire dans celle-ci le bulletin de participation, l'ensemble de ce matériel élaboré pour une loterie constituant un tout indivisible (page 14) ; qu'en affirmant que les prospectus ou bons de participation présentaient un message publicitaire, que le message doit se suffire à lui-même à l'exclusion de toute référence à un document extérieur qui préciserait son objet, que le fait que le règlement de la loterie ait été "plus ou moins clairement" affiché à proximité des urnes est indifférent, que les bulletins indiquaient "gagnez une cuisine" ou "gagnez une salle de bains" et se trouvaient à disposition du public dans les magasins franchisés, pour en déduire que ce message publicitaire comportait des indications de nature à induire en erreur sur la composition et la nature du bien offert, sans s'expliquer sur la prévention reprochant au demandeur d'avoir effectué une publicité trompeuse " grâce au matériel élaboré pour une loterie ", ce qui en démontrait le caractère indivisible, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors, d'autre part, qu'une publicité doit se suffire à elle-même et être exempte d'ambiguïté nécessitant pour sa compréhension le recours à des éléments extérieurs ; qu'il résulte du dossier et notamment des procès-verbaux qu'aucune publicité n'a été faite à l'extérieur des magasins, le demandeur faisant valoir l'unité de temps et de lieu pour la prise de connaissance de l'ensemble du matériel publicitaire, le bulletin de participation ne pouvant être considéré comme constitutif en soi d'une publicité dès lors qu'il formait un tout indivisible, comme retenu dans la citation, avec le matériel élaboré pour la loterie, dont il n'était que l'un des éléments ; qu'en décidant que les bulletins de participation présentaient un message publicitaire, que le fait que le règlement de la loterie ait été " plus ou moins clairement affiché " à proximité des urnes est indifférent d'autant que la plupart des clients indiquent n'avoir jamais lu ce règlement, que les bulletins indiquaient " gagnez une cuisine " ou " gagnez une salle de bains ", et se trouvaient à disposition du public dans les magasins, pour en déduire que le message publicitaire comportait des indications de nature à induire en erreur le consommateur, sans préciser dans ces circonstances ce qui justifiait, contrairement à la citation, que les bulletins de participation soient retenu indépendamment de l'ensemble du matériel publicitaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors, de troisième part, que le bulletin de participation au jeu était présenté sur le même emplacement que le règlement du jeu décrivant les lots à gagner, le consommateur étant dès lors à même de prendre connaissance exacte de ce qui constituait l'objet à gagner qui était précisément décrit sur les parois de l'urne et dans le règlement affiché au-dessus de l'urne ; qu'en retenant que le consommateur pouvait légitimement penser que le lot à gagner comprenait une cuisine ou une salle de bains complète, que la plupart des clients indiquent n'avoir jamais lu ledit règlement, cependant qu'un tel élément était inopérant et ne permettait pas de justifier que seul le bulletin de participation soit pris en considération pour apprécier l'existence d'une publicité trompeuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors, enfin, que, dès lors qu'il était constaté qu'aucune publicité n'était faite à l'extérieur des magasins, que les bulletins de participation étaient à disposition du public dans les magasins, les procès-verbaux établissant que le règlement, le descriptif et le prix à gagner étaient affichés au-dessus de l'urne, l'objet du gain étant décrit sur les parois de l'urne, ce qui avait justifié la prévention de publicité trompeuse " grâce au matériel élaboré pour une loterie ", la cour d'appel ne pouvait retenir que le message publicitaire doit se suffire à lui-même à l'exclusion de toute référence à un document extérieur qui préciserait son objet, en excluant les autres éléments permettant au consommateur, dans le même temps et sur le même lieu, d'avoir une connaissance exacte de ce qui faisait l'objet du jeu et partant, a violé les textes susvisés " ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Franck X, pris de la violation des articles L. 121-1 et suivants, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6 et L. 213-1 et suivants du Code de la consommation, 121-2, 121-3 du Code pénal, 485 et 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que, confirmant, le jugement, l'arrêt attaqué a dit le demandeur coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, et, en répression, l'a condamné à 100 000 F d'amende, à supporter solidairement avec Dominique Y, les frais de publication du jugement dans les journaux " 60 Millions de Consommateurs " et " Ouest France " toutes éditions ;
