CA Paris, 1re ch. H, 14 janvier 2003, n° ECOC0300016X
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Bouygues (SA), Vinci (SA), Sogea (SA), DTP Terrassement (SNC), Chagnaud (SA), Entreprise Bec Frères (SA), Entreprise Deschiron (SNC), Quille (SA), Fougerolle (SA), Demathieu et Bard (SA), Entreprise Jean Spada (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Présidents :
M. Lacabarats, Mme Pezard
Conseillers :
Mmes Penichon, Delmas-Goyon, M. Le Dauphin
Avoués :
SCP Narrat-Peytavi, SCP Duboscq-Pellerin, Me Huyghe, SCP d'Auriac-Guizard, SCP Teytaud
Avocats :
Mes Charpentier, Brunois, Blazy, Flecheux, Damas, Coppinger, Duteil, Gregoire, Maitre-Devallon, Montalescot, Sprung, SCPA Becker- Friot- Jean-Louvel, SCP Rambaud Marte.
Les 23 novembre et 26 juillet 1991, le ministre de l'Economie a saisi le Conseil de la concurrence (ci-après le conseil) de pratiques d'entente constatées à l'occasion de marchés de grands travaux dans le secteur du génie civil.
Il était reproché à cinquante-trois entreprises relevant du secteur du bâtiment et des travaux publics de s'être concertées, préalablement au dépôt de leurs offres, lors des procédures de mise en concurrence initiées pour l'édification de différents ouvrages d'art (ponts de Normandie, Rochefort, Gennevilliers et Plougastel) et pour la construction des lignes du TGV Nord, de son interconnexion ainsi que du TGV Rhône-Alpes.
Par décision n° 95-D-96 du 29 novembre 1995, le conseil a infligé à trente et une entreprises des sanctions pécuniaires d'un montant compris entre 5 200 F et 148 700 000 F. Vingt-quatre des entreprises sanctionnées ont introduit un recours contre cette décision.
Par arrêt du 6 mai 1997, suivi d'un arrêt rectificatif du 27 mai suivant, la Cour d'appel de Paris a notamment :
- maintenu les sanctions prononcées par le conseil pour les sociétés Bouygues, Campenon-Bernard, Fougerolle, Nord-France-Entreprise, Quille, Quillery et Spie-Citra ;
- après avoir annulé les sanctions prononcées par le conseil, condamné les sociétés Entreprise Bec Frères, Entreprise Chagnaud, Chantiers Modernes, Entreprise Industrielle, Guintoli, Sogea, Entreprise Jean Spada et Spie-Batignolles à des sanctions comprises entre 100 000 F et 17 120 000 F et dit n'y avoir lieu à sanction contre la société Auxiliaire d'entreprises (SAE) ;
- réformant pour le surplus la décision attaquée, fixé les sanctions pécuniaires infligées aux sociétés Demathieu et Bard, Deschiron, DTP Terrassement, Gagneraud Père et Fils, Muller TP, Pertuy, Prigent et Valerian à des montants allant de 200 000 F à 750 000 F.
Statuant sur le pourvoi formé par quinze des entreprises sanctionnées, la cour de cassation a, par arrêt du 5 octobre 1999, cassé et annulé cette décision en toutes ses dispositions concernant les entreprises mentionnées dans son dispositif et remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour faire droit, les a renvoyées devant la Cour de Paris autrement composée.
Les sociétés Bouygues, Fougerolle, Sogea, Vinci Construction (anciennement Campenon-Bernard), Entreprise Jean Spada, Bec Frères, Entreprise Deschiron, Muller TP, Eiffage TP (venant aux droits de Quillery), Entreprise Chagnaud, DTP Terrassement et Quille, ont saisi la cour de renvoi entre le 2 juillet 2001 et le 5 octobre 2001 et la société Demathieu et Bard le 11 décembre suivant. Les faits de l'espèce sont les suivants :
A. - Le secteur, les entreprises et les procédures d'appels d'offres concernées
1. Le secteur
En France, le secteur du bâtiment et des travaux publics regroupait, en 1989, 330 000 entreprises, employait 1,7 million de salariés et réalisait des investissements bruts de 28 milliards et une production totale de 650 milliards de francs. Le chiffre d'affaires des seuls travaux publics s'élevait à 134 milliards de francs, dont 15,39 milliards pour les " ouvrages d'art et génie civil ", soit 11,5 % de l'ensemble. En 1990, le chiffre d'affaires des travaux publics s'est élevé à 142 milliards de francs, dont 33 % pour le secteur privé et 67 % pour le secteur public.
2. Les entreprises
Parmi les entreprises concernées, nombre d'entre elles appartiennent à de grands groupes : groupe Bouygues, premier groupe européen en matière de travaux publics (sociétés Bouygues, Quille, DTP terrassement, Pertuy et Norpac) ; groupe Lyonnaise des eaux-Dumez, deuxième groupe national dans le bâtiment et les travaux publics et les services aux collectivités locales (sociétés Dumez, GTM-Entrepose, GTM-BTP, Chantiers modernes, Valérian, Razel frères et Pitance) ; groupe Compagnie générale des eaux (sociétés Campenon-Bernard, Sogea, Sogea Rhône-Alpes, Fougerolle, Fougerolle-Ballot et Deschiron) ; groupe SAE (sociétés SAE, Quillery et Cie et Borie-SAE) ; groupe Schneider (sociétés Spie-Batignolles et Spie-Citra).
3. Les procédures d'appel d'offres
a) Le pont de Normandie
Ce pont constitue le plus grand pont à haubans du monde. Il franchit l'estuaire de la Seine à une quinzaine de kilomètres du pont de Tancarville et relie ainsi la région du Havre à celle de Honfleur, Trouville et Deauville.
Le 22 mars 1988, l'Etat a concédé à la chambre de commerce et d'industrie du Havre la construction, l'exploitation et l'entretien du pont de Normandie. Cette convention, approuvée par décret du 5 mai 1988, a défini notamment, dans le cahier des charges qui y a été annexé, les caractéristiques générales et techniques de l'ouvrage et a prévu une mise en service qui ne pouvait être postérieure au 1er juillet 1993. Son article 6 a précisé expressément que : " Pour l'exécution des travaux, le concessionnaire sera tenu de recourir à la concurrence. Une discrimination entre les entreprises de la Communauté eurospéenne, en raison de la nationalité, lui sera interdite ".
En vue de suivre la réalisation de l'appel d'offres, la chambre de commerce et d'industrie du Havre, maître d'ouvrage, et la direction départementale de l'équipement de la Seine-Maritime, maître d'œuvre, ont constitué la " Mission Pont de Normandie ".
En application des dispositions de l'article 94 bis du Code des marchés publics, il a été procédé, le 30 octobre 1987, à un appel d'offres restreint, accessible aux entreprises établies dans un des pays de la Communauté économique eurospéenne. Le marché a été divisé en un lot principal (béton) et un lot accessoire (métal), la consultation portant à la fois sur l'ensemble des travaux et, simultanément, sur le lot accessoire seul. Outre la définition du lot principal et celle du lot accessoire, ainsi que l'énumération des variantes autorisées ou interdites, l'appel de candidatures précisait, en effet, que le marché serait passé pour la totalité des travaux avec un groupement d'entreprises conjointes et que, dans ce cadre, pourraient être agréées soit les entreprises candidates pour le lot principal en tant qu'" entreprise-pilote ", à condition de présenter en même temps une liste d'entreprises également soumises à agrément avec lesquelles elles envisageaient de cotraiter le lot accessoire, afin de remettre une offre sur la totalité des travaux, soit les entreprises candidates pour le lot accessoire seul, indépendamment d'une candidature éventuelle en groupement.
Le 21 janvier 1988, la commission d'admission des candidatures a agréé pour le lot principal béton les groupements d'entreprises Bouygues (avec Quille, SAE et Quillery), Campenon-Bernard (avec Sogea, Dumez-TP, GTM-BTP et Spie Batignolles), Fougerolle (avec Chantiers modernes, à condition qu'ils s'associent avec L. Ballot, Nord-France Entreprise et SBBM et Six Construct).
Pour le lot accessoire métal, en cotraitance avec l'un ou l'autre des groupements agréés pour le lot principal, ou pour le lot métal seulement, ont été retenues les entreprises CFEM et Baudin-Châteauneuf (groupées), Monberg et Thorsen, DSD et Secometal (groupées) et Cleveland Bridge.
Les dossiers de consultation ont été envoyés à partir du 7 mars 1988 aux entreprises préqualifiées, le délai de réponse étant fixé au 4 juillet 1988. Ce délai a été repoussé au 8 août 1988 à la demande des entreprises.
Le règlement particulier de l'appel d'offres spécifiait que le marché était assujetti aux dispositions du livre II, titre Ier, du Code des marchés publics, relatif à la passation des marchés de l'Etat et de ses établissements publics autres que ceux ayant le caractère industriel et commercial. Il rappelait la décomposition du marché en deux lots et énumérait les variantes autorisées ainsi que les caractéristiques techniques qui devaient être, en tout état de cause, respectées. Il précisait également que le marché devait être conclu avec des entreprises groupées conjointes, chacune d'elles exécutant un lot, le mandataire du groupement assurant la coordination entre les deux lots ; que chaque cotraitant chargé d'un lot serait soit une entreprise seule, soit un groupement d'entreprises solidaires, le mandataire de chaque groupement assurant la coordination du lot concerné ; que, dans l'acte d'engagement, les candidats au lot principal devaient remplir les mentions relatives à ce lot, mais non celles relatives au lot accessoire, tout en étant tenus de joindre à leur offre l'offre d'une ou de plusieurs entreprises spécialisées susceptibles de participer à l'exécution des travaux comme cotraitant(s) pour le lot accessoire, en ayant la possibilité de remettre plusieurs offres différentes avec des cotraitants agréés par le maître d'ouvrage ; que les entreprises de constructions métalliques sélectionnées devaient envoyer directement au maître d'ouvrage leurs offres pour le lot accessoire, les offres ainsi reçues devant être utilisées pour le jugement de la consultation comme celles jointes aux offres portant sur le lot principal ; que, pour la conclusion du marché, le maître d'ouvrage se réservait de choisir les entreprises chargées de l'exécution du lot accessoire soit parmi celles dont une entreprise retenue pour le lot principal avait joint l'offre, soit, mais sous réserve de l'accord de l'entreprise retenue pour le lot principal, parmi toutes les entreprises spécialisées dont il aurait reçu les offres par ailleurs, en cas d'intérêt technique ou financier manifeste.
Lors du dépouillement des offres, la Mission Pont de Normandie n'a pas présenté d'observations particulières au sujet du lot métallique, dont le montant avait été estimé à 350 millions de francs : selon elle, " le niveau des prix, sans être particulièrement serré, tradui(sai)t un minimum de concurrence au sein de la CEE ". S'agissant du lot béton, dont le montant avait été estimé à 450 millions de francs, les trois groupements agréés ont remis les propositions suivantes :
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Au vu des résultats, l'appel d'offres a été déclaré infructueux le 9 septembre 1988 et la Mission Pont de Normandie a mené des négociations avec les groupements Bouygues et Campenon-Bernard tout en réalisant des sondages auprès d'entreprises étrangères pour évaluer l'intérêt d'une nouvelle consultation.
Plusieurs entreprises, appartenant ou non à l'Union eurospéenne, ont manifesté leur intérêt pour le projet. Parmi ces dernières, certaines ont déclaré soit avoir été " barrées " par les " bétonniers " français lors du premier appel d'offres (Cleveland Bridge), soit craindre des représailles éventuelles des ciments Lafarge (entreprises espagnoles : cotes A, 51 à 53). L'idée d'une nouvelle consultation a été abandonnée.
Par la suite, en raison de la situation ainsi créée et après avoir en vain tenté de négocier séparément avec les deux groupements moins disants, la Mission Pont de Normandie a dû accepter, à partir de la mi-octobre 1988, l'idée d'un regroupement (cotes A, 59 et 60). Le marché a été finalement signé avec le GIE Pont de Normandie constitué entre les sociétés françaises membres de ces deux groupements et coadministrés par Bouygues et Campenon-Bernard. Ces deux dernières détenaient chacune 23 % des parts, Sogea 12 %, Quillery 11,6 %, GTM-BTP 10,4 %, Dumez-TP 10 % et Spie-Batignolles 10 %.
b) Le pont de Rochefort
Le 17 février 1988, le département de la Charente-Maritime, par l'intermédiaire de la SEMDAS (société d'économie mixte d'aménagement de l'Aunis et de la Saintonge) à qui il a délégué la maîtrise d'ouvrage, a lancé un appel d'offres restreint en vue de la construction d'un pont sur la Charente à Rochefort-sur-Mer. La maîtrise d'œuvre a été confiée à la SETEC, cabinet d'études indépendant. La valeur de l'ouvrage à construire, d'une longueur de 1 200 mètres environ, était estimée à 168,3 millions de francs et son délai d'exécution à dix mois.
Le 15 mars 1988, la commission d'appel d'offres a sélectionné les entreprises Baudin-Châteauneuf (métallique), Bouygues, Campenon-Bernard, GTM-BTP, Quillery et Spie-Batignolles et les groupements Chantiers modernes + Fougerolle, Sogea + Richard Ducros, Boris-SAE + ETPO + SOCAE (filiales du groupe SAE).
Les offres remises le 8 juin 1988 ont été ouvertes le lendemain par la commission d'appel d'offres et examinées le 5 juillet 1988 au vu d'un rapport établi par la SETEC. La commission a décidé de proposer que l'appel d'offres soit déclaré infructueux, toutes les soumissions étant supérieures à l'estimation et le délai d'exécution paraissant trop court.
En raison de modifications apportées au projet et de l'allongement des délais d'exécution avec deux possibilités (vingt mois et trente mois), le maître d'ouvrage a décidé de lancer un nouvel appel d'offres restreint aux sept entreprises ou groupements d'entreprises sélectionnées le 15 mars 1988. Le 26 août 1988, la commission d'appel d'offres procédait à l'ouverture des plis. Le tableau ci-après récapitule les soumissions enregistrées les 9 juin et 26 août 1988 :
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Le maître d'ouvrage a conclu le marché le 12 octobre 1988 avec le groupement moins-disant : Bouygues et Quillery. Le pont de Rochefort a été mis en service en mars 1991.
c) Le pont de Gennevilliers
Le doublement de l'autoroute A15 entre l'échangeur de l'autoroute A86 (Gennevilliers, Hauts-de-Seine) et l'échangeur de la RN 311 (Argenteuil, Val-d'Oise), dont l'avant-projet a été approuvé par décision ministérielle du 23 mars 1988, a nécessité la réalisation de deux ouvrages : un pont sur la Seine et un viaduc le long de la darse du port de Gennevilliers. L'Etat, maître d'ouvrage, a confié la maîtrise d'œuvre à la direction départementale de l'équipement du Val-d'Oise.
Un premier appel d'offres restreint, fin 1988, portait sur le pont sur la Seine, ouvrage courbe en béton précontraint de 658 mètres de long et réalisé par encorbellement, dont le coût était estimé à 143 millions de francs. La date limite de réception des offres était fixée au 2 janvier 1989. L'ouverture des plis du 3 janvier 1989 a permis de constater les résultats suivants (en millions de francs hors taxes) :
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Cet appel d'offres a été déclaré infructueux en raison de l'importance de l'écart entre l'offre la plus basse et l'estimation. Une nouvelle procédure d'appel d'offres portant à la fois sur le pont sur la Seine et sur le viaduc le long de la darse (ouvrage quasi-rectiligne de 912 mètres de long, en béton précontraint, réalisé par poussage) a donc été lancée. La date limite de dépôt des offres, fixée initialement au 27 avril 1989, a été reportée au 25 mai, et l'ouverture des plis arrêtée au 1er juin 1989. Les résultats ont été les suivants (en millions de francs hors taxes) :
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L'écart entre la soumission moins-disante et l'estimation étant plus modéré, et aucune anomalie dans les offres n'ayant été constatée, le marché a été conclu en septembre 1989 avec le groupement Spie-Batignolles, GTM-BTP et Fougerolle, pour un montant de 266,2 millions de francs hors taxes.
d) Le pont de Plougastel
Destiné à améliorer la desserte de l'agglomération brestoise, le pont existant s'avérant insuffisant, le nouveau pont sur l'Elorn est un pont à haubans de 800 mètres de long et d'une portée centrale de 400 mètres. Son tablier est large de 23,10 mètres. L'Etat, maître d'ouvrage, en a confié la maîtrise d'œuvre à la direction départementale de l'équipement du Finistère.
L'avis d'appel de candidatures pour un appel d'offres restreint, publié le 16 décembre 1988 avec date limite de réponse fixée au 13 février 1989, envisageait deux solutions de base, l'une uniquement en béton, l'autre " mixte " alliant le béton au métal. Le 18 avril 1989, la commission d'admission des candidatures a agréé pour la solution béton (cotes A, 709 à 711) les groupements d'entreprises Bouygues (mandataire, avec Quille et Grands Travaux de Bretagne), Dumez-TP (mandataire, avec Fougerolle et Chantiers modernes), GTM-BTP (mandataire, avec Campenon-Bernard, Marc SA, Quillery, ETPO et Spie-Batignolles) et, enfin, Sogea (mandataire, avec L. Ballot).
Le dossier de consultation a été adressé aux entreprises le 22 décembre 1989, la date limite de remise des offres étant fixée au 23 avril 1990 et chaque offre devant comporter obligatoirement le chiffrage de la solution de base avec possibilité de présenter également une variante mineure et une variante majeure.
L'ouverture des plis a eu lieu le 25 avril 1990 (cotes A, 2001 à 2020). Le tableau ci-après synthétise les résultats de l'appel d'offres pour la solution béton (en millions de francs), seul le groupement dont GTM-BTP était le mandataire ayant usé de la faculté de proposer des variantes :
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Le rapport d'analyse des offres en date du 9 mai 1990 (cotes A, 2021 à 2043) ne comporte que l'examen détaillé des offres de la société GTM-BTP pour la solution béton, son rédacteur observant en conclusion qu'un " premier examen de l'ensemble des offres a (...) montré que les autres offres (béton ou mixte) n'apportent aucune information supplémentaire par rapport aux trois offres les mieux placées de GTM " et " qu'étant donné les écarts de prix, l'examen de l'ensemble des offres n'a pas été poussé plus en détail ". Faisant valoir que " les offres de GTM, qui paraissent plus travaillées, présentent de nombreuses lacunes et omissions ", l'auteur du rapport propose de déclarer l'appel d'offres infructueux " non seulement pour des raisons financières, mais aussi pour des raisons techniques " et de relancer une consultation négociée sur la seule solution béton, sans variante.
Après avoir déclaré l'appel d'offres infructueux le 10 mai 1990 en considérant qu'aucune des offres proposées n'est acceptable tant sur le plan technique que sur le plan financier (cotes A, 2044 et 2045), le responsable du marché a décidé de procéder à un marché négocié en application de l'article 103, alinéa 2, du Code des marchés publics. Au terme de la négociation, le marché a été conclu en juillet 1990 pour un montant de 263,9 millions de francs TTC avec le groupement Razel, Demathieu et Bard et Pico, étant observé que le service chargé de la consultation avait porté à la connaissance des entreprises le prix limite de 260 millions de francs qu'il s'était fixé (cote A, 2095 et 2096).
e) La section 44 de l'interconnexion du TGV Nord
La construction d'une " interconnexion " (parfois également appelée " le barreau ") a été décidée, lors du Comité interministériel du 9 octobre 1987, pour éviter la convergence à Paris des réseaux Nord, Sud-Est et Atlantique en réalisant une " boucle " autour de la région parisienne où se connecteraient ces réseaux et qui desservirait l'aéroport de Roissy. Ainsi seraient directement reliées entre elles les régions desservies par le TGV et, au-delà, les pays européens concernés.
Sa mise en service était prévue pour 1993, en même temps que celles du TGV Nord et du tunnel sous la Manche. Son coût total était évalué à 7,655 milliards de francs hors taxes, valeur au 1er janvier 1989.
Comme pour le TGV Nord et le TGV Rhône-Alpes, les infrastructures de l'interconnexion ont été découpées en sections linéaires de 10 à 40 kilomètres et en grands ouvrages spéciaux (viaducs, tranchées ouvertes, franchissements d'autoroutes ou de voies ferrées, etc.). Chacune de ces sections et chacun de ces ouvrages a fait l'objet d'un appel d'offres (cotes B, 971 à 1011 et 1012 à 1017).
La construction de la section 44 de l'interconnexion, située en Seine-et-Marne, comprend notamment des travaux de terrassement, de drainage et de protection acoustique. Elle comporte aussi la réalisation d'ouvrages d'art et le rétablissement de chaussées routières (cotes B, 960 à 970).
Le 16 février 1990, un avis publié au Moniteur des travaux publics invitait les entreprises intéressées à présenter leur candidature avant le 2 mars 1990. Le 18 mai 1990, les dossiers d'appel d'offres étaient adressés aux onze entreprises ou groupements retenus, parmi lesquels deux d'origine italienne (Condotte d'Acqua et Cogefar) et les principales d'entreprises françaises du secteur.
Le 27 juillet 1990, date limite de remise des offres, deux de ces onze entreprises ou groupements se sont excusés et les autres ont déposé une offre. Mais quatre entreprises ou groupements se sont regroupés pour donner naissance à deux groupements soumissionnaires : les groupements emmenés par les sociétés Ballot et Razel, d'une part, ceux emmenés par les sociétés Bouygues et Muller TP, d'autre part. Au total, ce sont donc sept offres qui ont été déposées et qui sont résumées au tableau ci-après, classées par ordre croissant :
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Le marché a été attribué au groupement moins-disant, emmené par la société Ballot.
f) Le lot 43-C de l'interconnexion du TGV Nord
Ce lot consiste en la réalisation du franchissement, sur 2 960 mètres, du territoire du parc d'attraction Eurosdisneyland, en Seine-et-Marne, en coordination avec la société Eurosdisneyland Corporation. Il se décompose en une tranche ferme et deux tranches optionnelles (cotes B, 941 à 955).
Au terme de la préconsultation du 8 mars 1989, treize entreprises ou groupements ont été retenus parmi lesquels les principales entreprises françaises du secteur (cotes B, 465 et 466). Le 20 avril suivant, les dossiers d'appel d'offres leur étaient adressés.
La date limite de remise des offres, primitivement fixée au 26 mai 1989, a été reportée au 5 juin suivant. Le dépouillement des plis du 6 juin 1989 a permis de constater que onze entreprises ou groupements seulement avaient répondu, dont un pour s'excuser (SGE, TPI Ile-de-France) et deux autres pour se joindre à un autre groupement (Campenon-Bernard BTP et GTM-BTP). Au total, huit offres ont donc été déposées, qui sont résumées dans le tableau ci-après, classées par ordre croissant (cotes B, 467 et 468) :
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Le marché a été attribué au groupement emmené par la société Bouygues. Le 18 septembre suivant, la société Nord-France Entreprise a rejoint ce groupement adjudicataire.
g) La section 21 du TGV Rhône-Alpes
La section 21 du TGV Rhône-Alpes s'étend de Diémoz à Saint-Marcellin-lès-Valence, sur 73 km environ. Le marché correspondant a été divisé en lots : lots principaux (tunnels ou terrassements et ouvrages d'art courants " T0AC ") et lots d'ouvrages spéciaux insérés dans les lots TOAC.
Les premier étaient les lots 22 (TOAC Nord), 23 (tunnel de Messiez), 24 (TOAC médians), 25 (tunnel de la Galaure) et 26 (TOAC Sud). Les seconds étaient les lots 52 (viaduc de Savas-Mépin), 54 (viaduc de Bancel), 56 (estacade de la Galaure), 62 (viaduc de Messiez) et 66 (viaduc de l'Isère).
Pour faire exécuter ces travaux, la SNCF a procédé à une consultation à la fois technique et financière qui s'est déroulée de mars 1989 à juin 1990. Sur le plan financier, elle envisage de recourir à une forme de crédit-bail. Elle retiendrait soit la meilleure offre globale (financière et technique), soit la meilleure offre technique, mais elle s'interdirait de combiner une offre financière et une offre technique qui n'auraient pas été présentées conjointement.
Sur le plan technique, en vue d'optimiser le coût des travaux, la SNCF lançait une consultation générale, qu'imposait d'ailleurs la consultation financière. Les groupements consultés étaient donc invités à présenter à la fois une " solution SNCF " classique et une " solution Entreprise " basée sur l'avant-projet sommaire de la SNCF et tenant compte des contraintes répertoriées. Une étude de préconsultation a permis de retenir trois groupements de base d'entreprises de travaux publics. L'appel d'offres restreint (aux trois groupements) a été lancé le 13 mars 1989, par l'envoi du premier dossier permettant notamment l'étude de l'avant-projet " solution Entreprise ". Le 31 août 1989, le reste des pièces a été adressé aux groupements. Les offres ont été déposées le 6 novembre 1989 par les trois groupements et dépouillées le jour même. Elles sont présentées dans le tableau suivant :
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Encore une fois, le groupement B s'est révélé moins-disant. La SNCF a engagé avec lui une négociation pour obtenir les prix unitaires les plus bas possible et optimiser les travaux par la recherche des meilleures solutions techniques avant de lui attribuer le marché.
B. - Les pratiques relevées
1. L'accord de coopération Dumez-GTM-Entrepose
Le 25 juin 1986, les sociétés Dumez SA ('D') et GTM Entrepose ('G') sont convenues de ce qui suit (cote A, 1966, Sc. 5, 1019 à 1023 ; rapport, tome 4, p. 756, sq.) : " D et G sont à la tête de deux groupes de sociétés dont l'activité se situe principalement dans le domaine de l'ingénierie, de la construction et de l'équipement. L'évolution des marchés français et étranger au cours des derniers exercices a entraîné un accroissement de la concurrence nationale et internationale et conduit à une concertation des entreprises entraînant la création d'associations en unités plus importantes. D et G, à la suite d'une étude approfondie de leurs domaines d'activité, ont constaté entre celles-ci une complémentarité très poussée s'appliquant aussi bien sur le plan géographique que dans les domaines d'activité eux-mêmes. D et G ont donc, d'un commun accord, recherché les moyens de développer entre eux une coopération permettant un approfondissement des connaissances réciproques des structures et des hommes avec la volonté de déboucher dans un délai aussi rapide que possible sur des prises de participations au niveau des filiales et une restructuration coordonnée de l'ensemble des deux groupes permettant d'améliorer leur compétitivité. "
Afin de réaliser ces objectifs, l'accord décidait la création de trois instances composées de représentants en nombre égal de chaque entreprise : un Comité de coopération (CC), chargé notamment de décider in fine des questions qui n'auraient pas pu être résolues par les deux autres instances, un Comité exécutif de coopération BTP France (CECF) et un Comité exécutif de coopération étranger BTP (CECE).
L'article 2.2 de l'accord définit le rôle du CECF dans les termes suivants :
- " 2.2.1. Organiser la coopération entre les deux groupes et leurs filiales dans le vaste domaine du BTP en France.
- 2.2.2. Déterminer les affaires dites importantes qui feront l'objet d'une coopération systématique par participation (en principe affaires de plus de 50 millions de francs), choisir la ou les sociétés qui présenteront l'offre, la forme de participation (occulte ou non) et arbitrer éventuellement le niveau de l'offre.
- 2.2.3. En principe les participations se feront 50-50, sauf cas d'espèce à déterminer par le CECF.
- 2.2.4. Exclusions :
Outre les affaires inférieures à 50 millions de francs, ne feront pas l'objet d'une participation obligatoire les affaires en promotion avec financement.
- 2.2.5. Pour les affaires n'entrant pas dans la catégorie, qui sont en général traitées par des structures permanentes des sociétés principales, comme pour celles qui seront traitées par d'autres filiales moins importantes, une coordination sera recherchée avec intervention des responsables locaux.
Cette coordination aura pour but l'obtention par l'ensemble D + G du maximum d'affaires dans les meilleures conditions possibles en tenant compte des positions préférentielles de chaque groupe. Elle pourra prendre toute forme qui paraîtrait opportune aux responsables locaux, y compris la société en participation.
Le CECF réglera tous les conflits de voisinage qui pourraient se présenter dans ces affaires en prenant en compte, le cas échéant, l'existence de tiers extérieurs dans ces filiales qui réduisent la liberté de décision de D et G. "
L'article 3.2 de l'accord définit le rôle du CECE dans les termes suivants :
- 3.2.1. Déterminer les pays d'intervention dans le monde de chacun des deux groupes et classer l'ensemble des pays du monde en trois catégories :
A. - Pays où l'un des deux groupes seulement est déjà en activité ;
B. - Pays où les deux groupes sont déjà en activité avec détermination de la prééminence ;
C. - Pays où aucun des deux groupes n'est encore en activité ;
- 3.2.2. Partant de cette classification, le CECE déterminera une politique de participation (officielle ou occulte) dans toutes les affaires nouvelles en s'inspirant des règles suivantes n'excluant pas des cas particuliers :
Catégorie A. - Fourchette de la participation minoritaire 25-45 % gérance par le groupe en activité ;
Catégorie B. - Fourchette de la participation minoritaire 25-45 % gérance par le groupe prééminent ;
Catégorie C. - Participation 50-50 % gérance par le groupe initiateur.
Les pourcentages ci-dessus s'appliquent dans chaque catégorie à la part de contrat revenant à la société française (société mère ou société filiale) ou à la société locale lorsque celle-ci est détenue intégralement par un des deux groupes ; dans ce dernier cas, la participation ne sera obligatoire que pour les affaires dépassant 200 millions de francs monnaie de compte. "
b) Un second accord a été conclu le 10 mai 1989 (cotes A, 1966, Sc. 10, 1492 à 1497 et cotes B, 3824, Sc. 1, 2 et 3 et 7 à 12 ; rapport, tome 4, pp. 789, sq. et 1154, sq), qui développe et détaille le rôle, légèrement différent, du CECF et du CECE :
- 2.2. Rôle du CECF.
- 2.2.1 Organiser la coopération entre les deux groupes et leurs filiales dans le vaste domaine du BTP en France.
- 2.2.2. Examiner systématiquement les affaires importantes et déterminer celles qui feront l'objet d'une coopération.
- 2.2.2.1. Les affaires importantes sont celles dont le montant dépasse 100 millions de francs (HT). Les affaires en promotion et de montage avec financement ne font pas partie de cette catégorie donnant lieu à examen systématique.
- 2.2.2.2. L'examen systématique doit se faire le plus tôt possible et en tout cas avant la remise des offres.
- 2.2.2.3. La décision aura pour objectif l'efficacité maximale pour l'ensemble des deux groupes. Les critères de décision seront les atouts de toutes natures dont dispose chacune des sociétés pour obtenir l'affaire, ainsi que la nécessité de maintenir la réalité de deux entités distinctes et commercialement indépendantes.
- 2.2.2.4. Les décisions possibles peuvent être :
- s'associer officiellement ;
- s'associer de manière occulte, en choisissant la société qui présentera l'offre et en fixant d'un commun accord le niveau du prix ;
- convenir que l'un seulement des deux groupes présente une offre dont il aura l'entière responsabilité ;
- laisser les entreprises des deux groupes indépendantes, chacune jouant totalement le jeu de la concurrence.
- 2.2.2.5. Dans le cas d'association, les participations se feront en principe moitié-moitié, sauf cas d'espèce à déterminer par le CECF.
- 2.2.3. Coordonner l'action des deux groupes dans les affaires non importantes.
Les affaires sont en général traitées par des structures permanentes des sociétés principales, ou par des filiales.
Le CECF coordonnera l'action de ces structures avec intervention de leurs responsables locaux.
Cette coordination aura pour but l'obtention au moindre coût par l'ensemble D + G du maximum d'affaires dans les meilleures conditions possibles en tenant compte des positions préférentielles de chaque groupe. Elle pourra prendre toute forme qui paraîtrait opportune aux responsables locaux, y compris la société en participation.
Le CECF réglera tous les conflits de voisinage qui pourraient se présenter dans ces affaires en prenant en compte, le cas échéant, l'existence de tiers extérieurs dans ces filiales qui réduisent la liberté de décision de D et G.
- 3.2. Rôle du CECE.
- 3.2.1. Organiser la coopération entre les deux groupes dans le domaine du BTP à l'étranger en particulier, de manière à éviter ou limiter les doubles emplois et la concurrence sauvage et en recherchant :
- l'obtention au moindre coût pour l'ensemble D + G du maximum d'affaires dans les meilleures conditions possibles en tenant compte des positions préférentielles de chaque groupe et des contraintes limitant la liberté des décisions de D et G ;
- les cas où la complémentarité des compétences permettra des actions communes des deux groupes ou des retombées dans le domaine du BTP.
- 3.2.2. Assurer une circulation rapide et précoce de l'information sur toutes les affaires, déterminer celles susceptibles d'être traitées en commun et fixer pour celles-là les modalités de la coopération avant la remise des offres.
- 3.2.2.1. Par exception à la règle énoncée ci-dessus, aucune obligation n'existe pour les activités suivantes :
- affaires traitées dans des territoires où D et G ont une activité d'agence et qui relèvent de cette activité (que celle-ci soit exercée directement et/ou par l'intermédiaire d'une filiale locale). A titre indicatif, figurent parmi ces territoires (...) ;
- affaires traitées dans l'un des deux groupes par l'intermédiaire d'une filiale locale comportant la participation d'intérêts tiers ;
- affaires en promotion ou en montage ;
- d'une façon générale, toutes les affaires dont le montant est inférieur à la contre-valeur de 200 millions de francs.
- 3.2.2.2. Pour toutes les autres affaires importantes, toute participation éventuelle devra être examinée et si possible arrêtée au moment où l'un des groupes et les deux groupes envisagent de s'y intéresser. Trois schémas sont alors possibles.
Schéma 1 : l'un des deux groupes décide de ne pas s'intéresser à l'affaire ;
Schéma 2 : les deux groupes s'y intéressent et décident d'associer leurs efforts ;
Schéma 3 : les deux groupes s'y intéressent mais choisissent de progresser séparément.
Dans le cas des schémas 1 et 3, aucune obligation n'existera, en principe, pour le groupe éventuellement adjudicataire d'envisager une participation avec l'autre.
Le schéma 3 devra être évité autant que faire se peut.
Dans le cas du schéma 2, à défaut de critères spécifiques, l'association des deux groupes se fera, en principe, sur une base paritaire et tous les frais de projection et d'études correspondants seront partagés en conséquence entre les deux groupes. La gérance sera attribuée au groupe initiateur.
Le partage s'applique dans chaque cas à la part de contrat revenant à la société française (société mère ou société filiale) ou à la société locale lorsque celle-ci est détenue intégralement par un des deux groupes ".
Le 17 juin 1988, M Bernard Tarbès, vice-président de GTM-BTP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cotes B. 3824, Sc. 1, 49 ; rapport, tome 4, p. 1162) :
" Revoir texte accord Dumez GTM. "
Une note manuscrite prise par M. Dehan, directeur général adjoint du Dumez-TP, à l'occasion d'une réunion de la direction du 10 octobre 1988 (cote A, 1966, Sc. 8, 1307 V° ; rapport, tome 4, p. 780), indique : " 7-GTM : Accords sur coop. F. / Situation financière s'améliore. / Ce qui va mal : off shore (180) MF / an. Tout le reste est sous contrôle. "
M. Jean-Paul Parayre, président-directeur général de la société Dumez, a déclaré le 26 juin 1992 (cote A, 2140 à 2142 ; rapport, tome 4, p. 869, sq.) : " L'accord du 25 juin 1986 fait suite à une prise de participation par achat d'actions en bourse de Dumez chez GTM-Entrepose dans le courant du premier semestre 1986. En effet, jusqu'en 1985, Dumez avait essentiellement des activités BTP et réalisait la quasi-totalité de son chiffre d'affaires sur le marché international. A la suite de la baisse des commandes sur ce marché international, Dumez désirait rééquilibrer ses activités en les développant sur le marché national. Dumez a jugé que la meilleure façon d'atteindre cet objectif consistait à s'allier avec un groupe bien implanté sur le marché national et plus diversifié.
(...) Sur l'accord du 10 mai 1989 :
Cette nouvelle rédaction a été adoptée pour tenir compte de l'expérience acquise et des difficultés rencontrées alors que Dumez était devenu actionnaire de contrôle de GTM (...). Cet accord n'a pas été abrogé mais les modalités de coopération entre Dumez et GTM font actuellement l'objet d'une réflexion à la suite de la fusion Lyonnaise des eaux-Dumez.
La coopération entre Dumez et GTM dans le secteur du BTP ne concerne qu'une faible part du chiffre d'affaires BTP, la concurrence étant la règle générale. Cette coopération concerne essentiellement les très grands chantiers de travaux publics et c'est à mes yeux une nécessité face à la concurrence française et étrangère. "
2. L'accord de coopération Dumez-Razel
Le protocole convenu le 22 février 1990 entre les deux sociétés (cotes B, 3898, Sc. 3, 590 et 591 ; rapport, tome 4, p. 1194 et 1195) contient en particulier les clauses suivantes :
Article 1er
Partenariat général
Razel et Dumez décident de créer entre eux un partenariat général dans le domaine des grands travaux d'infrastructure pour lesquels les compétences de Razel et de Dumez apparaissent complémentaires.
Ce partenariat est principalement orienté sur la France et l'Europe (...).
Il est entendu que cet accord de partenariat respectera l'autonomie complète des deux partenaires.
Article 2
Modalités
Razel et Dumez examineront au cas par cas les projets susceptibles d'entrer dans le cadre du présent protocole (...).
Article 3
Comité de coordination
Un comité de coordination sera mis en place dès la signature du présent protocole. Il sera composé de six membres (trois représentants de Razel et trois représentants de Dumez), chacun d'eux pouvant désigner un suppléant.
De façon générale, ce comité sera responsable de la mise en place, du suivi et de l'exécution des dispositions du présent protocole. En particulier, il sera chargé d'examiner les projets susceptibles de faire l'objet d'une coopération et de définir au cas par cas les modalités de coopération et les dispositions des accords spécifiques à chacun des projets (...).
Ce comité se réunira aussi souvent que nécessaire et au minimum tous les trois mois (...).
Article 4
Durée
Le présent protocole est prévu pour une durée initiale de deux ans. Il se renouvellera ensuite par tacite reconduction pour les mêmes périodes, sauf dénonciation (...).
Le compte rendu du " Comité de coordination Dumez-Razel du 7 mars 1990 au siège Razel " en date du 8 mars 1990, saisi dans les locaux de Razel et établi sur du papier à en-tête de Dumez-TP (cote B, 3898, Sc. 3, 593 à 595 ; rapport, tome 4, p. 1196, sq.), indique notamment :
Confidentiel (...).
Le Comité de coordination qui a été constitué et qui siège pour la première fois aura pour vocation d'assurer un suivi concerté en France et en Europe, et le cas échéant à l'Etranger, dans les domaines des terrassements, du génie civil et des travaux souterrains (...).
Différents projets sont ensuite évoqués, en dehors de ceux actuellement suivis ou exécutés en commun (lots du TGV Nord, TGV Rhône-Alpes, tunnel de Puymorens) :
- tunnel de Monaco (Pico souhaitait s'y intéresser) ;
- métro de Toulouse (problèmes de réclamations) ; (...) ;
- programme de lignes nouvelles TGV (...).
Les comptes rendus de réunion seront strictement confidentiels et à traiter comme tels.
Pour le comité n° 2, la " liste des questions proposées par Razel " (cote B, 3898, Sc. 3, 596 rapport, tome 4, p. 1199) mentionnait :
TGV Lyon Valence(...)
garantir nos 140 Ms F (...)
lot 44 = solde de notre part TGV Nord
(...)
- Tunnel de Puymorens
- Ville de Paris
- Transmanche
- Les souterrains
- Les barrages
Le compte rendu du " Comité de coordination Dumez-Razel n° 3 du 20 juin 1990 au siège de Razel " en date du 3 juillet 1990, saisi dans les locaux de Razel et établi sur du papier à en-tête de Dumez-TP (cote B, 3898, Sc. 3, 598 à 602 ; rapport, tome 4, p. 1200, sq.), indique notamment :
"7) TGV Lyon Valence
(...)
Par ailleurs, Dumez accepterait de confier une partie des travaux pour environ 30 MF, à Pico dans le tunnel de la GAlaure, moyennant compensation de chiffre d'affaires.
8) TGV Est
M. Schoonheere manifeste l'intention de se rapprocher de GTM sur ce projet. M. Heiser indique que des discussions préliminaires ont été engagées avec certains de nos collègues, mais que rien ne pourra être décidé avant de connaître les granes lignes de la procédure qui sera suivie par la SNCF (découpage en 3 ou plusieurs lots; financement; concurrence étrangère. etc...)
Il est décidé de reparler de ce projet lors du prochain Comité Consultatif".
3. L'accord relatif à la construction des ponts
1. Un document dactylographié, ni daté ni signé et intitulé "Recherche des données actuelles en matière de réalisation des grands ponts en France", saisi au siège de la société L. Ballot-BTP (cotes A, 1985, Sc. 1, 12 et 13; rapport, tome 4, pp. 810 et 811), analyse, en cinq paragraphes numérotés I à V, le marché des grands ponts en France et note en particulier la "réduction sensible du nombre des grands ouvrages achevés chaque année en France depuis 1983" puis il examine les "conséquences de cet état de fait", les conséquences directes et les conséquences indirectes. Celles-ci sont présentées comme suit :
"Formation d'un club de spécialistes de bureau d'études et aussi d'entreprises qui prennent les affaires en main en amont des appels d'offres (très fermé, compte tenu de la réduction du marché)".
