Cass. crim., 29 octobre 2002, n° 02-80.199
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
Mme Gailly
Avocats :
SCP Parmentier, Didier.
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par X Pierre, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 20 novembre 2001, qui, pour tromperie et publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 50 000 F d'amende ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 213-1 du Code de la consommation, 111-2, 111-3, 111-4, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Pierre X coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur sur l'origine de la marchandise et de tromperie sur l'origine et, en répression, l'a condamné à la peine de 50 000 F d'amende ;
" aux motifs que le fait de commercialiser des produits élaborés à base de foie gras et découpes de volailles sous des marques et étiquettes faisant explicitement référence à une origine " périgourdine ", à savoir " Z ", " W ", alors qu'une partie de l'approvisionnement de l'entreprise provient d'autres régions de France voire de Bulgarie ou de Hongrie sans qu'aucun dispositif de traçabilité n'ait été mis en place pour garantir l'origine exclusivement périgourdine des produits vendus sous cette dénomination, caractérise tant l'infraction de publicité mensongère que celle de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, dès lors qu'il est aussi sciemment fait obstacle à toute vérification sur la réalité des indications contenues dans la publicité quant à l'origine des produits, laquelle constitue par ailleurs la cause déterminante des transactions portant sur les marchandises ; qu'ainsi, il sied de réformer la décision, de déclarer Pierre X coupable des infractions visées à la prévention, de le condamner à la peine de 50 000 F d'amende et d'ordonner le relèvement de la publication en application de l'article 132-21 du Code pénal ;
1°) alors, d'une part, qu'il ressort d'un certain nombre de pièces versées au débat par Pierre X qu'un contrôle de traçabilité HACCP complet est exercé par la SARL " Y " pour garantir l'origine et la qualité de ses produits ; que, dès lors, en ne s'expliquant pas sur ces éléments du dossier et en entrant néanmoins en voie de condamnation des chefs de publicité mensongère et de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, motif pris qu'aucun dispositif de traçabilité n'aurait été mis en place pour garantir l'origine exclusivement périgourdine des produits vendus sous cette dénomination, la cour d'appel a entaché sa décision attaquée d'une insuffisance de motivation ;
2°) alors, d'autre part, que la loi pénale, d'interprétation stricte, ne sanctionne que la violation d'obligations légales ou réglementaires précises, la simple abstention n'étant pénalement punissable que dans les hypothèses expressément prévues par le législateur ; que, dès lors, en sanctionnant Pierre X eu égard à la seule absence de dispositif de traçabilité des produits commercialisés sous les marques " W " et " Z ", sans autrement préciser l'origine de cette obligation, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;
3°) alors, en outre, que s'il est constant que les juges statuent d'après leur intime conviction, ils ne peuvent, toutefois, à peine de nullité de leur décision, entrer en voie de condamnation sans avoir constaté l'existence de tous les éléments constitutifs de l'infraction ; que, pour retenir la culpabilité de Pierre X des chefs de publicité mensongère et de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, la cour d'appel s'est bornée à relever l'absence de dispositif de traçabilité des produits commercialisés sous les marques " W " et " Z " ; que, cependant, aucun motif de l'arrêt ne vient constater de manière certaine que la matière première utilisée pour ces conserves n'était pas d'origine exclusivement périgourdine ; qu'ainsi, en s'abstenant de caractériser le caractère mensonger de l'origine des produits telle que précisée sur les marques et étiquettes litigieuses, élément constitutif des infractions dont elle a néanmoins déclaré Pierre X coupable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
4°) alors, encore, que pour retenir la culpabilité de Pierre X des chefs de publicité mensongère et de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, la cour d'appel énonce qu'aucun dispositif de traçabilité n'a été mis en place par la SARL " Y " pour garantir l'origine exclusivement périgourdine des produits vendus sous cette dénomination ; que ce motif d'ordre général et hypothétique est manifestement insuffisant pour établir que les produits litigieux ne seraient pas effectivement d'origine exclusivement périgourdine ; que, dès lors, l'arrêt attaqué est entaché d'un nouveau défaut de base légale ;
5°) alors, enfin, que la mauvaise foi requise par l'article L. 213-1 du Code de la consommation ne saurait être assimilée ni à la négligence ni au défaut de contrôle ; que, dans ces conditions, la cour d'appel ne pouvait, sous peine d'entacher sa décision d'un nouveau défaut de base légale, se borner à énoncer qu'en s'abstenant de mettre en place un dispositif de traçabilité au sein de son entreprise, Pierre X aurait sciemment fait obstacle à toute vérification sur la réalité des indications contenues dans la publicité quant à l'origine des produits, ce défaut de contrôle ne caractérisant, en effet, nullement la mauvaise foi au sens de l'article susvisé " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;d'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme :
Rejette le pourvoi.