" aux motifs que la société " Z " dont les responsables étaient Dominique Y de 1995 au 31 octobre 1997 et Franck X après le 31 octobre 1997, a chargé une agence de publicité de créer et confectionner ce message publicitaire ; que Franck X, secrétaire général, participait déjà activement à cette activité en 1995 et 1996 ; qu'après conception et élaboration, l'opération était soumise pour approbation avant diffusion vers les magasins franchisés ; que ceux-ci, contractuellement, ne pouvaient refuser de participer à cette opération, ainsi les décideurs et les dirigeants successifs de la société " Z " sont co-auteurs de cette publicité au même titre que les annonceurs apparents ; qu'en l'espèce, les dirigeants dont s'agit ont recherché sciemment les limites de ce qui leur paraissait raisonnable et ont joué avec l'aide d'un conseil sur l'ambiguïté des possibilités légales et jurisprudentielles ; que, même si l'élément moral du délit ici poursuivi peut être caractérisé par une simple faute d'imprudence ou de négligence par absence de vérification de la sincérité du message, le cas de l'espèce démontre une intention caractérisée de frauder aux intérêts d'une clientèle vulnérable ;
" et aux motifs adoptés que le jeu a été décidé et organisé par le franchiseur, la société " Z " ; que tous les documents nécessaires ont été préparés et conçus par une agence publicitaire à la demande de la société " Z ", les franchisés exploitant les magasins où étaient effectués la publicité agissant selon ses directives ; que l'organisation de ce jeu rentrait dans les attributions contractuelles du franchiseur que la société " Z " avait pour président-directeur général en 1995, 1996 et jusqu'au 31 octobre 1997 Dominique Y ; qu'il était ainsi le représentant légal de l'annonceur et qu'il lui appartenait de veiller à la régularité de la publicité ; que, faute de l'avoir fait, il s'est rendu coupable de l'infraction reprochée ; qu'au cours de la même période, Franck X, secrétaire général, était chargé de la communication ; qu'il a participé à la conception et à l'élaboration du jeu qui lui a été soumis par l'agence avant sa diffusion ; qu'il s'est ainsi rendu coupable de l'infraction reprochée ; que, postérieurement au 31 octobre 1997, il était le président-directeur général ; que des actes de publicité se sont déroulés au cours de cette période et qu'il lui incombait de veiller à la régularité de la publicité ; qu'il a manqué à cette obligation de sorte qu'il a commis le délit reproché à titre d'auteur ;
" alors, d'une part, que seul le franchisé, utilisant personnellement et pour son propre compte des documents publicitaires retenus comme constituant une publicité mensongère, a la qualité d'annonceur, peu important qu'il soit tenu contractuellement de participer à l'opération publicitaire décidée par le franchiseur ; qu'en relevant qu'après conception et élaboration, l'opération était soumise pour approbation au franchiseur avant diffusion vers les magasins franchisés qui ne pouvaient contractuellement refuser de participer à l'opération, pour en déduire que les décideurs et dirigeants successifs de la société franchiseur sont co-auteurs de cette publicité au même titre que les annonceurs apparents, après avoir cependant constaté que les bulletins de participation étaient distribués en magasin par les franchisés, au bénéfice desquels ils étaient établis, certains ayant d'ailleurs ajouté une photographie de cuisine ou de salle de bains, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;
" alors, d'autre part, que le franchiseur ne saurait avoir la qualité d'auteur principal ou de co-auteur lorsque les documents publicitaires ont été payés et utilisés par les franchisés personnellement et pour leur propre compte, le franchiseur ne pouvant être qualifié le cas échéant que de complice par instruction ou fourniture de moyens lorsqu'il est établi qu'il avait connaissance ab initio de l'utilisation des documents fournis à des fins de publicité mensongère ; qu'ayant constaté que la publicité litigieuse était faite en magasin par les franchisés, que dans certains magasins les bulletins comportaient la photographie d'une cuisine comprenant four, hotte aspirante, plan de cuisson ou d'une salle de bains avec miroir et lavabo, que le franchiseur a chargé une agence de publicité de créer et confectionner le message publicitaire, qu'après conception et