2. Le 11 mai 1988, M. Dehan (société Dumez TP) notait, dans le cahier de notes manuscrtites qu'il tient au jour le jour et rendant compte d'une réunion qui comptait quatre points à l'ordre du jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1203 R°; rapport, tome 4, p. 767; "DZ, B, QY, IF et JPP" désignent, respectivement, les sociétés Dumez-TP, Bouygues et Quimmery, l'expression "il faut" et M. Jean-Paul Parayre):
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3. Une autre note manuscrite de M. Dehan, datée du 17 mai 1988, indique (Cote A, 966, Sc. 7, 1206 R°; rapport, tome 4, p. 769):
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4. Un document intitulé "Réunion travaux publics du vendredi 27 janvier 1989", signé JC Jammes, président de la SAE, et saisi au siège de cette société (cote A, 1939, Sc. 1, 1 et 2; rapport, tomme 4, pp. 708 et 709) indique: "On maintient au maximum le principe d'indépendance totale entre Quillery et Borie pour les affaires de tous les jours. Pour les affaires, au niveau national, une coordination est nécessaire et différents cas sont possibles: Quillery ou Borie interviennent seules pour le groupe, ou Quillery ou Borie interviennent pour le groupement Quillery-Borie.
Dans les deux cas, l'un ou l'autre a l'appui total de la direction générale SAE et notamment de moi, comme ce fut le cas sur les ponts, le TGV Nord, Marseille ou Toulouse. Dans le deuxième cas, il convient, en plus, que celui qui suit informe le partenaire, ce qui n'a pas toujours été fait jusque-là.
Ponts et tunnels:
Il semble que les suites se dessinent (...).
5. Un document dactylographié, non signé, daté du 14 février 1989, intitulé " Génie civil, ouvrages d'art et terrassements " et saisi dans les locaux de la société Quille (cotes A, 1932, Sc. 2, 4 à 7 ; rapport, tome 4, pp. 702 à 705), présente l'état de " l'équilibre antérieur " puis analyse le problème de la coordination entre Bouygues-TP et ses filiales au regard des " trois éléments nouveaux ", parmi lesquels : " 3. A l'image de ce qui se pratique en Grande-Bretagne, la mise en œuvre au sein de BYTP d'une stratégie globale sur l'ensemble du territoire, qui privilégie les études en commun avec les autres "majors" au BTP en France, au détriment de la compétition plus classique dite "sauvage". "
Parmi " les effets et les constats " qui sont ensuite relevés, sont soulignés :
" 2. Les effets et constats externes :
A court terme :
- une diminution de la part du marché du groupe dans le domaine du génie civil et des ouvrages d'art, puisqu'il faut se contenter d'une part égale à celle des nombreux collègues et concurrents ;
- une implantation nouvelle ou un renforcement des positions de certains concurrents (Dumez-Sogea) : permis et même favorisés par les stratégies actuelles ; ils auraient été plus difficiles en milieu plus concurrentiel.
A plus long terme :
- un risque de voir notre compétitivité s'émousser (...). "
Enfin, quatre " propositions " sont formulées, s'appuyant sur cinq " principes généraux " dont l'un indique que " la stratégie du groupe en génie civil et terrassements est une stratégie de conquête et pas seulement de défense et de partage ". La deuxième de ces propositions est formulée comme suit : " Les opérations de la compétence de la direction générale filiales France ne peuvent être intégrées dans le cadre d'une stratégie générale d'études communes avec d'autres groupes. La DGFF prend ses responsabilités quant aux conséquences positives ou négatives d'une telle disposition pour son activité et ses marges. "
6. Un autre document saisi dans les locaux de la société Quille, dactylographié (cotes A, 1932, Sc. 2, 8 et 9 ; rapport, tome 4, pp. 706 et 707), a été rédigé par M. Michel Derbesse, directeur général de Bouygues SA. Sa date (7 juillet 1989) et son titre " Relations filiales-BYTP " sont manuscrits. Il énonce les " trois principes (qui) doivent guider (l') action " du groupe :
" 1. Réaffirmation de la compétence des filiales sur les ouvrages TP construits sur leur territoire (...).
2. Nécessité de développer les structures de Bouygues TP (...), seul mandataire du groupe pour les négociations menées avec la profession sur les grands ouvrages, en particulier s'ils sont interrégionaux (...).
3. Besoin de renforcer les synergies entre filiales et Bouygues TP (...) l'ensemble profite des négociations au niveau de la profession (...). Les négociations montées par Bouygues TP devront, avant d'être menées avec la profession, obtenir l'accord des DG des filiales (...). Il est très important que notre groupe soit soudé pour tirer le meilleur parti des évolutions de la profession. "
7. Un dernier document saisi dans les locaux de la société Quille, dactylographié (cotes A, 1932, Sc. 2, 3 ; rapport, tome 4, p. 701), a été rédigé par " JPAV " (responsable de la société Pertuy, filiale de Bouygues), selon les bordereaux de transmission auxquels il était agrafé (cotes A, 1932, Sc. 2, 1 et 2). Il est daté du 10 octobre 1989 et intitulé " Réflexions sur la politique génie civil ; ouvrages d'art ; terrassements " et il reprend et synthétise les notions exposées dans le document 5 ci-dessus, et notamment " la mise en œuvre au sein de Bouygues TP d'une stratégie globale sur l'ensemble du territoire qui privilégie les études en commun avec d'autres groupes du BTP en France, au détriment d'une compétition très agressive ". Afin de remédier aux inconvénients de cette situation (perte de compétitivité du groupe, aide apportée à certains concurrents et diminution des marges) qui paraît tenue pour acquise, l'auteur du document préconise, en cas de poursuite de cette stratégie, " de mettre en avant la pluralité des sociétés et filiales pour augmenter nos participations et nos prétentions aux parts de marché correspondantes ".
4. L'accord relatif à la construction des infrastructures des lignes de TGV
1. Le 28 mars 1988, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1188 R° ; rapport, tome 4, p. 763) : " 4. TGV Nord avec Campenonlet si possible Mullerl/et GIE occulte à 4 GTM Sogea M, CB DZ. "
2. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez-TP n° 8 du lundi 28 mars 1988 à 8 heures ", en date du 29 mars 1988, indique (cote A, 1966, Sc. 2, 318 ; rapport, tome 4, p. 753) :
" 5.4. TGV Nord :
Idée de Bouygues : 4 groupements, soit CBC + Sogea; Dumez + GTM; SAE + SPIE;
Bouygues + Fougerolle.
Idée de Dumez : GTM + Sogea; Dumez + CBC; Bouygues + Fougerolle; SPIE + SAE.
Rechercher l'incorporation de Razel dans le groupement Dumez + CBC.
Contact pris par M. Thievent avec M. Schoonehre (Razel)."
3. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez-TP n° 9 du lundi 11 avril 1988, à 8 heures ", en date du 13 avril 1988, indique (cote A, 1966, Sc. 2, 285 ; rapport, tome 4, p. 749) : 3.5. TGV Nord/4 groupements vont être constitués : SPIE/SAE ; DZ-TP/CBC : Sogea/GTM ; Bouygues/Fougerolle. "
4. Le 25 avril 1988, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1195 V° ; rapport, tome 4, p. 764) :
"4.6 TGV Nord
Fougerolle sous condition avec B. - les 4 Gts
On est avec Razel (sous réserve)
- SGTN et SATP - Spada
- et CB
Les terrassiers voudraient ne pas être en intégré avec les Gdes Entreprises
Razel Paul + 3 / est invité / mercredi / au cercle interallié / LD - TH - SH - JPP - JPG"
5. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez-TP n° 11 du lundi 25 avril 1988, à 8 heures ", en date du 27 avril 1988, indique (cotes A, 1966, Sc. 2, 291 et 292 ; rapport, tome 4, p. 751 et 752) : " 4.6. TGV Nord Fougerolle sera avec Bouygues. Notre groupement (Dumez-TP + Campenon Bernard + Razel) sera rejoint par SGTN + SATP + Spada. Attente de l'accord de Razel sur ce schéma (...) / 5.2. Réunion avec Razel / Déjeuner fixé au 27 avril 1988 au Cercle interallié. / 5.3. Réunion avec Bec / Fixer rapidement la date de ce déjeuner. "
6. Le 2 mai 1988, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1196 V° ; rapport, tome 4, p. 765 : les sociétés Sogea, GTM et Fougerolle sont actionnaires de la société Cofiroute, intervenue dans le cadre d'un projet de mise en concession des lignes de TGV) :
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7. Le 9 mai suivant, M. Dehan notait dans le même cahier (cote A, 1966, Sc. 7, 120 ; rapport, tome 4, p. 766) :
"6 - TGV Sud Est Lyon
Bec OK pour consolider Gt SPIE Razel DZ Bec mais en restant ouvert à B pour avoir 2 Ct
Buffevent est bien intéressé.
7 - TGV Nord
Ménage fait après rencontre Bec et Razel.
Ont bien compris la nécessité de faire éclater notre Gt initial"
8. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez-TP n° 13 du lundi 9 mai 1988, à 8 heures ", en date du 16 mai 1988, indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1531 ; rapport, tome 4, p. 797) : " 5.4. TGV / Sud-Est (Contournement de Lyon) / Groupement SPIE, Dumez-TP, Razel, Bec consolidé mais ouvert à Bouygues. L'autre groupement comme prévu comprendra Cofiroute. "
9. Une note manuscrite saisie dans le bureau de M. Schoonheere (société Razel) et datée du 10 mai 1988 indique (cotes B, 3898, Sc. 2, 452 et 453 ; rapport, tome 4, p. 1189) :
TGV Nord
1) Dumez - Campenom - Razel - SGTN - SATP - Spada
2) Sogea - GTM - Guintoli - Demathieu
3) SPIE - Bec - CM + Balot + Valérian + Beugnet
4) Bouygues - Fougerolle - Muller - Levaux - Gagneraud
RCFC ?
Nord-France ?
Urbaine ?
Chagnaud ?
EI ?
Solétanche ?
- 2 SEP - Terrassements Razel-Dumez-SATP-Spada
G. Civil Dumez-Campenon SGTN
Gare de Coquelles : 1,2 milliard
Traversée de Lille : 1.5
Ligne nouvelle 321 km : 8 milliards
Terminaux Paris ? : 2 milliards
Roissy
Terrassements : 5.6
Ouvrages ; 2,4
[ndlr total :] 8.
Terrassements : 5.6
Ouvrages : 5.4
[ndlt total :] 11.4 = 2.7 par groupement
50 % Terrassements
50 % Génie civil
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10. Une note dactylographiée de la direction commerciale de la société Razel datée du 20 mai 1988 indique (cote B, 3898, Sc. 2, 454 ; rapport, tome 4, p. 1190) :
"TGV Nord
Principes de base de l'intégration de Razel dans le groupement Dumez - CB - Razel - SGTN - SATP - Spada (Solution 4 groupements)
1 - Dumez mandataire de la SEP
2 - Razel gérant de la SEP, co-mandataire, responsable des terrassements
3 - Razel aura 25 % en montant de l'ensemble des travaux alloués au groupement, concentré en priorité sur les terrassements. (...)
7 - Dans le cas d'appel d'offres concurrentiel, chacun des partenaires reprendra sa liberté."
11. Un télex adressé le 10 juin 1988 par M. Cazenove (Razel) à MM. Heiser et Michel (Dumez-TP) indique (cote B, 3898, Sc. 1, 4 ; rapport, tome 4, p. 1184) :
"TGV Nord - Votre projet de protocole (téléfax du 8.06)
Vous confimre premières précisions accordées hier avec vous-même et CB sur v/projet de référence.
1) Par TGV Nord s'entend non seulement la liaison Roissy-Lille-Terminal mais aussi les gares Roissy, Terminal et traversée de Lille notamment (pour un montant total de Terrt + GC de 8 M. de F env.)
2) Objectif à atteindre 25 %, soit :
1 MDF en lots terrassements
+ 1 MDF en lots génie civil
3) Toutes décsions engageant les partenaires durant les différentes phases préliminaires seront unanimes.
4) En 4ème phase éclatement pour soumission et travaux.
A) POur les lots à majorité terrassement : Razel mandataire et pilote technique, fournissant le directeur du chantier. Dumez pilote administratif.
B) Pour les lots à majorité génie civil mêmes rôles tenus par Dumez et CB respectivement.
5) Equilibrage des parts :
A) Tant que la différence entre volume lots terrassments et lots G. civil est inférieure à 5 ou 6 %, l'équilibrage se fait par augmentation et diminution part Dumez dans les 2 SEP et respecter en ce qui concernen Razel 25 % du montant des travaux lots terrassement - lots G. civil pouvant être obtenus par le groupement, concentrés sur les lots terrassements.
B) Au-delà par une prise de participation complémentaire correspondante dans l'autre SEP.
6) Clauses : Délai, validité et arbitrage à rajouter.
7) Tout ceci s'entendant exclusivement dans le cadre et le contexte envisagés, les partenaires étant libérés en acs contraire."
12. Le 13 juin 1988, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cotes A, 1966, Sc. 7, 1211 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 770 et 771) :
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13. Le 20 juin suivant, M. Dehan notait dans le même cahier (cote A, 1966, Sc. 7, 1214 R° ; rapport, tome 4, p. 772) : " 3.9 - TGV-SE / On cherche à prendre le pilotage d'un des 2 Gts mais on n'a pas les hommes ".
14. Le 29 juin 1988, M. Bernard Tarbès, vice-président de GTM-BTP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cotes B, 3824, Sc. 1, 52 ; rapport, tome 4, p. 1163 ; M. Massip est le responsable des grands travaux chez Sogea) :
"Massip (...)
- TGV Nord : non à CM-Ballot.
avec Beugnet - SGTN ?
avec Urbaine-Montcocol ?"
15. Des notes du cahier manuscrit que tient au jour le jour M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP (cote A, 1966, Sc. 7, 1224 V° ; rapport, tome 4, p. 773), datées du " 30.07 " (cote A, 1966, Sc. 7, 1223 V°), mais comprises entre des notes datées du " 30.06 " (ibid, 1222 V°) et du '01.07' (ibid, 1225 R°), et donc rédigées le 30 juin 1988, indiquent (" JFM " désigne Monsieur Jean-François Michel, directeur commercial chez Dumez-TP) :
"TGV Nord : sous-traité à JFM sur plan commercial
me laisse le dossier : 4 Gts
mais merdier : 2 nouveaux Gts dérivés du Gt SPIE
On est OK dans notre Gt. Razel + Campenon + Dematieu Barre (+ Spada + SATP)"
16. Le 11 juillet suivant, M. Dehan notait dans le même cahier (cote A, 1966, Sc. 7, 1231 V° ; rapport, tome 4, p. 774) : " 5-6 TGV Lyon/5-7-TGV Nord/Se pose le pb. de récupérer Beugnet qui quitte le Gt de SPIE ".
17. Le 18 juillet suivant, M. Dehan notait dans le même cahier (cote A, 1966, Sc. 7, 1233 R° ; rapport, tome 4, p. 775) :
"3-7 - TGV Alpes
C.R de la réunion avec
(demander à Alfonsi)
3-8 - TGV Nord
Pb. avec Nordistes"
18. Des notes manuscrites de M. Gautherie (Campenon-Bernard), non datées mais qui ne peuvent être postérieures à juillet 1988 (cote B, 3811, Sc. 2, 62 ; rapport, tome 4, p. 1150), indiquent ce qui suit, étant rappelé que MM. Petitcolas, Heiser, Massip, Tarbès, Cote et Violet sont directeurs des Grands Travaux respectivement des sociétés Campenon-Bernard, Dumez-TP, Sogea, GTM-BTP, Bouygues et Fougerolle, que M. July est directeur commercial chez Campenon-Bernard, que MM. Gorge et Serralta sont responsables des Grands Travaux chez Spie-Batignolles et que M. Bec semble représenter l'entreprise homonyme et le groupe SAE :
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19. Des notes manuscrites de M Petitcolas (Campenon-Bernard), en date du 29 juillet 1988, indiquent (cote B, 3811, Sc. 2, 88 ; rapport, tome 4, p. 1151) :
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1 - Groupes envisagés
. SPIE - SAE Borie - NF - CM - Ballot
avec Bec - Valérian (CM) - Ballot - Tinel - Beugnet
. Bouygues - Fougerolle - Levaux - Gagneraud - Chagnaud - Norpac
avec Muller - DTP - Pertuis
. Dumez - Campenon - Demathieu - RCFC - EI
avec Razel - Dumez - Spada - SATP
. GTM - Sogea - Genest - SGTN
avec Guintoli - Sogea - GTM
Pb avec CM - Ballot (Molinie) - Geneste et Fougerolle - Beugnet
Refus 5è Groupement
2 - Objet
- TGV Nord - Interconnexion - TGV Rhône Alpes
- Lot 50 MF y compris Gares (...)"
20. Le 30 août 1988, M. Bernard Tarbès, vice-président de GTM-BTP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote B, 3824, Sc. 1, 60 ; rapport, tome 4, p. 1164) : " Penser déroulement TGV Nord. Nos accords Sogea ".
21. Des notes manuscrites de M. Gautherie (Campenon-Bernard), en date du 7 septembre 1988, indiquent (cote B, 3811, Sc. 2, 52 ; rapport, tome 4, p. 1148) :
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22. Le 8 septembre 1988, M. Bernard Tarbès, vice-président de GTM-BTP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote B, 3824, Sc. 1, 63 ; 1165) : " TGV Nord - 5e groupt CM/B GB ->JHBineau (...) TGV Est - Dumez 21 et suite Heiser après le 26 provoquer renc. "
23. Le 15 septembre suivant, M. Tarbès notait dans le même cahier (cote B, 3824, Sc. 1,66 ; rapport, tome 4, p. 1166 ; M. Mathy est le président de la société Chantiers modernes) :
"- Massip
- Razel
- Violet - me rappelle
(...)
- Camp : me rappelle ?
- Razel : - je rappelle lundi 19
- CM : Mathy me rappelle mercredi 21"
24. Le 16 septembre 1988, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 8, 1291 R° ; rapport, tome 4, p. 777) :
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25. Le 23 septembre suivant, M. Dehan notait dans le même cahier (cote A, 1966, Sc. 8, 1295 R° ; 778) :
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26. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez-TP n° 28 du lundi 26 septembre 1988 ", en date du 29 septembre 1988, note (cote A, 1966, Sc. 2, 336 ; rapport, tome 4, p. 754) : " 2.2 TGV Nord / Problèmes entre Bouygues et Fougerolle, Envisager la permutation Campenon-Bernard et Fougerolle ".
27. Des notes manuscrites de M. Gautherie (Campenon-Bernard), en date du 29 septembre 1988, indiquent (cote B, 3811, Sc. 2, 61, rapport, tome 4, p. 1149) :
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28. Un " tableau d'espérance d'activité en 1989-1990-1991 ", daté du 7 octobre 1988 et saisi dans les locaux de l'entreprise Campenon-Bernard indique (cote B, 3811, Sc. 3, 28 ; rapport, tome 4, p. 1153) :
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29. Le 10 octobre 1988, M. Bernard Tarbès, vice-président de GTM-BTP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote B, 3824, Sc. 1, 72 ; rapport, tome 4, p. 1167) : " Réu TGV Nord. après Genest - M me rappelle ".
30. Le 7 novembre 1988, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 8, 1323 R° ; rapport, tome 4, p. 781) : " 20 - TGV Nord / Aspect commercial : situation s'améliore (CM + Ballot) / On est avec Fougerolle - Razel ".
31. Le 9 novembre 1988, M. Bernard Tarbès, vice-président de GTM-BTP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote B, 3824, Sc. 1, 79 ; rapport, tome 4, p. 1168) : " Cote ->Camp mariés + petits + CDC / - SAE imp. "
32. Le lendemain 10 novembre, le même M. Tarbès notait dans le même cahier (cote B, 3824, Sc. 1, 79 ; rapport, tome 4, p. 1168) :
"Cote : Visite Faure ?
- TGV Sud dans le paquet
- Nord-France : plus de génie civil
- Spie Colombie"
33. Le 8 décembre 1988, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 8, 1343 R° ; rapport, tome 4, p. 782) :
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34. Un tableau " Affaires nouvelles/Espérances d'activité en 1989, 1990, 1991 ", daté du 20 décembre 1988 et saisi dans les locaux de l'entreprise Campenon-Bernard, indique (cote B, 3811, Sc. 3, 6 ; rapport, tome 4, p. 1152) :
"En millions de francs
- TGV
. Nord Est
. Interconnexion : 8 000
. Lyon 1ère phase : 1600 x 1/4 x 1/2 x 1/2 x 0,8
. Lyon 2ème phase : 2000"
35. Le 12 janvier 1989, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 9, 1389 R° et V° ; rapport, tome 4, pp. 784 et 785) :
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36. Le 6 février suivant, il notait (cote A, 1966, Sc. 9, 1403 V° ; rapport, tome 4, p. 786) :
"12 - TGV Sud est
1ère vague : TGV N 4 lots sur 12 - N du TGV SE
(hors Roissy - barreau)
Ao - mai 1989 environ 3 MF
2ème vague : 5 MF
Reste du TGV N (8 lots)
Toute l'interconnexion
Solde contournement Lyin : Sort de juin à octobre
3ème vague : Lot sud de Lyon 2 MF
1 part = 6 à 700 MF dont 180 TT 500 GC
On est intérressé au sud de Lyon car on est bon / banques
avec B. SPIE Razel bec Sogea
GTM aurait 0.9
B.1.
Sogea CB 1.5
et sur Roissy aérogare pour 200 MF
- JPP souligne que AdP va se superborder
(budget tenu et délais aussi) - pas de petite gâterie à la fin
JH se justifie - prix un peu meilleurs - beaucoup de travaux à roissy
JPP - attention à nos méthodes, à nos retards au démarrage...
et on va chercher un gros ouvrage important sur TGV N. en + d'un lot mixte GC + TT"
37. Dans son cahier de notes manuscrites, M. Razel, président-directeur général de la société homonyme, notait ce qui suit (cote B, 3898, Sc. 1, 281 ; rapport, tome 4, p. 1187). Ces annotations sont postérieures au, 15 février 1989 (ibid., 275) et antérieures au 21 février suivant (ibid., 284).
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38. Le 23 février 1989, M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 9, 1414 V° ; rapport, tome 4, p. 787) :
"9 - TGV Nord : Faury a en mains. Ne couvre pas le commercial bête : Monika
On s'intéresse au viaduc sur Oise avec
Fougerolle - Razel (ca. 180 MF)
On devrait recevoir le dossier - Q
Bien contrôlé côté filiales DZ par JMF"
39. Parmi les notes manuscrites de M. Schoonheere, directeur général de la société Razel, on peut lire ce qui suit (cote B, 3898, Sc. 2, 477 ; rapport, tome 4, p. 1192). Ces annotations sont postérieures au 24 avril 1989 (ibid., 476 ; rapport, tome 4, p. 1193) et antérieures au 5 mai suivant (ibid., 478).
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40. Le 11 mai 1989, M. Claude Razel (société Razel Frères) notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour, à la suite d'un entretien avec M. Roverato, président du groupe Fougerolle (cote B, 3898, Sc. 1, 420 ; rapport, tome 4, p. 1188) : " 5. Le TGV Nord ne marchera pas jusqu'au bout. "
41. Dans le cahier de notes manuscrites de M. Dumazer (Guintoli), on peut lire, à la date du 23 mai 1989, les mentions suivantes, relatives à une réunion tenue à " PAR(is ?) " avec " M. Rey ", " G. Raoul ", " GC " et " YB " (cotes B, 3880, Sc. 5, 103 et 103 bis ; rapport, tome 4, pp. 1182 et 1183 ; MM. Rey et Raoul appartiennent à l'entreprise GTM) :
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42. L'agenda de poche pour 1989 de M. Peticolas (Campenon-bernard) indique, à la date du 7 juin (cote A, 1948, Sc. 2, 64; rapport, tome 4, p. 719, sq.) :
"13h 5 couverts G. Michel M. Cote LP + heiser
Pb barreau Nord (CM + Razel + NF + non (illisible)
-----
Pb"
43. Le cahier de notes manuscrites de M. Razel, président-directeur général de la société homonyme, comporte les mentions suivantes à la date du 21 juillet 1989 (cote B, 3898, Sc. 1, 79 ; rapport, tome 4, p. 1185) :
" P. Schoonheere
(...)
JP Parayre veut aller voir Pronost pr. convenir d'un rabais général, ce qui ne serait pas dans nos vues.
Les 4 Grands se serreraient les coudes pr ne pas baisser les bétons et tondre au passage les terrassiers.
PS va essayer de ramener Heyser à la raison: pas de rupture avec la SNCF, qui se donne les moyens de mettre des Européens dans la course.
RN est bien au courant.
Blocage avec Guintoli. La DDE veur regrouper les soumissions Guintoli et Razel: si pas d'accord possible entre G et R. DDE donnerait le lot à Razel. Ne devrait donc pas nous échapper."
44. Peu après, M. Razel établissait un tableau dans ce même cahier de notes manuscrites (cote B, 3898, Sc. 1, 162 ; rapport, tome 4, p. 1186). Ce tableau est postérieur au 12 septembre 1989 (ibid., 158) et antérieur au 19 septembre suivant (ibid., 168), et il comporte trois colonnes (" Total piloté ", " Part Razel " et " Durée ") et 19 lignes dont les 16e, 17e et 18e sont : " TGV Nord ", " TGV Barreau " et " TGV Sud-Est " et ne comportent aucun chiffre dans les colonnes.
45. Sur des notes manuscrites saisies dans l'entreprise Bec et datées du 8 novembre 1989, on peut lire (cote B, 3907, Sc. 3, 41, rapport, tome 4, p. 1207) :
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46. Des notes manuscrites datées du 24 janvier 1990 de M. Cazenove (société Razel) indiquent (cote B, 3898, Sc. 3, 666 ; rapport, tome 4, p. 1206) :
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47. Sur un document saisi dans les locaux de l'entreprise Razel, dactylographié et constituant un " projet " de la " liste des questions proposées par Razel " pour un " comité n° 2 " du 10 avril 1990, des annotations manuscrites (de M. Cazenove) ont été portées en face de la rubrique " TGV Lyon-Valence " (cote B, 3898, Sc. 3, 596 ; rapport, tome 4, p. 1199). Ces annotations sont les suivantes :
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48. Dans une lettre adressée le 21 mai 1990 à M. Delabre (Ballot), M. Cazenove (Razel) écrivait (cote B, 3898, Sc. 3, 633 ; rapport, tome 4, p. 1205) :
" Faisant suite à notre premier contact de ce jour, nous vous confirmons l'accord de principe sur lequel nos deux groupements sont convenus de se rapprocher. La position de Razel tient compte des confirmations prochaines à obtenir, du désistement de l'entreprise Spada sur ce lot 44 et de l'accord sur le montant de la participation souhaitée par Razel dans la participation du TGV Sud-Est Lyon-Valence (ainsi que du complément de participation de Prigent). "
49. Un document manuscrit de M. Yvon Dumazer, président du directoire de la société Guintoli, intitulé " Fax à Muller " et daté du 8 juin 1990, indique (cote B, 3880, c. 2, 54 ; rapport, tome 4, p. 1180) : " TGV lot 21. Ai fini par avoir Thievent ce matin et lui ai exposé clairement notre opposition formelle à voir un troisième participant sur le 26 (TAC), ceci sur les quatre arguments convenus :
- sur trois lots d'importance équivalente, il faut laisser deux terrassiers sur chacun ;
- (...) ;
- Bec n'a pour l'instant travaillé que dans France-Sud et a par ailleurs obtenu toutes assurances sur la localisation du solde de son CA.
Thievent m'a confirmé qu'à hier soir le problème d'un glissement de DTP au Sud n'avait pas été évoqué mais qu'il pressentait une prochaine intervention dans ce sens. "
50. Le compte rendu du " Comité de coordination Dumez-Razel n° 3 du 20 juin 1990 au siège de Razel ", en date du 3 juillet 1990, indique (cote B, 3898, Sc. 3, 600 ; rapport, tome 4, p. 1202) : " 8) TGV Est : M. Schoonheere manifeste l'intention de se rapprocher de GTM sur ce projet. M. Heiser indique que des discussions préliminaires ont été engagées avec certains de nos collègues, mais que rien ne pourra être décidé avant de connaître les grandes lignes de la procédure qui sera suivie par la SNCF (découpage en trois ou plusieurs lots, financement ; concurrence étrangère, etc.).
Il est décidé de reparler de ce projet lors du prochain comité consultatif. "
51. Un cahier comportant des notes manuscrites a été saisi dans le bureau de la secrétaire commune à MM. Violet et Calinaud, cadres de la société Fougerolle. Sur ce cahier, on peut lire, dans un encadré portant la date du 26 juillet 1990, une liste de noms et d'abrévations qui ont été barrés, mais dont certains peuvent néanmoins être lus. Cet encadré indique (cote B, 3859, Sc. 1, 59 V° ; rapport, tome 4, p. 1175) :
"26/07
Réunion
(illisible)
Pottier - Qy
Meslin - Dz
(illisible)
Srralta - Spie
gendreau - Borie
Nivot
Blin - CB"
52. La première page du cahier à spirale de notes manuscrites de M. Pialoux, adjoint de M. Delabre chargé de l'étude de la section 44, à l'agence de Rouen de l'entreprise Ballot, indique à la date du 10 septembre 1990 (cote B, 3990, Sc. 1, 11 V° ; rapport, tome 4, pp. 1241 et 1242) : " M. Foury de Dumez veut savoir le pourcentage de Razel du lot 44. ->Delabre ".
53. Sur des notes manuscrites saisies dans les locaux de l'entreprise Bec et datées du 15 septembre 1990, on peut lire (cote B, 3907, Sc. 3, 43 ; rapport, tome 4, p. 1208) :
"TGV Lignes futures
Déjeuner Bouygues. DTP. Bec
Cot - Brunet - Seeli
(...)
TGV futurs
Accord de Cot sur poursuite gpt Lyon Valence en cas 11.21.31
voir note du 10.09.90. remise
- discutions sur
3 gpt en cas 1)
répartition en cas 2)
sur OA, V.T
By GTM 35 %
Bec Muller (-D&B), Razel, 10 %
Position D & B : à intégrer probabt : à revoir
Deschiron - Valérian :
A brunet : mérite réflexion
C. Seeli : confirme le plutôt non
Suite
- C. S voit Tarbès / Dumez rôle moteur
- Discution à S
- Discution à G - Cot"
54. Une note de M. Legrand (société Quillery), en date du 9 novembre 1990, indique (cote B, 3997, Sc. 5, 33 ; rapport, tome 4, p. 1253) ; " Objet : TGV / D'entretiens récents avec les membres de la direction générale de la SNCF, je retire les informations suivantes : 1) La mise en œuvre de la première phase du schéma directeur TGV/(...) Les premiers travaux ne sont pas attendus avant courant 1993, ce qui peut, surtout si nous ne nous plaçons pas sur les premiers appels d'offres, se traduire par une discontinuité avec notre part actuelle du programme TGV (qui constituera en 1991 la principale source d'activité des grands travaux). "
55. M. Jacques Gautherie, gérant de la SNC Campenon-Bernard, a déclaré le 22 novembre 1990 (cotes B, 1548 et 1549 ; rapport, tome 4, p. 106, sq.) :
" Concernant le document saisi dans mon bureau (cote 62 du scellé no 2), il s'agit de notes prises suite à mon entrée dans l'entreprise et à l'occasion de l'analyse du marché français. Notamment en ce qui concerne le TGV, c'est une analyse globale du niveau d'activité que Campenon-Bernard pouvait prétendre sur la base de ses atouts. Je n'ai rien à dire sur les mots " leader " et " réunion ", de plus je ne suis pas sûr que ce soit le mot " réunion " qui soit inscrit sur ce document. Ce sont des notes qui ont été prises au hasard et je n'ai aucune information complémentaire à donner. A ma connaissance, les noms marqués sont nos concurrents.
(...) En ce qui concerne les appels d'offres, étant génie-civilistes nous recherchons des entreprises dont les métiers sont complémentaires, et c'est le rôle de M. Petitcolas d'effectuer ces recherches. "
56. M. Louis Petitcolas, chargé des Grands Projets en France et adjoint de M. Gautherie au sein de Campenon-Bernard, a déclaré le 17 décembre 1990 (cotes B, 1556 à 1558 ; rapport, tome 4, p. 1076, sq.) : " En ma qualité de directeur chargé des grands projets France, j'ai sous ma responsabilité le choix des marchés sur lesquels une offre sera remise, l'élaboration des offres qui seront remises et le suivi de l'exécution des travaux. J'ai, par conséquent, la charge de la stratégie d'alliance de Campenon-Bernard avec d'autres entreprises pour la remise d'offres en groupement sur certains marchés. A cet effet, je prends personnellement contact avec les responsables des autres entreprises.
Concernant les marchés TGV, notre stratégie d'alliance a été mise en œuvre compte tenu de plusieurs critères : importance des travaux (TGV Nord interconnexion, TGV Rhône-Alpes) à réaliser, contrainte des délais, spécificité de Campenon-Bernard.
Campenon-Bernard ne possède pas de filiale terrassement et doit donc, sur les marchés TGV, trouver un partenaire terrassier, qui n'est pas toujours le même et qui est choisi au coup par coup.
(...) S'agissant du document coté 88 appartenant au scellé n° 2 de la saisie effectuée chez Campenon-Bernard, il remonte à l'époque où j'ai commencé à m'intéresser au TGV en 1988, donc. J'ai essayé de faire l'état des lieux et de voir comment Campenon-Bernard pouvait se positionner sur ces marchés. Deux solutions me semblaient envisageables : d'une part, celle de la constitution d'un groupement initié par Campenon-Bernard, d'autre part, l'intégration de Campenon-Bernard dans des groupements déjà constitués. Il fallait trouver un ou plusieurs terrassiers, ainsi que des entreprises petites ou moyennes performantes sur certains ouvrages SNCF. Ces groupements envisagés à l'époque sont des hypothèses de travail non confirmées par la suite. Ces informations résultent de nombreux contacts téléphoniques pris avec les responsables de ces entreprises pour voir quels étaient les mariages possibles. Je ne me souviens pas avoir participé à une réunion sur ce sujet. Je ne me souviens pas de la signification qu'a pu avoir la mention " refus 5e groupement ". Concernant la rubrique " 2. Objet " du document précité, son contenu avait pour objet de clarifier vis-à-vis des implantations régionales la politique de la société sur les marchés concernés.
Sur la formule de calcul énoncée sur le même document, j'en ignore la signification. Quant au résultat final, il correspond à une probabilité d'obtention de chiffre d'affaires, précédée par ce calcul, cette formule, dont j'ai oublié la signification des paramètres. De même pour le document coté 6 appartenant au scellé n° 3 de la saisie effectuée chez Campenon-Bernard et pour les formules de calcul qui y sont portées. "
57. M. Gilbert Battigello, adjoint de M. Petitcolas, a déclaré le 26 novembre 1990 (cote B, 1554 ; rapport, tome 4, p. 1552, sq.) : " Concernant le document daté du 20-12-88 (scellé n° 3, cote 6), il s'agit d'estimations de chiffre d'affaires. Je pense que les montants globaux (ex : 8000) correspondent à des montants globaux de marchés tous corps d'état confondus. Je ne connais pas la signification des fractions. Ce n'est pas moi qui ai établi ce document, je suppose que c'est M. Petitcolas. "
58. M. Bernard Tarbès, vice-président-directeur général de GTM-BTP, a déclaré le 22 janvier 1991 (cote B, 1413 ; rapport, tome 4, p. 1411, sq.) : " Les marchés du TGV Nord, d'une part, du TGV Rhône-Alpes, d'autre part, ont fait l'objet de rapprochements entre entreprises et de négociations distinctes et non globales. Je n'ai pas eu connaissance de réunions ayant eu lieu entre les présidents de groupes en 1988 concernant les marchés TGV. "
59. M. Jean-Marie Serralta, responsable du génie civil au titre de l'activité France et Europe du groupe Spie-Batignolles (sociétés Spie-Batignolles, Citra et filiales), a déclaré le 24 janvier 1991 (cotes B, 1466 et 1467 ; rapport, tome 4, p. 1059, sq.) : " D'une manière générale Spie ne réalise pas de grands terrassements en France et nous avons des relations privilégiées mais pas exclusives avec l'entreprise Bec. Pour les marchés TGV Nord et Rhône-Alpes en lots, nous avons également pour partenaire Borie-SAE. La politique d'alliance se fait dans le cadre de cette philosophie et en fonction du volume et de la nature des travaux. "
60. M. Jean-Jacques Massip, directeur adjoint chargé de l'activité France-Europe pour les grandes opérations de Sogea, a déclaré le 3 janvier 1991 (cotes B, 1510 et 1511 ; rapport, tome 4, p. 1062, sq.) : " Nous avons été amenés à nous rapprocher de GTM à cause de notre activité conjointe au sein de Cofiroute qui nous avait amenés à faire des études pour les futurs TGV dont le TGV Nord et le contournement de Lyon.
Les rapprochements ultérieurs se sont faits en fonction :
- de l'importance des lots ;
- de l'intérêt de chacun aux appels d'offres ;
- des moyens disponibles en études.
Pour les marchés TGV, je n'ai pas tenu ou participé à des réunions en dehors de celles tenues lorsqu'un groupement était constitué pour une soumission. En 1988, il n'y a pas eu de réunion entre les représentants des entreprises Dumez, Bouygues, Sogea, GTM, SAE, Fougerolle en vue de la constitution de groupements.
Nous n'avons pas répondu avec Bouygues ou Dumez sur quelque lot que ce soit sur les marchés TGV Nord interconnexion ou Lyon. "
61. M. Michel Cote, directeur génie civil - ouvrages d'art de la société Bouygues SA, a déclaré le 14 janvier 1991 (cotes B, 1458 et 1459 ; rapport, tome 4, p. 1055, sq.) : " Les marchés passés par la SNCF pour la construction des TGV se divisent en deux parties : d'une part, le contournement Est de Lyon (section 21), et, d'autre part, les lots classiques du TGV Nord, interconnexion et Lyon-Nord. (...) Pour les autres appels d'offres, autres que la section 21 nous avons constitué des groupements au cas par cas. Dans le cas de nos filiales, chacune a ses spécificités, les discussions se font au coup par coup. "
62. M. Michel Pottier, directeur des grands travaux de la société Quillery, a déclaré le 13 décembre 1990 (cote B, 1752 et 1768, rapport, tome 4, p. 1086, sq.) : " Nous nous constituons en groupement lorsque, sur une affaire donnée, nous estimons ne pas avoir les capacités de compétition maximum. Nous additionnons nos moyens dans divers domaines (techniques, d'étude, financiers et implantations régionales). C'est également un partage des risques. Toute entreprise membre du groupement doit s'exécuter dans le cadre des obligations définies dans le cadre de la convention, même si elle n'exécute pas elle-même de travaux. La société en participation permet de répartir essentiellement les risques et les avantages tirés du marché. En 1988, nous n'avons pas été contactés par des entreprises pour constituer des groupements en vue de soumissionner sur l'ensemble des marchés TGV (Nord, interconnexion, Rhône-Alpes). "
63. M. Claude Seeli, directeur général de la société Bec Frères, a déclaré (cote B, 1848 ; rapport, tome 4, p. 1098, sq.) : " En prévision des prochains marchés TGV et de leur mode de dévolution (grands lots ou concessions), nous avons souhaité conforter une alliance sûre avec une entreprise possédant les meilleures capacités. (...) Je me suis demandé si Bouygues n'avait pas d'autre alliance qui ne lui auraient pas permis de donner suite à notre souhait. Depuis cette date, nous n'avons pas conclu d'accord avec Bouygues. J'ai contacté M. Tarbès qui m'a indiqué qu'il ne pouvait envisager un accord compte tenu de sa participation dans Cofiroute. Si l'accord envisagé avait pu être concrétisé, M. Tarbès aurait pu avoir un rôle moteur. "
64. Concernant les pièces saisies dans son bureau, M. Jean-Claude Cazenove, directeur commercial de la société Razel, a déclaré le 15 janvier 1990 (cote B, 1808 ; rapport, tome 4, p. 1093, sq.) : " Sur le document coté 596 (scellé n° 3 saisi chez M. Cazenove), les notes que j'ai prises signifient que le lot 44 occuperait le solde de notre capacité de matériel sur le TGV Nord, ce qui correspondait, nous avait-on dit, à une fourchette de travaux se situant entre 80 et 150 millions de francs. Ces notes ont été prises en perspective d'un comité de coordination Dumez-Razel. Sur le document coté 666 (scellé n° 3 saisi chez M. Cazenove), je pense que la mention " R = 500 N 150 SE " correspond au total des marchés déjà obtenus. Pour le reste, je ne me rappelle (ni de) la signification de ces annotations, ni de la mention " GTM ".
65. M. Yvon Dumazer, président du directoire de la société Guintoli, a déclaré le 21 décembre 1990 (cote B, 2455 à 2457 ; rapport, tome 4, p. 1130, sq.) : " Concernant le document coté 103 appartenant au scellé n° 5 saisi dans mon bureau, il s'agit de notes prises au cours d'une réunion chez GTM à Nanterre à laquelle j'ai assisté partiellement et par hasard (je venais chercher Gérard Comte, directeur général de Guintoli, avec qui je devais prendre un avion), réunion qui comptait outre Gérard Comte et moi-même, M. Rey (directeur chez GTM, à ma connaissance responsable de la branche terrassement pour toute la France) ainsi qu'un de ses adjoints, M. Raoul, ingénieur en chef.
