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Décisions

CA Montpellier, 2e ch. A, 22 octobre 2002, n° 01-00923

MONTPELLIER

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Société Innovation et Développement Technologique (SARL)

Défendeur :

Tanita France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roche

Conseillers :

MM. Derdeyn, Grison

Avoués :

SCP Jougla-Jougla, Auche-Hedou

Avocats :

Mes Del Poso, Barreau

TGI Perpignan, du 12 févr. 2001

12 février 2001

Innovation et Développement Technologique - IDT France (SARL)

La SARL Société Innovation et Développement Technologique (IDT) France a régulièrement interjeté appel d'un jugement du Tribunal de grande instance de Perpignan en date du 12 février 2001 aux termes duquel :

- il a été constaté que la SA Tanita France est titulaire des marques Tanita et TBF sur les balances impédancemètres lorsqu'elle les commercialise sans logiciel d'exploitation et sans les notices conçues par IDT France ; qu'il n'était pas démontré que Tanita commercialisait des balances avec lesdits logiciels et notices,

- IDT a été déboutée de son action en concurrence déloyale,

- IDT a été condamnée à publier sur son site Internet le dispositif du jugement pendant une durée de 15 jours dans le délai de 10 jours de la signification sous astreinte de 2 000 F par jour de retard et à adresser copie du jugement à différents interlocuteurs de Tanita France.

Vu les conclusions récapitulatives déposées au greffe de la mise en état le 22 avril 2002 par l'intimée et le 12 août 2002 par l'appelante.

SUR QUOI :

De l'exclusivité :

Au soutien de son appel la société IDT argumente qu'elle aurait été l'agent exclusif de commercialisation de Tanita UK (société mère implantée au Japon).

A cet égard elle rappelle le libellé de deux fax en date du 2 septembre 1997 et 13 octobre 1997 signés par le dirigeant de Tanita UK, libellés en langue anglaise courante et parfaitement compréhensibles, d'ailleurs non contestés quant à leur traduction aux termes desquels il est indiqué " nous avons un agent en France dénommé IDT France " ou " nous avons un agent exclusif dénommé IDT France ".

Que de plus fort IDT France s'empare des termes identiques de correspondances adressées par Tanita à une société CAPI et à un sieur Maruel.

Mais attendu que le terme " exclusive " en anglais se traduit en français par les termes unique - ou un seul.

Qu'il s'ensuit, point qui correspond d'ailleurs à la chronologie de la relation Tanita UK - IDT pour la période 1994 à 1997, la première nommée n'ayant eu alors comme distributeur que la seule société IDT.

Qu'il ne s'ensuit pas pour autant qu'IDT établisse, faute de production de pièce à cet égard, production dont elle est en charge, l'existence d'un contrat synallagmatique la liant à Tanita UK, laquelle lui aurait accordé l'exclusivité qui ne saurait se présumer.

Qu'au reste il est établi au regard des pièces contradictoirement versées aux débats que Tanita UK, en réponse à la demande d'IDT, s'est refusée en janvier 1998, tout comme cela avait été le cas le 24 avril 1997, à lui accorder ou lui concéder l'exclusivité de la distribution de l'appareillage en la cause.

Au reste pour qu'il y ait exclusivité que les matériels distribués d'une part par IDT d'autre part par Tanita France soient identiques ; qu'à l'examen des pièces produites tel n'est pas le cas comme justement relevé par les premiers juges.

De la concurrence déloyale :

La société IDT soutient :

- qu'elle a implanté sur le territoire national l'intégralité de la gamme des balances Tanita,

- que Tanita France a bénéficié de ce travail pour ensuite commercialiser le même produit qu'IDT en utilisant le mode d'emploi conçu par cette dernière,

- que Tanita France pratiquerait le Dumping à son égard et exploiterait à son profit les améliorations apportées au produit par IDT,

- qu'elle aurait trompé la clientèle en affirmant que la balance 531 remplaçait, courant 1998, la 511 commercialisée par IDT,

- qu'ainsi il y aurait eu détournement de clientèle du fait de Tanita France au préjudice d'IDT, et que donc sur un plan plus général Tanita France aurait eu à l'égard d'IDT France un comportement parasitaire générateur d'un préjudice pour cette dernière.

Mais attendu qu'en l'absence d'un contrat d'exclusivité concédé par Tanita UK au profit d'IDT, rien n'interdisait à la première nommée de distribuer par l'intermédiaire de sa filiale Tanita France des produits indubitablement différents ou même identiques,alors même que par ailleurs il est constant qu'au cours des années de collaboration d'IDT avec Tanita UK, antérieurement à la création et l'installation de Tanita France, Tanita UK a incontestablement bénéficié des améliorations apportées au produit par des ingénieurs d'IDT, améliorations qui n'ont pas procédé d'un quelconque parasitisme, mais ont été la résultante de relations commerciales réciproques.

Attendu par ailleurs que les autres moyens de fait allégués par IDT, tels que précités, procèdent de la simple affirmation et qu'enfin il n'est pas démontré que les clientèles de Tanita et IDT soient absolument identiques ; qu'il est établi que ces deux sociétés ont un temps entendu collaborer et ainsi couvrir la clientèle la plus large dans toutes ses spécificités, hôpitaux, club de fitness, centre d'amaigrissement, clubs sportifs, particuliers.

Attendu qu'il s'ensuit dès lors que les premiers juges se sont prononcés par des justes et pertinents motifs tenus puis repris dans le présent arrêt notamment pour ceux mentionnés pages 11 et 12 du jugement quant au rejet de la pratique de dumping par Tanita, à la protection de la marque déposée par Tanita, et le caractère distinct des produits respectivement distribués par IDT et Tanita.

Il s'ensuit donc que sur les deux premiers points invoqués par IDT cette société succombe en son appel du jugement entrepris étant en voie de confirmation; qu'il en est de même quant à la concurrence déloyale imputée à IDT dans la mesure même où celle-ci ne justifiant pas d'un contrat d'exclusivité pouvait dès lors publier sur son site Internet une information contraire à une clientèle potentielle, et affirmer contre toute exactitude qu'elle était seule titulaire des marques Tanita et TBF.

Attendu sur l'appel incident interjeté par Tanita France que l'économie de l'instance justifie que IDT soit condamnée à faire cesser la parution de la publicité incriminée sur un site Internet à compter du jour de la signification du présent sous astreinte de 800 euros par jour de retard.

Attendu par contre que les autres demandes présentées par Tanita France seront rejetées comme procédant d'un impérialisme commercial qui réduirait à néant l'activité d'IDT dans un cadre concurrentiel les mesures édictées par le tribunal à cet égard étant suffisantes.

Les débours exposés par l'intimée justifient qu'il lui soit alloué, sa demande étant relativisée, 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement ; Dit la SARL Innovation et Développement Technologique (IDT) infondée en son appel ; Dit la SA Tanita France partiellement fondée en son appel incident ; Confirme le jugement entrepris et y ajoutant ; Condamne IDT : 1°) à faire cesser la publication incriminée sur son site Internet sous astreinte de 800 euros par jour de retard passé un délai de 3 jours à compter de la signification du présent ; 2°) à porter et payer à Tanita France 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; 3°) à supporter l'entière charge des dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP d'avoués Auche-Hedou Auche sur ses offres de droit.