élaboration l'opération lui était soumise pour approbation avant diffusion vers les magasins franchisés, lesquels contractuellement ne pouvaient refuser de participer à l'opération, pour en déduire que les décideurs et dirigeants successifs de la société franchiseur sont co-auteurs de cette publicité au même titre que les annonceurs apparents sans relever aucun élément permettant une telle qualification, qui ne s'évince d'ailleurs pas de ses propres constatations permettant seulement de constater que le franchisé était le seul annonceur à l'exclusion du franchiseur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors, de troisième part, que le franchiseur pouvait d'autant moins être l'auteur ou le co-auteur de la publicité litigieuse qu'il résulte tant du dossier, notamment des procès-verbaux établis par la DDCCRF, que les décisions des juges du fond qu'il s'agissait d'une opération nationale conçue et élaborée par une agence de publicité, le règlement étant national et donc identique pour tous les franchisés ; qu'il ressort en effet du dossier et des décisions tant du tribunal que de la cour d'appel que certains franchisés avaient diffusé des bulletins différents comportant la photographie de cuisine comprenant four, hotte aspirante, plan de cuisson ou de salle de bains avec miroir et lavabo, et que la valeur des lots "s'étageaient suivant les magasins entre 3 000 F et 16 000 F avec des modalités d'application différentes" (arrêt p. 6 et 9), tous éléments démontrant que seuls les franchisés avaient la qualité d'annonceur dès lors que les règles fixées nationalement n'étaient pas uniformément appliquées conformément au règlement national ; que, de ce chef encore, l'arrêt n'est pas légalement justifié en ce qu'il retient que la société franchiseur et donc le demandeur avaient la qualité d'annonceur sans s'expliquer sur ces éléments démontrant que seuls les franchisés avaient la qualité d'annonceurs et d'auteurs à l'exclusion du demandeur ;
" alors, enfin que, le demandeur était prévenu d'avoir, courant 1995, 1996 et 1997, effectué, une publicité comportant des allégations, indications et présentation fausses ou de nature à induire en erreur grâce au matériel élaboré pour une loterie ; que le demandeur faisait valoir n'être devenu président de la société " Z " que le 1er novembre 1997, le dirigeant étant pour la période de 1995 au 31 octobre 1997 Dominique Y ; qu'en retenant la responsabilité du demandeur tout en relevant qu'il était devenu le dirigeant de la société après le 31 octobre 1997 sans préciser à quelle date les faits litigieux s'étaient réalisés, s'agissant de campagnes annuelles décidées avant le début de l'année, la campagne 1997 ayant été décidée avant la fin de l'année 1996, les juges du fond qui n'ont pas constaté que le demandeur avait reçu délégation du dirigeant social lorsqu'il était seulement secrétaire général n'ont pas mis la Cour de cassation à même d'exercer son contrôle et, partant, ont violé les textes susvisés " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Franck X, pris de la violation des articles L. 121-1 et suivants, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6 et L. 213-1 et suivants du Code de la consommation, 121-2, 121-3 du Code pénal, 485 et 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que, confirmant le jugement, l'arrêt attaqué a dit le demandeur coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, et, en répression, l'a condamné à 100 000 F d'amende, à supporter solidairement avec Dominique Y, les frais de publication du jugement dans les journaux " 60 Millions de Consommateurs " et " Ouest France " toutes éditions ;
" aux motifs que l'opération dont s'agit avait, selon les déclarations même des intéressés un caractère incitatif et permettait de constituer des fichiers de clientèle ; que les prospectus ou bons de participation présentaient un message publicitaire visant à attirer les consommateurs quels que soient les consommateurs ou les modalités présentées ou offertes ; que le message publicitaire doit se suffire à lui-même à l'exclusion de toute référence à un document extérieur qui préciserait son objet ; que le fait que le règlement de la loterie ait été plus ou moins clairement affiché à proximité des urnes est indifférent d'autant que la plupart des clients indiquent n'avoir jamais lu le règlement ; que les bulletins indiquaient " gagnez une salle de bains " ou " gagnez une cuisine " et se trouvaient à disposition du public dans les magasins franchisés à l'enseigne "Z" : "A" ou "B" commercialisant tant des placards et meubles divers que des appareils ménagers