Au cours de cette réunion, les lots 34 et 11, 12, 41 ont été l'objet de discussion ; ces lots en étaient à cette date (28/05/89) au stade de l'appel d'offres. (...) Je ne me souviens pas de la raison de la mention du lot 34 qui figure sur ce document. (...) Je ne me souviens pas de la signification des montants de 755 et 620 millions de francs HT, mentionnés sur ce document ; il me semble toutefois qu'ils se rapportent à l'ensemble 34 + 11, 12, 41 (c'est ce que semble montrer l'accolade).
La discussion a porté sur la part qui serait attribuée à Guintoli au cas où le groupement dont Guintoli et GTM étaient membres obtiendrait un marché. C'est la signification des deux lignes précédées du mot " convention " (en abrégé), qui sont deux hypothèses de fixation de la part Guintoli, soit du chiffre d'affaires terrassement, soit 20 % du chiffre d'affaires total.
La signification du terme " sac " plusieurs fois porté sur ce document est la suivante : " seul ou conjoint ", conjoint sous-entendu avec un ou plusieurs autres terrassiers et non avec un groupement général, ce qui est forcément le cas pour Guintoli. La mention " 220 millions de francs HT acquis - 230 millions de francs à prendre " semble correspondre aux deux hypothèses de fixation de part Guintoli précitées.
Sur la mention d'autres entreprises, il s'agit d'une approche de la concurrence (visant principalement le terrassement) sur ces affaires. Concernant le chiffre mentionné en regard de chaque entreprise, il s'agit, d'une part, d'informations (concernant les quatre entreprises citées en premier et qui étaient en voie de se constituer en groupement) émanant de l'un des participants (hormis moi-même) à la suite de recoupements ; d'autre part (concernant les deux entreprises citées ensuite) de supputations sur le poids que pourraient représenter leurs parts au sein d'éventuels groupements.
Sur le même document, les mentions " Lyon-Sud... 2 milliards de francs et Barreau... 2 milliards de francs " correspondent aux marchés à venir et à leur montant estimé par le client au stade des avant-projets. " Barreau " était la dénomination, à l'époque, de l'interconnexion. L'ensemble TGV Nord + Interconnexion + Lyon-Sud était alors estimé par la direction générale de la SNCF à 10 milliards de francs dont 4,4 en terrassement et 5,6 en ouvrages d'art, ce qui figure sur le document coté 103 bis du scellé n° 5 : 5 milliards pour le TGV Nord, 2 pour Lyon-Sud, 2 pour l'Interconnexion, 1 non localisé (...).
La mention " 1,1 milliard de terrassement par sac sur l'ensemble " portée sur le document coté 103 bis s'explique ainsi : si Guintoli avait avec GTM poursuivi la politique fixée, le groupement aurait pu peser pour 1,1 milliard de francs sur l'ensemble des travaux de terrassement. Il s'agissait d'un objectif estimé possible. "
5. Le pont de Normandie
L'analyse des offres pour le lot béton faite par les membres de la mission Pont de Normandie les a conduits à formuler les observations suivantes :
a) Les offres des groupements pilotés par Bouygues et Campenon-Bernard sont " quasi égales sans que ceci puisse être l'effet du hasard " (cot A, 55 ; rapport, tome 4, p. 557, sq.). En effet, elles présentent un écart de l'ordre de " 0,2 % de différence sur la totalité des réponses. Ceci prouve qu'il y a une entente, car, sur un marché de 700 millions de francs, une telle similitude de devis est incroyable " (cote 39 ; rapport, tome 4, p. 543, sq.).
b) Ces deux offres présentent sur certains postes, notamment les postes études, béton et pylônes, des anomalies flagrantes par rapport à l'estimation et à des ouvrages comparables et contemporains comme le pont de Cheviré (cotes A, 37 à 45 ; rapport, tome 4, p. 543 à 551).
c) La société Fougerolle, dont le groupement a présenté une offre sensiblement plus élevée que celle des deux autres groupements et ne comportant aucune variante technique, ne paraît s'être " jamais réellement intéressée (au projet) après avoir reçu le dossier d'appel d'offres et malgré la grande motivation des autres membres de son groupement " (cote A, 55 ; rapport, tome 4, p. 558).
1. Un document manuscrit daté du 23 novembre 1987, saisi dans les locaux de la société Dumez-TP et rédigé par M. Heiser, directeur général, indique, parmi les " affaires en étude " (cote A, 1966, Sc. 2, 385 ; rapport, tome 4, p. 755 ; " Bo " = Borie ; " DZ " = Dumez-TP : " CB " = Campenon-Bernard) : " Pont de Normandie (ex-Honfleur). On prendrait SPIE dans notre groupement, de manière à réduire 2 offres (Bo + SAE d'une part, DZ + SPIE + CB + Sogea + GTM d'autre part). A ce moment-là, une nouvelle idée (compte tenu de la performance technique : 850 ml de portée, soit plus du double de ce qui a déjà été réalisé) : pourquoi pas un GIE à 7 entreprises ? Suivi par J.-F. Michel ".
2. Le compte rendu du "Comité de direction de Dumez travaux publics n° 3 du lundi 22 février 1988 à 8 heures " indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1550 ; rapport, tome 4, p. 802) : " 5.5. Pont de Normandie. La cellule d'études démarre le 7 mars 1988 ; Bouygues souhaite la création d'un GIE des différentes sociétés concernées dont il prendrait le pilotage. M. Parayre indique son désaccord sur le pilotage de cette affaire par Bouygues. Ce pilotage pourrait être assuré par Campenon ou GTM. "
3. Ce même 22 février 1988, M. Dehan (de la société Dumez-TP) notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 6, 1137 V° ; rapport, tome 4, p. 761 ; 'B' = Bouygues et 'JPP' = M. J.-P. Parayre, PDG de Dumez-TP) :
" Pont de Normandie
Cellule intégrée : démarre 7 mars
B suggère un accord général officiel avec GIE dont B. serait pilote : non (en cost + phi)
B. essaierait aussi de faire un accord avec Spie Campenon et GTM pour se partager les pilotages.
JPP ne veut pas entendre parler de B. pilote de cette opération."
4. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez travaux publics n° 4 du lundi 29 février 1988, à 8 heures " indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1546 ; rapport, tome 4, p. 801 ; " GC " = Génie civil) : " 5.6 Pont de Normandie / Le projet se décompose en deux lots : lot 1 pour le GC et lot 3 pour la charpente de la travée centrale. Notre groupement est préqualifié pour les 2 lots, à côté de charpentiers ou groupements mixtes pour le lot 2. Bouygues poursuivrait son offensive en vice de la création d'un GIE général dont il voudrait prendre la tête ".
5. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez travaux publics n° 6 du lundi 14 mars 1988, à 8 heures " indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1541 ; rapport, tome 4, p. 800) :
"5.7. POnt de Normandie
On peut envisager deux solutions :
. Aller à la bagarre
. Faire un GIE avec tous les préqualifiés, mais à condition de restreindre les ambitions de Bouygues et d'imposer, par exemple, une Gérane Campenon Bernard GTM"
6. Ce même 14 mars 1988, M. Dehan notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1180 R° ; rapport, tome 4, p. 762 ; M. Jammes est le directeur général de la SAE ; " looser fee " = frais, coûts pour le perdant) :
"7 - Pont de Normandie
appel de James. Possibilités :
- bagarre + looser fee
- un seul GT Français
Eviter à tous prix une solution où B. pourrait se prévaloir du leadership technique de faàon lui permettant de se mettre en vedette".
7. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez travaux publics n° 8 du lundi 28 mars 1988, à 8 heures " indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1536 ; rapport, tome 4, p. 799) : " 5.3. Pont de Normandie / M. Heiser précise la proposition faite par M. Derbesse (Bouygues). Réunion subséquente entre MM. Parayre, Heiser et Thievent, afin de clarifier notre position. Objectif gestion intégrée du groupement, avec minoration des parts de Bouygues et CBC et majoration de la part de GTM. Eviter le leadership de Bouygues ".
8. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez-TP n° 9 du lundi 11 avril 1988, à 8 heures " indique (cote A, 1966, Sc. 2, 286 ; rapport, tome 4, p. 750) : " 3.6. Pont de Normandie / Regroupement général toujours envisagé, compte tenu de la difficulté du projet. Deux autres ponts (Gennevilliers et Rochefort) sont aussi à l'étude ".
9. Le protocole d'accord du 29 avril 1988 relatif au Pont de Normandie convenu entre Fougerolle France, Chantiers modernes, Nord-France Entreprise, Léon Ballot et SBBM et Six (cote A, 1500 à 1503 ; rapport, tome 4, p. 640) prévoit à son article 4.
" En cas de succès lors de l'appel d'offres, il sera passé entre les Entreprises un acte de société en participation, qui sera enregistré avant la signature du marché correspondant, et reprenant les termes du présent protocole.
Les parts des associés dans la société en participation seront les suivantes :
Fougerolle France : 33 %
Chantiers Modernes : 33 %
Ballot : 33 %
Nord-France : 0,50 %
SBBM et Six : 0,50 %
10. L'agenda 1988 de M. A. de la Chaise (entreprise Bouygues) indique, à la date du 4 mai à 11 h 30 (cote A, 1916, Sc. 1, 24 V° ; rapport, tome 4, pp. 662 et 663 ; M. Battigello appartient à l'entreprise Campenon-Bernard " CB ") : " RV Clt 2, CB/M. Batigello - Rauthier ".
11. Un post-it blanc collé dans cet agenda à la semaine du 2 au 8 mai (cote A, 1916, Sc. 1, 26 ; rapport, tome 4, p. 665) porte les mentions manuscrites suivantes :
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12. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez-TP n° 13 du lundi 9 mai 1988 à 8 heures " indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1532 ; rapport, tome 4, p. 798) : " 5. Pont de Normandie / Le financement étant assuré par plusieurs chambres de commerce locales, il est nécessaire qu'il y ait au moins deux groupements, même si ces groupements auront à se rapprocher ensuite sous la pression de l'équipement en fonction de la difficulté de l'ouvrage. Il faudra examiner le problème posé par CFEM qui s'estime mal traité au sein de notre groupement. "
13. Ce même 9 mai 1988, M. Dehan notait, dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1200 V°, rapport, tome 4, p. 766 ; M. Antoine Ruffenacht est député de Seine-Maritime et président du conseil régional de Haute-Normandie ; " MO " : maîtrise d'ouvrage ; " IF " : il faut) : " 8-Ponts / Avance bien / 1 - Pont de Normandie. Ruffenac averti de la tentative de rapprochement des 2 groupements : comprend notre argumentation, mais la MO est très disparate : différentes chambres de commerce locales ->IF 2 propositions étant entendu qu'on sera rapprochés à la demande du MO / CFEM ne serait pas content de son traitement dans notre GT ; JFM voit. "
14. Le " point de la situation au 24 août 1988 " de la mission Pont de Normandie indique (cote A, 42 ; rapport, tome 4, p. 548) que " fin avril, selon nos informations, Bouygues (M. Derbesse) et Campenon-Bernard (M. Guittonneau) sont allés voir M. Méhaignerie pour lui indiquer leur souhait de se regrouper compte tenu des difficultés et des risques de l'affaire. Ils ont renouvelé leur démarche auprès du maître d'ouvrage le 10 mai 1988, mettant en avant le problème du montage et des études, ainsi que la difficulté du projet. Une fin de non-recevoir a été opposée à leur demande de regroupement. Des rumeurs ont continué à circuler faisant état du maintien des contacts entre les 2 groupements, même si 2 dossiers séparés seraient réunis ".
15. L'agenda 1988 de M. A. de la Chaise (entreprise Bouygues) indique, à la date du 11 mai à la rubrique " Dominante " (cote A, 1916, Sc. 1, 25 V° ; rapport, tome 4, p. 666) " CB ".
16. Cet agenda indique, à la date du 16 mai à la rubrique " Dominante " (cote A, 1916, Sc. 1, 27 V° ; rapport, tome 4, p. 668) : " CB ".
17. Ce même 16 mai 1988, M Dehan (entreprise Dumez-TP) notait, dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1204 R° ; rapport, tome 4, p. 768) : " 4 - Projets / 4.1. Pont de Rochefort / IF 2 offres. Pas d'accord sur le moins-disant ! / sur Normandie. "
18. Le lendemain, 17 mai, M. Dehan notait dans ce même cahier (cote A, 1966, Sc. 7, 1206 R° ; rapport, tome 4, p. 769) : " Sur pont Normandie, 2 offres : / Nous remettons l'offre la + basse en béton avec engagement des bétonniers sur la partie métal. / Fée B < aux nôtres >total très voisin. "
19. L'agenda 1988 de M. A. de la Chaise (entreprise Bouygues) indique, à la date du 30 mai entre 14 et 16 heures (cote A, 1916, Sc. 1, 29 V° ; rapport, tome 4, p. 672 ; MM. Petitcolas et Cote - " MCe " - appartiennent aux entreprises Campenon-Bernard et Bouygues) :
"Mce - PetitColas.MC
Parmentier (CFEM)
3 AT 4
Mazon (Baudin Char)"
20. Le même agenda indique, à la date du 15 juin à 14 heures (cote A, 1916, Sc. 1, 31 V° ; rapport, tome 4, p. 676) :
"Battigello - Champs Ely
Fortier -- Anneron"
21. A la date du 21 juin, à la rubrique " Dominante ", il indique : " Tikoniki + Matras - réunion prix " et, à 9 heures : " Normandie / 1 AT 1 " (cote A, 1916, Sc. 1, 32 V° ; rapport, tome 4, p. 678 : MM. Fortier, Mafras et Tifonicki appartiennent à l'entreprise Campenon-Bernard).
22. Un télex adressé le 22 juin 1988 à 16 h 26 par la société Bouygues à la société Monberg et Thorsen confirme une communication téléphonique du même jour et fixe l'ordre du jour d'une réunion des deux entreprises à Copenhague, le 3 juillet suivant (cote A, 1916, Sc. 1, 169 et 170 ; rapport, tome 4, p. 694, sq.). Des mentions manuscrites sont portées sur ce document, parmi lesquelles : " Date de remise des informations par By / (...) Offre By par rapport à celle de CB ".
23. L'agenda 1988 de M. A. de la Chaise (entreprise Bouygues) indique, à la date du 23 juin entre 8 h 30 et 9 heures (cote A, 1916, Sc. 1, 32 V° ; rapport, tome 4, p. 678) : " Matras - Tifoniki / Battigello / Prix unitaires ".
24. A la date du 30 juin à 15 heures (cote A, 1916, Sc. 1, 33 V° ; rapport, tome 4, p. 680) : " Réserves / Lacombe - C.B. / Finalisation grille / prix ".
25. Une note manuscrite, datée du 7 juillet 1988 et destinée à M. Heiser (entreprise Dumez-TP) indique (cote A, 1966, Sc. 1, 168 ; rapport, tome 4, p. 748) ; " 2. Calendrier de bouclage. / - le 19/07. - Comparaison des prix des groupements. / - le 21/07 à 8 h 30 chez Campenon réunion de notre groupement ".
26. Un tableau, saisi au siège de l'entreprise Bouygues, daté du 11 juillet 1988 et relatif au " Pont de Normandie - Solution de base - Lot principal - Récapitulation des déboursés " (cote A, 1916, Sc. 1, 93 ; rapport, tome 4, p. 691), comporte l'indication manuscrite suivante : " 8. Etude avant-projet / 8 - Etudes complémentaires / Respect des protocoles / Fougerolle / Gennevilliers. "
27. Le " compte rendu des réunions tenues à Vélizy le mardi 12 juillet 1988 à 9 heures " portant sur le pont de Normandie et qui réunissaient des représentants des entreprises Ballot, Chantiers modernes, CFEM et Fougerolle, saisi dans les locaux de cette dernière (cote A, 1978, Sc. 1, 10 à 15 ; rapport, tome 4, p. 803, sq.), indique notamment (ibid., 12) : " Point des études Conformément aux décisions prises le 24 juin, un nombre minimum de plans sont en cours de préparation. "
28. Un tableau manuscrit saisi dans les locaux de l'entreprise Bouygues (cote A, 1916, Sc. 7, 55 ; rapport, tome 4, p. 698), daté du 19 juillet 1988, à 16 heures, et relatif à la " comparaison des débours directs totaux " du " Pont de Normandie ", comporte, pour les " séries " 100 à 700, des chiffres en trois colonnes. La première est intitulée " 1re solution ", la deuxième " 2e solution " et la troisième " DELTA (1) - (2) ". Des mentions manuscrites au crayon, inscrites dans un cercle, indiquent que la " 1re solution " est celle de " CB " et la " 2e solution " celle de " By ".
29. L'agenda 1988 de M. A. de la Chaise (entreprise Bouygues) indique, à la date du 19 juillet, entre 8 et 12 heures (cote A, 1916, Sc. 1, 36 V° ; rapport, tome 4, p. 686) : " Prix CD - BY / BY / 1.AT8 ".
30. Il indique, à la date du 20 juillet, entre 8 heures et 9 h 30 (cote A, 1916, Sc. 1, 36 V° ; rapport, tome 4, p. 686) : " M. Mauboussin / Vélizy / Fougerolle ".
31. L'agenda 1988 de M. Mauboussin (entreprise Fougerolle) indique, à cette même date du 20 juillet, à 8 heures (cote A, 1978, Sc. 3, 34 V° ; rapport, tome 4, p. 809) : " Battigello - x/ICI ".
32. Deux tableaux dactylographiés, non datés, ont été saisis au secrétariat de M. Gautherie dans les locaux de Campenon-Bernard (cote A, 1959, Sc. 2, 28 et 29 ; rapport, tome 4, pp. 745 et 746). Le premier porte en tête la mention manuscrite " Pont de Honfleur ", qui est la première désignation du pont de Normandie, et comporte quatre colonnes (" Proposition B ", " Proposition SAE ", " Proposition GTM " et " Moyenne ") et une ligne pour chacune des entreprises qui composeront, par la suite, le GIE Pont de Normandie, à savoir : " Bouygues ", " Campenon " - " Bernard ", " GTM ", " SAE ", " Sogea ", " Dumez " et " Citra ". Une ligne, séparée par un pointillé de celles relatives à ces entreprises, est réservée à Fougerolle " (pm) " (lire : " pour mémoire ") pour les trois " propositions ". Puis le total est calculé avec et sans la présence de Fougerolle. Au terme de ces calculs, les deux tableaux établissent les parts résultantes de chaque entreprise ou groupe de deux entreprises concernés et des deux groupements qui seront menés par Campenon-Bernard et Bouygues, à l'exception de Fougerolle.
Les parts par entreprise qui figurent sur ces tableaux sont différentes de celles qui seront en fin de compte adoptées par le GIE à venir. De même, la société Citra (filiale de Spie-Batignolles) figure sur ces tableaux, alors que ce groupe ne rejoindra le groupement mené par Campenon-Bernard que bien après l'appel à candidatures de novembre 1987.
33. Une note dactylographiée rédigée sur papier à en-tête de Campenon-Bernard, relative au " Pont de Normandie/Réunion du vendredi 22 juillet 1988 interne à Campenon-Bernard " Bouclage de l'offre " (cote A, 1948, Sc. 1, 109, sq. ; rapport, tome 4, p. 711, sq.) indique :
"III - Comparaison des études (au 19 juillet 1988)
1 - Lot principal
1.1 - Choix techniques
1.2 - Incidence prix secs (annexe 5)
1.3 - Chapeau (annexe 5)
1.4 - Vente (annexe 5)
IV - Jeux sur prix de vente"
L'annexe 5 (cote A, 1948, Sc. 1, 115) est un tableau de " comparaison des études " comportant pour la " base " comme pour les " variantes " et pour le lot principal et le lot accessoire, des chiffres répartis en trois colonnes intitulées " 1 ", " 2 " et " Ecart " .
34. L'agenda 1988 de M. A. de la Chaise (entreprise Bouygues) indique, à la date du 22 juillet entre 8 h 30 et 13 h 30 (cote A, 1916, Sc. 1, 37 R° ; rapport, tome 4, p. 687) : " Réunion/prix CB ".
35. Deux tableaux dactylographiés ont été saisis dans les locaux de l'entreprise Bouygues (cote A, 1916, Sc. 1, 101 et 102 ; rapport, tome 4, pp. 692 et 693), relatifs respectivement à la " solution de base " et à la " solution variante ". Pour chaque ligne de ces tableaux, des chiffres ont été portés dans deux colonnes, dont les intitulés ont été occultés par gouachage. Il est toutefois possible de lire par transparence que ces intitulés sont " BY " et " CB ". Du reste, la mention manuscrite portée en haut de la première colonne est " By ". Ces tableaux sont inclus dans une chemise intitulée " Feuilles de marge " (ibid. 99), dont le premier document est daté du 25 juillet 1988 (ibid. 100). Les chiffres du " total vente " sont voisins, mais différents de ceux qui ont été effectivement remis par les deux groupements.
36. L'agenda 1988 de M. A. de la Chaise (entreprise Bouygues) indique, à la date du 25 juillet à 14 h 30 (cote A, 1916, Sc. 1, 37 V° ; rapport, tome 4, p. 688) : " Petitcolas./3 AT4 ".
37. Le compte rendu, daté du 29 juillet 1988, du " comité commercial du 26 juillet 1988 " de Campenon-Bernard, qui réunissait cinq participants, dont M. Gautherie, a été saisi dans cette entreprise (cote A, 1959, Sc. 2, 6 à 8 ; rapport, tome 4, p. 731, sq.). Il traite successivement de " la création d'un comité de direction générale " et des " affaires ". Ces dernières ont été examinées dans l'ordre suivant : TGV Nord, TGV Rhône-Alpes, barrage Serre de la Fare, projet Melox à Marcoule, Synchrotron de Grenoble, métro de Strasbourg, port de Dives-sur-Mer et projet d'aménagement, eurosdisneyland, Puymorens, et, à l'étranger, Malaisie, Turquie, Lesotho, Chine et Grèce Achiloos River.
38. Des notes manuscrites de M. Gautherie ont par ailleurs été saisies, dont une page non datée concerne le pont de Normandie (cote A, 1959, Sc. 2, 9 à 19 ; rapport, tome 4, p. 734, sq.). Ces notes, comme le compte rendu précédent, figurent dans une sous-chemise intitulée " Comité commercial/26 juil 88 " (ibid., 5). Elles suivent le même ordre et utilisent des termes semblables que ce compte-rendu, mais celui-ci est moins exhaustif que les notes manuscrites. Parmi ces dernières, celles qui concernent le pont de Normandie (ibid., 10) indiquent notamment :
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39. L'agenda 1988 de M. A de la Chaise (entreprise Bouygues) indique, à la date du 27 juillet à 8 heures (cote A, 1916, Sc. 1, 37 V° ; rapport, tome 4, p. 688) : " Clichy/Petitcolas/MCe ".
40. A la date du 28 juillet de 14 heures à 15 h 30 (cote A, 1916, Sc. 1, 37 V° ; rapport, tome 4, p. 688) : " Bouclage/MD-JPC-PRi-MCe-MMa ".
41. Deux tableaux relatifs au pont de Normandie ont été saisis dans les locaux de l'entreprise Campenon-Bernard. Le premier, daté du 1er août 1988 (cote A, 1959, Sc. 1, 59 ; rapport, tome 4, p. 728), est intitulé " RECAP " et il récapitule en deux colonnes " BASE " et " VARIANTES " les prix de chacun des deux groupements (colonnes " B " pour Bouygues et " C " pour Campenon-Bernard) pour le lot principal et, après application de " correctifs ", égalise les prix totaux. Le second (ibid., 58), intitulé " Réunion interne à CB du 2 août 1988/Bouclage de l'offre ", reprend les données du précédent en y ajoutant celles relatives au lot accessoire, de manière à aboutir également à un prix identique pour les deux groupes.
42. Dans une note confidentielle datée du 2 septembre et relative à la " réunion Pont de Normandie du 26 août 1988 " (cote A, 46 ; rapport, tome 4, p. 552), un fonctionnaire de la DDE " apporte les propos entendus lors de cette visite. (...) 6 - Nous avons fait nos études chacun de notre côté et nous ne nous sommes concertés qu'à la fin. "
43. L'ordre du jour d'une " réunion d'information du 17 mars 1989 " tenue au sein de Campenon-Bernard et relative au pont de Normandie indique (cote A, 1948, Sc. 1, 18 ; rapport, tome 4, p. 710) :
"2 - Constitution du GIE
. Organigramme et fonctionnement
. Fee de Campeneon Bernard et Bouygues
. Organigramme de la cellule étude - répartition des rôles
. Fonctionnement budgétaire des études
3 - Etat actuel des dépenses pour l'étude de prix et la mise au point des marchés
. GIE
. Campenon Bernard"
44. M. Jacques Gautherie, gérant de la SNC Campenon-Bernard, a déclaré, le 1er février 1990 (cote A, 926 R° ; rapport, tome 4, p. 605, sq.) : " Les notes que j'ai rédigées, lors de mon arrivée chez Campenon-Bernard, à la suite du comité commercial du 26 juillet 1988 et de contacts de divers intervenants de la société peuvent être datées des jours suivants ce comité commercial. "
45. M. Michel Cote, directeur général adjoint de Bouygues, a déclaré, le 10 janvier 1990 (cote A, 725 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 577, sq.) : " Le pont de Normandie est un ouvrage tout à fait exceptionnel (...). La forme du marché, sur bordereau estimatif, ne nous paraissait pas la plus adaptée et nous avons suggéré à l'administration de passer un marché en régie intéressée. A cette époque, nous n'avons pas obtenu satisfaction. L'idée d'un GIE regroupant les moyens d'études des plus grandes entreprises françaises a été évoquée début 1988. Cette idée s'est concrétisée en mai 1988 par une rencontre entre les représentants des entreprises (Campenon-Bernard et Bouygues) avec le ministre de l'équipement. Il nous a demandé de rencontrer le client, celui-ci nous a déclaré qu'il était tenu de recevoir trois offres et qu'il verrait après l'ouverture des plis. Nous avons travaillé séparément, d'un côté le groupement C-B, de l'autre Bouygues, toutefois nous avons eu quelques' contacts. Ces contacts avaient pour objectif :
- d'évaluer en commun les risques technologiques de l'ouvrage ;
- de définir le mode de relations avec les entreprises métalliques.
Nous avons essayé de dégager un consensus sur l'évaluation des risques, ce qui a conduit à remettre des prix très voisins. Nous avons présenté des solutions techniques très différentes. "
46. M. Arnaud de la Chaise, directeur de travaux de l'entreprise Bouygues, a pour sa part déclaré le 10 janvier 1990 (cote A, 790 et 791 ; rapport, tome 4, p. 581, sq.) : " J'ai été nommé directeur du Projet Pont de Normandie en avril-mai 1988, ce qui est contraire au principe de l'entreprise de séparer le commercial-étude-mise à prix de l'exécution. Ceci compte tenu de la difficulté du projet et de la brièveté du temps d'études. Les capacités d'études pour réaliser le pont de Normandie existent chez Bouygues, mais auraient nécessité d'affecter la totalité des bureaux d'études à cette réalisation. J'ai eu des contacts avec le groupement Campenon-Bernard entre mai et août 1988. Ces rencontres avaient pour objet de contrôler les choix techniques adoptés de façon à présenter des offres qui puissent être regroupées par la suite. Dans ce but, nous avons comparé nos méthodes d'exécution et par la suite les déboursés. Les offres devaient être très proches l'une de l'autre. Je n'ai eu aucun contact avec Fougerolle pour le Pont de Normandie ; le 20 juillet 1988 il est possible que j'ai eu un rendez-vous avec M. Mauboussin, mais il ne concernait pas le Pont de Normandie. Je n'ai donc pas rencontré M. Battigello et M. Mauboussin chez Fougerolle.
Concernant le document saisi dans mon bureau (scellé n° 1, pièce n° 93), je n'ai jamais eu connaissance de protocole avec Fougerolle ; à cette époque, nous avions trois protocoles : l'un avec Quille, le second avec Quillery et le troisième avec CFEM. Je ne sais pas pourquoi j'ai écrit " Fougerolle [phi] et Gennevilliers ". Sur le document n° 26, du même scellé, j'ai écrit " Loser [phi] + Gennevilliers " ; je savais à l'époque que le pont de Gennevilliers allait sortir et il m'intéressait puisque j'étais responsable des grands ouvrages, mais je ne sais pas la raison pour laquelle j'ai écrit ces mots.
Les tableaux (scellé n° 1, pièces 101 et 102) sont des comparaisons de prix établis avant la remise des offres, comparaisons réalisées suite aux rencontres avec Campenon-Bernard. "
47. M. Louis Petitcolas, directeur des Grands Projets France de Campenon-Bernard, a déclaré le 4 janvier 1990 (cotes A, 922 V° et 923 R° ; rapport, tome 4, p. 597, sq.) : " Mars 1988 (...) Jusqu'à cette époque, il n'y a eu aucun contact ou idée de rapprochement avec Bouygues. Cette idée est venue après plusieurs mois d'études et la découverte de la complexité de l'ouvrage.
Elle s'est concrétisée en mai 1988 par une démarche des deux groupements " CB " et " Bouygues " auprès du maître d'ouvrage. L'objet de cette démarche était de proposer au client, compte tenu du caractère tout à fait exceptionnel de l'ouvrage, du fait que les études conception n'étaient pas suffisamment avancées, des risques de constructibilité de l'ouvrage et en conséquence des difficultés de mise à prix, de réunir les meilleures compétences françaises dans le domaine et de réaliser les conditions permettant d'aboutir à un marché en régie d'intérêt commun (trop de problèmes restaient en suspens pour ne pas attirer l'attention du maître d'ouvrage sur le degré d'avancement du projet).
Pour respecter la convention de concession, le client avait administrativement besoin de recevoir trois offres et n'a pu, à l'époque, accepter notre proposition : " remettez vos offres, après on verra ". Nous avons convenu de poursuivre deux études séparées afin de faire apparaître le maximum de problèmes liés à cet ouvrage exceptionnel. Ce n'est qu'avant la remise des offres, base ou variante, que nous avons comparé nos résultats. Pour ne pas être hypocrite, nous avons remis exactement les mêmes prix dans tous les cas de figure (les différentes solutions).
Les bases d'un groupement possible CB-Bouygues, acceptables par le client, ont bien sûr été évoquées pendant la période antérieure à la remise des offres. Pour moi, les rencontres de mai-juin 1993 sont des rencontres de procédure et non des rencontres pour comparer les prix qui, à l'époque, n'étaient pas finalisés. Il s'agit de réflexions sur le cadre analytique des prix permettant " in fine " une comparaison rapide.
En ce qui concerne le groupement Fougerolle, celui-ci ne l'a jamais inquiété en tant que concurrent. Son offre ne m'intéressait pas et je n'ai eu aucun contact avec eux. "
48. M. Gilbert Battigello, directeur adjoint des Grands Projets France de Campenon-Bernard, a pour sa part déclaré le 5 janvier 1990 (cote A, 924 V° ; rapport, tome 4, p. 601, sq.) : " Je n'ai pas eu de contact avec les représentants du groupement Fougerolle au sujet des prix pour le Pont de Normandie, durant la période de l'appel d'offres (mars à août 1988). Je ne me souviens pas avoir eu un rendez-vous le 20 juillet avec M. Mauboussin, par contre c'est possible. Je n'avais pas à traiter de problème commun entre Bouygues, Fougerolle et Campenon-Bernard à cette époque.
Après le rejet de proposition d'offre commune (Bouygues - CB), par la Chambre de commerce, il fallait continuer à faire l'étude technique et de prix indépendamment du groupement Bouygues. En revanche, les propositions ne devaient pas contenir d'éléments techniques incompatibles entre elles en vue d'un rapprochement ultérieur. C'est pour cette raison que les contacts avec M. Arnaud de la Chaise ont été maintenus. "
49. M. André Clappier, directeur général de la société Quillery, a déclaré le 7 février 1990 (cote A, 858 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 591, sq.) : " En ce qui concerne le Pont de Normandie, nous étions depuis longtemps avec Bouygues, car nous avons deux implantations régionales importantes à Rouen. En cours d'appel d'offres, notre mandataire nous a proposé, compte tenu de la complexité de l'ouvrage, de faire une démarche commune avec le groupement Campenon-Bernard auprès du maître d'œuvre, ou du maître d'ouvrage, pour remettre une seule offre. Il n'était pas question d'associer Fougerolle, et son groupement, à cette démarche. Suite au refus du maître d'ouvrage, qui désirait plusieurs offres, nous avons continué les études de prix sur la base des choix techniques effectués par notre groupement. Le prix qui a été remis était celui arrêté d'un commun accord par les membres du groupement. Mon mandataire, Bouygues, ne m'a (pas) tenu au courant de concertation avec le groupement Campenon-Bernard. "
50. M. Jean Heiser, directeur général de Dumez-TP, a déclaré le 1er février 1990 (cote A, 1188 V° ; rapport, tome 4, p. 622, sq.) : " Concernant le Pont de Normandie, je savais qu'il y avait des discussions pour le rapprochement des deux groupements Bouygues et Campenon, lors du lancement de l'appel d'offres. Je pense que la part respective de chacun a dû être évoquée ; mais je n'ai pas participé personnellement à ces discussions. C'est M. Jean-François Michel qui avait la charge, pour Dumez, de la partie commerciale de cette affaire. "
51. M. Jacques Allemand, directeur adjoint de GTM-BTP, a déclaré le 2 février 1990 (cote A, 1208 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 626, sq.) : " Je suis intervenu, pour GTM-BTP, sur l'ouvrage " Pont de Normandie " début 1988. Il s'agissait d'une affaire importante et difficile, ce qui nous a conduit à constituer une équipe forte au sein de notre groupement. Pour ma part, je représentais GTM auprès du groupement dont Campenon-Bernard était mandataire.
Après la réception du dossier, nous avons eu confirmation de la difficulté de l'ouvrage, ce qui m'a conduit à approuver la démarche conjointe des deux mandataires (CB-Bouygues) vis-à-vis du maître d'ouvrage. J'ai régulièrement informé de la poursuite du rapprochement et des contacts entre les mandataires, sans y participer. Je savais que l'offre serait comparée aux niveaux techniques et des prix avec celle du groupement Bouygues. Ceci afin de vérifier que l'on était susceptible de travailler ensemble, si le client entérinait un regroupement des deux groupements. "
52. M. Jean-Jacques Massip, directeur à la DGT de la Sogea, a déclaré le 6 février 1990 (cote A, 1013 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 614, sq.) : " Après s'être regroupés au sein du groupement dont Campenon-Bernard était mandataire, nous avons très peu suivi l'affaire du Pont de Normandie. M. Tickonicky de Sogea a été détaché à la cellule d'étude, pour ma part je n'ai assisté qu'à la réunion d'arrêt des prix. Nous avons laissé l'entière liberté à Campenon-Bernard de gérer l'affaire. Cette affaire, de par son caractère exceptionnel, intéressait notre entreprise qui souhaitait y participer pour bénéficier de la référence tout en sachant que sa réalisation était très risquée. (...) Je savais qu'il y avait eu des discussions entre les mandataires (Campenon-Bernard et Bouygues), et le prix, que m'a présenté notre pilote, était le plus bas que nous pouvions consentir. "
53. M. Jean-Marie Serralta, directeur France-Europe du Génie civil de l'entreprise Spie-Batignolles a déclaré le 25 janvier 1990 (cote A, 1279 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 630, sq.) : " En ce qui concerne le Pont de Normandie, nous nous sommes rapprochés du groupement déjà constitué entre Campenon-B., Dumez, GTM et Sogea. Nous avions une participation de 20 % dans ce groupement. J'ai participé aux réunions de constitution du prix de l'offre d'août 1988. J'ai été tenu au courant de la volonté de rapprochement des deux groupements (CB et Bouygues) et des démarches entreprises dans ce sens. L'idée d'un regroupement n'était pas définitive pour moi et je n'avais pas l'impression que le client était obligé de faire ou d'accepter le regroupement. "
54. M. Mauboussin, directeur technique dans la SA Fougerolle, a déclaré le 10 janvier 1990 (cote A, 1506 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 644, sq.) :
" Concernant mon agenda de 1988, le 20 juillet, M. Battigello m'avait prévenu qu'il passait dans les locaux de Fougerolle et qu'à cette occasion il désirait me rencontrer comme il le faisait de temps en temps. Je ne savais pas de quel sujet il désirait m'entretenir. Je l'ai effectivement rencontré ce jour-là mais je ne me rappelle pas des sujets de notre conversation. Je me souviens qu'il était accompagné d'une personne que je ne connaissais pas. Je ne sais pas pourquoi M. Arnaud de la Chaise avait prévu un rendez-vous le 20 juillet, avec moi-même, à 8 heures. A cette époque, je ne savais pas quel prix allait être remis par le groupement représenté par Fougerolle puisque la réunion de bouclage n'avait pas eu lieu. A aucun moment je n'ai communiqué à mes concurrents les prix établis par Fougerolle pour le Pont de Normandie. "
55. M. Bertrand Deroubaix, ingénieur des Ponts et Chaussées, chef de la mission Pont de Normandie, a déclaré le 9 janvier 1990 (cote A, 1 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 530, sq.) : " Pour avoir un troisième candidat face à Bouygues et Campenon-Bernard, nous avons proposé à la Chambre de commerce d'associer Nord-France et Fougerolle. Ce groupement nous paraissait crédible et pouvoir assurer une concurrence minimum. Il semblait exister une très vive concurrence entre Campenon-Bernard et Bouygues. Le point de vue de la maîtrise d'œuvre était que chacun des groupements avait la capacité de construire ce pont, et plus particulièrement la partie béton qui n'est pas la partie la plus exceptionnelle de l'ouvrage. "
56. M. Jean-Claude Bertrand, directeur général de la société anonyme Nord-France entreprise TP, a déclaré le 13 février 1990 (cote A, 1734 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 658, sq.) : " Nord-France n'avait pas la qualification requise pour soumissionner seule à l'appel d'offres du pont de Normandie. Par contre, elle pensait que, regroupée avec son actionnaire principal la société belge des bétons, le groupement ainsi constitué était suffisant. Je ne sais pas exactement dans quelles conditions nous avons été regroupées au sein du consortium dont Fougerolle était mandataire. Finalement, lorsque cette affaire est sortie, l'actionnaire principal n'était plus la SBB mais le groupe Pelège, promoteur. SBB et Nord-France n'avaient plus de raison de porter le même intérêt à cette affaire, il a donc été convenu que la participation de ces deux sociétés au sein du groupement serait symbolique. La solidarité liant les cinq entreprises, vis-à-vis du client, restait entière. Si le groupement avait obtenu le marché, Nord-France et SBB auraient suivi le chantier compte tenu de la responsabilité qu'ils avaient vis-à-vis du client. "
57. M. Martial François, directeur chez L. Ballot-BTP, a déclaré le 23 janvier 1990 (cote A, 1545 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 650, sq.) : " En ce qui concerne le Pont de Normandie, j'étais chargé de coordonner l'étude au sein de l'entreprise. A ma connaissance, c'est à la demande du maître d'œuvre que nous nous sommes groupés avec le groupement Fougerolle - Chantiers Modernes. Par la suite, et après un changement d'actionnaire, Nord-France s'est retiré du groupement. Toutefois, je pense que nous gardions les capacités de construire le pont de Normandie. L'offre qui a été présentée le 8 août 1988 était parfaitement étudiée, mais le groupement n'a pas jugé utile de proposer des variantes compte tenu de la dimension du projet. "
58. M. Michel Cote, directeur général Génie civil et ouvrages d'art de la société Bouygues, a également déclaré (cotes A, 2125 à 2127 ; rapport, tome 4, p. 854, sq.) : " Avant même l'appel à candidatures, nous avons constitué une société en participation à raison de 60 % des parts pour Bouygues et Quille et 40 % des parts pour SAE et Quillery. Au début des études, Quille a souhaité ne pas participer à la construction de cet ouvrage en raison du niveau de risques. Nous avons constitué une équipe intégrée en vue de l'étude du prix de l'offre, avec uniquement la société Quillery, SAE ne figurant qu'en tant que garant financier de cette dernière société, sa présence nous donnant, de plus, l'assurance qu'aucune de ses autres filiales ne présenterait d'offres concurrentes.
(...) Je ne me souviens pas qu'il y ait eu, avant la remise des offres, des discussions sur la répartition des parts, entre les membres des deux groupements, du futur GIE. (A propos du document 33) Je n'ai jamais eu connaissance de ce document et il ne m'inspire aucun commentaire. En outre, je constate qu'il n'est pas daté et que la mention " Pont de Honfleur " est manuscrite et au crayon.
En ce qui concerne le groupement dont Fougerolle était le mandataire, j'estime qu'il n'avait pas les références dans le domaine des grands ouvrages d'art et les capacités d'études nécessaires et je n'ai eu aucun contact avec lui. "
59. M. Jean-Claude Jammes, président-directeur général de la société SAE, a déclaré (cotes A, 2119 et 2120 ; rapport, tome 4, p. 849, sq.) : " Dans le groupement formé par Bouygues, Quille, SAE et Quillery, dont Bouygues était le mandataire, SAE n'est intervenu que comme garant financier de sa filiale Quillery. Nous n'avons pas participé aux études puisque SAE, société holding qui ne dispose pas de bureau d'étude, n'en a pas les moyens techniques. (...) En ce qui concerne SAE, cette société n'a en aucune manière participé à la constitution du prix de l'offre du groupement Bouygues, c'est Quillery qui a suivi cette affaire sur le plan technique et financier. (...) (A propos du document 33) Ce document ne peut trouver son origine dans des propositions qui auraient été formulées par SAE proprement dite, je suppose que sous l'intitulé SAE le rédacteur de ce document a désigné le groupe SAE qui en fait était représenté par Quillery. "
60. M. André Clapier, directeur général de la société Quillery, a déclaré (cotes A, 2132 et 2133 ; rapport, tome 4, p. 861, sq.) : " En vue de la présentation des offres, nous avons constitué uniquement avec Bouygues une équipe composée de représentants de notre société et de représentants de Bouygues.
En raison de la difficulté de l'ouvrage découverte en cours d'étude, Bouygues, mandataire de notre groupement, nous a proposé d'avoir des contacts avec le groupement piloté par Campenon-Bernard. Une démarche commune des deux mandataires a été faite auprès du maître d'ouvrage pour lui proposer de remettre une offre unique, ce qu'il a refusé en nous disant qu'il désirait recevoir plusieurs offres et que l'on verrait ensuite.
Par la suite, les contacts se sont poursuivis entre Bouygues et Campenon-Bernard et j'en ai été tenu informé. Il est probable que j'ai été informé de l'évolution de ces contacts sans pour autant avoir connaissance des détails ni de l'étude de prix de Campenon-Bernard. (...) (A propos du document 33) Je n'ai jamais eu connaissance de ce document tout en étant d'accord pour considérer qu'à travers SAE c'est en réalité Quillery qui est visée.
Je conteste tout à fait que Quillery soit pour quoi que ce soit dans l'élaboration de ce document et je remarque qu'il est pour le moins étrange qu'elle se trouve à l'origine de la proposition la plus faible en ce qui concerne le groupement qu'elle forme avec Bouygues. "
61. M. Jacques Allemand, directeur de la société GTM-BTP, a déclaré (cote A, 2122 ; rapport, tome 4, p. 851, sq.) : " Je confirme les termes de mon audition du 2 février 1990 par le commissaire enquêteur : "j'ai été régulièrement informé de la poursuite du rapprochement et des contacts entre les mandataires, sans y participer je savais que l'offre serait comparée au niveau technique et des prix avec celle du groupement Bouygues". J'en ai tenu informé ma hiérarchie ainsi que du déroulement de toutes les opérations auxquelles je participais. (A propos du document 33) Matériellement je n'ai jamais vu ce document et je suis surpris que l'on puisse parler de propositions GTM face à des propositions GTM face à des propositions Bouygues et SAE parce que nous n'étions que membre du groupement et non mandataire. (...)
Nous avons eu avant la remise des offres des discussions au sein du groupement Campenon-Bernard sur l'organisation en général et sur la répartition possible des parts au sein d'une organisation future qui aurait regroupé les membres des deux groupements Bouygues et Campenon-Bernard. S'agissant de la mention de Fougerolle (pour mémoire) sur ce document, je suis incapable d'en fournir la moindre explication, la présence de Fougerolle n'ayant jamais été évoquée dans nos discussions. "
62. M. Henri Stouff, directeur général de la société Campenon-Bernard, a déclaré (cote A, 2144 ; rapport, tome 4, p. 872, sq.) : " En vue de l'élaboration de l'offre de notre groupement, nous avons constitué, comme il est d'usage, une cellule intégrée dont je ne peux affirmer qu'elle comprenait absolument un ou des représentants de chaque société membre du groupement.
Cependant, chacune d'entre elles, et notamment Sogea, a été tenue informée au fur et à mesure du montage de l'offre, par des réunions périodiques, de l'évolution des études et de la mise au point des prix qui devaient être proposés par le groupement. (...)
J'ai été tenu informé des rencontres et des échanges d'informations entre Bouygues et Campenon-Bernard. Je ne peux affirmer que ces échanges se limitaient à des rencontres entre ces deux sociétés, en tout état de cause, les autres sociétés membres des deux groupements en étaient régulièrement informées.
J'ai su qu'avant le dépôt des offres les différentes sociétés membres des deux groupements se sont consultées sur les modalités de répartition des parts de chacune d'entre elles dans un groupement unique, mais je tiens à souligner que cette répartition a été définitivement arrêtée ultérieurement au moment de la constitution du GIE courant 1989 ".
63. M. René Jacquot, directeur général de la société Quille, a déclaré (cotes A, 2130 et 2131, rapport, tome 4, p. 859, sq.) : " Quille a été agréé par la commission d'admission des candidatures comme membre dit groupement dont Bouygues était le mandataire. Cependant, nous avons très vite considéré que l'ouvrage représentait des risques techniques et financiers trop importants au regard de l'importance de nos moyens. Dès avant le début des études, auxquelles nous n'avons à aucun moment participé, nous avons avisé Bouygues de notre volonté de ne pas concourir à cet ouvrage.
Nous n'avons pas avisé officiellement de notre retrait ni le maître d'ouvrage ni le maître d'œuvre, cependant je suis certain, compte tenu de notre implantation locale, qu'il n'ignorait rien de cette situation. Nous n'avons d'ailleurs pas donné de pouvoir à Bouygues pour le dépôt des offres. "
64. M. Lucien Dehan, directeur général adjoint de la société Dumez-TP, a déclaré (cote A, 2137 ; rapport, tome 4, p. 865, sq.) : " J'ai été informé à l'occasion des réunions du comité directeur de Dumez-T P de ce que l'appréciation des aléas techniques de l'ouvrage par les groupements Bouygues et Campenon-Bernard et leurs conséquences sur les prix seraient confrontées. Avant le dépôt des offres, j'ai eu connaissance de débats entre les entreprises membres des deux groupements en vue de la constitution du futur groupement commun éventuel. Les discussions portaient notamment sur le problème du " leadership " et sur celui du rôle de chacun. En ce qui concerne le problème de la part de Dumez, si ce point avait été soulevé, mais je n'en ai aucun souvenir, il aurait été réglé à un niveau supérieur au mien. "
65. M. Jean-Marie Serralta, directeur général de la société Spie-CAPAG et qui était à l'époque des faits le directeur des " Grandes réalisations France-Europe Génie civil " de la société Spie-Batignolles, a déclaré (cote A, 2129 ; rapport, tome 4, p. 857, sq.) : " J'ai été informé par Campenon-Bernard des contacts établis avec le groupement Bouygues au niveau de l'étude de l'offre en vue d'un regroupement proposé au client avant la remise des offres. Je ne me souviens pas avoir vu des tableaux comparatifs des offres des groupements Bouygues et Campenon-Bernard, mais j'étais informé du fait que les études seraient rapprochées en vue du futur regroupement. En ce qui concerne la constitution du futur regroupement commun, je pense que des discussions ont eu lieu entre Campenon-Bernard et Bouygues, mais je n'y ai pas participé, notamment au plan de la répartition des parts de ce futur groupement. "
6. Le pont de Rochefort
1. Une note manuscrite prise par M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, datée du 2 mai 1988, indique (cote A, 1966, Sc. 7, 1196 V° ; rapport, tome 4, p. 765) :
" 5 - Pont de Charente 150 MF dont on a 40 MF
On doit répondre le 27.05 Démarrerait cette année
B. nous aide à intégrer son groupement
Mais attention à signer un protocole
Pb avec GTM IF faire le pari de Pascal pour le pont de Rochefort
IF secouer CB"
2. Le 11 mai 1988, M. Dehan (société Dumez-TP) notait, dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour et rendant compte d'une réunion qui comptait quatre points à l'ordre du jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1203 R° ; rapport, tome 4, p. 767) :
2001_11780_tab30.jpg
3. Une autre note manuscrite de M. Dehan, datée du 17 mai 1988, indique (cote A, 966, Sc. 7, 1206 R°; rapport, tome 4, p. 769):
2001_11780_tab31.jpg
4. Dans un cahier de notes manuscrites saisi dans les locaux de la société Bouygues, on peut lire le compte rendu d'une " réunion d'info BETP " dont l'indication " - Rochefort remise prix le 8-06. Affaire avec accord BY + Quillery + Dumez " sur une page (cote A, 1916, Sc. 4, 38 ; rapport, tome 4, p. 697) suivant la page datée du 7 juin 1988 (ibid., 37) et précédant une page datée du " 08-04-88 " (ibid., 39). En fait, cette date du 8 avril résulte d'une erreur, et il faut lire 8 juin : elle porte l'indication " info tech. 22 juin pont à haubans " et elle est elle-même suivie d'une page reproduisant à son recto le calendrier du 8 au 26 juin 1988 et mentionnant à son verso la date du " vendredi 10-06 " (ibid., 40).
5. Une note manuscrite prise par M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, en date du 18 juillet, c'est-à-dire postérieure à la première ouverture des plis (cote A, 1966, Sc. 7, 1233 V° ; rapport, tome 4, p. 776) indique :
2001_11780_tab32.jpg
6. Parmi les notes manuscrites prises par M. Gautherie, gérant de Campenon-Bernard, lors du comité commercial du 26 juillet 1988 de l'entreprise, on peut lire (cote A, 1959, Sc. 2, 11 ; rapport, tome 4, p. 736) :
"Rochefort
A d'o infructueux - en raison de la DUP
Nouvelle offre 20/8
Bouygues = 203 MF 1re offre
- marge 18 %
B - SAE - DZ
égalité"
7. Une note manuscrite prise par M. Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, à l'occasion d'une réunion de la direction du 10 octobre 1988 (cote A, 1966, Sc. 8, 1307 V° ; rapport, tome 4, p. 780) indique : " 7 - GTM : Accords sur coop. F./Situation financière s'améliore / Ce qui va mal : offshore (180) MF/an/Tout le reste est sous contrôle. "
8. MM. Claude Néraud et Gérard Forgues, responsables de la SETEC, maître d'œuvre, ont déclaré le 27 janvier 1990 (cote A, 682 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 570, sq.) : " Nous avions assisté à la commission d'appel d'offres qui était chargée de sélectionner les candidatures. Elle s'est déroulée le 15 mars 1988. Dumez n'avait pas répondu à l'appel à candidatures. Nous pensions que Dumez avait une participation dans GTM et que, pour cette raison, il ne se présentait pas sous son nom propre, mais qu'il était présent par l'intermédiaire de GTM-BTP spécialiste de ce type d'ouvrage. A aucun moment de l'appel d'offres et jusqu'à aujourd'hui nous n'avons été informés de la participation de l'entreprise Dumez à l'appel d'offres et au chantier. "
9. M. Lucien Dehan, directeur général adjoint de Dumez-TP, a déclaré le 17 janvier 1990 (cote A, 1153 V° et 1154 ; rapport, tome 4, p. 618, sq.) : " Le 11 mai 1988 (document coté 1203), j'ai reçu des instructions de la part de M. Heiser (JH) pour faire signer un protocole pour le Pont de Rochefort avec Bouygues et Ouillery (...). Malheureusement notre participation au pont de Rochefort n'est toujours pas officialisée (...). Notre participation en " occulte " sur le pont de Rochefort est liée à une compensation pour un service rendu à Bouygues pour le tunnelier du Val d'Orly sur lequel nous avions pris un engagement d'utilisation. "
10. Le 24 juin 1992, à propos de sa note manuscrite du 2 mai 1988, M. Dehan a déclaré (cote A, 2137 ; rapport, tome 4, p. 865, sq.) : " Je pense que cela signifie que nous espérions que GTM ne réagirait pas au fait que nous participions en occulte à cette affaire, contrairement à ce que nous lui avions annoncé. En ce qui concerne Campenon-Bernard, j'affirme que cette mention ne vise pas le pont de Rochefort mais le pont de Normandie, l'ensemble des ponts étant traités en même temps à l'occasion de ces réunions. "
11. M. Michel Cote, directeur adjoint Travaux publics de la société Bouygues, a déclaré le 10 janvier 1990 (cote A, 726 ; rapport, tome 4, p. 577, sq.) : " L'entreprise Dumez participe à certaines prestations pour le pont de Rochefort. Je ne peux répondre plus précisément, je le ferai par écrit. "
La réponse écrite, télécopiée le 22 janvier 1990, indiquait (cote A, 793 ; rapport, tome 4, p. 585 et 586) : " Nous avons accepté que Dumez participe au pont de Rochefort, ouvrage pour lequel Dumez n'avait pas remis l'offre, en compensation d'une participation Bouygues à la proposition Dumez pour le Val d'Orly. "
12. M. André Clappier, directeur général de la société Quillery, a déclaré le 7 février 1990 (cote A, 858 V° ; rapport, tome 4, p. 591, sq.) : " Sur le pont de Rochefort, après l'admission du groupement Bouygues-Quillery, notre mandataire (Bouygues) nous a proposé d'intégrer l'entreprise Dumez à l'intérieur de leur part. Nous avons accepté, Dumez apportant des moyens et une garantie supplémentaire. "
7. Le pont de Gennevilliers
1. Dans son rapport à la Commission spécialisée des marchés de génie civil, la direction départementale de l'équipement du Val-d'Oise a noté, à propos des résultats de l'ouverture des plis du 3 janvier 1989, que " l'analyse des offres faisait apparaître que seule l'offre du groupement moins-disant était présentée avec des documents permettant de conclure à une étude de détail : certaines offres étaient incomplètes et le dossier de présentation très réduit : pour d'autres les prix forfaitaires avaient été confondus avec des prix unitaires lorsqu'avait été complété le bordereau des prix. D'autres enfin forfaitisaient uniformément des tâches telles que les réalisations de plate-forme pour injection, pour exécution des pieux ou pour exécution de la semelle, dont la difficulté de mise en œuvre est pourtant très différente suivant la pile considérée ", constat " qui tendait à faire conclure à une faible mobilisation des entreprises sur le projet " (cotes A, 180 et 181 ; rapport, tome 4, p. 566 et 567).
2. Un post-it blanc collé dans l'agenda 1988 de M. de la Chaise (Bouygues) à la semaine du 2 au 8 mai (cote A, 1916, Sc. 1, 26 ; rapport, tome 4, p. 665) porte les mentions manuscrites suivantes :
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3. Une note manuscrite de M. Dehan, datée du 17 mai 1988, indique (cote A, 1966, Sc. 7, 1206 R° ; rapport, tome 4, p. 769) :
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4. Un tableau, saisi au siège de l'entreprise Bouygues, daté du 11 juillet 1988 et relatif au " Pont de Normandie - Solution de base - Lot principal - Récapitulation des déboursés " (cote A, 1916, Sc. 1, 93, rapport, tome 4, p. 691), comporte l'indication manuscrite suivante : " 8 - Etude avant-projet/8 - Etudes complémentaires / Respect des protocoles [Fougerolle/Gennevilliers. "
5. L'agenda 1989 de M. Petitcolas, de Campenon-Bernard, contient la mention manuscrite suivante à la date du jeudi 11 mai, à 18 heures (cote A, 1948, Sc. 2, 63 ; rapport, tome 4, p. 720) : " Spie Gennev. "
6. M. Arnaud de la Chaise, directeur de travaux de l'entreprise Bouygues, a déclaré le 10 janvier 1990 (cotes A, 790 et 791 ; rapport, tome 4, p. 581, sq.) : " Concernant le document saisi dans mon bureau (scellé no 1, pièce n° 93), je n'ai jamais eu connaissance de protocole avec Fougerolle ; à cette époque nous avions trois protocoles : l'un avec Quille, le second avec Quillery et le troisième avec CFEM. Je ne sais pas pourquoi j'ai écrit " Fougerolle et Gennevilliers ". Sur le document n° 26 du même scellé, j'ai écrit " Loser phi + Gennevilliers " ; je savais à l'époque que le pont de Gennevilliers allait sortir et il m'intéressait puisque j'étais responsable des grands ouvrages, mais je ne sais pas la raison pour laquelle j'ai écrit ces mots. "
7. M. Lucien Dehan, directeur général adjoint de la société Dumez-TP, a déclaré le 17 janvier 1990 (cote A, 1153, V° ; rapport, tome 4, p. 619) : " Concernant nos relations avec GTM, j'ai participé uniquement deux fois aux " comités de coordination ", je n'en reçois pas les comptes rendus. A mon avis, pour le pont de Gennevilliers, nous cherchions à entrer dans un groupement ".
8. M. Jean-Marie Serralta, directeur France-Europe du Génie civil de la société Spie-Batignolles, a déclaré le 25 janvier 1990 (cotes A, 1279 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 630, sq.) : " En ce qui concerne l'appel d'offres relatif au pont de Gennevilliers (pont sur la Seine), nous nous sommes regroupés avec Sogea (SGE-TPI étant sa direction opérationnelle pour la région parisienne). C'est un partage habituel de moyens et de risques. Il est possible que nous ayons été approchés par diverses sociétés dont GTM, aucune suite n'a été donnée. Pour le deuxième appel d'offres, SGE-TPI a estimé que les niveaux de prix qui risquaient d'être pratiqués par Spie-Batignolles ne lui convenaient pas et a préféré tenter sa chance de son côté. Nous avons, par la suite, été approché par GTM qui était en groupement avec Fougerolle. Nous avons accepté compte tenu du volume de l'affaire et de la capacité de GTM pour construire des ponts poussés. Les bouclages de l'offre ont eu lieu les 19 (avec les associés) et le 22 mai (interne) 1989. Je ne vois pas, a priori, pourquoi M. Petitcolas a rencontré Spie le 18 mai 1989 : peut-être voulait-il proposer un rapprochement pour cet ouvrage ? GTM et Spie sont les spécialistes des ponts poussés, qui est la technique employée pour le pont sur la Darse. "
9. M. Louis Petitcolas, directeur des Grands projets France de la société Campenon-Bernard, a déclaré le 4 janvier 1990 (cote A, 928 R° et V° ; rapport, tome 4, p. 609, sq.) : " Concernant le marché du pont de Gennevilliers, Campenon-Bernard a répondu seul au premier appel d'offres relatif au seul pont sur la Seine (CB a réalisé le premier ouvrage de l'autoroute A 15 sur la Seine). Après appel d'offres infructueux et nouvel appel d'offres comprenant en plus le viaduc sur la Darse (pont poussé), j'ai contacté Spie afin de soumissionner ensemble. Spie est considéré comme le spécialiste des ponts poussés. Spie étant déjà engagé avec un autre partenaire, je me suis ensuite rapproché de Quillery afin de partager les risques sur cette affaire. Je ne me souviens pas qui j'ai rencontré chez Spie le 11 mai 1989. "
10. M. André Clappier, directeur général de la société Quillery, a déclaré le 7 février 1990 (cote A, 858 V° ; rapport, tome 4, p. 591, sq.) : " Concernant l'appel d'offres du pont et viaduc de Gennevilliers (2e appel d'offres), Quillery avait décidé de s'excuser puisque l'ensemble de ces ouvrages dépassait nos possibilités de l'époque. Ce n'est que quelques jours avant l'appel d'offres que Campenon-Bernard nous a proposé de se regrouper avec eux, ce que nous avons accepté, après avoir vérifié leur étude de prix du viaduc que nous n'avions pas étudié. "
8. Le pont de Plougastel
1. Les entreprises consultées lors du premier appel d'offres ont été écartées du marché négocié après avoir refusé d'accéder à la demande du responsable du marché, " afin de susciter entre elles une concurrence plus vive (...), de se constituer en groupements de taille moindre mais plus nombreux ", la Commission spécialisée des marchés du bâtiment et de Génie civil ayant relevé, pour la première consultation, " que l'écart très élevé (33 % pour la solution "béton"), entre les montants des offres reçues et les estimations de l'administration semble provenir d'une certaine sous-évaluation de ces dernières qui, notamment, ont été établies sans tenir compte de la hausse du prix des ponts à haubans constatée dès avant le lancement de la consultation des entreprises, mais aussi d'une surestimation importante de la part des entreprises " et la personne responsable du marché ayant " précisé en séance qu'elle soupçonnait une entente entre les entreprises ayant répondu à l'appel d'offres " (cote A, 2092 à 2094 : rapport, tome 4, p. 844, sq.).
2. Dans une note manuscrite saisie dans les locaux de la société Campenon-Bernard, M. Louis Petitcolas consigne le 23 août 1988 (cote A, 1959, 105 ; rapport, tome 4, p. 729) :
"Louis Petitcolas
Plougastel
Demande de Quillery de s'associer avec CB.
CB a la cote et est bien placé techniquement et commercialement.
Qy a "les entrées politiques" que l'on n'avait pas à l'île de Ré.
Bouygues le sait et ne court pas après Plougastel.
On peut ensemble le faire savoir aux autres.
LP le 23/08"
3. Dans une autre note manuscrite saisie, M. Louis Petitcolas consigne le lendemain (cote A, 1959, 106 ; rapport, tome 4, p. 730) :
"LP le 24.08
Louis Petitcolas
- H. Stouff / J. Mesmain
J'ai CT à Cote le 24.08.
(avant son déjeuner avec Rufenacht)
- avons mis nos pendules à l'heure sur le Pont de >Normandie
(le prix du béton est le bon)
- lui ai demandé de nous laisser passer sur Plougastel
- lui ai demandé de réfléchir à un mariage
Concession VAL de Strasbourg"
4. Dans un des cahiers de notes manuscrites que prend au jour le jour M. Dehan (Dumez-TP), celui-ci notait le 16 décembre 1988, lors d'une réunion du comité de coopération Dumez-TP/GTM (cote A, 1966, Sc. 8, 1349 V° ; rapport, tome 4, p. 783) : " Pb pont Plougastel : CB veut être leader = explosion ".
9. La section 44 de l'interconnexion du TGV Nord
1. Un cahier de notes personnelles rédigées par M. Schoonheere a été saisi dans les locaux de l'entreprise Razel. Une des pages de ce cahier (cote B, 3898, Sc. 2, 477 ; rapport, tome 4, p. 1192) comporte les mentions suivantes :
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Ces annotations ont été portées par M. Schooheere entre le 24 avril 1989 (date qui figure au recto de la page ; cote B, 3898, Sc. 2, 476 ; rapport, tome 4, p. 1191) et le 9 mai 1989 (date qui figure au bas de la cote B, 3898, Sc 2, 477, rapport, tome 4, p. 1192).
2. Quelques mois plus tard, et huit mois avant l'envoi des dossiers d'appel d'offres, M. Razel, président-directeur général de la société homonyme, établissait un tableau dans son cahier de notes manuscrites (cote B, 3898, Sc. 1, 162 ; rapport, tome 4, p. 1186). Ce tableau est postérieur au 12 septembre 1989 (ibid., 158) et antérieur au 19 septembre suivant (ibid., 168), et il comporte trois colonnes (" Total piloté ", " Part Razel " et " Durée ") et 19 lignes dont les 16e, 17e et 18e sont : " TGV Nord ", " TGV Barreau " et " TGV Sud-Est " et ne comportent aucun chiffre dans les colonnes.
3. Un mois plus tard, un directeur commercial de Razel indiquait, dans une lettre du 18 octobre 1989 adressée à Dumez-TP (cote B 3898, Sc. 2, 526 ; rapport, tome 4, p. 1193 ; " SEP " = société en participation) : " (...) étant entendu que, dans ce cas, nous obtiendrions la participation demandée de 100 millions de francs HT dans la SEP des terrassements du lot 44 de l'interconnexion TGV Nord et Sud de Paris, en cours de constitution. Espérant avoir votre accord sur les termes de cette proposition. (...) ".
4. De juin 1989 décembre 1990, l'entreprise Razel a soumissionné à de très nombreux appels d'offres relatifs à la construction du TGV, au sein de divers groupements. Le tableau ci-après indique ces appels d'offres, section par section, ainsi que la date limite de remise des plis, le résultat du groupement dont Razel était membre (moins-disant ou non), les cotes du dossier et les pages correspondantes du rapport (tome 4) d'où sont extraites ces indications. Les objectifs mentionnés par M. Schoonheere à la fin avril 1989 ont très exactement été atteints par la suite, sur les lots 13 et 22, 23 et 24, comme sur le lot 44 de l'interconnexion.
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5. Un ensemble de notes personnelles rédigées par M. Piedelièvre a été saisi dans les locaux de l'entreprise Chantiers Modernes. Une de ces notes, qui porte la date du 23 novembre 1989 (cote B, 3917, Sc. 1, 32 ; rapport, tome 4, p. 1211), comporte les mentions suivantes :
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6. Une autre de ces notes, qui porte la date du 16 janvier 1990 (cote B, 3917, Sc. 1, 3 ; rapport, tome 4, p. 1209) comporte les mentions suivantes :
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7. Parmi les documents saisis dans les locaux de l'entreprise Razel figure (cote B, 3898, Sc. 3, 596 ; rapport, tome 4, p. 1199) un " projet " de " liste des questions proposées par Razel " pour le " Comité 2 ". On lit sur ce document dactylographié et annoté de façon manuscrite les mentions suivantes :
"TGV Lyon-Valence - point actuel ? Chef projet Dumez ? (...)
- garantir nos 140 Ms F (70-70 ?) notre part
- priorité - mandataire gérant
(lot 44 : solde de notre part TGV Nord) 150/80
nous a-t-on dit ?"
Un " projet de compte rendu du Comité no 1 tenu le 7 mars 1990 " en date du 9 mars 1990 et relatif au " Comité de coordination Dumez-Razel " (cotes B, 3898, Sc. 3, 592 à 595 ; rapport, tome 4, p. 1196, sq.) se termine par l'indication que la " prochaine réunion du Comité de coordination (se tiendra) mercredi 11 avril 1990 à 8 h 30 au siège Dumez (salle E au rez-de-chausée). M. Thievent diffusera, une semaine avant la réunion, un ordre du jour tenant compte des souhaits formulés par les représentants de Dumez et Razel " (cote B, 3898, Sc. 3, 595 ; rapport, tome 4, p. 1198).
Le Comité de coordination Dumez-TP/Razel no 3 s'est tenu le 20 juin 1990 et le Comité 4 le 11 septembre 1990 (cote B, 3898, Sc. 3, 597). La date du Comité 2 est donc comprise entre le 9 mars et le 11 avril 1990.
8 et 9. Le responsable de GFA a montré aux enquêteurs les originaux du cahier des messages téléphoniques reçus, tenu par sa secrétaire, et de son agenda pour 1990, puis il leur a communiqué copie de plusieurs pages de ces documents.
Sur le premier, on lit, le vendredi 22 juin 1990 à 10 heures : " Delabre/Etablissements Ballot. Rappeler 35-74-06-65/FA " (cote B, 16 ; rapport, tome 4, p. 887) ; entre 13 heures et 15 h 20 : " Delabre donner une réponse (M. Rosetti) travaux SNCF/FA/Remis à lundi/JPG " (cote B, 17 ; rapport, tome 4, p. 888) ; à 17 h 20 : " Delabre/Etablissements Ballot rappellera lundi fin de matinée. Remis à lundi/FA " (cote B, 18 ; rapport, tome 4, p. 889). Le lundi 25 juin 1990, on lit à 10 h 40 : " Delabre/rappellera/FA " (cote B, 19 ; rapport, tome 4, p. 890) ; à 11 heures " Delabre/35-74-06-65/FA " (cote B, 19 ; rapport, tome 4, p. 890) ; à 12 h 40 : " Delabre/35-70-19-08 Jusqu'à 13 h 30 (35) 74-06-65, 45-63-01-66/FA " (cote B, 19 ; rapport, tome 4, p. 890) ; à 13 h 30 : " Delabre/35-74-06-65 Réponse sur affaire SNCF/FA " (cote B, 19, rapport, tome 4, p. 890) ; à 16 h 30 : " Delabre Etablissements Ballot/Rappellera/FA " (cote B, 20 ; rapport, tome 4, p. 891), à 18 heures : " Rapp. à 18 h 30. Pers : 35-70-18-08. à 21 h 30/FA " (cote B, 20, rapport, tome 4, p. 891).
Sur le second, on lit à la date du vendredi 29 juin, à 10 heures : " Ballot/M. Delabre/FA " (cote B, 21 ; rapport, tome 4, p. 892).
10. Parmi les documents saisis dans les locaux de l'entreprise Chantiers modernes, une note manuscrite datée du 6 juillet 1990 de M. C. Mathieu, collaborateur de M. Piedelièvre, mentionne (cote B, 3917, Sc. 1, 28 ; rapport, tome 4, p. 1210 ; MM. Delabre et Boisson sont des cadres respectivement de Ballot et de Chantiers modernes.) : " Points majeurs :/Accrochage avec Condotte d'Acqua sur le TGV 44/(voir Delabre-Boisson) (...) "
11. Le double d'une télécopie envoyée le 11 juillet 1990 au président de la société Condotte d'Acqua, à Rome, par le responsable de Ballot a été saisi dans les locaux de cette dernière entreprise (cote B, 3865, Sc. unique ; 1 ; rapport, tome 4, p. 1176). Son contenu est le suivant " M. Ballot, président de Ballot SA, sera comme convenu en vos bureaux le vendredi 20 juillet 1990 à 11 h 30. "
12. L'agenda 1990 de M. Ballot, qui a également été saisi, comporte à la date du 20 juillet (cote B, 3865, Sc. unique, 61 ; rapport, tome 4, p. 1177) les mentions : " 7.55 Paris-Rome/11.30 Condotte d'Acqua Rome/19 Arrivée Paris ".
13. L'agenda 1990 de M. Pialoux, adjoint de M. Delabre chargé de l'étude de la section 44, a également été saisi le 28 septembre 1990 dans les locaux de l'agence de Rouen de l'entreprise Ballot, soit une semaine après les visite et saisie effectuées auprès de son siège parisien. Cet agenda est tout à fait complet, à l'exception des journées comprises entre le vendredi 6 et le jeudi 19 juillet : la cote B, 3990, Sc. 1, 46 V° (rapport, tome 4, p. 1243) s'achève au jeudi 5 juillet, et la cote B, 3990, Sc. 1, 47 R° (rapport, tome 4, p. 1243) commence au vendredi 20 juillet. Entre les deux, ne restent des pages manquantes, coupées à ras, que quelques millimètres.
14. La première page du cahier de notes manuscrites de M. Pialoux, à spirale, qui a également été saisi, commence abruptement par des notes datées du 1er août 1990 (cote B, 3990, Sc. 1, 1 et 2 ; rapport, tome 4, p. 1239).
15. L'entreprise GFA, représentant Condotte d'Acqua en France, a joint à l'appui de la plainte qu'elle a déposée auprès de la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes ce qui, selon elle, serait l'offre de couverture préparée par l'entreprise Ballot pour être présentée à la SNCF par elle comme étant sa propre offre. Ce document (cotes B, 25 à 55 ; rapport, tome 4, p. 895, sq.) se présente comme un récapitulatif manuscrit sur une feuille de papier quadrillé, suivi d'imprimés de la SNCF partiellement ou complètement remplis. Le récapitulatif manuscrit indique (cote B, 25, rapport, tome 4, p. 895 ; " SIGMA " = somme, total) :
" Terrassements : 626.833.300
O arts y c erreurs : 173.000.000
(illisible) : 57.000.000
Chaussées : 18.700.000
[total] : 875.533.300"
La première série d'imprimés est le détail estimatif de l'"indice a", dont toutes les pages (cotes B, 26 à 40 ; rapport, tome 4, p. 896, sq.) sont barrées au stylobille bleu. A trois pages de " récapitulation " vierges de tout chiffre (cotes B, 26 à 28 ; rapport, tome 4, p. 896 à 898) succèdent les bordereaux eux-mêmes (cotes B, 29 à 40 ; rapport, tome 4, p. 899 à 910) qui modifient de façon manuscrite certaines des quantités mentionnées dans l'imprimé (cote B, 29 ; rapport, tome 4, p. 899) et qui mentionnent, également de façon manuscrite, certains prix unitaires (cotes B, 30, 34 et 35 ; rapport, tome 4, p. 900, 904 et 905), certains sous-totaux (165 500 000 et 7 500 000 : cotes B, 39 et 40 ; rapport, tome 4, p. 909 et 910) et le " total sans IC " (173 000 000 : cote B, 40 ; rapport, tome 4, p. 910). Ce dernier chiffre correspond à celui mentionné sur le récapitulatif manuscrit (cote B, 25 ; rapport, tome 4, p. 895) à la ligne " Ouvrages d'art y compris erreurs ".
La seconde série d'imprimés (cotes B, 41 à 55 ; rapport, tome 4, p. 911 à 925) est également un détail estimatif où sont indiqués, de façon manuscrite, tous les prix unitaires, montants partiels, montants par chapitre et total. Ce dernier s'élève à 626 833 300 (cote B, 55 ; rapport, tome 4, p. 925), et il correspond à celui mentionné sur le récapitulatif manuscrit (cote B, 25, rapport, tome 4, p. 895) à la ligne " Terrassements ".
Ces différents documents ont été annotés de deux écritures différentes : l'une pour les cotes B, 41 à 55 (rapport, tome 4, p. 911 à 925), et l'autre pour les cotes B, 25, 29, 30, 34, 35, 39 et 40 (rapport, tome 4, p. 895, 899, 900, 904, 905, 909 et 910). Cette dernière écriture est celle de M. Delabre, directeur régional de l'entreprise Ballot, comme il ressort de sa comparaison à celle qui figure dans les documents dont il est établi qu'ils ont été rédigés par M. Delabre, comme par exemple ceux qui figurent au dossier sous cote B, 3990, Sc. 2, 6 V°, 64, 65, 69 et 85 à 88 (rapport, tome 4, p. 1245, sq.), M. Jacques-Henri Ballot a formellement reconnu l'écriture de M. Delabre (cotes B, 1979 à 1981 ; rapport, tome 4, p. 1106, sq.) et ce dernier a reconnu être l'auteur de ces documents (cotes B, 2008 à 2010 ; rapport, tome 4, p. 1111, sq.).
16. Une note manuscrite de M. Claude Gabon (entreprise Prigent) indique à la date du 6 août 1990 (cote B, 3927, Sc. 1, 21 ; rapport, tome 4, p. 1212 ; cette note manuscrite comme les autres sont datées avec les chiffres de l'arabe moderne, qui se lisent donc de la droite vers la gauche : le premier groupe - à droite - représente le mois et le second - à gauche, séparé par une barre oblique - le jour dans le mois) :
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17. Le cahier de notes de M. Pialoux (société Ballot) comporte les annotations suivantes, datées du 10 septembre 1990 (cote B, 3990, Sc. 1, 11 V° ; rapport, tome 4, p. 1242) :
"Tel Delabre (tel 92 54 23 53)
- Dossier mis à plat
Il faut aller jusqu'à 751 MF
(...)
- Question SNCF sur S D lot 44 - qui s'en occupe ?
- Voir les questions page précédente (...)
(...)
- Mr Foury de Dumez veut savoir le % de Razel du lot 44"
La page précédente (cote B, 3990, Sc. 1, 11 R° ; rapport, tome 4, p. 1241) comporte des notes intitulées " Compte rendu réunion du 5/09/90 à la SNCF "
18. Le " mémento n° 48 de la réunion de direction du 17 septembre 1990 " de la SNCF indique à sa page 5 (cote B, 3975, Sc. 3, 108 ; rapport, tome 4, p. 1226) :
" Section 44
Envisager de relancer les négociations avec le second entrepreneur. D'une manière générale, demander aux 2 ou 3 premiers entrepreneurs mieux-disant de fournir leurs propositions sous 48h.
M. Berrin souhaite que lui soit présenté ce dossier".
Lors de leur intervention du 21 septembre 1990 dans les locaux de la direction de la ligne nouvelle du TGV Nord et de son inter-connexion, situés 173, rue du Faubourg-Saint-Denis, à Paris (10e), les enquêteurs ont constaté (rapport administratif, p. 102 ; rapport, tome 1, p. 102, sq.) :
19. Que les offres remises par les entreprises soumissionnaires étaient conservées jusqu'à la séance d'ouverture des plis dans une armoire dont la clef était à la disposition de l'ensemble du personnel du service.
20. Que tous les plis reçus à l'occasion de l'appel d'offres n° 90-11 relatif à la section 44 n'avaient pas fait l'objet d'un accusé de réception : le double de ce document n'existe que pour les offres de Condotte d'Acqua, de Cogefar, de Fougerolle, de Ballot et de Deschiron (cotes B, 3975, Sc. 5, 131 à 135 ; rapport, tome 4, p. 1227, sq.).
21. Que ces accusés de réception étaient datés du 27 juillet 1990 et signés, mais ne comportaient pas l'heure de la réception des offres correspondantes.
22 et 23. Qu'il existait par contre un document en original et sa copie, exactement semblable aux précédents, c'est-à-dire comportant l'indication du numéro de l'appel d'offres (90-11), la même date, du 27 juillet 1990, et la même signature, mais ne comportant pas le nom de l'entreprise (cotes B, 3975, Sc. 5, 136 et 137 ; rapport, tome 4, pp. 1232 et 1233).
24 à 27. Et que de tels accusés de réception datés et signés à l'avance avaient été établis à propos de l'appel d'offres
n° 90-13 (cotes B, 3975, Sc. 5. 139 à 142 ; rapport, tome 4, p. 1235, sq.).
28 à 31. Par ailleurs, quatre notes, où ne figurent ni le nom ni la qualité de leur rédacteur, ont été saisies le 21 septembre 1990 au siège de la Direction générale de la SNCF, 88, rue Saint-Lazare, à Paris (9e). Ces notes font état de diverses pratiques, dont des ententes, mises en œuvre par certaines entreprises à l'occasion de la construction du TGV, avec la participation de certains responsables de la SNCF. La première, du 24 novembre 1989, est intitulée : " La procédure des appels d'offres concernant les travaux envisagés par la SNCF serait entachée d'irrégularités " (cotes B, 3967, Sc. 1, 63 à 65 ; rapport, tome 4, p. 1223, sq.) ; la deuxième, du 7 décembre 1989, est intitulée : " La passation des marchés de travaux publics SNCF-TGV ferait l'objet d'ententes illicites " (cotes B, 3967, Sc. 1, 61 et 62 ; rapport, tome 4, pp. 1221 et 1222) ; la troisième, du 20 décembre 1989, n'a pas de titre (cote B, 3967, Sc. 1, 60 ; rapport, tome 4, p. 1220) ; la dernière, du 2 avril 1990, est intitulée : " A propos des marchés du TGV Nord " (cote B, 3967, Sc. 1, 59 ; rapport, tome 4, p. 1219).
32. Le contenu de ces quatre notes peut être rapproché des indications fournies par le Groupe foncier d'Anjou (GFA) aux enquêteurs, par télécopie du 23 novembre 1990 (cotes B, 115 et 116 ; rapport, tome 4, pp. 937 et 938).
33. Dans sa plainte déposée auprès de l'administration (cotes B, 3 à 13 ; rapport, tome 4, p. 875, sq.), le GFA rappelait les caractéristiques de la section 44 de l'Interconnexion, puis il exposait : " L'entreprise Ballot, chef de file d'un groupe comprenant aussi Chantiers Modernes, Entreprise industrielle, Razel (groupe Dumez) et quelques autres, a très tôt, après la préqualification de Condotte par la SNCF, pris contact tant avec GFA à Paris qu'avec Condotte à Rome. Le responsable du projet chez Ballot, M. Delabre, a pris de nombreux contacts avec Abballe à G.F.A., tandis que le PDG de Ballot, M. Léon Ballot, se rendait à Rome au siège de Condotte. Ces messieurs expliquaient que l'appel d'offres était totalement, et depuis longtemps, préorganisé avec la complicité des responsables de la SNCF en faveur du groupement dirigé par Ballot. Par conséquent, GFA et Condotte perdaient leur temps à vouloir concourir.
Ces démarches répétées de Ballot étaient assorties :
- de menaces ;
- de propositions de dédommagements ;
- de pressions sur les éventuels sous-traitants français que pressentaient GFA et Condotte.
Les menaces dirigées contre Condotte ont consisté en promesses de représailles sur les chantiers de Condotte un peu partout dans le monde. Vis-à-vis de GFA (...).
Deux types de dédommagements ont été proposés. A M. Abballe, PDG de GFA, à titre personnel, un " honoraire de désistement " dont le montant initial était de 200 000 F puis qui est passé à 2 millions, 3 millions et, pour finir, 5 millions. Pour Condotte, les propositions de dédommagement ont été d'abord l'offre de rembourser simplement les frais d'étude en échange de l'engagement de Condotte de ne pas déposer d'offre, puis, Condotte affirmant sa détermination de déposer une offre, la proposition de confier à l'entreprise italienne une sous-traitance de travaux dont les montants, là encore, ont augmenté, passant de 25 millions à 30, 40, 50 et, pour finir, 75 millions en deux fractions. Il était demandé à Condotte de ne pas faire apparaître son panneau sur le chantier et de s'engager à ne plus soumissionner sur aucun des lots à venir de l'interconnexion des TGV (dont le montant total est estimé à 2,2 milliards de francs).
Naturellement, Condotte concertait son offre avec Ballot de manière à proposer un chiffre plus élevé que celui de Ballot, permettant ainsi à cette entreprise d'enlever le marché.
GFA et Condotte se sont montrées insensibles aux menaces et aux propositions de dédommagement.
En revanche, les pressions exercées par Ballot sur les éventuels sous-traitants contactés par GFA et Condotte d'Acqua se sont avérées parfaitement efficaces. Condotte s'efforçait de rassembler des entreprises françaises comme sous-traitantes. (...) Or toutes les entreprises pressenties se sont récusées ; certaines ont fait entendre qu'elles avaient fait l'objet de pressions et qu'on leur avait expliqué que le marché était déjà attribué. (...)
Dans les heures précédant la remise de l'offre, le vendredi 26 juillet, Ballot a fait une ultime tentative par l'entremise de M. Gauthery, directeur général de Campenon-Bernard. Celui-ci s'est donc retrouvé à sa demande à 16 heures ce même jour dans les locaux de GFA avec M. Abballe, PDG de GFA, M. De Sena, PDG de Condotte, et M. Rosi, délégué général de Condotte. GFA et Condotte ont à nouveau rejeté les dernières offres transmises par M. Gauthery, mais ce dernier a cru comprendre que Condotte acceptait, et, sans aucune contrepartie, de déposer non pas le prix qu'elle avait calculé, mais un prix calculé par Ballot et qui situerait Condotte à une place honorable.