et éléments sanitaires ; que le consommateur moyen pouvait légitimement penser que le lot à gagner comprenait une cuisine ou une salle de bains complète d'autant que dans plusieurs magasins (Lens, Mulhouse, Vineuil...) les bulletins comportaient la photographie soit d'une cuisine où apparaissaient un four, une hotte aspirante et un plan de cuisson, soit d'une salle de bains avec miroir et lavabo ; qu'en cas de gain, le client se voyait offrir un maigre mobilier composé de quelques placards sur une largeur de moins de 3 mètres pour la cuisine ne permettant pas de considérer qu'il s'agissait d'une cuisine non équipée ; que le message publicitaire dont s'agit comportait des indications de nature à induire en erreur le client portant sur la nature et la composition du bien offert ;
" et aux motifs adoptés qu'il est établi que dans plusieurs magasins exploités et franchisés sous l'enseigne Z ont été diffusés à l'intention de la clientèle des écrits portant l'inscription " gagnez une salle de bains " ou " gagnez une cuisine " ; que ce document a le caractère d'une publicité ; qu'il vise en effet à attirer les consommateurs ; qu'il est, dès lors, indifférent qu'il ait eu pour objet de susciter la participation à une loterie gratuite et encore qu'il ait été diffusé exclusivement à l'intérieur du magasin ; que le message publicitaire doit se suffire à lui-même à l'exclusion de toute référence à un document extérieur qui définirait plus précisément son objet ; qu'ainsi, en l'espèce, les documents doivent être analysés abstraction faite du règlement affiché par les magasins ; que l'expression " gagnez une salle de bains " ou " gagnez une cuisine " est de nature à induire en erreur ; qu'en effet, le consommateur peut légitimement se convaincre qu'il peut se voir attribuer tout le mobilier de l'équipement sanitaire ou électroménager, dans la mesure où ils constituent des éléments nécessaires et indissociables ; que cette conviction sera d'autant plus forte que dans certains magasins, à Lens, à Mulhouse, à Vineuil, le bulletin reproduit une photographie, que sur la photographie de la cuisine apparaissent un four et une hotte aspirante et que sur la photographie de la salle de bains un miroir, une rampe lumineuse, un lavabo ; qu'en cas de gain, seul le mobilier était offert à l'exception de l'électroménager et des éléments sanitaires ; que, dès lors, la publicité comporte des indications ou présentations de nature à induire en erreur portant sur la nature et la composition du bien offert ; que l'infraction est ainsi constituée en ses éléments matériels ;
" alors, d'une part, que les juges du fond doivent caractériser une faute de négligence ou d'imprudence conformément à l'article 121-3 du Code pénal et à l'article 339 de la loi du 16 décembre 1992 ; que le demandeur précisait qu'en sa qualité de secrétaire général, il avait eu recours aux services d'une agence de publicité, professionnelle, laquelle était assistée d'un conseil juridique qui a rédigé le règlement du jeu et vérifié la légalité des affichettes annonçant le jeu, l'agence ayant établi les bulletins de participation ; qu'en ne recherchant pas si ces circonstances n'étaient pas de nature à caractériser les diligences du demandeur en vue de vérifier et de s'assurer de la licéité de l'opération et partant qu'aucune faute de négligence ou d'imprudence ne pouvait lui être reproché, en l'état de ses diligences, la cour d'appel qui retient une absence de vérification de la sincérité du message, a violé les textes susvisés ;
" alors, d'autre part, qu'en affirmant que les dirigeants ont recherché sciemment les limites de ce qui leur paraissait possible et ont joué avec l'aide d'un conseil sur l'ambiguïté des possibilités légales sans préciser ce qui justifiait une telle affirmation péremptoire, aucun élément n'établissant une recherche délibérée des limites de ce qui était possible ni que les dirigeants aient été assisté d'un conseil, ce dernier ayant assisté l'agence de publicité V, personne morale indépendante, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" qu'en outre, à supposer que le conseil ait été celui des " dirigeants " et " décideurs ", il appartenait à la cour d'appel de préciser en quoi l'intervention de ce dernier n'était pas de nature à exonérer le demandeur de toute négligence ou imprudence, la cour d'appel ne précisant d'ailleurs nullement d'où il ressortait que ce professionnel du droit, dont le dossier révèle qu'il conseillait l'agence de publicité, aurait donné au franchiseur et donc au demandeur des informations permettant de " jouer " " sur l'ambiguïté des possibilités légales et jurisprudentielles " ;