M. Gauthery en avisait aussitôt les dirigeants de Ballot, et annonçait que l'offre calculée par le groupement à l'intention de Condotte serait préparée d'ici la fin de la journée.
M. Gauthery appelait en effet vers 20 h 30 et GFA faisait retirer le dossier en question entre les mains de M. Gauthery, vers 21 heures, au siège de Campenon-Bernard à Clichy.
De fait, Condotte déposait le 27 juillet vers 8 h 30 son offre à 737 millions. M. Gauthery, depuis la veille 21 heures, avait cherché à obtenir de GFA confirmation que l'offre déposée par les Italiens serait celle calculée à leur intention, et qui s'élevait à 875 millions. GFA finissait par lui répondre par la négative, tout en refaisant de révéler à M. Gauthery le chiffre en question.
Or l'insistance de M. Gauthery a brusquement cessé le vendredi 27 juillet à 11 heures. Il paraît important de signaler que la date limite de dépôt des plis était ce même 27 juillet à 10 heures, l'ouverture officielle ne devant avoir lieu que le mardi 31 juillet à 13 heures (hors la présence du public). Tout porte à croire que, peu après le dépôt des offres, le groupe Ballot a pu avoir accès aux plis contenant les offres, prendre connaissance du montant de 737 millions offert par Condotte, retirer sa propre offre (qui, d'après des indications intervenues par la suite, se serait située aux alentours de 858 millions), en élaborer une autre de peu inférieure à celle de Condotte et la réintroduire à la SNCF.
Une indication transmise à GFA dès le 31 juillet démontait le mécanisme et confirmait les précisions ci-dessus. "
34. M. Michel Carmona, professeur à la Sorbonne, a rédigé une déclaration en date du 27 septembre 1990 où il expose (cotes B, 104 à 114 ; rapport, tome 4, p. 926, sq.) : " Je soussigné (...) déclare avoir été témoin des faits suivants :
1. Le jeudi 26 juillet 1990 après midi, je me trouvais dans les locaux de la société GFA (...). A 16 heures est arrivé M. Gauthery, directeur général de Campenon-Bernard ; la réunion a commencé aussitôt.
J'étais assis auprès de M. de Sena à qui je servais un peu d'interprète.
Dès les premières minutes, il y a eu un grand coup de colère de M. de Sena, qui a reproché vigoureusement à M. Gauthery d'avoir fait accompagner M. Léon Ballot, quand il s'est rendu à Rome au siège de Condotte d'Acqua, par un cadre important de Campenon-Bernard, M. Battigello, directeur adjoint de cette société.
(...) M. Gauthery proposait, au nom de l'entreprise Ballot, de verser une somme de 50 millions de francs à Condotte d'Acqua pour qu'elle renonce à défendre ses chances dans l'appel d'offres sur la section 44 du TGV, soit en ne déposant pas d'offre, soit en déposant une offre à un prix convenu avec Ballot, et supérieur au prix remis par Ballot. Il était également précisé par M. Gauthery :
- que les 50 millions en question seraient 50 millions de travaux sous-traités par Ballot, après le gain du marché, à Condotte d'Acqua ;
- que Ballot et ses alliés souhaitaient que Condotte d'Acqua ne plante pas son panneau sur les lieux de ces travaux ;
- que Condotte s'engage aussi à ne plus jamais concourir pour les travaux à venir du TGV Ile-de-France.
(...) M. Gauthery demande à sortir pour téléphoner d'une pièce voisine. Il revient en disant qu'il a obtenu que soit ajoutée une autre tranche de 25 millions de travaux qui serait allouée à Condotte sur un chantier ultérieur, s'ajoutant donc aux 50 millions proposés, le reste des conditions restant inchangé.
(...) A 16 heures, je me suis trouvé en présence de M. Gauthery dans l'antichambre de GFA. M. Gauthery venait de passer un nouveau coup de téléphone et disait à M. Abballe " que c'était d'accord " et que " l'on ferait ainsi ". Puis il est parti.
2. Quelques minutes plus tard (...) M. Abballe m'informait que j'aurais à retirer à Campenon-Bernard, enfin de journée, un dossier que M. Gauthery devait me remettre, que ce dernier préviendrait GFA dès que ce dossier serait prêt et que lui, M. Abballe, souhaitait vivement que ce soit moi, et nul autre, qui aille chercher ce dossier.
Vers 20 h 15 / 20 h 30, le coup de téléphone de M. Gauthery (ou de son secrétariat) arrivait à GFA. M. Abballe me demandait donc de partir pour le siège de Campenon-Bernard, à Clichy, ce que je fis quelques minutes plus tard.
J'arrivai devant le siège de Campenon-Bernard vers 20 h 45 / 20 h 50 seulement (...). La secrétaire, qui m'attendait, alla prévenir M. Gauthery dans le bureau contigu au secrétariat, puis me raccompagna jusqu'aux quelques fauteuils installés sur le palier, en me demandant d'attendre là, et qu'on viendrait me chercher pour me recevoir " ailleurs que dans le bureau de M. Gauthery ". Et la secrétaire d'ajouter : " Je ne sais pas pourquoi, mais qu'est-ce qu'il y a comme agitation ce soir ! " Il y avait en effet beaucoup d'effervescence.
Quelque cinq minutes plus tard, la secrétaire vient me chercher et me conduit jusqu'à la porte d'une salle de réunions quelques mètres après le bureau de M. Gauthery. Celui-ci était sur le pas de la porte, qui était ouverte ; voyant qu'il y avait à l'intérieur 25 à 30 personnes réunies je me retire (...) mais M. Gauthery me fait signe d'avancer, présente théâtralement une enveloppe d'où il retire à moitié une liasse de papiers, me présente la première page où je lis quelques lignes manuscrites avec, en bas, un chiffre qui est 875 millions et des poussières. Et M. Gauthery, d'une voix forte, me dit : " Voilà, messieurs, l'offre qui vous classe troisième. Vous voyez bien le prix : 875 millions ".
Il a remis les papiers dans l'enveloppe, m'a tendu celle-ci, m'a serré la main, et je suis reparti porter l'enveloppe à M. Abballe. Quand j'ai quitté l'immeuble de Campenon-Bernard, il devait être 21 h 30, peut-être un peu passées. Je suis arrivé très vite chez GFA, et j'ai remis l'enveloppe à M. Abballe.
(...) C'est à la demande de M. Abballe, et à titre amical, que j'ai assisté à cette réunion, et que je me suis ensuite rendu à Campenon-Bernard. "
35. M. Cazenove, directeur commercial de Razel, a pour sa part déclaré (cotes B, 1807 et 1808, rapport, tome 4, p. 1093, sq.) : " Sur le lot 44 du TGV Nord, Razel s'est préqualifié en groupement avec Spada et l'Entreprise industrielle. A l'époque de la préqualification, le contenu du marché n'était pas encore connu, et ce n'est qu'à la réception du dossier d'appel d'offres, une fois préqualifié, que nous avons pris conscience de l'ampleur des travaux. Notre groupement a donc cherché à s'associer à un autre groupement pour partager les risques. Sur ce lot situé en région parisienne, un partenariat avec Dumez, qui n'est pas une entreprise parisienne, ne nous a pas paru le plus opportun. L'association s'est donc faite avec le groupement emmené par Ballot. Les négociations se sont prolongées jusque peu de temps avant la remise des plis, ce qui explique que la SNCF n'en ait été avisée que le jour de l'ouverture des plis, bien qu'elle ait au préalable donné son autorisation de principe. Dumez et Razel étaient par conséquent concurrents sur ce marché comme il n'est pas rare. Spada s'est retirée du groupement en cours d'appel d'offres niais est restée en nom pour des raisons juridiques et commerciales. "
36. M. Jacques-Henri Ballot, responsable de l'entreprise homonyme, a déclaré (cotes B, 1979 à 1981 ; rapport, tome 4, p. 1106, sq.) : " En ce qui concerne la section 44, Condotte d'Acqua a pris contact avec nous, à ma connaissance par l'intermédiaire de Prigent, en vue d'un éventuel rapprochement.
Je me suis donc rendu à Rome en vue d'un rendez-vous avec M. Rosi. J'étais accompagné, de manière fortuite, par M. Battigello, celui-ci m'ayant été proposé par M. Petitcolas du fait de sa connaissance de la langue italienne. Par ailleurs, Campenon-Bernard, par l'intermédiaire de la Générale des eaux, est en relation avec Condotte.
Lors de cette rencontre à Rome, nous avons discuté de la possibilité de remettre une offre commune et, en contrepartie, de se présenter ensemble sur d'autres marchés italiens. Si nous n'arrivions pas à mettre au point les modalités d'une association, nous avons également discuté d'un engagement réciproque de sous-traitance si l'un ou l'autre remportait le marché. Il s'agissait uniquement d'une proposition pour ménager la possibilité d'une coopération ultérieure. Suite à ce rendez-vous, aucune décision n'a été prise.
A cette époque nous avions déjà décidé de remettre une offre groupée avec Razel, Spada et l'Entreprise industrielle. Condotte d'Acqua nous avait contacté en tant que mandataire du groupement.
En nous quittant à Rome, M. Rosi m'a dit qu'il me donnerait une réponse rapidement compte tenu du délai. J'ai à nouveau rencontré le représentant de Condotte à Paris, M. Ritonnale, à sa demande qui voulait connaître les propositions faites à M. Rosi à Rome. A nouveau je n'ai plus eu de nouvelles jusqu'au jeudi soir ; j'ai été appelé par M. Gauthery ce jour-là enfin de soirée, qui m'a dit être en réunion avec les dirigeants de Condotte et m'a dit que ces personnes étaient d'accord sur la dernière proposition sans préciser laquelle. Pour moi cette proposition était un accord de sous-traitance réciproque vis-à-vis du gagnant au vaincu.
J'ai rédigé quelques mots dont la teneur est approximativement la suivante : " Je vous confirme ma proposition d'engagement réciproque de sous-traitance d'un montant d'environ 75 millions de francs. Prière de me contacter demain matin première heure pour matérialisation de cet accord ".
J'ai fait porter ce pli chez Campenon-Bernard.
Par la suite, je n'ai eu aucune nouvelle jusqu'au 21 septembre 1990.
La section 44 nous intéressait au plus haut point car c'était une des dernières chances d'obtenir l'emploi de nos engins de terrassement pour l'année prochaine qui de plus terminaient des chantiers relativement voisins. C'est pour cette raison que nous avons fait un rabais in fine, avec l'accord de mes partenaires qui nous avaient laissé la possibilité d'aller jusqu'à 5 %, j'ai décidé de couper la poire en deux à 2,5 %.
Les documents joints à la plainte de GFA, ait nom de Condotte, sont effectivement de la main de M. Delabre qui m'a déclaré que c'était des pièces provenant d'une préestimation qu'il avait avec lui lors des discussions avec Condotte à Paris. Ces pièces ont été substituées ou oubliées lors des réunions communes avec Condotte. Sur les bordereaux qui sont joints, la date du 20 juin 1990 n'est pas explicable. "
37. M. Delabre, directeur régional de Ballot chargé des marchés du TGV Nord, a déclaré (cotes B, 2008 à 2010 ; rapport, tome 4, p. 1111, sq.) : " Concernant la section 44 du TGV Nord, Condotte d'Acqua a contacté Prigent, membre du groupement Ballot, et Prigent en a avisé Ballot.
Dès lors, une collaboration a été envisagée entre Ballot et Condotte d'Acqua. Parmi les solutions envisagées figuraient une cotraitance sur la section 44, une réciprocité portant sur des travaux à réaliser en France et en Italie, et un accord de sous-traitance.
Les premiers contacts ont eu lieu fin mai. Cinq ou six réunions ont eu lieu entre GFA, Condotte d'Acqua et Ballot. J'étais présent à la réunion de Rome fin juillet, à celle de Paris à l'hôtel Pullman qui fut la dernière, ainsi qu'aux autres réunions qui ont eu lieu à Paris. J'ai accompagné M. Jacques-Henri Ballot à Rome, où nous avons rejoint M. Battigello de chez Campenon-Bernard. Les cotraitants de Ballot étaient au courant de ces contacts. Courant juin, les groupements Ballot et Razel s'étaient regroupés sur ce marché.
Je n'ai plus eu de nouvelles de Condotte d'Acqua après la dernière réunion de l'hôtel.
La soumission de Ballot s'est accompagnée d'un rabais, in fine, de 2,5 %. J'avais pour ma part présenté mon étude à M. Jacques-Henri qui était mandaté par ses partenaires pour consentir un rabais à situer entre 0 et 5 % et qui a décidé de couper la poire en deux à 2,5 %. Le rabais, in fine, est une pratique courante dans la profession.
Je connaissais la proposition de sous-traitance d'un montant de 75 millions de francs qui était ressortie des discussions de Rome. Mais je n'étais pas présent aux côtés de M. Ballot la veille de la remise des plis lors des contacts qui ont eu lieu entre M. Gautherie de chez Campenon-Bernard et lui. Je n'étais d'ailleurs pas au courant qu'il y eût des contacts entre Ballot et Campenon-Bernard sur le marché de la section 44.
Concernant le document portant un montant de 875 millions de francs, il a été rédigé de ma main. Il s'agit d'une estimation globale portant sur la section 44 utilisée lors de la réunion de Rome avec Condotte d'Acqua. Je n'ai pas remis ce document à Condotte d'Acqua. C'est à mon insu qu'il est resté dans les locaux où a eu lieu la réunion.
Concernant les notes prises par M. Pialoux le 10 septembre 1990, je ne m'explique pas la mention " il faut aller jusqu'à 751 MFF ", j'ignore ce qu'elle peut signifier. "
38. Dans sa télécopie en date du 20 décembre 1990 (cote B, 4035 ; rapport, tome 4, p. 1258) faisant suite à une demande de l'enquêteur, M. Delabre a précisé les dates où il a rencontré les représentants de Condotte d'Acqua à Paris :
"1) Deux premiers rendez-vous ont été pris de manière impromptue, suite à entretien téléphonique, et n'ont pas été notés de ce fait :
le premier = fin mai
le second = fin juin
2) Trois autres rendez-vous ont été planifiés :
03-07-90
20-07-90
23-07-90"
39. M Pialoux, adjoint de M Delabre, a déclaré (cotes B, 2012 et 2013 ; rapport, tome 4, p. 1115. sq.) : " Je suis, au sein de l'entreprise Ballot, l'adjoint de M. Delabre. J'étais auparavant employé par l'entreprise Razel. (...) Concernant la section 44 du TGV Nord, c'est surtout M. Delabre qui était en contact avec les autres entreprises présentes sur le marché. (...) Je n'ai eu aucun contact avec l'entreprise Condotte d'Acqua.
Sur le fait que j'ai retiré de mon agenda les pages qui intéressent les dates du 6 juillet 1990 inclus au 19 juillet 1990 inclus, je l'ai fait pour des raisons personnelles.
Concernant le prix de soumission sur la section 44, M. Delabre m'a indiqué, peu avant la remise des plis, qu'il avait été procédé à un rabais in fine de 2,5 %, sur la décision de M. Ballot.
Concernant la mention " il faut aller jusqu'à 751 MFF " contenue dans mes notes (...) saisies à l'agence de Normandie, elle vient à la suite d'une réunion qui a eu lieu début septembre avec la SNCF et à laquelle je n'ai pas assisté. La SNCF a demandé des réductions sur certains prix unitaires alors que nous souhaitions nous en tenir à notre offre, soit 751 millions moins 2,5 % de rabais in fine. La mention de 751 millions s'explique par le fait que l'on raisonne sur la base du montant résultant du total des sous-détails, avant réduction.
Concernant la mention " M. Foury de Dumez veut savoir le pourcentage de Razel sur le lot 44 " contenue dans mes notes (...) saisies à l'agence de Normandie, j'ignore de quoi il pouvait s'agir. J'ai noté de parler à M. Delabre de ce coup de fil de cette personne. "
40. M. Battigello, directeur adjoint de Campenon-Bernard, a déclaré (cotes B, 1552 à 1554, rapport, tome 4, p. 1072, sq.) : " Concernant la section 44 du TGV Nord, je savais que des affaires étaient en cours d'étude sur le TGV mais je ne connaissais pas de manière précise le lot 44.
M. Petitcolas m'a demandé d'accompagner M. Jacques-Henri Ballot à Rome afin de servir d'interprète entre Ballot et les responsables de Condotte d'Acqua à propos d'affaires portant sur les marchés TGV en France et d'affaires italiennes, affaires dont j'ignorais le contenu. J'ai pris l'avion en compagnie de MM. Ballot et Delabre. Nous avons rencontré au siège de Condotte d'Acqua MM. Rosi et Marchi. C'était un vendredi de fin juillet. (...)
Je ne peux pas faire de compte rendu exhaustif de tout ce qui s'est dit à Rome : MM. Marchi et Rosi s'exprimaient partiellement en français ; par ailleurs il y avait par moments deux discussions parallèles entre les quatre personnes. Les contacts étaient bons, normaux. Ces discussions ont porté sur de la sous-traitance réciproque entre Ballot et Condotte d'Acqua sur des affaires à conduire en France et en Italie. Ces discussions ont porté sur le type de travaux à sous-traiter (ouvrages d'art, terrassements, assainissement) et le montant des travaux objet de cette sous-traitance. Les chiffres de 50 et 75 millions de francs ont été évoqués.
Aucun accord n'a été obtenu et, en conclusion, M. Rosi a indiqué à M. Ballot qu'il lui donnerait une réponse rapidement sur la suite qu'il donnerait à cet entretien.
(...) Le lundi, M. Ballot m'a téléphoné en m'indiquant qu'il avait un rendez-vous avec M. Ritornale, qui ne parlait pas français. Ce rendez-vous avait lieu à l'hôtel de M. Ritornale (...) et M. Ballot m'a demandé d'y assister pour y assurer l'interprétariat. Ce monsieur nous a indiqué qu'il était chargé des études de prix. Il a demandé à M. Ballot de lui faire part du contenu des entretiens de Rome. M. Ballot, lui, a demandé à M. Ritornale la réponse de M. Rosi.
Je n'ai plus ensuite entendu parler de cette affaire. "
41. Dans une lettre à l'enquêteur en date du 22 octobre 1990 (cotes B, 1565 et 1566 ; rapport, tome 4, p. 1081, sq.), M. Gautherie a exposé : " Je soussigné Jacques Gautherie (...), gérant de la société Campenon-Bernard, atteste les faits suivants :
J'ai accepté, le 26 juillet 1990, un rendez-vous dans les bureaux de GFA à la demande d'un ami commun pour les raisons suivantes :
- principalement pour rencontrer le général Da Sena, président de Condotte d'Acqua, afin de lui parler de projets en Iran et du projet Karun-III en particulier, car je savais qu'il maîtrise parfaitement les données de ce pays ;
- et également parce que cet ami n'avait dit qu'il y avait des problèmes entre Condotte d'Acqua et l'entreprise Ballot.
J'ai servi de messager en ce qui concerne ce dernier point en ayant proposé spontanément, connaissant M. Ballot, de passer un message à ce dernier si les représentants de Condotte d'Acqua le désiraient.
Ceux-ci m'ont demandé de bien vouloir intervenir auprès de M. Ballot pour qu'il confirme par écrit sa position sur l'affaire du lot 44 du TGV.
J'ai téléphoné à M. Ballot du bureau de GFA et l'ai informé que j'étais en réunion avec les représentants de Condotte d'Acqua qui attendaient sa proposition écrite.
M. Ballot m'a dit savoir ce dont il s'agissait et m'a demandé comment transmettre ladite proposition.
J'étais pressé et lui ai demandé de faire transiter son pli par mon bureau afin de (le) faire parvenir. Le pli a été transmis à mon bureau dans la soirée par un représentant de l'entreprise Ballot. Un émissaire de Condotte d'Acqua est venu le récupérer plus tard dans la même soirée. J'ai été le témoin de l'ensemble de ces faits. "
42. M. Gautherie a confirmé ces propos lors de son audition du 22 novembre 1990 (cotes B, 1548, sq. ; rapport, tome 4, p. 1068, sq.).
43. M. Pronost, directeur de la direction LN 3 à la SNCF, a déclaré (cotes B, 701 à 703, rapport, tome 4, p. 975, sq.) : " En tant que direction de la ligne nouvelle, nous cumulons les fonctions, dans la pratique, de maître d'ouvrage et de maître d'œuvre, sous la tutelle de la direction des transports terrestres au Ministère de l'Equipement. A ce titre, nous organisons la procédure d'approbation des marchés. Cette procédure est réglementée par des instructions et des consignes générales diffusées au sein de la SNCF.
Dans le cadre de l'application de l'instruction générale AG 4 B 3 no 3, nous jugeons les offres conformément aux articles du chapitre III de cette instruction.
C'est dans ce cadre que nous (avons) examiné les offres du marché de la section 44. Suite aux interventions (perquisitions), j'ai téléphoné à GFA - M. Abballe - afin de connaître les motifs de leur démarche dans cette affaire puisqu'il mettait en cause des complicités dans mon service. Par ailleurs, ayant été préqualifiés par la SNCF à deux occasions, il me semblait normal que les dirigeants de l'entreprise Condotte viennent nous présenter leurs références, leur organisation et les moyens qu'ils comptaient mettre en œuvre en cas d'attribution d'un gros marché en France. En dehors de cet appel, je n'ai pas contacté GFA ou Condotte à propos de leur offre sur le lot 44. Pour l'avenir, j'ai demandé à M. Carmona de GFA d'organiser un rendez-vous avec les dirigeants de Condotte pour qu'ils viennent présenter leur entreprise puisqu'ils ont sollicité de nouvelles préqualifications.
Je considère, actuellement, que notre procédure d'appel d'offres est tout à fait régulière. En outre, j'ai donné des instructions pour renforcer la sécurité des plis entre leur remise et la réunion de dépouillement. Une enquête interne à la SNCF, diligentée par le service de contrôle des marchés, doit conduire très prochainement à la remise d'un rapport qui nous indiquera si nécessaire des mesures complémentaires. C'est M. Garnacho qui a la responsabilité de la mise en œuvre des nouvelles mesures.
Dans le cadre de l'ensemble des appels d'offres, j'ai le sentiment que la cadence élevée d'appel au marché a fait que les entreprises ne se sont pas toutes intéressées à tous les dossiers. Je n'ai pas le souvenir que sur les affaires importantes nous ayons eu des marchés signés à partir d'une seule proposition sérieusement étudiée. Oralement, les entreprises m'avaient prévenu que leurs moyens d'étude ne leur permettaient pas de s'intéresser à toutes les affaires. Pour améliorer la concurrence dans nos appels d'offres, il a été décidé, en accord avec notre ministère de tutelle et de la mission de contrôle du ministère des finances, d'ouvrir nos appels d'offres aux entreprises eurospéennes. "
10. La section 43-C de l'interconnexion du TGV Nord
1. Un cahier de notes personnelles rédigées par M. Tarbès a été saisi dans les locaux de l'entreprise GTM-BTP. Une des pages de ce cahier (cote B, 3824, Sc. 1, 99 ; 1170) comporte, à la date du 13 mars 1989, les mentions suivantes :
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2. Dans l'agenda de poche 1989 de M. Petitcolas (Campenon-Bernard), on peut lire à la date du mardi 25 avril, à 16 heures (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 723) : " TGV Champs/Cote/Brunet/Mabulet/Esine/Arnal. "
3. Dans ce même agenda, on peut lire à la date du lundi 8 mai (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 724) : " Zucker/Gif-sur-Yvette ".
4. Dans ce même agenda, on peut lire à la date du mercredi 10 mai (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 724) : " Accord de coopération commerciale : Cote + Zucker ".
5. Dans ce même agenda, on peut lire à la date du dimanche 14 mai, comme note de bas de page (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 724) : " après jeudi 11 à 14 h 30 à Longpont ".
6. Dans ce même agenda, on peut lire à la date du lundi 22 mai à 8 h 30 (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 726) : " (Saint-Quentin Barré) Clichy/Bouclage By/Disneyland ".
7. Dans ce même agenda, on peut lire à la date du vendredi 26 mai à 14 h 30 (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 726) : " Saint-Quentin/TGV Disneyland/ + Zucker ".
8. Une note manuscrite saisie dans le bureau de M. Petitcolas, au siège de Campenon-Bernard (cote B, 3811, Sc. 1, 55 ; rapport, tome 4, p. 1147) et rédigée le 5 juin 1989, c'est-à-dire avant la date limite de remise des plis, indique :
"LP :
J Gautherie
H Stouff
J Mesmain
G Battigello
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"
9. M. Petitcolas, directeur chargé des grands travaux France chez Campenon-Bernard, a déclaré (cotes B, 1557 et 1558 ; rapport, tome 4, p. 1076, sq.) : " Campenon-Bernard a avec Bouygues un protocole d'accord de groupement sur la section 43 C du TGV Nord (Eurosdisneyland). Je ne me souviens pas d'un accord, avant la remise des offres, signé avec Nord-France, qui a en revanche intégré le groupement après l'obtention du marché par le groupement, comme cotraitant et en accord avec la SNCF / (...) Concernant le marché d'eurosdisneyland, et s'agissant plus particulièrement de la pièce cotée 55 appartenant au scellé n° 1 (...), j'ai eu des contacts avec M. Zucker en mai 89 sur l'intégration de Nord-France dans le groupement. Aucun accord n'a été trouvé sur cette intégration. Je ne me souviens pas de la signification accordée à la mention " 30 MF à réserver à N. France " portée sur ce document, Nord-France ayant peut-être à l'époque une solution technique intéressante pour notre groupement ".
10. M. Michel Cote, directeur Génie civil-Ouvrages d'art chez Bouygues, a déclaré (cote B, 1459 ; rapport, tome 4, p. 1055, sq.) : " (...) pour la gare Eurosdisneyland, Nord-France a été réintégré officiellement par courrier à la SNCF, le 18.09.89 - courrier ci-joint. Je n'ai pas connaissance de contact entre Campenon-Bernard et Nord-France avant la remise des plis pour le marché de la gare Eurosdisneyland ".
11. La lettre adressée le 18 septembre 1989 par la société Bouygues à la SNCF (cote B, 1465 ; rapport, tome 4, p. 1058), ayant pour objet le " TGV - lot 43 C / Traversée du site Eurosdisneyland " indique : " En tant que mandataire du groupement adjudicataire de l'affaire citée en référence, nous avons l'honneur de solliciter l'entrée de Nord-France au sein de notre groupement ; Nord-France nous apportant sa bonne connaissance locale d'EPA-France, EPA-Marne et diverses municipalités. Nous souhaiterions donc, si vous acceptez notre demande, que Nord-France puisse être nommé dans le marché, étant donné qu'à ce jour celui-ci n'est toujours pas signé ". (M. Zucker a quitté la société Nord-France Entreprise à la fin de l'année 1989 et n'a pu être entendu au sujet de ces rencontres.)
11. La section 21 du TGV Rhône-Alpes
1. Le 2 mai 1988, M Dehan, directeur général adjoint de la société Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1196 V° ; rapport, tome 4, p. 765 : M. Jean-Paul Paufique est directeur du développement à la société Dumez-TP) :
"3. TGV Contournement Lyon
Cofiroute serait prêt à discuter si 2 lots
Cofiroute (+ Campenon ?) d'un côté
Dumez Spie B. Razel Be de l'autre
Paufique est en piste - D'annunzio
OK pour s'organiser sur 2 lots"
Se reporter à la page 87 bis pour les alinéas 2 à 5.
"Concur. à ce jour
- Bouygues - CITRA - Dumez
- Cofiroute
Contacts
Bec ou Razel
Berthouly - Mazza - Perrier
Contact GC (illisible samedi 5.11)
M. Taillet XPonts successeur Veyrier à VP"
6. Le 9 janvier 1989, M. Jean Carayon adressait la note suivante (cotes B, 3851, Sc. 2, 161 et 162 ; rapport, tome 4, pp. 1173 et 1174) à M. Serralta (l'un et l'autre appartiennent à l'entreprise Spie-Batignolles) :
" CONFIDENTIEL
TGV Rhône-Alpes
1. Il a été convenu qu'on était dans une optique gagnante pour notre groupement et en transparence complète.
2. Eiser est d'accord pour GTM (mais pourquoi pas Sogea) pour bien caler nos rapports avec Cofiroute. Il voit avec GTM. Il a précisé qu'il souhaitait plus d'1 part à eux deux...
3. Cotte indique que Colas est contre la participation de Cofiroute au TGV Rhône-Alpes.
Cotte remarque qu'on va avoir en prenant le tronçon Sud du TGV Rhône-Alpes des frais d'études supplémentaires (par rapport au tronçon Nord par ex.) mais bien sûr des espoirs pour d'autres tronçons (il n'est pas très optimiste contrairement à J. Renault sur la possibilité de voir se réaliser tous ces TGV).
4. Il a été convenu de se contenter de Razel et Bec, et de rendre la liberté à Muller qui était plus ou moins avec Bouygues. Muller va sans doute aller vers CB et SAE.
2. Le 9 mai suivant, M. Dehan notait dans ce même cahier (cote A. 1966, Sc. 7, 1200 V° ; rapport, tome 4, p. 766 ; M. Georges de Buffevent est le président-directeur général de Spie-Batignolles) : " 6. TGV Sud-Est Lyon/Bec OK pour consolider Gt Spie Razel DZ Bec mais en restant ouvert à B, pour avoir 2 Gt7 Buffevent est bien intéressé. "
3. Le compte rendu du " Comité de direction de Dumez-TP n° 13 du lundi 9 mai 1988 à 8 heures " indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1531 ; rapport, tome 4, p. 797) : " Groupement Spie, Damez-TP, Razel, Bec consolidé mais ouvert à Bouygues. L'autre groupement comme prévu comprendra Cofiroute. "
4. Le 20 juin 1988, M. Dehan, directeur général adjoint de la société Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 7, 1214 R° ; rapport, tome 4, p. 722) : " 3.9 - TVG SE/On cherche à prendre le pilotage d'une des 2 Gts mais on n'a pas les hommes. "
5. Le 4 novembre, M. Demazer (société Guintoli) notait dans son cahier de notes manuscrites commencé le 8 août 1988, à propos du " TGV - Contr Lyon ->Valence " (cote B, 3880, Sc. 5, 36 bis ; rapport, tome 4, P. 1181 : seule l'entreprise Berthouly ne fera partie d'aucun des groupements qui soumissionneront) :
5. On a reparlé des locaux lyonnais mais on n'a pas conclu et on doit en reparler. "
7. Le 12 janvier 1989, M Dehan, directeur général adjoint de la société Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 9, 1389 V° ; rapport, tome 4, p. 785) : " Sur Lyon Notre GT : B Spie DZ Razel Bec / et on va réintégrer GTM. "
8. Le 27 janvier 1989, M. Tarbès (GTM) notait dans son cahier de notes manuscrites allant du 2 juin 1988 au 1er juin 1990 (cote B, 3824, Sc. 1, 93 ; rapport, tome 4, p. 1169) : " Heiser - OK sur TGV Lyon Sud prix agrégats / j'ai appelé Maillant. "
9. Le 4 avril 1989, M. Dehan, directeur général adjoint de la société Dumez-TP, notait dans le cahier de notes manuscrites qu'il tient au jour le jour (cote A, 1966, Sc. 9, 1435 V° ; rapport, tome 4, p. 788) :
" 9. TGV SE JC s'en va : devient un pb d'entreprise Jacoty chef de projet
Défendre une position de mandataire
CB se défend "
10. Dans l'agenda 1989 de M. Petitcolas, directeur chargé des Grands Travaux de France de la société Campenon-Bernard (cote A, 1948, Sc. 2, 63 ; rapport, tome 4, p. 719), on peut lire à la date du 25 avril à 17 h 30 : " Sogea 21e étage / TGV Lyon ".
11. Dans l'agenda de poche 1989 de M. Petitcolas (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 723), on peut lire à la date du 25 avril à 17 h 30 : " TGV Lyon / Sogea 21e étage (illisible) réunion ".
12. Dans ce même agenda de poche 1989 de M. Petitcolas (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 724), on peut lire à la date du mardi 9 mai à 18 heures : " Gendreau Pottier / TGV / Lyon / Part de chacun dans ABCo ". MM. Claude Gendreau et Michel Pottier étaient respectivement directeur général France de Borie SAE et directeur des Grands Travaux de Quillery.
13. Dans ce même agenda de poche 1989 (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 725), on peut lire à la date du mercredi 17 mai à 8 heures : " TGV Sud Lyon / Champs ".
14. Le compte rendu du " Comité de direction Dumez-TP n° 46 du lundi 29 mai 1989 à 8 h 30 " indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1517 ; rapport, tome 4, p. 796) : " 4.2. TGV Rhône-Alpes / Le problème Campenon-Bernard est toujours en suspens. Ses exigences (rôle apparent et commandataires)] sont trop élevées. Les banques de son groupement sont le Crédit du Nord, la Barclays et le Crédit agricole. "
15. Dans l'agenda de poche 1989 de M. Petitcolas (cote A, 1948, Sc. 2, 64 ; rapport, tome 4, p. 727), on peut lire à la date du mardi 5 juin à 18 heures : " OA / TGV Lyon Sud / Champs-Elysées ".
16. Le compte rendu su " Comité se direction Dumez-TP n° 47 du mercredi 5 juillet 1989 à 8 h 15 " indique (cote A, 1966, Sc. 10, 1512 ; rapport, tome 4, p. 795) : " 3.1. TGV Rhône Alpes / Etude en cours. Problème Campenon-Bernard toujours pas réglé et choix du mandataire de notre Groupement pas encore arrêté. Réunion fixée entre Dumez TP et M. Schaer à la SNCF / Lyon le 20 juillet. "
17. Dans les locaux se l'entreprise Cillerez a été saisi un tableau manuscrit daté su 15 octobre 1989 et intitulé : " TGV / Lyon Valence / Comparaison des estimations base SNCF " (cote B, 3997, Sc. 5, 164 et 165 ; rapport, tome 4, p. 1254 et 1255). Dans une première partie (ibid., 164), il comporte sept colonnes (cinq concernant les " lots " " 22 " à " 26 ", la sixième des sous-totaux et la septième des totaux généraux) et cinq rubriques en ligne (" Terrassements ", " Chaussées ", " Drainage ", " OEA courants " et " Ecrans "). Chacune de ces rubriques fait l'objet se trois lignes : " 1 ", " 2 " et " 3 " . Dans sa deuxième partie (ibid., 165), la rubrique horizontale " Viaducs ", qui fait l'objet se trois lignes, " 1 ", " 2 " et " 3 ", concerne sept colonnes (" Savas 52 ", " Meyssiès 62 ", " Bancel 54 ", " Estacade 56 ", " Isère 66 ", " Isère Métal 66 " et une colonne se totaux). La rubrique " Tunnels ", qui fait l'objet de trois lignes, " 1 ", " 2 " et " 3 ", concerne quatre colonnes (" 23 ", " puits ", " 25 " et une colonne se totaux). A la suite, un récapitulatif encadré indique : " 1 - 2508, 3/2 - 2282, 4/3 - 2351,8 ". Puis une " comparaison faite avec le lot 11 SNCF (LGV-Lyon Nord) " calcule pour les lots " 22 ", " 24 " et " 26 " les " terrassements seuls ", les " ouvrages d'art + écran " et une moyenne 1-2-3 ". Enfin, des " hypothèses " de " MO " sont faites en " air libre " et en " souterrains " dans trois colonnes intitulées " 1 ", " 2 " et " 3 ".
18. Dans les locaux de l'entreprise Cillera a été saisi un autre tableau dactylographié auquel ont été ajoutées des mentions manuscrites (cote B, 3997, Sc. 5, 178 ; rapport, tome 4, p. 1257). Ce tableau comporte cinq colonnes : les deux premières sont intitulées " Réf. hors aléas " et " Réf. y.c aléas " et les trois autres n'ont pas d'intitulé. Toutes comportent des chiffres par lignes : la rubrique " Terrassements " est subdivisée en " 22 ", " 24 ", " 26 " et " Entrées tunnels ". Les autres rubriques sont " OA Courants ", " Viaducs, " Tunnels, Sous-total (hors tunnel) " et " Total ". En dessous se ce tableau figurent plusieurs calculs manuscrits établis à partir des totaux du tableau auquel ont été appliquées diverses majorations et minorations. La dernière ligne est la suivante : " Admis ->2400 ->24665 ->24966 ->Po ". Le premier appel d'offres lancé par la SNCF pour l'ensemble du programme TGV Nord + Interconnexion + TGV Rhône-Alpes portait sur le lot 11, qui a ainsi pu servir de base de comparaison.
19. Un dernier tableau, portant en tête la mention manuscrite " Avant mardi ", a été saisi dans les locaux se l'entreprise Quillera (cote B, 3997, Sc. 5, 179, rapport, tome 1, p. 261). Une première partie, dactylographiée, comporte quatre colonnes intitulées " Réf. ", " A ", " B " et " C " et sept rubriques en lignes : la première (" TER + DR + C ") comporte trois lignes (" L 22 ", " L 24 " et " L 26 ") et les autres sont " TER TUN ", " OAC + ECR ", " Viaducs ", " Tunnels ", " Total " et " X/B ". La deuxième partie, manuscrite, comporte six rubriques en lignes : " 22 ", " 24 ", " 26 ", " Entrée ", " OAC ", " Viad ", " Tunnel M ", " (Tunnel) G ", " (Tunnel) PM " et la ligne des totaux et quatre colonnes intitulées " Po ", " A ", " B " et " C " . Seules les trois premières colonnes " Po ", " A " et " B " sont correctement remplies et correspondent aux colonnes " A ", " B " et " C " du tableau de la partie dactylographiée. Une dernière partie, enfin, comporte plusieurs calculs manuscrits.
Les mentions manuscrites qui composent les trois tableaux saisis repérés sous les numéros 17 et 19 ci-dessus ou qui y figurent ont été portées par une même personne, dont l'écriture se retrouve dans divers documents saisis dans les locaux de l'entreprise Campenon-Bernard. Ces tableaux décomposent les travaux à effectuer en lots dont la numérotation est celle de la SNCF pour la section 21 du TGV Rhône-Alpes.
Le tableau suivant récapitule ces trois tableaux. Les trois hypothèses calculées dans chacun d'eux correspondent aux offres des groupements soumissionnaires A, B et C, que ces hypothèses soient explicitement notées " A ", " B " et " C " (19), qu'elles soient notées " 1 ", " 2 " et " 3 " (17) ou qu'elles ne soient pas intitulées du tout (18) : les prix mentionnés sur les tableaux non datés (18 et 19) sont voisins mais différents de ceux qui ont été effectivement remis et sont donc, comme ceux du tableau du 15 octobre 1989 (17), antérieurs à la remise des plis le 6 novembre 1989 ; à chaque offre moins disante effectivement déposée (en gras) correspond l'offre la plus basse de l'hypothèse associée (également en gras) ; l'ordre du moins-disant au plus-disant est généralement le même, pour chaque rubrique, dans ces tableaux et dans le résultat du dépouillement des offres effectivement déposées.
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L'ordre de présentation de ces différents tableaux (documents 17, puis 18, puis 19) correspond à l'ordre chronologique de leur réalisation : de l'un à l'autre, les prix indiqués se rapprochent de plus en plus de ceux qui seront effectivement remis, et l'ordre d'arrivée des trois groupements de celui qui sera effectivement observé lors du dépouillement. Le document 19 indique l'écart entre les offres des trois groupements : pour une base 100 pour le groupement B, le groupement A atteint 103,7 et le groupement C 106,7.
20. Dans les locaux de l'entreprise Quillery a été saisi un document manuscrit rédigé sur du papier à en-tête de la SA Dynergie (cote B, 3997, Sc. 5, 177 ; rapport, tome 4, p. 1256). L'encadré en haut de la page porte la mention " Lyon Sud/Remise le 6 ". Suivent des indications chiffrées relatives à l'" Application PVTG Sud-Est " et qui distinguent, pour deux colonnes dont l'une est intitulée " gpt " et aboutit à un total de 2 332 et l'autre, sans titre, aboutit à un total de 2 149, entre " OC ", " Viaduc ", " Terras pur " et " Tunnel ". Ce document se termine par la mention : " Cote ->pas rab. général ".
21. Dans le " compte rendu de la réunion d'information du 26 avril 1990 à Arles " saisi dans les locaux de l'entreprise Guintoli, on peut lire (cote B, 3880, Sc. 1, 53 ; rapport, tome 4, p. 1178) " 1.3/Affaires en perspective/ (...) - LVG lot 21 Satolas-Valence : Guintoli espère toujours participer à ces travaux, à hauteur de 150 MF environ. "
22. Une note manuscrite de M. Dumazer (société Guintoli), intitulée " Fax à Muller " et datée du 8 juin 1990, indique (cote B, 3880, Sc. 2, 54 ; rapport, tome 4, p. 1180) :
" A l'attention de MM. Crenna et Edme. LGV lot 21 : Ai fini par avoir Thievent ce matin et lui ai exposé clairement notre opposition formelle à voir un 3e participant sur le 26 (TAC). Ceci sur les 4 arguments convenus :
- sur 3 lots d'importance équivalente, il faut laisser 2 terrassiers sur chacun
- les 49 MF d'augmentation du 26 correspondent pour partie à des travaux sous-traités, pour l'autre à des prestations très spéciales (estacade).
- malgré cette augmentation, le delta pour nos 2 entreprises reste significatif.
- Bec n'a pour l'instant travaillé que dans France Sud et a par ailleurs obtenu toutes assurances sur la localisation du solde de son CA.
Thievent m'a confirmé qu'à hier soir le problème d'un glissement de DTP au Sud n'avait pas été évoqué mais qu'il pressentait une prochaine intervention dans ce sens. "
23. Dans le " compte rendu de la réunion d'information du 3 juillet 1990 à Giens " saisi dans les locaux de l'entreprise Guintoli, on peut lire (cote B, 3880, Sc. 1, 69 ; rapport, tome 4, p. 1179) :
" 1.2 - Affaires obtenues
(...) b) France Sud
- LGV LYON VALENCE. Accord de la SNCF et du groupement adjudicataire pour 147 MF à Guintoli sur le lot Sud n° 26. Préparation de l'affaire en cours. Guintoli, obligatoirement sous-traitant, a été admis au Comité de Direction du groupement général. "
24. La télécopie d'une note manuscrite datée du 5 septembre 1990 a été saisie dans les locaux de Campenon-Bernard (cote B, 3811, Sc. 1, 42 ; rapport, tome 4, p. 1146). Elle émane de M. Guillien, est adressée à M. Petitcolas et indique :
" Phrases de M. Schaer lors de notre entretien du 5/09/90, en présence de M. Jourdain
- la SNCF constate que le groupement B "redistribue" une part importante du travail
- ce constat conduit la SNCF à prendre la position suivante
(...)
Les modalités pratiques de cette règle, guidée par l'important phénomène de sous-traitance, ne sont pas encore au point. "
25. M. Bernard Tarbès, vice-président-directeur général de GTM-BTP, a déclaré le 22 janvier 1991 (cotes B, 1412 et 1413 ; rapport, tome 4, p. 1051, sq.) : " Concernant les marchés TGV, la SNCF avait laissé entendre qu'elle allait modifier son mode de dévolution des travaux et faire appel à des entreprises et à des financiers réunis dans le cadre d'une concession GTM s'est donc intéressé à ces marchés dans le cadre de la structure Cofiroute, spécialiste de ce type de dévolution des travaux depuis 20 ans sur les autoroutes.
Sur le TGV Nord, la SNCF a renoncé à cette solution et est revenue à un schéma classique.
Sur le TGV Rhône-Alpes, elle en a conservé certaines caractéristiques et GTM s'est donc présenté sur la section 21 avec les entreprises constituant la structure Cofiroute, qui comprend 5 entreprises : GTM Entrepose, Jean Lefevre, Sogea, Fougerolle et Colas. La structure était réduite à 3 entreprises sur le TGV Rhône-Alpes, le marché ne comportant guère de travaux relevant de la spécialité de Jean Lefevre et de Colas. Cofiroute avait beaucoup travaillé sur le marché initial du TGV Rhône-Alpes.
La SNCF demandait un gros travail aux entreprises sur ce marché. Les 3 entreprises du groupement réunies ont dépensé 16 millions de francs en études ; une équipe mixte travaillait sur le projet dans les locaux de GTM.
Notre travail était particulièrement intéressant dans sa partie terrassement. Nous avons déposé notre offre en novembre 1989. Puis pendant 3 mois, la SNCF a étudié les offres et négocié sur divers points techniques puis financiers avec les entreprises. Courant mars 1990, nous avons compris qu'elle s'apprêtait à choisir le groupement B, malgré notre rabais de 1 % environ sur notre offre.
La SNCF semblait s'apprêter à procéder à une sorte de synthèse des différents projets dont elle disposait, ce qui posait un problème déontologique. Aussi notre idée a-t-elle été, parce que nous avions des atouts que nous souhaitons mettre à disposition sur ce marché, de demander une compensation et de participer aux travaux.
Nous avons obtenu l'accord de nos concurrents du groupement B emmené par Dumez dans un premier temps, celui de M. Schaer dans un second temps. Les discussions avec nos nouveaux partenaires ont ensuite porté sur la part qui nous serait attribuée, part qui a été prélevée sur le montant total.
Il n'a pas été question de notre réintégration au groupement avant mars 1990. Ce n'est que postérieurement à notre réintégration que nous avons comparé nos prix avec les prix du groupement B. "
26. M. Michel Pottier, directeur des Grands Travaux de la société Quillery, a déclaré le 13 décembre 1990 (cotes B, 1752 et 1768 ; rapport, tome 4, p. 1086, sq.) : " Il n'y a pas de coordination générale de l'activité au sein du groupe SAE, en revanche, il est possible qu'il y ait à titre ponctuel pour certaines affaires, dans des cas exceptionnels, une intervention de SAE en tant qu'actionnaire. Cela a été le cas pour la constitution du groupement Lyon-Sud.
L'actionnaire, SAE, est intervenu uniquement lors de la constitution du groupement Lyon-Sud et il n'a aucune coordination sur les autres marchés de construction des lignes TGV. Sur les autres marchés TGV nous nous présentons en tant que concurrents.
Le groupement que j'appelle "Lyon-Sud" a été constitué pour la section 21.
(...) S'agissant des tableaux saisis dans mon bureau (cote n° 179), cela concerne des discussions avec le mandataire sur les différentes solutions, les différentes possibilités de présenter les prix, je ne sais pas à quelle date ce tableau a été établi.
Le document coté 180 est la récapitulation de prix de vente. Je ne peux vous dire si les documents nos 179 et 180 ont un lien entre eux. Les lettres "A, B et C" qui figurent sur le document no 179 sont peut-être les différentes solutions envisagées. Je ne peux pas vous dire ce que la colonne "REF" signifie. Ces tableaux ont été établis, je suppose, par le mandataire, M. Petitcolas était le représentant du mandataire. Les notes prises sur le document n° 178 sont de ma main. Les tableaux cotés 164 et 165 sont des comparaisons des différentes variantes que notre groupement avait établies. Il n'a jamais été envisagé de rapprocher les groupements "A, B et C" en compétition sur Lyon-Sud. "
27. M. Yvon Dumazer, président du directoire de la société Guintoli, a déclaré le 21 décembre 1990 (cotes B, 2457 à 2459 ; rapport, tome 4, p. 1130, sq.) : " Les contacts dont il est fait état sur le document coté 36 bis appartenant au scellé n° 5 saisi dans mon bureau correspondent à des démarches que j'ai effectuées à l'époque en vue de la constitution du groupement non encore figé auquel appartenait déjà Guintoli. Ces contacts ont eu lieu avec les entreprises Bec et Razel qui m'ont d'abord fait une réponse d'attente qui s'est avérée négative puisqu'elles ont rejoint un autre groupement. Puis avec les trois entreprises locales citées en dessous des premières.
C'est en sous-traitance que Guintoli travaille sur le TGV Lyon, sur le lot 26 de la section 21.
(...) Lorsque le résultat de la section 21 a été connu, au printemps 90, Guintoli appartenant au groupement A battu, j'ai contacté M. Thievent, secrétaire général de Dumez, pour proposer les services de Guintoli à son groupement, en indiquant une préférence pour le lot 26 pour des raisons géographiques et pratiques. Il m'a dit de contacter l'entreprise Muller qui devait réaliser les travaux du lot 26 pour le groupement B. L'entreprise Muller a été d'accord pour sous-traiter la moitié de ces travaux à Guintoli dans le cadre d'une participation. MM. Thievent, de Dumez, et Crenna, de Muller, ont successivement contacté la SNCF (M. Schaer) pour obtenir son accord sur cette sous-traitance, accord qui a été obtenu sous réserve d'une demande officielle de sous-traitance à présenter par le groupement attributaire. Ce que je me suis fait confirmer par M. Schaer lui-même lors d'un entretien. Le montant de cette sous-traitance est d'environ 130 ou 140 millions de francs.
(...) Concernant le document coté 54 appartenant au scellé n° 2 saisi dans mon bureau, il concerne les relations de plusieurs terrassiers entre eux sur le TGV Rhône-Alpes, et principalement l'arrivée sur le lot 26 de la section 21 d'un troisième terrassier en plus de Muller et Guintoli : DTP, dont l'intervention était initialement prévue sur le lot 22 avec Bec. Bec souhaitant rester seul terrassier sur ce lot, DTP risquait de glisser sur le lot 26, ce à quoi Guintoli et Muller étaient opposés. Il apparaissait de toute façon que même si Bec partageait comme prévu au sein du groupement adjudicataire les travaux de terrassement avec DTP, il aurait la possibilité d'intervenir sur d'autres prestations (ouvrages d'art courants). A peu de chose près, chacun est resté sur les positions initialement établies. "
28. M. Michel Cote, directeur Génie civil et ouvrages d'art de la société Bouygues, a déclaré le 14 janvier 1991 (cotes B, 1458 et 1459 ; rapport, tome 4, p. 1055, sq.) : " Nous avons essayé de constituer un groupement, pour la section 21, avec SPIE, Dumez et les terrassiers Razel et Bec, à ma connaissance Muller nous a rejoints par la suite. Ce groupement était constitué également de six banques. Plusieurs réunions complexes se (sont) déroulées en vue de la constitution de ce groupement. A l'intérieur de ce groupement, notre rôle est limité à la réalisation du tunnel de la Galaure. Je n'ai pas suivi l'intégration de GTM à notre groupement dans la mesure où cela n'avait aucune incidence sur notre part de travaux. Je ne suis pas au courant de comparaisons des études entre les groupements. "
29. M. Louis Petitcolas, directeur chargé des grands projets France chez Campenon-Bernard, a déclaré le 17 décembre 1990 (cote B, 1559 ; rapport, tome 4, p. 1076, sq.) : " Concernant les contacts et rencontres que j'ai eus avec les responsables de diverses entreprises et qui sont portés sur mon agenda 89, saisi dans le cadre de la procédure intéressant l'affaire "Pont de Normandie", il m'est impossible de dire à quelles affaires ils se rapportaient exactement.
S'agissant de la pièce cotée 179 appartenant au scellé n° 5 de la saisie effectuée chez Quillery, je ne connais pas la provenance de ces tableaux.
(...) Mes nombreux contacts avec Bouygues portaient soit sur des affaires en cours, soit sur des affaires à venir. "
30. M. Jean-Jacques Massip, directeur adjoint de la société Sogea jusqu'au 30 septembre 1990, a déclaré le 3 janvier 1991 (cote B, 1511 ; rapport, tome 4, p. 1062, sq.) : " En ce qui concerne la section 21 de Lyon-Sud, l'étude conjointe a été faite chez GTM. Je n'ai jamais eu connaissance de rapprochement des études entre les différents groupements. "
31. M. Daniel Calinaud, directeur commercial de la société Fougerolle France (division Génie civil) jusqu'en septembre 1990, a déclaré le 4 janvier 1991 (cote B, 1771 ; rapport, tome 4, p. 1089, sq.) : " Pour Lyon-Sud, section n° 21, j'ai participé mais pas directement à la cellule d'études, puis j'ai assisté aux réunions d'arrêt de prix avec GTM et Sogea, les représentants des entreprises étaient MM. Massip et Courtecuisse pour Sogea, Tarbès pour GTM, Violet et moi-même pour Fougerolle. A ma connaissance, il n'y a pas eu de rapprochement entre les études de prix des trois groupements. "
32. M. Jean-Claude Cazenove, directeur commercial de la société Razel, a déclaré le 15 janvier 1990 (cotes B, 1808 et 1809 ; rapport, tome 4, p. 1093, sq.) : " Concernant l'intégration de GTM au groupement de Razel sur la section 21 du TGV Rhône-Alpes, j'ai été réticent à l'accepter car GTM était un concurrent. Mais M. Schaer nous demandait de faire des économies techniques. Or GTM avait des variantes techniques intéressantes et c'est ainsi qu'elle a rejoint le groupement, avec l'accord de la SNCF. "
33. MM. Bernard Schaer et André Besse, respectivement directeur régional de la SNCF à Lyon et chef de la division des marchés de cette direction, ont déclaré le 10 décembre 1990 (cotes B, 1134 et 1135 ; rapport, tome 4, p. 1044, sq.) : " Il y a eu une seule remise des plis, le 6 novembre 1989, mais deux reprises :
- 13 mars 1989 : envoi d'un premier dossier permettant l'étude de l'avant-projet " entreprises "
- 31 août 1989 : reste des pièces de la consultation.
Jusqu'au 6 novembre 1989, il n'était pas envisagé de rapprocher les groupements. Après cette date, nous avions trois solutions "entreprises" et trois solutions "SNCF" (...) Les groupements n'ont jamais été rapprochés par nos soins. Nous avons obtenu la solution la mieux-disante avec le groupement B, fin avril 1990, et le marché a été présenté au conseil d'administration de juillet 1990. Le 12 juin 1990, on a eu un courrier demandant l'intégration de GTM au groupement en voie d'être retenu.
(...) Après étude des offres et compte tenu des variables non acceptables, nous avons négocié séparément avec les groupements et nous avons redemandé une nouvelle offre globale et complète pour le 5 février 1990. Les entreprises étaient toujours mises en concurrence. Par la suite nous avons engagé la discussion avec les trois groupements, sachant que le groupement B était moins-disant.
(...) Nous avons alors obtenu un certain nombre de rabais (...).
Actuellement, le marché de la section 21 est attribué au groupement B associé à GTM. Les éventuels sous-traitants nous sont proposés au fur et à mesure en fonction des déclarations du mandataire. "
LA COUR :
Vu la déclaration de recours du 13 mars 1976 et les mémoires des 15 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 2 octobre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 2 octobre 2001 et 28 juin 2002 par lesquels la société Bec Frères poursuit à titre principal l'annulation de la décision du conseil et de l'ensemble de l'instruction et de la procédure suivies devant lui, en raison de la violation de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (la Convention), et notamment du principe d'égalité des armes, qui a été retenue par la cour de cassation dans son arrêt du 5 octobre 1999, subsidiairement sa réformation, et demande à la cour :
- de dire qu'après l'annulation de la décision du conseil, la Cour d'appel de Paris ne pourra pas statuer au fond, en raison des irrégularités affectant, dans son ensemble, l'instruction et la procédure suivie devant le conseil ;
- de dire, en conséquence, qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction à son encontre ;
Subsidiairement,
- de dire qu'après l'annulation de la décision du conseil, la cour d'appel, saisie sur renvoi, ne peut pas valablement statuer sur le fond ;
- de constater que, selon l'article L. 464-8 du Code de commerce, aux termes duquel le recours contre les décisions du conseil est " un recours en annulation ou en réformation ", la cour d'appel ne peut utiliser cumulativement son pouvoir d'annulation et de réformation, ni substituer, après l'annulation de la décision frappée de recours, sa propre décision au fond à celle du conseil ;
- d'autre part, de dire qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction en raison de la prescription prévue par l'article L. 462-7 du Code de commerce qui, par suite de l'effet de l'annulation de la décision du conseil et des actes de procédure postérieurs, s'est trouvée acquise le 25 août 1998, ou au plus tard le 25 octobre 1998, soit trois ans après la date de notification du rapport du conseil, ou " celle de la réponse du commissaire du gouvernement auprès du conseil à ce rapport " ;
- de constater la violation du principe du contradictoire et des droits de la défense dans le cadre de la procédure devant le conseil, en raison :
- de l'absence d'accès à la totalité des pièces de la procédure ;
- de l'absence de débat contradictoire sur les sanctions dans le cadre de la procédure devant le conseil ;
- de la violation des exigences de droit quant à l'individualisation et à la motivation des griefs notifiés ;
- de constater que l'ordonnance du président du Tribunal de grande instance de Nanterre du 24 novembre 1997 a annulé, à sa demande, la saisie de cinq pièces ;
- de dire que ces pièces doivent être écartées des débats ;
- en conséquence, ces irrégularités affectant l'instruction et la procédure devant le conseil, de dire qu'il est impossible à la cour d'appel, statuant sur renvoi, de statuer au fond et de juger qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction à son encontre ;
Plus subsidiairement encore,
- de constater l'absence d'identification et de définition du marché pertinent au regard duquel doivent être appréciées les pratiques examinées comme l'éventuel dommage à l'économie ;
- de constater l'absence de démonstration individuelle pour chaque grief de sa volonté de participer aux concertations anticoncurrentielles sanctionnées ;
- de constater le caractère inévitable et licite de la recherche de partenaires économiques et de la nécessité de constitution de groupements momentanés ;
- de constater les autres éléments spécifiques dont il doit être tenu compte dans la qualification des faits :
- l'inadaptation des procédures de consultation ;
- l'attitude des maîtres d'ouvrage ;
- l'absence de pertinence des estimations des maîtres d'ouvrage, et donc des écarts entre celles et les prix ;
- la situation des entreprises du secteur concerné ;
- de prendre acte de ses observations sur l'unique grief pour lequel elle a été sanctionnée par le conseil ;
- de dire que la preuve de sa volonté de participer à l'entente de répartition alléguée n'est pas établie ;
- de constater qu'au regard des différents critères posés par l'article L. 464-2 du Code de commerce, la sanction qui avait été prononcée à son encontre ne répond pas à ces critères ni aux exigences générales de proportionnalité des sanctions, et qu'elle est manifestement excessive et injustifiée ;
- de dire que c'est à tort que le conseil a fait référence, comme élément aggravant dans le cadre de l'appréciation de la sanction prise à son encontre, à une décision précédente du conseil la concernant, qui ne lui est pas opposable, ce qui doit conduire à une minoration significative du montant de la sanction ;
- de dire, en conséquence, que la sanction susceptible d'être prononcée à son encontre devrait être très significativement inférieure à celle qui avait été prononcée par le conseil dans ladite décision.
En cas d'annulation de la décision du conseil sans que la cour statue au fond, ou de décision au fond prononçant à son encontre une sanction inférieure à celle qui avait été prononcée par la décision du conseil, de dire que le trop-perçu payé par elle au titre de cette sanction doit lui être remboursé par le Trésor Public, avec intérêts de droit à compter de la date de son paiement, les intérêts devant en outre être capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;
- de dire, au surplus, qu'en cas d'annulation de la décision, le Trésor Public devra lui rembourser sa quote-part des frais de la publication de la décision ordonnée par le conseil ;
Vu la déclaration de recours du 11 mars 1996 et les mémoires des 15 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 2 juillet 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 2 juillet 2001 et 28 juin 2002, par lesquels la société Bouygues, poursuivant à titre principal l'annulation de la décision du conseil, et subsidiairement sa réformation, demande à la cour :
A titre principal,
- de dire que la cour d'appel de renvoi, après avoir prononcé l'annulation de la décision du conseil, ne retire pas de l'article L. 464-8 du Code de commerce, ou de quelque autre texte, le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil ;
Subsidiairement, pour le cas où la cour estimerait qu'elle a le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites, dont était saisi le conseil, après avoir prononcé l'annulation de sa décision,
- de dire et juger que la prescription de trois ans de l'article L. 462-7 du Code de Commerce se trouve à ce jour acquise, le dernier acte susceptible d'avoir interrompu celle-ci étant constitué par les conclusions du commissaire du gouvernement contenant notamment proposition de sanctions du ministre, déposées au conseil le 24 octobre 1995, cela sans préjudice et sous réserve de la régularité de l'instruction et desdites poursuites ;
Plus subsidiairement, pour le cas où la cour estimerait qu'elle a le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil, après avoir prononcé l'annulation de sa décision, et considérerait que la prescription de l'article L. 462-7 du Code de commerce n'est pas acquise à la date du 25 octobre 1998 ou antérieurement,
- de constater la violation des dispositions de l'article 6, paragraphes 1, 2 et 3, de la Convention, ensemble de l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de l'article L. 463-1 du Code de commerce, relativement à la procédure suivie devant le conseil ayant abouti à sa décision du 29 novembre 1995, tenant notamment :
- à la présence du rapporteur général et du rapporteur lors du délibéré du conseil ;
- à la circonstance que le rapporteur général et le rapporteur ont, dès l'origine, instruit le dossier, établi la notification de griefs et le rapport contenant les griefs définitivement retenus, dans la perspective et en considération de leur présence future au délibéré de la décision du conseil, cette circonstance viciant la procédure d'instruction elle-même et interdisant à la cour de renvoi de statuer sur des poursuites entachée d'irrégularité ;
- à la confusion des fonctions d'instruction et de décision du conseil, au manquement à la présomption d'innocence qui résulte, notamment, de cette confusion, le conseil ayant statué sur la recevabilité et l'opportunité des poursuites avant d'avoir statué au fond ;
- au caractère non contradictoire et au manquement au principe de l'égalité des armes de l'instruction devant le conseil dans des conditions portant irrémédiablement atteinte aux droits de la défense ;
- à l'absence de communication, dans le plus court délai, des saisines du ministre, lesquelles constituent des accusations ;
- à l'absence de publicité des débats lors de la séance du conseil et du prononcé de la décision ;
- de prononcer, en conséquence, outre l'annulation de la décision, celle de l'ensemble de la procédure suivie devant le conseil ;
- de dire, en conséquence, que la cour ne peut statuer sur des faits procédant d'une poursuite et d'une instruction entachées de nullité ;
- de juger que la prescription de l'article L. 462-7 du Code de commerce se trouve acquise respectivement à la date du 24 novembre 1993, s'agissant de la saisine F 358 relative au pont de Normandie et autres ouvrages d'art, et du 27 juillet 1994, relativement à la saisine F 426 concernant le TGV Nord et son interconnexion et le TGV Rhône-Alpes, compte tenu de la date de chacune des saisines par le ministre du conseil concernant ces faits, respectivement en date des 23 novembre 1990 et 26 juillet 1991, lesdites saisines constituant alors les seuls actes susceptibles d'avoir régulièrement interrompu la prescription ;
En conséquence, de dire que le Trésor Public sera tenu à restitution et paiement à son profit, avec intérêts au taux légal à compter des dates de règlement, du montant de la sanction pécuniaire et des coûts de publications, respectivement prononcés et ordonnés par le conseil aux termes de sa décision telle qu'elle a été réformée partiellement en ce qui la concerne par la Cour d'appel de Paris, aux termes de son arrêt du 6 mai 1997, toutes condamnations dont l'exécution provisoire a été poursuivie ;
Plus subsidiairement encore, pour le cas où, par impossible, la cour estimerait que la prescription n'est pas acquise et qu'elle peut statuer au fond,
- de provoquer la communication aux débats, par le ministre chargé de l'économie, des documents visés dans sa demande de communication de pièces adressée au conseil le 25 octobre 1995 ;
- de constater les détournements de procédure commis lors de l'enquête administrative ;
- de dire que l'administration ne pouvait exploiter les pièces saisies en conséquence de l'ordonnance rendue le 28 novembre 1989 par le président du Tribunal de grande instance de Nanterre que relativement à l'objet de cette ordonnance, limité au seul marché relatif au pont de Normandie, ainsi que l'a jugé la cour de cassation, chambre commerciale, dans son arrêt du 4 juin 1991, sur pourvoi formé contre cette ordonnance ;
- de dire illicite toute utilisation, autre que celle conforme à l'objet de l'ordonnance ci-dessus, par l'administration des pièces ainsi saisies ;
- de dire que lesdites pièces ne peuvent être utilisées pour fonder les griefs relatifs aux ponts en général, et aux ponts de Plougastel, Gennevilliers et Rochefort en particulier ;
- de constater que ces mêmes pièces ont été utilisées et exploitées par l'administration à l'appui de la requête qui a abouti à l'ordonnance rendue le 18 septembre 1990 par le président du Tribunal de grande instance de Nanterre portant sur le TGV Nord, d'une part, et la section 44 de son interconnexion avec les réseaux Sud-Est et Atlantique, d'autre part ;
- de constater que l'administration n'était en possession de présomptions et d'indices détenus légitimement par elle que relativement à la section 44 de l'interconnexion du TGV, à la suite de la plainte déposée par la société Condotte d'Acqua, ce qui résulte des mentions figurant à ladite ordonnance et des pièces dont les parties ont pu prendre connaissance à la suite de la notification de griefs ;
- de dire que les saisies opérées sur le fondement de l'ordonnance du 18 septembre 1990 ne peuvent, en conséquence de ce détournement de procédure, fonder un quelconque grief relatif au TGV Nord, au TGV Rhône-Alpes et aux TGV en général, les saisies ainsi opérées ne pouvant produire d'effet que relativement à la section 44 de l'interconnexion ;
- de dire que la concertation intervenue relativement au marché du pont de Normandie est justifiée sur le fondement de l'article L. 420-4 I, 2° du Code de commerce, et qu'il n'y a lieu à sanction de ce chef ;
Plus subsidiairement encore,
- de prononcer une sanction pécuniaire réduite tenant compte du caractère exceptionnel du pont de Normandie et des circonstances particulières dans lesquelles la consultation s'est déroulée, en relevant l'absence de dommage à l'économie ;
- de constater l'absence de preuve ou d'indices probants de la réalité d'autres ententes et, dans tous les cas, de sa participation à celles-ci ;
- de dire qu'elle n'a pas contrevenu à la prohibition édictée par l'article L. 420-1 du Code de commerce ;
Dans tous les cas où la cour estimerait devoir prononcer une sanction pécuniaire sur le fondement de l'article L. 420-1 du Code de commerce, à son égard, conformément aux dispositions de l'article L. 464-2 du Code de commerce ;
- de prendre en considération le chiffre d'affaires hors taxes en France du dernier exercice clos réalisé par elle en 1999, tel qu'il résulte des pièces fiscales jointes en annexe au présent mémoire, ou, le cas échéant, celui du dernier exercice clos à intervenir au jour où la cour statuera ;
- conformément aux dispositions de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile, pour le cas où la cour envisagerait de retenir un chiffre d'affaires autre que ceux mentionnés aux deux alinéas qui précèdent, de l'inviter préalablement à présenter ses observations ;
Vu la déclaration de recours du 12 mars 1996 et les mémoires des 12 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 5 octobre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et le mémoire déposé le 5 octobre 2001, par lequel la société Chagnaud, poursuivant à titre principal l'annulation de la décision du Conseil de la concurrence, et subsidiairement sa réformation, demande à la cour :
Subsidiairement,
- de constater la prescription des faits visés par les poursuites par application des dispositions de l'article L. 462-7 du Code de commerce ;
Plus subsidiairement,
- d'annuler l'ensemble de la procédure suivie devant le conseil en application de l'article 6 de la Convention ;
Infiniment subsidiairement,
- de constater qu'il n'existe aucun élément de preuve quant à sa participation à l'entente reprochée et de la mettre hors de cause ;
En conséquence, d'ordonner la restitution des sommes versées par elle en exécution de la décision du conseil, tant au titre de la sanction pécuniaire prononcée qu'au titre du coût des publications ordonnées et mises à sa charge, et ce avec intérêt au taux légal à compter des versements, et avec application des dispositions de l'article 1154 du Code civil ;
Vu la déclaration de recours du 14 mars 1996 et les mémoires des 12 avril et 9 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 11 décembre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 11 décembre 2001, 28 juin 2002 et 1er juillet 2002 par lesquels la société Demathieu et Bard poursuit à titre principal l'annulation de la décision du conseil et celle de l'instruction et de la procédure suivie devant lui, pour violation de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention, et notamment pour violation du principe d'égalité des armes, tel que retenu par l'arrêt de la cour de cassation dans son arrêt du 5 octobre 1999, subsidiairement sa réformation, et demande à la cour :
A titre liminaire,
- de dire et juger que les diligences accomplies par les parties appelantes ont interrompu le délai de péremption d'instance ;
- de constater que le litige est indivisible à l'égard des parties concernées ;
- de dire que " l'appel formé par les sociétés Quille, Fougerolle, DTP Terrassement, Vinci Construction, Sogea, Muller TP, Deschiron, Bec Frères, Jean Spada, Bouygues, conserve son droit d'appel " ;
En conséquence,
- de dire sa déclaration de saisine recevable ;
- à titre subsidiaire, de la mettre d'office en cause ;
A titre principal,
- de dire que la cour ne peut statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil en raison tant des irrégularités affectant l'instruction et la procédure, que de l'annulation de la décision rendue par le conseil ;
- de dire qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction à son encontre ;
En conséquence,
- d'ordonner les mesures de remise en état consécutives et de dire que le Trésor Public devra restituer à son profit l'ensemble des sommes réglées au titre de la sanction pécuniaire prononcée, ainsi que tous frais accessoires, notamment les coûts de publication, avec les intérêts de droit à compter de la date du paiement, lesdits intérêts devant en outre être capitalisés en application de l'article 1154 du Code civil ;
A titre subsidiaire,
- de constater l'accomplissement de la prescription de trois ans prévue à l'article L. 462-7 du Code de commerce, le dernier acte susceptible d'avoir interrompu celle-ci étant constitué par les conclusions du commissaire du gouvernement du 24 octobre 1995, ou, en tout état de cause, par la décision du 29 novembre 1995, de sorte que la prescription est acquise au plus tard le 29 novembre 1998 ;
Encore plus subsidiairement, pour le cas où la cour estimerait qu'elle a le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil et où elle considérerait que la prescription n'est pas acquise,
- de constater la violation des dispositions de l'article 6, paragraphes 1, 2 et 3, de la Convention, de l'article 14 du Pacte relatif aux droits civils et politiques, de l'article L. 463-1 du Code de commerce, relativement à la procédure suivie devant le conseil ayant abouti à la décision du 29 novembre 1995, pour non-respect du principe de la contradiction, utilisation irrégulière de documents saisis, absence d'accès à la totalité des pièces, violation des exigences de droit quant à l'individualisation et la motivation des griefs servant de fondement à la sanction, absence de publicité des débats lors de la séance du conseil et du prononcé de la décision ;
En conséquence,
- de dire que la cour ne peut statuer sur des faits procédant d'une poursuite et d'une instruction entachées de nullité ;
Toujours plus subsidiairement,
- de constater l'absence de preuve ou de présomption déterminante de la réalité de sa participation à une ou plusieurs ententes illicites ;
- de dire et juger qu'elle n'a pas contrevenu à la prohibition édictée par l'article L. 420-1 du Code de commerce ;
En conséquence,
- de dire et juger qu'il n'y avait pas lieu à sanction financière à son encontre ;
- de dire que le Trésor Public devra restituer à son profit l'ensemble des sommes réglées au titre de la sanction pécuniaire prononcée, ainsi que tous frais accessoires, notamment les coûts de publication, avec les intérêts de droit à compter de la date du paiement, lesdits intérêts devant en outre être capitalisés en application de l'article 1154 du Code civil ;
Vu la déclaration de recours du 12 mars 1996 et les mémoires des 12 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 2 juillet 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et le mémoire déposé le 15 octobre 2001, par lequel la société Deschiron, poursuivant à titre principal l'annulation de la décision du conseil, et subsidiairement sa réformation, demande à la cour :
A titre principal,
- de dire et juger que la cour d'appel de renvoi, après avoir prononcé l'annulation de la décision du conseil, ne retire pas de l'article L. 464-8 du Code de commerce, ou de quelque autre texte, le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil ;
Subsidiairement, pour le cas où la cour estimerait qu'elle a le pouvoir de statuer de nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil,
- de dire et juger que la prescription de trois ans de l'article L. 462-7 du Code de commerce se trouve à ce jour acquise au regard des faits visés par les poursuites, en ce que le dernier acte susceptible d'avoir interrompu celle-ci se trouve constitué par les conclusions du commissaire du gouvernement contenant notamment proposition de sanctions du ministre, déposées au conseil le 24 octobre 1995, cela sans préjudice et sous réserve de la régularité de l'instruction et desdites poursuites, et par conséquent de ce que ledit acte ait pu régulièrement avoir pour effet d'interrompre la prescription ;
Plus subsidiairement, pour le cas où la cour estimerait qu'elle a le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil et considérerait que la prescription relativement aux faits visés par les poursuites ne s'est pas trouvée acquise à la date du 25 octobre 1998,
- de dire que la cour ne peut statuer sur des faits procédant d'une poursuite et d'une instruction entachées de nullité ;
- de dire que la prescription de l'article L. 462-7 du Code de commerce, relativement auxdits faits, se trouve acquise à la date du 27 juillet 1994 relativement à la saisine F 426 concernant le TGV Nord, compte tenu de la date de la saisine par le ministre du conseil concernant ces faits, en date du 26 juillet 1991, ladite saisine constituant alors le seul acte susceptible d'avoir régulièrement interrompu la prescription ;
En conséquence, d'ordonner les mesures de remise en état consécutives et de dire que le Trésor Public sera tenu à restitution et paiement à son profit, avec intérêts au taux légal à compter des dates de règlement, du montant de la sanction pécuniaire, du montant des coûts de publication, respectivement prononcés et ordonnés par le conseil, et de toute condamnation subséquente dont l'exécution provisoire a été poursuivie ;
Plus subsidiairement encore,
- de constater, en tout état de cause, les détournements de procédure commis lors de l'enquête administrative ;
- de dire que l'administration ne pouvait exploiter les pièces saisies à l'occasion d'une autre procédure ;
- de constater que ces pièces détournées ont été utilisées et exploitées par l'administration à l'appui de la requête qui a abouti à l'ordonnance rendue le 18 septembre 1990 par le président du Tribunal de grande instance de Nanterre portant sur le TGV Nord ;
- de dire que les saisies opérées sur le fondement de l'ordonnance du 18 septembre 1990 ne peuvent, en conséquence de ce détournement de procédure, fonder un quelconque grief relatif au TGV Nord, les saisies ainsi opérées ne pouvant produire d'effet ;
- de constater que les seuls griefs invoqués à son encontre proviennent des documents cotés B dont l'annulation est demandée ;
Encore plus subsidiairement,
- de prononcer une sanction pécuniaire réduite tenant compte des éléments de fait relevés par la cour dans sa précédente décision, retenant son rôle mineur et sa faible importance économique ;
Vu la déclaration de recours du 12 mars 1996 et les mémoires en date des 15 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 5 octobre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 5 octobre 2001 et 28 juin 2002, par lesquels la société DTP Terrassement, poursuivant à titre principal l'annulation de la décision du conseil, et subsidiairement sa réformation, demande à la cour :
A titre principal,
- de dire que la cour d'appel de renvoi, après avoir prononcé l'annulation de la décision du conseil, ne retire pas de l'article L. 464-8 du Code de commerce, ou de quelque autre texte, le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil ;
Subsidiairement, pour le cas où la cour estimerait qu'elle a le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil, après avoir prononcé l'annulation de sa décision,
- de dire et juger que la prescription de trois ans de l'article L. 462-7 du Code de commerce, se trouve à ce jour acquise, le dernier acte susceptible d'avoir interrompu celle-ci étant constitué par les conclusions du commissaire du gouvernement contenant notamment proposition de sanctions du ministre, déposées au conseil le 24 octobre 1995, cela sans préjudice et sous réserve de la régularité de l'instruction et desdites poursuites ;
Plus subsidiairement, pour le cas où la cour estimerait qu'elle a le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont était saisi le conseil, après avoir prononcé l'annulation de sa décision, et considérerait que la prescription de l'article L. 462-7 du Code de commerce ne s'est pas trouvée acquise à la date du 25 octobre 1998 ou antérieurement,
- de constater la violation des dispositions de l'article 6, paragraphes 1, 2 et 3, de la Convention, ensemble de l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de l'article L. 463-1 du Code de commerce, relativement à la procédure suivie devant le conseil ayant abouti à sa décision du 29 novembre 1995, tenant notamment :
- à la présence du rapporteur général et du rapporteur lors du délibéré du conseil ;
- à la circonstance que le rapporteur général et le rapporteur ont, dès l'origine, instruit le dossier, établi la notification de griefs et le rapport contenant les griefs définitivement retenus, dans la perspective et en considération de leur présence future au délibéré de la décision du conseil, cette circonstance viciant la procédure d'instruction elle-même et interdisant à la cour de renvoi de statuer sur des poursuites entachées d'irrégularité ;
- à la confusion des fonctions d'instruction et de décision du conseil, au manquement à la présomption d'innocence qui résulte, notamment, de cette confusion, le conseil ayant statué sur la recevabilité et l'opportunité des poursuites avant d'avoir statué au fond ;
- au caractère non contradictoire et au manquement au principe de l'égalité des armes de l'instruction devant le conseil dans des conditions portant irrémédiablement atteinte aux droits de la défense ;
- à l'absence de communication, dans le plus court délai, des saisines du ministre, lesquelles constituent des accusations ;
- à l'absence de publicité des débats lors de la séance du conseil et du prononcé de la décision ;
- de prononcer, en conséquence, outre l'annulation de la décision, celle de l'ensemble de la procédure suivie devant le conseil ;
- de dire, en conséquence, que la cour ne peut statuer sur des faits procédant d'une poursuite et d'une instruction entachées de nullité ;
- de juger que la prescription de l'article L. 462-7 du Code de commerce se trouve acquise respectivement à la date du 24 novembre 1993, s'agissant de la saisine F 358 relative au pont de Normandie et autres ouvrages d'art, et du 27 juillet 1994, relativement à la saisine F 426 concernant le TGV Nord et son interconnexion et le TGV Rhône-Alpes, compte tenu de la date de chacune des saisines par le ministre du Conseil concernant ces faits, respectivement en date du 23 novembre 1990 et du 26 juillet 1991, lesdites saisines constituant alors les seuls actes susceptibles d'avoir régulièrement interrompu la prescription, sous réserve de leur régularité ;
Plus subsidiairement encore, pour le cas où, par impossible, la cour estimerait que la prescription n'est pas acquise et qu'elle peut statuer au fond,
- de provoquer la communication aux débats, par le ministre chargé de l'Economie, des documents visés dans sa demande de communication de pièces adressée au conseil le 25 octobre 1995 ;
- de constater les détournements de procédure commis lors de l'enquête administrative ;
- de dire que l'administration ne pouvait exploiter les pièces saisies en conséquence de l'ordonnance rendue le 28 novembre 1989 par le président du Tribunal de grande instance de Nanterre que relativement à l'objet de cette ordonnance, limité au seul marché relatif au pont de Normandie, ainsi que l'a jugé la cour de cassation, Chambre Commerciale, dans son arrêt du 4 juin 1991, sur pourvoi formé contre cette ordonnance ;
- de dire illicite toute utilisation, autre que celle conforme à l'objet de l'ordonnance ci-dessus, par l'administration des pièces ainsi saisies ;
- de constater que ces mêmes pièces ont été utilisées et exploitées par l'administration à l'appui de la requête qui a abouti à l'ordonnance rendue le 18 septembre 1990 par le président du Tribunal de grande instance de Nanterre portant sur le TGV Nord, d'une part, et la section 44 de son interconnexion avec les réseaux Sud-Est et Atlantique, d'autre part ;
- de constater que l'administration n'était en possession de présomptions et d'indices détenus légitimement par elle que relativement à la section 44 de l'interconnexion du TGV, à la suite de la plainte déposée par la société Condotte d'Acqua, ce qui résulte des mentions figurant sur ladite ordonnance et des pièces dont les parties ont pu prendre connaissance à la suite de la notification de griefs ;
- de dire que les saisies opérées sur le fondement de l'ordonnance du 18 septembre 1990 ne peuvent, en conséquence de ce détournement de procédure, fonder un quelconque grief relatif au TGV nord, au TGV Rhône-Alpes et aux TGV en général, les saisies ainsi opérées ne pouvant produire d'effet que relativement à la section 44 de l'interconnexion ;
- de dire que les saisies ne sauraient fonder le grief retenu à son encontre portant sur un " accord général " concernant les travaux du TGV ;
- de prononcer, en conséquence, l'annulation de la décision du conseil en ce qu'elle porte, notamment, sur le grief retenu à son encontre relatif à " un accord général sur les TGV " ;
- en toute hypothèse, de constater l'absence de preuves ou d'indices probants de la réalité de cette entente et, dans tous les cas, de sa participation à cette entente ;
- de réformer, en conséquence, la décision du conseil en ce qu'elle a retenu ce grief à son encontre, sur le fondement de l'article L. 420-1 du Code de commerce, prononcé une sanction pécuniaire à son égard et ordonné des mesures de publication ;
En conséquence, de dire que le Trésor Public sera tenu à restitution et paiement à son profit, avec intérêts au taux légal à compter des dates de règlement, du montant de la sanction pécuniaire et des coûts de publication, respectivement prononcés et ordonnés par le conseil aux termes de sa décision telle qu'elle a été réformée partiellement en ce qui la concerne par la Cour d'appel de Paris, aux termes de son arrêt du 6 mai 1997, toutes condamnations dont l'exécution provisoire a été poursuivie ;
Plus subsidiairement encore, pour le cas où la cour considérerait que la preuve de ce grief est rapportée,
- de réformer la décision du conseil en ce qui concerne le montant de la sanction pécuniaire prononcée à son encontre, et la réduire à de plus justes proportions, en prenant en considération sa situation personnelle relativement aux faits litigieux, objet du seul et unique grief qui lui est reproché, conformément aux dispositions de l'article L. 464-2 du Code de commerce ;
- de dire que le Trésor Public sera tenu à restitution et paiement à son profit, avec intérêts au taux légal à compter de la date de règlement, du montant de la différence entre la sanction pécuniaire qui serait ainsi prononcée et celle de 600 000 F précédemment prononcée par la cour aux termes de son arrêt du 6 mai 1997, condamnation dont l'exécution provisoire a été poursuivie ;
Vu la déclaration de recours du 12 mars 1996 et les mémoires des 15 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 5 octobre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 5 novembre 2001 et 28 juin 2002, par lesquels la société Eiffage TP, venant aux droits de la SNC Entreprises Quillery et Cie, poursuit à titre principal l'annulation de la décision du conseil et celle de l'ensemble de l'instruction et de la procédure suivie devant lui, en raison de la violation de l'article 6-1 de la Convention, de l'article 2 du protocole additionnel n° 7 à ladite Convention et de l'article 14 du Pacte relatif aux droits civils et politiques, subsidiairement sa réformation, et demande à la cour :
- de dire qu'après l'annulation de la décision du conseil, la Cour d'appel de Paris en tant que cour de renvoi ne pourra pas statuer au fond en raison des irrégularités affectant l'instruction et la procédure ;
Subsidiairement,