" alors, enfin, qu'en retenant, d'une part, que le cas de l'espèce démontre une intention caractérisée de frauder aux intérêts d'une clientèle vulnérable, que les dirigeants ont recherché sciemment les limites de ce qui leur paraissait possible et ont joué avec l'aide d'un conseil sur l'ambiguïté des possibilités légales et jurisprudentielles, et en constatant, d'autre part, que les franchisés n'appliquaient pas tous les règles fixées au niveau national tant relativement au gain offert que relativement au bulletin de participation, certains l'accompagnant de photographies, la cour d'appel s'est prononcée par motifs contradictoires " ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour Dominique Y, pris de la violation des articles 121-3, alinéa 2, et 121-7 du Code pénal, L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Dominique Y coupable de publicité mensongère ;
" aux motifs que "le message publicitaire doit se suffire à lui-même à l'exclusion d'un document extérieur qui préciserait son objet " ; que le fait que le règlement de la loterie ait été plus ou moins clairement affiché à proximité des urnes est indifférent, d'autant que la plupart des clients indiquent n'avoir jamais lu ledit règlement ; que les bulletins indiquaient " gagnez une salle de bains " ou " gagnez une cuisine " et se trouvaient à disposition du public dans les magasins franchisés à l'enseigne "A" ; "A" ou "B" commercialisant tant des placards et des meubles divers que des appareils ménagers et éléments sanitaires ; que le consommateur moyen pouvait légitimement penser que le lot à gagner comprenait une cuisine ou une salle de bains complète, d'autant que dans plusieurs magasins (Lens, Mulhouse, Vineuil...) les bulletins comportaient la photographie soit d'une cuisine où apparaissaient un four, une hotte aspirante et un plan de cuisson, soit d'une salle de bains avec miroir et lavabo ; que en cas de gain, le client se voyait offrir un maigre mobilier composé de quelques placards sur une largeur de moins de 3 mètres pour la cuisine, ne permettant même pas de considérer qu'il s'agissait d'une cuisine non équipée ; que le message publicitaire dont s'agit comportait des indications de nature à induire en erreur le client et portant sur la nature et la composition du bien offert ; que la société Z dont les responsables étaient Dominique Y, de 1995 au 31 octobre 1997 et Franck X après le 31 octobre 1997, a chargé une agence de publicité de créer et confectionner ce message publicitaire ; que Franck X, secrétaire général, participait déjà activement à cette activité en 1995 et 1996 ; que après conception et élaboration, l'opération était soumise pour approbation avant diffusion vers les magasins franchisés ; que ceux-ci, contractuellement, ne pouvaient refuser de participer à ladite opération, que les décideurs et les dirigeants successifs de la société " Z " sont co-auteurs de cette publicité au même titre que les annonceurs apparents ; que en l'espèce, les dirigeants dont s'agit ont recherché sciemment les limites de ce qui leur paraissait possible et ont joué avec l'aide d'un conseil sur l'ambiguïté des possibilités légales et jurisprudentielles ; que même si l'élément moral du délit ici poursuivi peut être caractérisé par une simple faute d'imprudence et de négligence par absence de vérification de la sincérité du message, le cas de l'espèce démontre une intention caractérisée de frauder aux intérêts d'une clientèle vulnérable " ;
" alors, d'une part, que le délit de publicité trompeuse implique une information de nature à induire en erreur qui doit être appréciée au regard d'un consommateur normalement vigilant ; que, contrairement à ce qu'affirme la cour d'appel, le caractère mensonger de l'information fournie au consommateur sur un bien ou un service doit s'apprécier par rapport à l'ensemble des documents portant sur ce bien ou ce service, dès lors que le consommateur est appelé à en prendre connaissance simultanément ; qu'en effet, seules les informations complémentaires ultérieures ou les rectificatifs ne sont jamais exclusifs de publicité mensongère, en ce qu'ils interviennent après que le consommateur ait pu être trompé ; que, par conséquent, la cour d'appel qui considère que le règlement du jeu qui précisait la nature des lots à gagner était un document extérieur à la publicité, qui ne pouvait pas être pris en considération pour en apprécier le caractère trompeur, alors qu'elle avait constaté que les bulletins de participation à la loterie n'étaient remis que dans les magasins franchisés de la société " Z " et qu'ils renvoyaient au règlement de la loterie affiché dans ces magasins et situé à proximité de ces bulletins, a violé l'article précité ;