- de dire qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction en raison de la prescription prévue par l'article L. 462-7 du Code de commerce ;
Plus subsidiairement encore,
- de constater l'irrégularité des opérations d'enquête et de l'utilisation des documents saisis au regard des principes fondamentaux du droit, notamment de la Convention et du Pacte relatif aux droits civils et politiques ;
En conséquence,
- d'ordonner la distraction de toutes les pièces provenant des saisies effectuées en exécution des ordonnances du 28 novembre 1989 et du 18 septembre 1990 ;
- de constater qu'eu égard à ces nombreuses irrégularités, la cour d'appel statuant sur renvoi ne peut statuer au fond et qu'il ne peut donc y avoir lieu à poursuite et à sanction à son encontre ;
- de constater l'absence de définition du marché pertinent au regard duquel doivent être appréciées les pratiques examinées comme d'éventuels dommages à l'économie ;
- de constater l'insuffisance voire l'inexistence de la motivation des accusations portées à son égard par le ministre de l'Economie ;
- de constater l'absence de faisceaux d'indices graves, précis et concordants tendant à prouver non seulement la réalité de sa mise en cause, mais aussi sa volonté de participer à ces prétendus actes anticoncurrentiels et son intention réelle d'y participer ;
- de constater qu'au regard des critères de l'article L. 464-2 du Code de commerce, la sanction prononcée à son encontre ne répondait pas aux exigences de proportionnalité et qu'en tout état de cause elle était manifestement excessive et injustifiée au regard des principes d'égalité et d'équité, " qui sont le fondement judiciaire de toute sanction parapénale " ;
- de dire qu'il y a lieu de la mettre hors de cause ;
En conséquence,
- d'ordonner la restitution par le Trésor Public des sommes par elle versées en exécution de la décision du conseil et ce, augmenté des intérêts au taux légal à compter de la signification de l'arrêt de la cour de cassation ;
- de dire et juger que les intérêts échus depuis une année produiront des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil ;
Vu la déclaration de recours du 12 mars 1996 et les mémoires des 15 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 14 septembre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 14 septembre 2001 et 28 juin 2002 par lesquels la société Fougerolle, poursuivant à titre principal l'annulation de la décision du conseil en raison de la présence du rapporteur et du rapporteur général au délibéré, et subsidiairement sa réformation, demande à la cour :
- de dire qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la procédure en raison de la prescription des faits et de l'irrégularité de la procédure suivie devant le conseil ;
Subsidiairement,
- de dire et juger que sa participation à des ententes portant sur la répartition des travaux d'infrastructures de TGV, le pont de Normandie et le pont de Gennevilliers n'est pas établie ;
- de prononcer sa mise hors de cause de ce chef ;
En conséquence, d'ordonner la restitution par le Trésor Public des sommes par elle versées, au titre de la sanction pécuniaire et des publications, augmentées des intérêts au taux légal à compter du jour de leur règlement, et de dire que les intérêts échus depuis une année produiront des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil ;
Encore plus subsidiairement, de dire et juger :
- qu'elle ne peut être l'objet de sanction en raison du silence du rapport sur lesdites sanctions ;
- que sa situation doit être appréciée par référence à son chiffre d'affaires de l'exercice 2000 ou tout autre exercice ultérieur dont les comptes seraient approuvés à la date à laquelle la cour statuera ;
- que sa situation doit être appréciée par référence à son chiffre d'affaires en matière de génie civil et par rapport à son activité réelle, à l'exclusion des opérations réalisées dans le cadre de sociétés en participation, dont elle est le gérant, et des opérations de longue durée qui ne sont rattachées que de manière comptable à l'exercice de référence ;
- que le principe de proportionnalité des sanctions justifie qu'il ne soit pas prononcé de sanction à son encontre ;
Vu la déclaration de recours du 12 mars 1996 et les mémoires en date des 12 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 1er octobre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 1er octobre 2001 et 27 juin 2002 par lesquels la société Entreprise Jean Spada, poursuivant à titre principal l'annulation de la décision du conseil, et subsidiairement sa réformation, demande à la cour :
A titre principal,
- de déclarer irrégulière la procédure engagée devant la cour de renvoi en raison de l'intervention du conseil et, en conséquence, d'annuler la décision du conseil dans la mesure où les parties se trouvent privées de l'exercice de voie de recours :
- en tout état de cause, d'écarter des débats les observations orales et écrites qui pourraient être déposées devant la cour par le conseil ;
- de constater la nullité de la décision du conseil ;
A titre subsidiaire,
- de dire n'y avoir lieu à poursuivre la procédure en raison de la prescription des faits acquise au plus tard le 29 novembre 1998 ;
A titre encore plus subsidiaire,
- de juger que la décision est intervenue au terme d'une procédure d'enquête et d'instruction irrégulière au regard des stipulations de l'article 6 de la Convention ;
- de dire que les griefs retenus par la décision à son encontre ne sont fondés ni en droit ni en fait ;
- de dire que la sanction rendue méconnaît le principe de la contradiction ;
- de dire que la décision ne respecte pas l'obligation de motivation individuelle des sanctions ;
- en conséquence, d'annuler la décision frappée de recours dans sa totalité ;
A titre infiniment subsidiaire,
- de réformer la décision attaquée en ce qu'elle ne respecte pas le principe de proportionnalité de la sanction ;
- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, " dont la distraction au profit de la SCP Duboscq & Pellerin, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code précité " ;
Vu la déclaration de recours du 12 mars 1996 et les mémoires des 15 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 3 octobre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 5 octobre 2001 et 28 juin 2002, par lesquels la société Muller TP poursuit à titre principal l'annulation de la décision du conseil, en raison de la violation de l'article 6 de la Convention, de l'article 2 du protocole additionnel n° 7 à ladite Convention et de l'article 14 du Pacte relatif aux droits civils et politiques, subsidiairement sa réformation, et demande à la cour :
- de juger que la cour d'appel de renvoi, après avoir prononcé l'annulation de la décision du conseil, n'a pas le pouvoir de statuer à nouveau sur les poursuites dont il a été saisi ;
Subsidiairement,
- de dire et juger qu'il n'y a pas lieu à poursuivre la procédure en raison de la prescription des faits visés par la notification de griefs qui lui a été notifiée ;
Plus subsidiairement,
- de constater les détournements de procédure et la violation des dispositions de l'article 6, paragraphes 1, 2 et 3, de la Convention, de l'article 14 du Pacte relatif aux droits civils et politiques, de l'article L. 463-1 du Code de commerce au regard de la procédure suivie devant le conseil ;
- de prononcer l'annulation de l'ensemble de la procédure suivie devant le conseil et de sa décision ;
- de dire, en conséquence, que la cour ne peut statuer sur des faits procédant d'une poursuite et d'une instruction entachées de nullité ;
Infiniment subsidiairement,
- de dire que sa participation à une entente de répartition générale des travaux d'infrastructure de TGV n'est pas établie et de prononcer sa mise hors de cause ;
En conséquence, d'ordonner la restitution par le Trésor Public des sommes versées au titre de la sanction pécuniaire et des publications qui ont été décidées à son encontre, et ce avec intérêt au taux légal à compter des dates de règlement ;
Vu la déclaration de recours du 12 mars 1996 et le mémoire du 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 5 octobre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 5 octobre 2001 et 28 juin 2002 par lesquels la société Quille, poursuivant à titre principal l'annulation partielle de la décision du conseil, et subsidiairement sa réformation, demande à la cour :
- de constater que la décision du conseil est définitive à son égard en ce qu'elle a été mise hors de cause concernant sa participation à une entente anticoncurrentielle pour l'attribution du marché du pont de Normandie ;
- de prononcer, pour le reste, l'annulation de la décision du conseil ;
- de dire et juger que la cour d'appel de renvoi, par suite de cette annulation, ne peut statuer au fond après avoir évoqué l'affaire ;
Subsidiairement,
- de dire et juger l'action prescrite ;
Plus subsidiairement encore,
- de la mettre hors de cause pour sa participation à un accord général relatif à la répartition des marchés de construction de grands ponts ;
En conséquence, de dire que le Trésor Public sera tenu à restitution et paiement à son profit, avec intérêts au taux légal, à compter des dates de règlements, capitalisés s'ils sont dus pour une année entière, en application de l'article 1154 du Code civil, de la somme de 9 000 000 F ainsi que du montant des coûts de publication décidé par le conseil le 29 novembre 1995 ;
Vu la déclaration de recours du 13 mars 1996 et les mémoires des 15 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 26 septembre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 26 septembre 2001, 28 juin 2002, 25 juillet 2002 et 27 septembre 2002, par lesquels la société Sogea Construction, venant aux droits de la société Sogea, poursuit à titre principal l'annulation de la décision du conseil et celle de l'instruction et de la procédure suivies devant lui, en raison de la violation de l'article 6-1 de la Convention, et notamment du principe d'égalité des armes, qui a été retenue par la cour de cassation dans son arrêt du 5 octobre 1999, subsidiairement sa réformation, et demande à la cour :
- de dire qu'après l'annulation de la décision du conseil, la Cour d'appel de Paris ne pourra pas statuer au fond, en raison des irrégularités affectant, dans son ensemble, l'instruction et la procédure suivie devant le conseil ;
- de dire, en conséquence, qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction à son encontre ;
Subsidiairement,
- de dire qu'après l'annulation de la décision du conseil, la cour d'appel, saisie sur renvoi, ne peut pas valablement statuer sur le fond ;
- de constater que, selon l'article L. 464-8 du Code de commerce, aux termes duquel le recours contre les décisions du conseil est " un recours en annulation ou en réformation ", la cour d'appel ne peut utiliser cumulativement son pouvoir d'annulation et de réformation, ni substituer, après l'annulation de la décision frappée de recours, sa propre décision au fond à celle du conseil ;
- d'autre part, de dire qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction en raison de la prescription prévue par l'article L. 462-7 du Code de commerce qui, par suite de l'effet de l'annulation de la décision du conseil et des actes de procédure postérieurs, s'est trouvée acquise le 25 août 1998, ou au plus tard le 25 octobre 1998, soit trois ans après la date de notification du rapport du conseil, ou " celle de la réponse du commissaire du gouvernement auprès du conseil à ce rapport " ;
Plus subsidiairement,
- de se déclarer compétente pour statuer sur les contestations soulevées sur l'irrégularité des opérations d'enquête et de l'utilisation des documents saisis, en application des arrêts de la cour de cassation du 30 novembre 1999 ;
- de constater l'irrégularité de l'utilisation des documents saisis en vertu de l'ordonnance du 18 septembre 1990 et d'ordonner la distraction de toutes les pièces provenant des saisies effectuées en exécution de cette ordonnance (pièces cotées B) ;
- de constater l'illicité de l'utilisation de documents relatifs à d'autres marchés que ceux pour lesquels l'autorisation était donnée et d'ordonner la distraction des débats de tous les documents résultant des saisies effectuées en exécution de l'ordonnance du 28 novembre 1989 (cotés A) invoqués pour les marchés concernant les ponts de Rochefort, de Gennevilliers et de Plougastel ainsi que pour les différents marchés de TGV ;
- d'autre part, et s'il n'était pas fait droit à la demande de distraction globale des documents résultant des saisies exécutées en vertu de l'ordonnance du 18 septembre 1990, d'ordonner la distraction des documents provenant de ces saisies (pièces cotées B) et utilisés pour les marchés de TGV autres que celui du TGV Nord, à savoir la section 21 du TGV Rhône-Alpes ;
- d'écarter, en tout état de cause, des débats les pièces dont la saisie a été considérée comme irrégulière et nulle par l'ordonnance du 24 novembre 1997 du président du TGI de Nanterre, et concernant les griefs relatifs à l'accord général de construction des TGV et à la section 21 du TGV Rhône-Alpes ;
- de constater la violation du principe du contradictoire et des droits de la défense dans le cadre de la procédure devant le conseil, en raison :
- de l'absence d'accès à la totalité des pièces de la procédure ;
- de l'absence de débat contradictoire sur les sanctions dans le cadre de la procédure devant le conseil ;
- de la violation des exigences de droit quant à l'individualisation et à la motivation des griefs notifiés ;
- en conséquence, ces irrégularités affectant l'instruction et la procédure devant le conseil, de dire qu'il est impossible à la cour d'appel, statuant sur renvoi, de statuer au fond ;
- de dire, en conséquence, qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction à son encontre ;
Plus subsidiairement encore,
- de constater l'absence d'identification et de définition du marché pertinent au regard duquel doivent être appréciées les pratiques examinées comme l'éventuel dommage à l'économie ;
- de constater l'absence de démonstration individuelle pour chaque grief de sa volonté de participer aux concertations anticoncurrentielles sanctionnées ;
- de constater le caractère inévitable et licite de la recherche de partenaires économiques et de la nécessité de constitution de groupements momentanés ;
- de constater les autres éléments spécifiques dont il doit être tenu compte dans la qualification des faits ;
- l'inadaptation des procédures de consultation ;
- l'attitude des maîtres d'ouvrage ;
- l'absence de pertinence des estimations des maîtres d'ouvrage, et donc des écarts entre celles et les prix ;
- la situation des entreprises du secteur concerné ;
- de prendre acte de ses observations sur les griefs qui lui ont été notifiés dans le cadre de la procédure devant le conseil, et pour lesquels elle a été sanctionnée par celui-ci, et conduisant à considérer :
- que sa volonté de participer à une entente de répartition générale des travaux de TGV n'est pas réellement établie ;
- que les faits relatifs au pont de Normandie ne sont pas susceptibles d'incrimination et doivent bénéficier de l'application de l'article L. 251-14 du Code de commerce ;
- que le grief relatif à la section 21 du TGV Rhône-Alpes doit être écarté, à défaut de démonstration de sa volonté de participer à une concertation anticoncurrentielle dans le cadre de cet appel d'offres ;
- de constater qu'au regard des différents critères posés par l'article L. 464-2 du Code de commerce, la sanction qui avait été prononcée à son encontre ne répond pas à ces critères ni aux exigences générales de proportionnalité des sanctions, et qu'elle est manifestement excessive et injustifiée ;
- de dire que c'est à tort que le conseil a fait référence, comme élément aggravant dans le cadre de l'appréciation de la sanction, à deux décisions précédentes du conseil la concernant, qui ne lui sont pas opposables en l'espèce, ce qui doit conduire à une minoration significative de la sanction ;
- de dire, en conséquence, que la sanction susceptible d'être prononcée à son encontre devrait être très significativement inférieure à celle qui avait été prononcée par le conseil ;
En cas d'annulation de la décision du conseil sans que la cour statue au fond, ou de décision au fond prononçant à son encontre, une sanction inférieure à celle qui avait été prononcée par la décision du conseil, de dire que le trop-perçu par elle payé au titre de cette sanction devra lui être remboursé par le Trésor Public avec intérêts de droit à compter de la date de son paiement, les intérêts devant en outre être capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;
- de dire, au surplus, qu'en cas d'annulation de la décision, le Trésor Public devra lui rembourser sa quote-part des frais de la publication de la décision ordonnée par le conseil ;
Vu la déclaration de recours du 13 mars 1996 et les mémoires des 15 avril et 6 décembre 1996, ensemble la déclaration de saisine du 26 septembre 2001, sur renvoi de la cour de cassation, et les mémoires déposés les 26 septembre 2001 et 28 juin 2002, par lesquels la société Vinci Construction, anciennement dénommée Campenon-Bernard, poursuit à titre principal l'annulation de la décision du conseil et celle de l'ensemble de l'instruction et de la procédure suivie devant lui, en raison de la violation de l'article 6-1 de la Convention, et notamment du principe d'égalité des armes, qui a été retenue par la cour de cassation dans son arrêt du 5 octobre 1999, subsidiairement sa réformation, et demande à la cour :
- de dire qu'après l'annulation de la décision du conseil, la Cour d'appel de Paris ne pourra pas statuer au fond, en raison des irrégularités affectant, dans son ensemble, l'instruction et la procédure suivie devant le conseil ;
- de dire, en conséquence, qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction à son encontre ;
Subsidiairement,
- de dire qu'après l'annulation de la décision du conseil, conformément à l'arrêt de la cour de cassation du 5 octobre 1999, la cour d'appel, saisie sur renvoi, ne peut pas valablement statuer sur le fond ;
- de constater que, selon l'article L. 464-8 du Code de commerce, aux termes duquel le recours contre les décisions du conseil est " un recours en annulation ou en réformation ", la cour d'appel ne peut utiliser cumulativement son pouvoir d'annulation et de réformation, ni substituer, après l'annulation de la décision frappée de recours, sa propre décision au fond à celle du conseil ;
- d'autre part, de dire, en tout état de cause, qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction en raison de la prescription prévue par l'article L. 462-7 du Code de commerce qui, par suite de l'effet de l'annulation de la décision du conseil et des actes de procédure postérieurs, s'est trouvée acquise le 25 août 1998, ou au plus tard le 25 octobre 1998, soit trois ans après la date de notification du rapport du conseil, ou " celle de la réponse du commissaire du gouvernement auprès du conseil à ce rapport " ;
Plus subsidiairement,
- de se déclarer compétente pour statuer sur les contestations soulevées sur l'irrégularité des opérations d'enquête et de l'utilisation des documents saisis, en application des arrêts de la cour de cassation du 30 novembre 1999 ;
- de constater l'irrégularité de l'utilisation des documents saisis en vertu de l'ordonnance du 18 septembre 1990 et ordonner la distraction de toutes les pièces provenant des saisies effectuées en exécution de cette ordonnance (pièces cotées B) ;
- de constater l'illicité de l'utilisation de documents relatifs à d'autres marchés que ceux pour lesquels l'autorisation était donnée et d'ordonner la distraction des débats de tous les documents résultant des saisies effectuées en exécution de l'ordonnance du 28 novembre 1989 (cotés A) invoqués pour les marchés concernant les ponts de Rochefort, de Gennevilliers et de Plougastel ainsi que pour les différents marchés de TGV ;
- d'autre part, et s'il n'était pas fait droit à la demande de distraction globale des documents résultant dess saisies exécutées en vertu de l'ordonnance du 18 septembre 1990, d'ordonner la distraction des documents provenant de ces saisies (pièces cotées B) et utilisés pour les marchés de TGV autres que celui du TGV Nord, à savoir le lot 43 C et la section 21 du TGV Rhône-Alpes ;
- d'écarter, en tout état de cause, des débats les pièces dont la saisie a été considérée comme irrégulière et nulle par l'ordonnance du 24 novembre 1997 du président du TGI de Nanterre, et concernant les griefs relatifs à l'accord général de construction des TGV, au pont de Rochefort, et à la section 21 du TGV Rhône-Alpes ;
- de constater la violation du principe du contradictoire et des droits de la défense dans le cadre de la procédure devant le conseil, en raison :
- de l'absence d'accès à la totalité des pièces de la procédure ;
- de l'absence de débat contradictoire sur les sanctions dans le cadre de la procédure devant le conseil ;
- de la violation des exigences de droit quant à l'individualisation et à la motivation des griefs notifiés ;
- en conséquence, ces irrégularités affectant l'instruction et la procédure devant le conseil, de dire qu'il est impossible à la cour d'appel, statuant sur renvoi, de statuer au fond ;
- de dire, en conséquence, qu'il ne peut y avoir lieu à poursuite ni à sanction à son encontre ;
Plus subsidiairement encore,
- de constater l'absence d'identification et de définition du marché pertinent au regard duquel doivent être appréciées les pratiques examinées comme l'éventuel dommage à l'économie ;
- de constater l'absence de démonstration individuelle pour chaque grief de sa volonté de participer aux concertations anticoncurrentielles sanctionnées ;
- de constater le caractère inévitable et licite de la recherche de partenaires économiques et de la nécessité de constitution de groupements momentanés ;
- de constater les autres éléments spécifiques dont il doit être tenu compte dans la qualification des faits :
- l'inadaptation des procédures de consultation ;
- l'attitude des maîtres d'ouvrage ;
- l'absence de pertinence des estimations des maîtres d'ouvrage, et donc des écarts entre celles-ci et les prix ;
- la situation des entreprises du secteur concerné ;
- de prendre acte de ses observations sur les griefs qui lui ont été notifiés dans le cadre de la procédure devant le conseil, et pour lesquels elle a été sanctionnée par celui-ci, et conduisant à considérer :
- que n'est pas réellement établie sa volonté de participer à une concertation anticoncurrentielle et répréhensible, spécialement à propos du prétendu accord général de répartition des travaux de TGV, comme à propos des concertations alléguées dans le cadre des appels d'offres invoqués ; ou que les faits doivent bénéficier de l'application de l'article L. 251-14 du Code de commerce, notamment s'agissant du pont de Normandie ;
- de constater qu'au regard des principes posés par l'article L. 464-2 du Code de commerce, la sanction qui avait été prononcée à son encontre ne répond pas à ces critères ni aux exigences générales de proportionnalité des sanctions, et qu'elle est manifestement excessive et injustifiée ;
- de dire qu'après l'annulation de la décision du conseil, et conformément aux dispositions précitées de l'article L. 464-2, le chiffre d'affaires à prendre en considération pour apprécier le montant maximum de la sanction pécuniaire doit être celui du dernier exercice clos à la date à laquelle statuerait la Cour d'appel de Paris, soit, selon la date de la saisine, l'exercice 2000 ;
- de dire, en conséquence, que la sanction susceptible d'être prononcée à son encontre devrait être très significativement inférieure à celle qui avait été prononcée par le conseil ;
- en cas d'annulation de la décision du conseil sans que la cour statue au fond, ou de décision au fond prononçant à son encontre, une sanction inférieure à celle qui avait été prononcée par la décision du conseil, de dire que le trop-perçu par elle payé au titre de cette sanction devra lui être remboursé par le Trésor Public avec intérêts de droit à compter de la date de son paiement, les intérêts devant en outre être capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;
- de dire, au surplus, qu'en cas d'annulation de la décision, le Trésor Public devra lui rembourser sa quote-part des frais de la publication de la décision ordonnée par le conseil ;
Vu les observations du Conseil de la concurrence des 20 septembre 1996 et 12 avril 2002 ;
Vu les observations des 19 septembre 1996 et 24 avril 2002 par lesquelles le ministre chargé de l'Economie demande à la cour d'annuler la décision du conseil en raison de la présence du rapporteur et du rapporteur général au délibéré, de statuer à nouveau sur les pratiques reprochées, de dire que les sociétés requérantes ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de prononcer des sanctions pécuniaires à leur encontre ;
Vu les observations des 16 et 17 janvier 1997 et 1er octobre 2002 par lesquelles le Ministère public demande à la cour de déclarer recevables les saisines des treize sociétés requérantes, d'annuler la décision du conseil comme prise dans des conditions irrégulières affectant sa légalité externe, de statuer à nouveau sur les pratiques reprochées, de dire que les sociétés requérantes ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de prononcer des sanctions pécuniaires à leur encontre en application de l'article L. 464-2 du Code de commerce ;
Ouï à l'audience du 1er octobre 2002 les conseils des requérants en leurs plaidoiries, le représentant du ministre en ses observations, le Ministère public en ses conclusions, les requérants ayant eu la parole en dernier ;
Sur ce,
Sur la recevabilité de la déclaration de saisine de la société Demathieu et Bard :
Considérant que la péremption de l'instance a été interrompue par les déclarations de saisine des sociétés Bouygues, Fougerolle, Sogea Construction, Vinci Construction, Entreprise Jean Spada, Bec Frères, Entreprise Deschiron, Muller TP, Eiffage TP, Entreprise Chagnaud, DTP Terrassement et Quille, intervenues entre le 2 juillet 2001 et le 5 octobre 2001 ;
Que cette interruption valant pour toutes les parties à l'instance, la déclaration de saisine de la société Demathieu et Bard intervenue le 11 décembre 2001 et les mémoires subséquents sont recevables ; qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter la demande du ministre chargé de l'économie tendant à les voir déclarer irrecevables ;
Sur les observations du Conseil de la concurrence devant la cour :
Considérant que, selon l'article 9, alinéa 1er, du décret du 19 décembre 1987, le Conseil de la concurrence, qui n'est pas partie à l'instance, peut présenter des observations écrites, portées par le greffe à la connaissance des parties ; que, contrairement à ce qui est soutenu par la société Entreprise Jean Spada, l'exercice de cette faculté ne porte pas atteinte aux droits de l'entreprise poursuivie à un procès équitable, dès lors qu'elle dispose elle-même de la faculté, dont elle a usé en l'espèce, de répliquer, par écrit et oralement, aux observations de cette autorité administrative ; qu'en conséquence, il y a lieu de rejeter les demandes d'annulation présentées de ce chef par la société Entreprise Jean Spada ;
I. - SUR LA PRESCRIPTION
Considérant que l'ensemble des entreprises requérantes soutient que l'annulation de la décision du conseil ayant pour effet de mettre à néant cette décision ainsi que les actes subséquents, les faits seraient prescrits, le dernier acte d'interruption de la prescription remontant, si l'instruction devait être annulée dans sa totalité, aux saisines du conseil par le ministre des 23 novembre 1990 et 26 juillet 1991, sous réserve de leur régularité, ou au 2 juin 1994, date de la notification de griefs, ou au 24 août 1995, date de la notification du rapport, ou, si ce dernier devait être écarté des débats, au 24 octobre 1995, date des observations du ministre en réponse au rapport, ou au plus tard au 29 novembre 1995, date de la décision du conseil ;
Considérant que, selon l'article L. 462-7 du Code de commerce, la prescription peut être interrompue par tout acte " tendant à la recherche, la constatation ou la sanction " des faits dont le conseil est saisi ;
Qu'en l'espèce, les moyens relatifs à la nullité de l'instruction soulevés par les requérants n'étant pas fondés, ainsi qu'il sera démontré plus loin, le cours de la prescription a été valablement interrompu par la notification du rapport en date du 24 août 1995, les observations du ministre sur le rapport en date du 24 octobre 1995, les observations devant la cour du ministre chargé de l'Economie du 20 septembre 1996, l'ordonnance du 9 décembre 1996 du délégué du Premier Président tendant à organiser la poursuite de l'instance, les observations devant la cour du Ministère public des 16 et 17 janvier 1997, ainsi que l'arrêt de la cour de cassation du 5 octobre 1999;
II. - SUR LES MOYENS TENDANT À L'ANNULATION DE LA DÉCISION DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Considérant que l'ensemble des entreprises requérantes fait valoir que la présence du rapporteur et du rapporteur général au délibéré du conseil entache de nullité la totalité de la procédure suivie devant cette autorité, l'instruction ayant été menée dès l'origine par ces personnes en considération de leur participation future au délibéré de la décision, contrairement au principe du non-cumul des fonctions d'instruction et de jugement ;
Considérant qu'il ressort de la décision du conseil du 29 novembre 1995 que le rapporteur et le rapporteur général ont assisté au délibéré du conseil sans voix délibérative ; que la présence de ces personnes au délibéré, l'une chargée de l'instruction du dossier et de la notification des griefs, l'autre d'animer et de contrôler l'activité des rapporteurs, leur a permis d'exprimer sur l'affaire, devant le conseil, en l'absence des parties, des positions sur lesquelles celles-ci n'ont pas été en mesure de répondre ; qu'une telle situation est à la fois contraire à l'article 6-1 de la Convention, aux garanties de la défense et au principe de la contradiction ;
Considérant que, prise dans des conditions irrégulières, la décision du conseil doit être annulée en ce qu'elle concerne les 13 entreprises ayant saisi la cour de renvoi ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de se prononcer sur les moyens relatifs à la brièveté du délibéré, à la publicité de la séance ainsi qu'à la motivation et à la publicité de la décision du conseil, devenus inopérants par suite de l'annulation prononcée ;
III. - SUR LA SAISINE DE LA COUR
Considérant que les entreprises requérantes soutiennent que la cour ne peut statuer sur le fond au motif que l'article L. 464-8 du Code de commerce lui confère un pouvoir alternatif et non cumulatif d'annulation ou de réformation, que le recours devant la cour n'étant pas un appel, les dispositions du nouveau Code de procédure civile concernant l'effet dévolutif et l'évocation ne sont pas applicables, que, ne disposant pas des moyens d'enquête et d'instruction du conseil, elle ne peut suppléer à la nullité de l'instruction et qu'enfin, une telle solution fait échec au principe du double degré de juridiction posé par les articles 14 du Pacte relatif aux droits civils et politiques et 2-2 du protocole additionnel n° 7 à la Convention ;
Mais considérant que, dans le contentieux de pleine juridiction, institué par l'article L. 464-8 du Code de commerce, la cour d'appel, après avoir annulé la décision, a le pouvoir de se prononcer, conformément à l'article L. 464-2 dudit Code, sur les pratiques dont le conseil est saisi; que cette prérogative, qu'elle tient de la combinaison de l'article L. 464-8 précité et de l'article 561 du nouveau Code de procédure civile, de statuer, en fait et en droit, sur les griefs notifiés, ne saurait être confondue avec le pouvoir de réformation mentionné par l'article L. 464-8 précité, la cour se prononçant à partir des éléments du dossier et sans considération de la décision du conseil qu'elle a précédemment annulée;
Qu'ainsi les moyens articulés par les entreprises sur l'impossibilité pour la cour de statuer et la violation du double degré de juridiction apparaissent dénués de fondement ;
IV. - SUR LES MOYENS TENDANT À L'ANNULATION DE LA PROCÉDURE
A. - Sur la violation du principe de la contradiction et des droits de la défense
Considérant, en premier lieu, que la contestation relative à l'accès à la requête aux fins de visite et de saisie ainsi qu'à la totalité des pièces produites à son appui, élevée par les sociétés Bec Frères, Bouygues, Demathieu et Bard, Deschiron, DTP Terrassement, Muller TP, Sogea Construction et Vinci Construction, relève du contentieux réservé au président du tribunal de grande instance par l'article L. 450-4 du Code de commerce en ce qu'elle touche à la régularité de l'autorisation par lui délivrée ;
Que la cour n'étant saisie que de la régularité des visites et saisies effectuées par l'administration au regard du champ de l'autorisation donnée par le président du tribunal de grande instance, les pièces dont la communication est demandée sont étrangères aux débats ;
Qu'il n'y a donc pas lieu d'en ordonner la production dans le cadre de la présente instance, leur absence n'étant de nature ni à affecter la régularité de la procédure ni à préjudicier aux droits des parties ;
Considérant, en second lieu, que les sociétés Fougerolle et Muller TP font grief au conseil d'avoir joint les saisines F 358 du 23 novembre 1992 et F 426 du 26 juillet 1991, sans que le principe de la contradiction ait été respecté, créant ainsi " un amalgame " entre le marché des ponts et celui des TGV, contraire aux principes d'égalité des armes et d'impartialité ;
Mais considérant que les entreprises précitées n'établissent pas que la jonction ordonnée par le conseil, qui constitue une mesure non susceptible de recours, a porté atteinte aux droits de la défense dès lors qu'elles ont eu la faculté de s'expliquer tout au long de la procédure sur les faits qui leur étaient reprochés ;
Considérant, en troisième lieu, que les sociétés Bec Frères, Bouygues, Demathieu et Bard, Deschiron, DTP Terrassement, Sogea Construction, Entreprise Jean Spada et Vinci Construction soutiennent qu'en l'absence d'accès au dossier, l'instruction menée par le rapporteur avant la notification de griefs ne respecte pas le principe de la contradiction posé par l'article L. 463-1 du Code de commerce ; qu'elles font encore valoir que, postérieurement à celle-ci, la communication de la procédure est enfermée dans le délai de deux mois imparti aux entreprises pour présenter leurs observations sur la notification de griefs, alors que le rapporteur peut consulter le dossier à tout moment et poursuivre ses investigations, sans que des droits symétriques leur soient accordés, notamment après le rapport établi par le rapporteur, et qu'elles puissent à aucun moment demander des mesures d'instruction ou l'audition des témoins à décharge ; que la société Entreprise Jean Spada ajoute que, n'ayant pas fait l'objet de mesures d'enquête, à la différence des autres entreprises, elle n'a eu la possibilité de préparer sa défense qu'à partir de la notification de griefs, sans avoir pu faire valoir ses observations antérieurement ;
Considérant, toutefois, qu'aux tenues des dispositions combinées des articles L. 463-1 et L. 463-2 du Code de commerce, la notification de griefs marque l'ouverture de la procédure contradictoire ; que les entreprises ont, dès ce moment, la faculté de consulter le dossier, de demander, en application des articles 6-3 de la Convention et L. 463-7 du Code de commerce, l'audition de témoins à décharge au rapporteur ou au conseil, lesquels demeurent cependant maîtres de la conduite des investigations, de présenter leurs observations sur ces griefs puis sur le rapport établi en réponse, lequel " est accompagné des documents sur lesquels se fonde le rapporteur " et peut être consulté dans les quinze jours précédant la séance par les parties, ainsi que de s'exprimer oralement devant le conseil ; que les entreprises ne faisant état d'aucun fait précis établissant que ces garanties fondamentales de la procédure leur ont été refusées, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Considérant, s'agissant de la société Entreprise Jean Spada, qu'il convient d'observer que le fait que cette entreprise n'ait pas été l'objet d'investigations aux stades de l'enquête et de l'instruction est, en l'absence d'obligation légale en la matière, sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors qu'à compter de la notification de griefs et lors des différentes phases de la procédure, elle a été mise en mesure de faire valoir ses observations en temps utile ;
Considérant, en dernier lieu, que les sociétés Bec Frères, Entreprise Chagnaud, Demathieu et Bard, Deschiron, Fougerolle, Sogea Construction, Spada et Vinci Construction soutiennent que les sanctions n'ont pas été contradictoirement débattues, le rapport n'ayant pas mentionné le chiffre d'affaires retenu par le rapporteur non plus que les condamnations antérieures susceptibles de leur être opposées, qu'elles n'ont pas fait l'objet, dans la décision du conseil, d'une motivation individualisée et qu'il s'ensuit que le rapport comme la décision doivent être annulés ;
Mais considérant, d'une part, qu'aucun texte ne prévoit, à peine de nullité, la mention, dans le rapport, des éléments susceptibles d'être retenus pour déterminer le montant de la sanction;
Que, d'autre part, les griefs invoqués par les entreprises précitées apparaissent inopérants dès lors qu'en l'espèce, la décision du conseil a été annulée et que, depuis lors, elles ont eu la faculté de débattre contradictoirement sur les données à prendre en considération pour le calcul de la sanction ;
B. - Sur les moyens pris de la violation des garanties fondamentales instaurées par les conventions internationales ratifiées par la France
Considérant que la procédure suivie devant le conseil est critiquée par l'ensemble des entreprises requérantes au regard des dispositions des articles 6 de la Convention et 14-5 du Pacte relatif aux droits civils et politiques, au motif qu'auraient été méconnus :
- le principe du délai raisonnable, en notifiant les griefs cinq à six ans après les faits ;
- le principe de la présomption d'innocence, en instruisant à charge et en procédant à la publication partielle de la décision du conseil ;
- les exigences d'individualisation et de motivation des griefs ;
- le principe d'égalité des armes, en ce qui concerne les délais de procédure ;
- le principe du double degré de juridiction au motif que le conseil est, non une juridiction, mais une autorité administrative indépendante, et qu'ainsi la cour d'appel constitue le premier degré de juridiction ;
- l'exigence d'impartialité en raison du cumul des fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement ;
Considérant, cependant, que, si les dispositions de l'article 6 de la Convention sont applicables aux sanctions prévues par l'article L. 464-2 du Code de commerce, des impératifs de souplesse et d'efficacité, entièrement compatibles avec la protection des droits de l'Homme, peuvent justifier l'intervention préalable d'organes administratifs ou corporatifs et a fortiori juridictionnels ne satisfaisant pas, sur tous leurs aspects, aux prescriptions de forme du paragraphe 1er de l'article 6 de la Convention, dès lors que les décisions prises par ceux-ci subissent a posteriori, sur les points de fait, les questions de droit ainsi que sur la proportionnalité de la sanction prononcée avec la gravité de la faute commise, le contrôle effectif d'un organe judiciaire offrant toutes les garanties d'un tribunal au sens du texte susvisé ; que ces principes s'appliquent aussi bien aux contestations sur des droits et obligations de caractère civil qu'à celles ayant pour objet de " trancher des accusations en matière pénale ", sans qu'il y ait lieu de distinguer selon la gravité des faits poursuivis et des sanctions prévues, ainsi que le soutiennent les sociétés Bouygues et DTP Terrassement ;
Que, dans ce cadre, il convient d'examiner les moyens de nullité invoqués par les entreprises requérantes tant au regard de la Convention et du Pacte relatif aux droits civils et politiques que sur le fondement des droits et libertés constitutionnellement garantis ainsi que des dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986, en vigueur à l'époque des faits ;
Sur le délai raisonnable :
Considérant que le délai raisonnable prescrit par la Convention précitée doit s'apprécier au regard de l'ampleur et de la complexité de la procédure ; que, certes, en l'espèce, s'est écoulé un délai de cinq années entre la date des faits remontant aux années 1988 et 1989 et celle de la notification de griefs au mois de juin 1994, ainsi qu'un délai d'un an et demi entre cette dernière date et celle de la notification de la décision au mois de février 1996 ;
Mais considérant que les pratiques incriminées concernent une partie importante de l'activité de génie civil pour les ouvrages d'art tels que le pont de Normandie, dont le caractère exceptionnel est souligné par plusieurs sociétés, et ceux réalisés pour le TGV Nord, son interconnexion et le TGV Rhône-Alpes ; que cinquante-trois entreprises de travaux publics ont finalement été retenues dans la notification de griefs ; que, compte tenu de l'ampleur et de la complexité de l'enquête, le délai écoulé doit être considéré comme répondant aux exigences de la Convention précitée ;
Sur la régularité de l'instruction suivie devant le conseil au regard du principe de la présomption d'innocence :
Considérant, sur la régularité de l'instruction suivie devant le conseil, que, certaines des entreprises requérantes, Bec Frères, Deschiron, Eiffage TP, Fougerolle, Muller TP, Sogea Construction et Vinci Construction soutiennent que le rapporteur a instruit à charge, en s'abstenant de faire référence aux pièces qui n'étaient pas considérées comme des indices de la concertation, en retenant une interprétation des documents systématiquement défavorable aux entreprises et en faisant prévaloir les déclarations de tiers sur les leurs ;
Considérant, cependant, que le fait que la notification de griefs puis le rapport n'aient pas cité tous les faits et documents qui n'ont pas été retenus comme indices des pratiques anticoncurrentielles ne peut faire grief aux entreprises précitées, celles-ci ayant eu accès à l'ensemble de la procédure ; que l'argument selon lequel le rapporteur aurait dénaturé les documents et les déclarations figurant au dossier est dépourvu de portée, dès lors que les requérantes reconnaissent dans le même temps que ceux-ci sont sujets à interprétation et qu'il n'est pas contesté qu'elles ont pu faire valoir, tout au long de la procédure, leurs moyens de défense sur l'interprétation qui en était donnée par le rapporteur, le conseil puis la cour ayant été mis en mesure par la suite de faire un nouvel examen des éléments de preuve ainsi produits ;
Considérant que les entreprises Bec Frères, Bouygues, Demathieu et Bard, Deschiron, DTP Terrassement, Eiffage TP, Fougerolle, Muller TP, Sogea Construction et Vinci Construction reprochent encore au rapporteur d'avoir, dans le rapport, " conclu pour chacun des griefs concernés sur les entreprises mises en cause par un paragraphe unique et un tableau mentionnant seulement le nom de chaque entreprise et en face le numéro des documents et déclarations, qui, selon [lui], établissaient leur participation à l'entente alléguée ", de sorte que, n'étant étayés par aucune démonstration, les griefs sont imprécis ;
Considérant, toutefois, que la notification de griefs a reproduit tous les éléments de preuve retenus à l'encontre de chaque entreprise pour chaque grief et que la notification de griefs complémentaire a apporté des précisions supplémentaires sur certains d'entre eux ; que le rapport a, tout d'abord, commenté à nouveau ceux dont la signification était contestée, puis précisé, pour chaque grief, le nom des entreprises concernées et, pour chaque entreprise, les éléments de preuve retenus ; que le fait que le rapporteur ait procédé par renvoi, en désignant ces indices par les numéros des pièces les identifiant, afin d'alléger l'exposé, ne saurait avoir nui à la précision de l'ensemble dès lors que ceux-ci avaient fait l'objet d'une analyse complète et circonstanciée dans la notification de griefs, sous le numéro indiqué dans le rapport ;
Qu'ainsi le moyen tiré de la violation des exigences de droit quant à l'individualisation et à la motivation des griefs doit être écarté de même que celui corrélatif pris de la violation du principe de la contradiction, évoqué par la société Demathieu et Bard, les entreprises ayant été mises en mesure de présenter des observations écrites sur la notification de griefs, la notification de griefs complémentaire et le rapport, ainsi que des observations orales, lors de la séance qui s'est tenue devant le conseil ;