" et alors, d'autre part, que l'annonceur est la personne pour le compte de laquelle la publicité mensongère est diffusée et non celle qui la conçoit ou qui participe à sa conception ; que, pour considérer que Dominique Y avait la qualité d'annonceur, la cour d'appel constate que la société "Z", dont il était le président-directeur général, s'était chargée de la conception de la publicité et que les franchisés étaient contractuellement tenus de participer à l'organisation du jeu ; que, cependant, les éléments d'information sur la loterie ayant été conçus pour le compte des franchisés qui organisaient le jeu, Dominique Y n'était éventuellement tenu d'en répondre qu'en qualité de complice, soit en raison de ses propres actes et non en sa qualité de président-directeur général de l'annonceur ; que, par conséquent, en condamnant Dominique Y en qualité de co-auteur de l'infraction, soit en sa qualité de dirigeant de la société " Z ", la cour d'appel, qui n'a pas constaté d'actes de complicité commis par celui-ci, a tout à la fois, violé l'article L. 121-5 du Code de la consommation et privé sa décision de base légale au regard de l'article 121-7 du Code pénal ;
" alors, enfin, qu'en tout état de cause, la faute constitutive de publicité mensongère ne peut être retenue à l'encontre de son auteur que s'il est établi qu'il n'a pas accompli les diligences normales compte tenu le cas échéant de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que des moyens dont il disposait en application de l'article 121-3 du Code pénal ; que la cour d'appel qui refuse de prendre en compte, pour apprécier la faute à l'origine du lancement de la loterie, le fait que lors de la conception de la publicité, sa licéité avait été soumise à l'avis d'un conseil, viole nécessairement l'article 121-3 du Code pénal par refus d'application " ;
Les moyens étant réunis : - Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les magasins affiliés au réseau de franchise de la société " Z " ont mis à la disposition de leurs clients des bons les invitant à participer à un jeu national pour " gagner une salle de bain ou une cuisine par mois " ; que les bons précisaient que le jeu était gratuit et sans obligation d'achat et que son règlement pouvait être consulté au magasin ; que les personnes tirées au sort apprenaient que le bien offert était constitué de meubles de cuisine ou de salle de bain dont la valeur variait de 3 000 à 16 000 F selon les magasins, et que celui-ci leur était acquis pour 1 F à condition d'acheter l'équipement sanitaire ou électroménager complet ; que le règlement affiché dans le magasin disposait que seuls les meubles étaient offerts ;
Attendu que Dominique Y, dirigeant de la société " Z " jusqu'au 31 octobre 1997, et Franck X, secrétaire général en charge de la communication de la société dont il est devenu dirigeant après le départ de Dominique Y, ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour publicité de nature à induire en erreur ;
Attendu que, pour caractériser l'élément matériel du délit poursuivi, les juges d'appel relèvent que les prospectus et les bons de participation présentent un message publicitaire, qui, par son contenu, les photographies qui l'accompagnent, sa mise à la disposition du public dans des magasins commercialisant des meubles, des appareils ménagers et des éléments sanitaires, est de nature à induire le consommateur en erreur sur la nature et la composition du bien offert ;qu'ils ajoutent que la maigreur du mobilier offert ne permet pas même de considérer le bien offert comme une cuisine ou une salle de bain non équipée ;que les juges précisent que le message publicitaire se suffit à lui même, indépendamment de l'affichage du règlement ;
Attendu, par ailleurs, que, pour déclarer les prévenus coupables de publicité de nature à induire en erreur, les juges relèvent qu'ils ont participé à la conception et à l'élaboration de la publicité, qu'ils l'ont approuvée et l'ont diffusée aux magasins, qui ne pouvaient refuser de participer à l'opération, laquelle s'est poursuivie postérieurement au 31 octobre 1997 ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine, d'où il résulte que les prévenus ont sciemment accompli les actes matériels constitutifs de l'infraction, la cour d'appel, qui n'avait pas à s'expliquer mieux qu'elle ne l'a fait sur l'élément moral de l'infraction, a justifié sa décision ;d'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme :
Rejette les pourvois.