Considérant également que le seul fait que le délai de réponse du rapporteur aux observations des parties ait été supérieur au délai de deux mois fixé par la loi pour le dépôt des observations de ces dernières ne saurait constituer une atteinte au principe d'égalité des armes ; qu'en effet, le rapporteur, outre qu'il n'est pas une partie à la procédure, a en charge la totalité de cette dernière et doit répondre aux observations qui lui sont faites par l'ensemble des parties ;
Considérant enfin qu'il n'est apporté aucune preuve de manœuvres ou de procédés déloyaux contraires à l'équité du procès, auxquels se serait prêté le rapporteur du conseil dans le dessein de faire échec aux garanties procédurales essentielles ;
Qu'il y a donc lieu de rejeter les moyens tirés du non-respect du procès équitable, de la violation de la présomption d'innocence et des principes de contradiction et d'égalité des armes ;
Sur l'atteinte à la présomption d'innocence résultant de la publication partielle de la décision du conseil dans la presse :
Considérant, sur l'atteinte à la présomption d'innocence résultant de la publication partielle de la décision du conseil dans la presse, nonobstant l'exercice de voies de recours formées contre cette décision, que l'injonction de publier la décision entre dans les prévisions de l'article L. 464-8 du Code de commerce ; qu'elle a un caractère immédiatement exécutoire ; que, par ailleurs, le même article prévoit la reproduction intégrale de la décision dans le Bulletin officiel de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes ; que, toutefois, l'entreprise a la faculté de saisir la cour d'une demande de sursis à exécution de cette mesure ; qu'en l'espèce, les requérants, qui n'ont pas usé de cette faculté, ne sauraient se plaindre de la publication, laquelle ne constitue pas, en elle-même, une atteinte à la présomption d'innocence dès lors que des voies de recours peuvent être exercées à l'encontre de la décision ;
Sur le respect du principe du double degré de juridiction :
Considérant qu'il ne saurait être utilement soutenu qu'au motif que le conseil est une autorité administrative indépendante, et non une juridiction, la cour d'appel ne pourrait être considérée comme un second degré de juridiction; qu'en effet, saisie d'un recours contre une décision du conseil, la cour examine à nouveau l'ensemble des faits instruits par le rapporteur et jugés dans une décision dont elle contrôle la motivation; qu'investie d'un pouvoir de réformation, la cour peut requalifier lesdits faits et en donner une nouvelle appréciation, tant en ce qui concerne la responsabilité que la proportionnalité de la condamnation; qu'ainsi le grief pris de la violation du principe du double degré de juridiction tel qu'il résulte de l'article 14-5 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, selon lequel toute personne déclarée coupable d'une infraction a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité et la condamnation, n'est, en conséquence, pas fondé;
Sur le cumul des fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement :
Considérant que le cumul des fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement, dénoncé par les sociétés Bec Frères, Bouygues, Deschiron, DTP Terrassement, Fougerolle, Sogea et Vinci Construction, n'est contraire aux exigences de la Convention que lorsque, dans les modalités concrètes de sa mise en œuvre, il porte atteinte au droit à un procès équitable ; qu'il convient donc de rechercher, en l'espèce, si ce droit a été méconnu et si notamment ont été violés les principes d'impartialité, d'égalité des armes et de la présomption d'innocence évoqués par les entreprises précitées ;
Considérant, en premier lieu, que n'est pas de nature à caractériser une atteinte au principe du procès équitable la prétendue confusion opérée entre les fonctions d'investigation et de commissaire du gouvernement, au sein de la Direction générale de la concurrence et de la consommation ; qu'en effet, cette administration étant un organe extérieur au conseil n'est pas associée à l'élaboration de sa décision, peu important qu'elle intervienne au cours de l'enquête et de l'instruction, dès lors que les entreprises sont mises à même de lui répliquer en temps utile ;
Considérant, en second lieu, que l'absence de dénonciation de la saisine du conseil par le ministre chargé de l'économie aux entreprises concernées ne constitue pas une violation de l'article 6 de la Convention, cet acte ayant pour seul objet d'ouvrir la procédure afin que puissent être conduites les investigations pouvant servir de base à la notification des griefs, sans qu'à ce stade, aucun fait ne puisse être qualifié ni aucune pratique anticoncurrentielle imputée à quiconque ; qu'il s'ensuit que la saisine ne constituant pas un acte d'accusation liant le rapporteur ou l'autorité, l'entreprise concernée par celle-ci ne peut être assimilée à " une personne accusée " au sens de la Convention, avec les droits qui lui sont garantis, notamment l'information donnée sur l'accusation ;
Que, par ailleurs, le seul fait pour le conseil de ne pas déclarer une saisine irrecevable et d'en confier l'instruction au rapporteur ne constitue pas " une accusation en matière pénale " emportant les obligations de motivation, de notification et de contradiction des débats attachées à une décision administrative, dès lors que cette autorité ne préjuge ni de l'orientation ou de l'aboutissement de l'instruction ni de la décision qui sera prise ;
Considérant, en troisième lieu, que les entreprises requérantes invoquent, au soutien de leur argumentation, l'absence d'impartialité du président du conseil, lequel est tenu informé des différentes étapes de l'enquête et de l'instruction et notifie aux parties les principaux actes de la procédure alors qu'il participe à l'élaboration de la décision de cette autorité ; que, toutefois, les compétences administratives du président, telles que définies dans l'ordonnance du 1er décembre 1986 applicable en la cause, ne sont pas constitutives d'une immixtion de l'autorité de jugement dans le cours de l'instruction en ce que, revêtant un caractère purement formel, elles ne permettent pas à ce dernier " d'orienter les poursuites selon les objectifs qui lui paraissent les plus appropriés " ;
Considérant, en quatrième lieu, que les entreprises requérantes ne peuvent utilement se prévaloir de l'absence d'impartialité de l'instruction ainsi que du défaut d'indépendance du rapporteur, du fait que celui-ci est nommé par le président et qu'il instruit " en étant habité par la considération de sa présence future au délibéré de la décision du conseil " ;
Qu'en effet, d'une part, l'équilibre de la procédure est assuré par l'ordonnance du 1er décembre 1986, qui, dans ses articles 18, 21 et 25, donne aux entreprises la faculté de présenter des observations, de consulter le dossier et de demander des auditions à décharge, ainsi qu'il a été rappelé plus haut ;
Que, d'autre part, l'autonomie du rapporteur est assurée par le fait qu'il dispose du pouvoir propre d'orienter l'enquête administrative, dont il est tenu informé, ainsi que de celui d'instruire le dossier, avec les mêmes pouvoirs que les enquêteurs, le fait qu'il puisse les déléguer à ces derniers étant sans incidence sur sa faculté de retenir les griefs qui lui semblent les plus appropriés, sous réserve de l'appréciation qui sera faite par le conseil ;
Qu'enfin, les entreprises ne démontrent pas en quoi la circonstance que le rapporteur instruise dans le souci de la décision qui sera prise par le conseil porte atteinte aux droits de la défense dès lors qu'elles peuvent répliquer à ses écrits ; qu'au demeurant, la circonstance que le rapporteur a retiré certains des griefs originairement retenus, notamment ceux relatifs à la section 15 du TGV Rhône-Alpes et, que, pour sa part, le conseil a mis hors de cause un certain nombre d'entreprises, notamment pour ce qui concerne les marchés des sections 39-21, 19-07 et 29-04 du TGV Nord, prive de pertinence les critiques formulées par les requérants de ce chef ;
Considérant, en dernier lieu, qu'il ne saurait être tiré argument des modifications de la procédure introduites par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, pour soutenir que les textes anciennement en vigueur étaient contraires à la Convention alors que les entreprises requérantes n'ont apporté aucun élément concret de nature à établir que la mise en œuvre desdites dispositions avaient nui à leurs intérêts ;
Qu'ainsi les critiques articulées du chef d'une violation des principes d'impartialité, d'égalité des armes et de la présomption d'innocence ne sont pas fondées ;
V. - SUR LA RÉGULARITÉ DE L'ENQUÊTE ADMINISTRATIVE
Sur la régularité des procès-verbaux dressés entre le 22 novembre 1990 et le 24 janvier 1991 :
Considérant que la société Muller TP fait grief à l'administration d'avoir indiqué l'objet de l'enquête sous la forme d'une mention pré-imprimée de nature à laisser croire aux personnes entendues que l'entente visée avait trait au marché du pont de Normandie sur lequel avaient porté les premières investigations ;
Mais considérant que ces procès-verbaux ont été signés par les enquêteurs et par les parties entendues, lesquelles n'ont exprimé aucune réserve, et qu'ils comportent la mention que l'objet de l'enquête leur a été indiqué ; que, les entreprises en cause n'apportant pas la preuve contraire, il n'est pas établi qu'elles aient pu se méprendre sur l'objet de l'enquête alors surtout que les investigations initiales avaient porté successivement sur le pont de Normandie et sur les infrastructures du TGV ;
Sur la validité des ordonnances autorisant les visites et saisies :
Considérant que les sociétés Bec Frères, Eiffage TP, Fougerolle, Muller TP, Sogea Construction et Vinci Construction ne sont pas recevables à demander l'annulation de tout ou partie de la procédure en se fondant sur des vices affectant les ordonnances ayant autorisé les visites et saisies et concernant l'absence de formule exécutoire ainsi que la certification de la copie, la cour n'ayant pas le pouvoir de se prononcer sur la validité de l'autorisation donnée par le président du tribunal de grande instance, laquelle n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation ;
Sur la validité des saisies effectuées sur le fondement de l'ordonnance du 28 novembre 1989 :
Considérant que les entreprises requérantes, à l'exception des sociétés Entreprise Chagnaud et Entreprise Jean Spada, font grief à l'administration d'avoir saisi des pièces étrangères à l'objet de l'autorisation, laquelle aurait été limitée, selon elles, au marché relatif au pont de Normandie ;
Considérant cependant, que, par ordonnance du 28 novembre 1989, le président du Tribunal de grande instance de Nanterre a autorisé les visites et saisies nécessitées par la recherche de la preuve des agissements relatifs au marché du pont de Normandie ainsi que " toute manifestation de cette concertation prohibée " ;
Qu'en l'espèce, l'administration a saisi, sous la cote A, des documents couvrant un champ plus vaste que celui du marché du pont de Normandie (accords Dumez-GTM Entrepose des 25 juin et 10 mai 1989, accord non daté intitulé " Recherche des données actuelles en matière de réalisation des grands ponts en France "), susceptible de caractériser une entente de répartition entre entreprises du génie civil " pour la réalisation de grands chantiers de travaux publics ", ainsi que des pièces pouvant matérialiser cette concertation portant sur d'autres ponts ou des infrastructures de TGV ;
Considérant, cependant, qu'il n'est pas interdit à l'administration de saisir des documents, pour partie utiles à la preuve des agissements retenus, dès lors que ces pièces ne sont pas étrangères à l'autorisation accordée puisqu'elles étaient susceptibles de limiter la concurrence, par un jeu de compensations réciproques, entre les mêmes sociétés et à la même époque, sur des marchés individualisés comme ceux des ponts de Rochefort, Gennevilliers et Plougastel et celui du TGV Nord et de son interconnexion avec le réseau ferré ;
Et considérant qu'il ne saurait être soutenu que l'ordonnance du 24 novembre 1997 du président du tribunal de grande instance de Nanterre, dont se prévalent les entreprises Bec Frères, Sogea Construction et Vinci Construction pour invoquer l'irrégularité des saisies des pièces désignées sous les n° 5, 6, 7, 8, 35 et 36, revêt " un caractère définitif ", dès lors qu'elle a été annulée en toutes ses dispositions par deux arrêts du 30 novembre 1999 de la cour de cassation, lesquels ont l'autorité de la chose jugée à l'encontre des sociétés Bec Frères et Sogea ;
Que, dans ces conditions, l'administration, en saisissant les documents figurant sous la cote A, n'a commis aucun détournement de procédure ; qu'en conséquence, il ne saurait être reproché au rapporteur du conseil d'avoir exploité irrégulièrement ceux-ci pour fonder des griefs étrangers à l'objet des autorisations judiciaires ;
Sur la validité des saisies effectuées sur le fondement de l'ordonnance du 18 septembre 1990 :
Considérant que les entreprises requérantes, à l'exception des sociétés Entreprise Chagnaud, Entreprise Jean Spada et Quille, font encore grief à l'administration, alors que celle-ci n'aurait disposé d'indices que pour la section 44 du TGV et son interconnexion, d'avoir, d'une part, diligenté une enquête et procédé à des saisies concernant le TGV Nord et son interconnexion, en utilisant des documents irrégulièrement saisis lors des visites opérées en exécution de l'ordonnance du 28 novembre 1989 et sans avoir reçu l'autorisation de les distraire de cette procédure, et, d'autre part, saisi des pièces relatives à des sections du TGV Rhône-Alpes, lesquelles n'étaient pas comprises dans le champ de l'autorisation judiciaire du 18 septembre 1990 ;
Considérant qu'en s'appuyant sur les notes du 26 juillet 1988 de M. Gautherie, gérant de la société Campenon-Bernard, et le compte rendu du comité de direction de Dumez TP du 28 mars 1988 relatifs au TGV Nord, pièces saisies sur le fondement de l'ordonnance du 28 novembre 1989, ainsi que sur la plainte de la société Condotte d'Acqua concernant la section 44 du TGV et son interconnexion, les enquêteurs ont obtenu, le 18 septembre 1990, du président du Tribunal de grande instance de Nanterre l'autorisation d'effectuer les visites et saisies nécessitées par la recherche de la preuve des pratiques anticoncurrentielles relevées dans le cadre d'appels d'offres relatifs à la construction du TGV Nord et de son interconnexion avec les réseaux Sud-Est et Atlantique ainsi que " toute autre manifestation de cette concertation prohibée " ;
Que les enquêteurs ont alors saisi, sous la cote B, des documents couvrant un champ plus vaste, que celui du marché du TGV Nord et de son interconnexion avec le réseau ferré (accord coopération Dumez-Razel du 22 février 1990), de nature à caractériser une entente de répartition entre entreprises du génie civil " dans le domaine des terrassements, du génie civil et des travaux souterrains ", ainsi que des pièces susceptibles de matérialiser cette concertation portant d'autres sections du TGV telles que les sections 15 et 21 du TGV Rhône-Alpes ;
Mais considérant, d'une part, que les deux documents incriminés par les entreprises relatifs au TGV Nord ont été, ainsi qu'il a été vu plus haut, régulièrement saisis, sous la cote A, dans le cadre de l'autorisation donnée le 28 novembre 1989 par le président du Tribunal de grande instance de Nanterre ;
Que, d'autre part, et contrairement à ce qui est soutenu par les entreprises, il n'est pas interdit à l'administration de saisir des documents, pour partie utiles à la preuve des agissements retenus, dès lors que ces pièces ne sont pas étrangères à l'autorisation accordée puisqu'elles étaient susceptibles de limiter la concurrence, par un jeu de compensations réciproques, entre les mêmes sociétés et à la même époque, sur des marchés individualisés comme celui du TGV Rhône-Alpes;
Que, dans ces conditions, l'administration, en saisissant les documents figurant sous la cote B, commis aucun détournement de procédure ; qu'il ne saurait donc être reproché au rapporteur du conseil d'avoir exploité irrégulièrement ceux-ci pour fonder des griefs étrangers à l'objet des autorisations judiciaires ;
Considérant, par ailleurs, qu'il n'est apporté aucune preuve de manouvres ou de procédés déloyaux contraires à l'équité du procès, auxquels se seraient prêtés les enquêteurs dans le dessein, de faire échec aux garanties procédurales essentielles ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'écarter l'ensemble des moyens articulés du chef de la régularité de l'enquête ;
VI. - SUR LE FOND
Sur la définition du marché pertinent :
Considérant qu'un certain nombre d'entreprises, notamment les sociétés Bec, Eiffage TP, Sogea et Vinci Construction, soutenant qu'il n'y a pas lieu de retenir un éventuel marché du bâtiment et des travaux publics, ni même des ouvrages d'art, font observer qu'en l'espèce l'identification précise du marché pertinent fait défaut ;
Considérant que la procédure contestée a été engagée à l'encontre des entreprises incriminées, d'une part, pour des présomptions d'accords généraux de répartition des marchés antérieurement au lancement des appels d'offres pour la construction de différents ponts et les travaux d'infrastructures des lignes de TGV, d'autre part, pour des présomptions d'accords particuliers intervenus à l'occasion des offres correspondantes ;
Considérant que chaque marché public passé selon la procédure de l'appel d'offres constitue un marché de référence, résultant de la confrontation concrète, à l'occasion de l'appel d'offres, d'une demande du maître d'ouvrage et des propositions faites par les candidats qui répondent à l'appel;
Considérant que si cette circonstance permet de délimiter et identifier le marché de référence, peuvent néanmoins être sanctionnées en application de l'article L. 420-1 du Code de commerce, non seulement les pratiques anticoncurrentielles affectant exclusivement ce marché, mais aussi l'entente organisée à un échelon plus vaste que chacun des marchés considérés et produisant des effets sur lesdits marchés, en ce qu'elle conduit les entreprises qui y sont présentes à s'en répartir illicitement les parts; que le grief invoqué n'est pas dès lors fondé ;
Sur les groupements d'entreprises et les accords généraux relatifs à la construction des ponts et des infrastructures des lignes de train à grande vitesse :
Considérant que les entreprises en cause contestent l'illicité des pratiques relevées à leur encontre en faisant valoir notamment que l'importance particulière des chantiers proposés rendait nécessaire la recherche de partenaires économiques et la constitution de groupements momentanés, que les procédures d'appel d'offres sont inadaptées aux marchés d'une telle nature et complexité, que les maîtres d'ouvrage eux-mêmes ont suscité ou couvert les comportements reprochés aux entreprises, que les écarts entre les estimations faites par les maîtres d'ouvrage et les offres ne sont pas un indice de concertation entre les entreprises ni un élément de nature à établir le prétendu caractère excessif des prix et, par conséquent, le dommage à l'économie ;
Considérant que, s'il est vrai que des entreprises peuvent se grouper pour soumissionner à un marché dans un but de complémentarité sans enfreindre les dispositions de la loi, sont en revanche prohibées toutes les formes de concertation pouvant fausser le libre jeu de la concurrence et tromper le maître d'ouvrage sur la réalité de la compétition entre les entreprises ayant répondu à son appel d'offres ; que la preuve de tels agissements illicites, généralement occultes, ne pouvant résulter que de la réunion d'un ensemble de présomptions précises et concordantes, il convient d'examiner successivement les indices relatifs aux marchés des ponts et ceux concernant les infrastructures des lignes de train à grande vitesse ;
Les marchés des ponts :
Considérant qu'il résulte de deux notes datées des 11 et 17 mai 1988, établies par M. Dehan, que la société Dumez (présentation des faits, pages 25 et 26 de cet arrêt), dont il était le directeur général adjoint, était convenue, alors que les dates limites de dépôt des offres étaient toutes postérieures, de se répartir les marchés des ponts de Normandie, de Rochefort et de Gennevilliers avec les entreprises Bouygues et Quillery et que des discussions étaient en cours avec les entreprises GTM-BTP et SPIE-Batignolles, la nécessité étant évoquée d'" un protocole signé sur tous les ponts " ; que les notes saisies au siège des sociétés Ballot et Quille, cette dernière filiale de Bouygues, révèlent la " formation d'un club de spécialistes de bureaux d'études et aussi d'entreprises qui prennent les affaires en main en amont des appels d'offres ", ainsi que " la mise en œuvre au sein de Bouygues d'une stratégie globale sur l'ensemble du territoire qui privilégie les études en commun avec les autres "majors" du BTP en France au détriment de la compétition classique dite "sauvage" " (arrêt, page 26) ; que deux autres documents des 7 juillet et 10 octobre 1989, saisis dans les locaux de la société Quille, mais rédigés respectivement par le directeur général de la société Bouygues et le président de la société Pertuy, autre filiale de cette dernière, attestent notamment (arrêt, page 27) de l'existence de négociations conduites par Bouygues " avec la profession sur les grands ouvrages ", du fait que ces négociations étaient conduites " avec l'accord des DG des filiales ", du souci du groupe Bouygues " de mettre en avant la pluralité de sociétés et filiales " qui le composaient au cours de ses négociations avec les autres groupes du BTP, " pour augmenter (leurs) participations et (leurs) prétentions aux parts de marché correspondantes " ;
Les travaux d'infrastructure des lignes de train à grande vitesse :
Considérant qu'au cours des années 1989 et 1990, la SNCF a procédé à un grand nombre de consultations concernant la construction des infrastructures des lignes de train à grande vitesse des réseaux Nord et Sud-Est ainsi que de l'interconnexion des réseaux Sud-Nord et Atlantique dont le principe avait été retenu par le comité interministériel du 9 octobre 1987 ;
Considérant que deux notes des 2 et 9 mai 1988 du directeur général adjoint de la société Dumez (arrêt, pages 28 et 29) indiquent que cette société, ainsi que les sociétés Cofiroute, SPIE-Batignolles, Bouygues, Razel et Bec, se sont concertées en vue d'organiser la répartition entre différents groupements des travaux concernant les infrastructures des lignes de train à grande vitesse Nord et Rhône-Alpes ; que le compte rendu du comité de direction de Dumez du 9 mai 1988 (arrêt, page 29) mentionne la composition du groupe emmené par SPIE-Batignolles et la participation de Cofiroute à " l'autre groupement " ; que, dès le mois de juin suivant, selon une note manuscrite du directeur général adjoint de la société Dumez, cette société était en mesure d'évaluer sa part des travaux, pour la ligne de train à grande vitesse Nord et l'interconnexion ; qu'une note datée du 10 mai 1988 trouvée dans les locaux de la société Razel évaluait la part de chacun des quatre groupes d'entreprises envisagés, emmenés par les société Dumez, Sogea, SPIE-Batignolles et Bouygues, à 2,7 milliards de francs, répartis à parts égales entre les terrassements et le génie civil, la part de la société Razel étant de 50 % des travaux de terrassements attribués au groupe Dumez dont elle faisait partie ; que des notes manuscrites du 29 juillet 1988 d'un salarié de la société Campenon-Bernard (arrêt, page 33) indiquent la composition des quatre groupes d'entreprises envisagés, évaluent les travaux d'infrastructures des lignes de train à grande vitesse Nord, Rhône-Alpes et de l'interconnexion et précise la " part " de Campenon-Bernard ; qu'un " tableau d'espérance d'activité en 1989, 1990, 1991 ", saisi dans les locaux de la même entreprise (arrêt, page 36), fixe également sa part pour les " affaires de TGV Nord et interconnexion et TGV Rhône-Alpes " ; que des notes manuscrites du directeur général de la société Campenon-Bernard mentionnent à la date du 7 septembre 1988 (arrêt, page 34) une " réunion des huit présidents " et, à la date du 29 septembre, " les huit présidents doivent se bouger " (arrêt, page 36), les discussions portant notamment sur le nombre de groupes à constituer dans un " GIE occulte " et sur la composition de chacun d'eux ; qu'outre les entreprises citées, les documents saisis au cours de l'enquête relatifs à la constitution et à la composition des différents groupements, à l'évaluation des besoins des entreprises, aux modalités de fixation des parts revenant à chacune, révèlent l'implication dans cette concertation des sociétés DTP Terrassement, Fougerolle, Spada, Muller TP, Eiffage TP, Deschiron, Chagnaud et Demathieu (arrêt, pages 8 à 48) ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments d'appréciation que, tant pour le marché des ponts que pour ceux concernant les réseaux de voies ferrées, une concertation a été mise en œuvre par de nombreuses entreprises, non seulement pour réaliser des études d'intérêt collectif sur des sujets techniques ou professionnels relevant de leur secteur d'activité, mais pour éviter les effets jugés pervers du libre jeu de la concurrence ; qu'il s'agissait pour elles d'élaborer une stratégie de répartition des marchés à venir en tenant compte des intérêts particuliers des sociétés susceptibles de présenter des offres, de " maîtriser " le niveau de la concurrence par des échanges d'informations sur leurs besoins et leurs objectifs pour être en définitive en mesure de proposer des prix fixés, non de manière autonome en fonction des coûts de production de chaque entreprise, mais après entente pour la satisfaction des buts préalablement déterminés en commun ;
Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu par les requérantes, la prétendue inadaptation de la procédure d'appel d'offres aux marchés importants et complexes, l'éventuelle incitation des maîtres d'ouvrage au rapprochement des entreprises ne sauraient justifier des pratiques caractérisées, non par la constitution licite de groupements destinés à l'organisation d'une collaboration industrielle et technique répondant aux spécificités des marchés en cause, mais par une prérépartition concertée des travaux, réalisée à l'insu des maîtres d'ouvrage ;
Considérant que l'analyse et la confrontation des documents saisis, leur comparaison à l'attitude ultérieure des entreprises visées lors des appels d'offres révèlent ainsi, au-delà d'un simple échange d'informations sur leurs intentions de participation aux offres, l'existence d'accords de répartition impliquant une harmonisation de leurs propositions de prix et ayant eu pour but ou pour effet de fausser les règles de la concurrence; que ces pratiques, interdites par l'article L. 420-1 du Code de commerce, sont notamment imputables, comme le démontrent les circonstances analysées :
- pour les marchés de travaux relatifs aux ponts, aux sociétés Bouygues, Quille, Eiffage TP, qui, malgré leur concertation illicite antérieure, présenteront des offres distinctes et apparemment concurrentes susceptibles d'induire en erreur les maîtres d'ouvrage sur la certitude et l'ampleur de la compétition ;
- pour les marchés de travaux ferroviaires, aux sociétés Bouygues, DTP Terrassement, Fougerolle, Spada, Vinci Construction, Bec, Muller TP, Eiffage TP, Deschiron, Chagnaud, Demathieu et Sogea, qui ont eu pour objectif, par leur association en différents groupements, de se substituer aux maîtres d'ouvrage dans les décisions de répartition des marchés en accordant leurs offres de telle manière qu'elles correspondent aux attributions dont elles étaient préalablement convenues;
Sur les marchés particuliers de construction des ponts :
Le pont de Normandie :
Considérant que sur ce marché (première partie de cet arrêt, pages 6 à 9, 48 à 63) des griefs d'entente illicite ont été notifiés à de nombreuses entreprises, parmi lesquelles les sociétés Bouygues, Vinci Construction, Fougerolle, Eiffage TP, Sogea, demanderesses actuelles au recours ;
Considérant que ces sociétés font valoir que l'ouvrage présentait un caractère exceptionnel et posait de très nombreux problèmes techniques, que le maître d'ouvrage a été informé de la nécessité d'un regroupement d'entreprises et ne s'y est pas opposé, qu'il a même suscité la constitution de tels groupements, que la procédure d'appel d'offres n'a été maintenue qu'afin de préserver les apparences d'une mise en concurrence, que la concertation des entreprises doit en toute hypothèse bénéficier de l'exemption prévue par l'article L. 420-4 du Code de commerce ;
Considérant cependant que les pièces saisies au cours de l'enquête montrent que la volonté de regroupement manifestée en particulier par les sociétés Bouygues et Campenon-Bernard (Vinci Construction) dès la présentation du projet de construction avait pour objectif, non de répondre à un vou du maître d'ouvrage, mais de permettre à ces entreprises de désigner elles-mêmes à l'avance, indépendamment des effets de la concurrence, celles qui réaliseraient les travaux ;
Considérant qu'à cet égard, l'agenda de M. de La Chaise (société Bouygues) révèle l'existence de rencontres entre les représentants de Bouygues et Campenon-Bernard courant mai, juin et juillet 1988 avec notamment pour objet la fixation du prix des offres (arrêt, page 50) ; que les notes de M. Gautherie (Campenon-Bernard) corroborent la réalité de ces rencontres (arrêt, page 54) ; qu'un tableau saisi au siège de Bouygues et daté du 19 juillet 1988 (arrêt, page 52) reprend les résultats chiffrés des études faites par Bouygues et Campenon-Bernard en comparant les écarts poste par poste ; qu'un autre tableau récapitule, à la date du 1er août 1988, les prix des groupements et y apporte des " correctifs " (arrêt, page 55) ; que ces échanges ont finalement abouti à la présentation par Bouygues et Campenon-Bernard d'offres apparemment concurrentes mais comportant un écart de 0,04 % pour le lot béton sur un montant de près de 700 millions de francs ;
Considérant que d'autres entreprises ont été associées à cette concertation, comme en attestent des tableaux trouvés chez Campenon-Bernard (arrêt, page 53), qui comparent des propositions de prix faites par diverses sociétés et suggèrent des répartitions de travaux entre elles ; qu'au nombre de ces sociétés apparaît en particulier Fougerolle dont l'offre sur le marché du pont de Normandie sera nettement supérieure à celle des sociétés Bouygues et Campenon-Bernard mais qui, selon des notes de M. de La Chaise et Gautherie (arrêt, pages 52 à 54, 56 et 57), s'était entendue avec les deux autres pour être le " loser " (perdant) sur ce marché en contrepartie d'une position privilégiée sur des marchés différents ; qu'indépendamment de Fougerolle, les notes susvisées de même que les déclarations faites au cours de l'enquête par les représentants de diverses entreprises du bâtiment (arrêt, pages 57 et s.) établissent que les sociétés Quillery et Sogea ont été associées et ont participé activement aux échanges d'informations ;
Considérant que ces échanges d'informations avant le dépôt des offres visaient ainsi à déterminer les entreprises bénéficiaires des marchés, à désigner dans ce but la ou les sociétés moins-disantes et à organiser pour les autres la présentation d'offres dites de " couverture "; que la concertation constatée était également de nature à tromper le maître d'ouvrage sur la réalité de la concurrence entre les différents soumissionnaires qui ont présenté des offres faussement indépendantes, alors que, en dépit de ce que soutiennent les requérantes, aucun fait concret n'établit une quelconque intention de sa part de s'affranchir des règles applicables en cette matière; que le maître d'ouvrage a au contraire, tout en n'excluant pas l'éventualité d'un regroupement d'entreprises pour l'exécution de l'ouvrage, clairement appelé à la mise en concurrence du marché, comme l'atteste la chronologie de l'affaire (arrêt, page 6) et n'a dû en définitive traiter avec les groupements coadministrés par Bouygues et Campenon-Bernard qu'à la suite des ententes illicites précédemment décrites;
Considérant que les pratiques en cause, destinées à empêcher ou restreindre les effets de la concurrence et à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché, ne sauraient être justifiées au regard de l'article L. 420-4-1 (2o) du Code de commerce ; que, s'il est incontestable que la construction du pont de Normandie a pu contribuer au progrès économique, il n'est en revanche nullement établi que ce progrès résulte directement des pratiques constatées, que la restriction de la concurrence a été indispensable à sa réalisation et qu'elle a réservé aux utilisateurs une part équitable du profit qui en est résulté, étant observé à cet égard que le coût pour la collectivité du lot principal " béton " de l'ouvrage a été supérieur de près de 40 % aux prévisions de la Mission pont de Normandie, du fait de l'entente imputable aux entreprises ;
Le pont de Rochefort :
Considérant qu'il convient de rappeler que, pour cet ouvrage pour lequel le premier appel d'offres a été lancé au mois de février 1988, le marché a été conclu le 12 octobre 1988 avec le groupement le moins-disant, Bouygues et Quillery, les sociétés GTM-BTP et Campenon-Bernard ayant chacune déposé une offre par ailleurs ;
Considérant que les sociétés Bouygues, Eiffage TP (Quillery) et Vinci Construction (Campenon-Bernard), qui font partie des entreprises auxquelles des griefs d'entente illicite ont été notifiés, font valoir au soutien de leur recours qu'il n'existe aucune preuve d'une concertation anticoncurrentielle ;
Considérant cependant qu'il résulte des déclarations d'un responsable de la société Dumez (arrêt, page 65), des notes de ce même responsable ainsi que, de celles d'un représentant de la société Bouygues (arrêt, pages 63 et s.) que la première, bien qu'elle n'ait pas fait acte officiellement de candidature, a participé " en occulte " à l'offre formulée par le groupement Bouygues-Quillery, en contrepartie d'un " service rendu " à Bouygues sur un autre marché ; que les mêmes documents et la déclaration du responsable de la société Quillery (arrêt, page 65) établissent que celle-ci a accepté cette participation qui n'a pas été portée à la connaissance du maître d'ouvrage ;
Considérant, en outre, que les notes manuscrites du mois de mai 1988 d'un responsable de la société Dumez, antérieures d'un mois à la première ouverture des plis, établissent que ces entreprises savaient déjà que l'offre du groupement Bouygues serait moins-disante (arrêt, pages 63 et s.) ; qu'il est également établi que la société Dumez est intervenue pour " secouer " la société Campenon-Bernard qui allait par la suite déposer une offre (arrêt, page 63), que cette dernière société connaissait, dès le mois de juillet 1988, l'existence et le contenu de l'accord conclu entre Bouygues, Quillery et Dumez, le montant de l'offre initialement présentée par le groupement Bouygues-Quillery et la marge dégagée par cette offre (arrêt, page 65) ; qu'elle a pu dès lors soumissionner en connaissance desdits accords ;
Considérant que ces indices précis et concordants établissent que, malgré leur autonomie et leurs offres apparemment concurrentes, les sociétés requérantes se sont livrées, avant le dépôt effectif des offres, à des échanges d'informations et à des pratiques qui avaient pour objet et pouvaient avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché du pont de Rochefort ;
Le pont de Gennevilliers :
Considérant qu'après un premier appel d'offres déclaré infructueux en raison de l'écart entre l'offre la plus basse et l'estimation, le marché a été en définitive attribué au mois de septembre 1989 au groupement SPIE-Batignolles GTM-BTP Fougerolle, moins-disant, la société Bouygues et un groupement formé par Campenon-Bernard et Quillery ayant chacun déposé une offre ;
Considérant que les sociétés Bouygues, Quillery, Fougerolle et Campenon-Bernard, visées par la notification de griefs pour entente illicite sur ce marché, invoquent l'absence de preuve d'une telle entente ;
Mais considérant que les documents saisis dans les locaux de la société Bouygues (arrêt, pages 66 et s.) montrent que celle-ci savait que Fougerolle, qui avait accepté la position de " loser " pour le marché du pont de Normandie, devait bénéficier d'une contrepartie sur l'appel d'offres de la construction du pont de Gennevilliers, " dans le respect des protocoles " ( arrêt, page 67) ; que des notes du 11 et du 17 mai 1988, outre les déclarations recueillies établissent également des concertations entre SPIE-Batignolles et Campenon-Bernard ainsi qu'avec Quillery avant le dépôt des offres ; que ces circonstances démontrent, en dépit de ce que soutiennent les requérantes, des négociations et une concertation destinées à fausser le jeu de la concurrence ou pouvant avoir cet effet, en induisant le maître d'ouvrage en erreur sur l'effectivité de la compétition existant entre les entreprises ayant déposé des offres fictivement indépendantes ;
Le pont de Plougastel :
Considérant que les sociétés Bouygues, Eiffage TP et Vinci Construction, impliquées pour entente illicite sur ce marché, soutiennent l'absence de preuve d'une telle entente ;
Mais considérant que des notes manuscrites des 23 et 24 août 1988 émanant d'un responsable de Campenon-Bernard montrent que, bien avant la date fixée pour le dépôt des offres, une concertation a eu lieu entre ces sociétés et les deux autres entreprises requérantes (arrêt, pages 68 et 69) ; que Campenon-Bernard a en effet demandé aux autres de la " laisser passer sur Plougastel " ; que Quillery, associée pour ce chantier avec Campenon-Bernard, invoquait des " entrées politiques " qu'elle n'avait pas pour de précédents chantiers ; que la société Bouygues connaissait cette circonstance et avait indiqué qu'elle " ne court pas après Plougastel " ; que ces indices concordants démontrent l'existence d'une entente de répartition ayant faussé le jeu de la concurrence sur le marché ;
Sur les marchés particuliers de construction d'ouvrages ferroviaires :
La section 44 du TGV Nord et son interconnexion :
Considérant que la société Vinci Construction (Campenon-Bernard) est, parmi les sociétés requérantes, la seule entreprise concernée par le grief d'entente visant l'attribution de ces travaux ; qu'elle soutient être étrangère aux pratiques relevées par les enquêteurs en soulignant qu'elle n'a en aucune façon répondu à l'appel d'offres ;
Considérant cependant que l'article L. 420-1 du Code de commerce ne pose pas comme condition de son application l'exigence du dépôt d'une offre par l'entreprise incriminée ; qu'il suffit de constater que celle-ci a personnellement participé à une concertation destinée à fausser, de l'une des manières prévues par la loi, le jeu de la concurrence ;
Considérant qu'en l'espèce, le marché a été attribué à un groupement emmené par la société Ballot après que celle-ci, avec l'aide notamment de la société Campenon-Bernard, s'est employée à dissuader une entreprise italienne, la société Condotte d'Acqua, de soumissionner sur ce marché ;
Considérant qu'il résulte en effet du cahier des messages téléphoniques reçus par le responsable de la société Groupement Foncier Anjou, représentant en France la société italienne, et de son agenda (arrêt, page 72) qu'un membre de la société Ballot a pris contact au mois de juin 1990 avec la société Groupement Foncier Anjou et la société italienne au sujet des " travaux SNCF " ; que l'existence de ces contacts est corroborée par une note manuscrite du 6 juillet 1990 rédigée par un collaborateur de la société Chantiers Modernes, membre du groupement Ballot (arrêt, pages 72 et 73), cette note faisant état d'un " accrochage avec Condotte d'Acqua sur le TGV 44 " ; que la société Campenon-Bernard a pris part aux réunions des différentes parties intéressées, ainsi que l'établit notamment le témoignage de M. Carmona (arrêt, pages 78 et 79) ; que ce témoignage, corroboré par une note produite par la société Groupement Foncier Anjou mais rédigée par le responsable de la société Ballot (arrêt, page 81), révèle qu'il a été suggéré à la société italienne de présenter une offre de couverture s'élevant à 875 millions, de façon qu'elle soit classée " troisième " lors du dépouillement des offres (arrêt, page 79) ; que ces indices concordants établissent ainsi l'implication de la société requérante dans une pratique anticoncurrentielle visant à entraver l'accès d'un opérateur économique à un marché ;
La section 43 du TGV Nord et son interconnexion :
Considérant que les sociétés Bouygues et Vinci Construction (Campenon-Bernard) contestent la réalité des pratiques anticoncurrentielles qui leur sont reprochées pour ce marché, attribué après dépouillement des offres au groupement emmené par Bouygues et comprenant notamment Campenon-Bernard ;
Considérant cependant que des notes manuscrites émanant des représentants de l'entreprise GTM-BTP et de la société Campenon-Bernard (arrêt, pages 85 et 86) montrent la mise en œuvre, avant le dépôt effectif des offres de prix, d'une concertation destinée à déterminer les entreprises qui auraient à réaliser les travaux et la part leur revenant dans cette réalisation; qu'il en résulte notamment que Bouygues et Campenon-Bernard ont réservé une fraction du marché à une autre entreprise, la société Nord-France qui se présentait pourtant au maître d'ouvrage comme une société indépendante du groupement et a déposé une offre apparemment concurrente, non retenue en raison de son montant supérieur; qu'il convient d'ailleurs de souligner que la société Nord-France a par la suite rejoint le groupement Bouygues et Campenon Bernard et a reçu sa part de travaux pour le montant convenu; que ces circonstances démontrent ainsi que les échanges et manouvres préalables au dépôt des offres ont eu pour but de tromper le maître d'ouvrage sur l'existence même d'une concurrence entre les entreprises en cause;
La section 21 du TGV Rhône-Alpes :
Considérant qu'il convient, pour ce marché, de rappeler que la SNCF avait sélectionné trois groupements, le premier (groupe B) emmené par la société Dumez, comprenant les sociétés Bouygues, SPIE-Batignolles, Bec, Razel et Muller, le deuxième (groupe A) emmené par la société Campenon-Bernard et composé des sociétés Borie, Quillery, Demathieu, Guintoli, Chantiers Modernes et Valérian, le troisième (groupe C) piloté par GTM-BTP auquel s'était jointe la société Sogea ; que le groupe B s'est révélé le moins-disant ;
Considérant que, parmi les sociétés actuellement requérantes, des griefs d'entente illicite ont été notifiés à Bouygues, Vinci Construction (Campenon-Bernard), Eiffage TP (Quillery) et Sogea ; qu'elles contestent les faits qui leur sont reprochés en soutenant que le marché présentait des particularités rendant nécessaires les consultations préalables entre entreprises, que le coût des études requises pour ce marché exclut que certaines entreprises aient pu accepter l'idée que les travaux soient attribués à d'autres, que la SNCF a été d'autant plus satisfaite du déroulement des opérations préalables à l'ouverture des plis qu'elle a accordé un dédommagement à Campenon-Bernard ;
Considérant cependant qu'aucune de ces circonstances n'est de nature à priver de valeur les indices d'entente anticoncurrentielle rassemblés au sujet de ce marché ;
Considérant que des tableaux, saisis dans les locaux de l'entreprise Quillery (arrêt, pages 89 et 90), confrontent les offres faites pour les trois groupements A, B et C, en faisant figurer les prix des différents lots ; que ces prix sont voisins mais différents de ceux qui ont été effectivement proposés à la SNCF, ce qui établit l'antériorité du document par rapport à la date du dépôt des offres et, partant, l'échange d'informations sur les prix susceptible d'être retenu pour leurs offres par les entreprises ;
Considérant en outre que les notes manuscrites d'un responsable de la société Dumez rédigées aux mois de mai et juin 1988, le compte rendu du comité de direction de la même société en date du 9 mai 1988 (arrêt, pages 87 et 88), les déclarations du vice-président de la société GTM-BTP (arrêt, page 93), les annotations figurant dans l'agenda d'un responsable de Campenon-Bernard (arrêt, page 88) établissent l'existence de nombreux contacts entre entreprises de groupements différents avant le dépôt des offres, notamment dans les locaux de Sogea ; qu'une note interne à l'entreprise SPIE-Batignolles du 9 janvier 1989 (arrêt, page 87), les déclarations du vice-président de GTM-BTP et une note manuscrite du 12 janvier 1989 d'un responsable de Dumez (arrêt, page 88) établissent que Dumez, SPIE-Batignolles et Bouygues (groupement B) et la société GTM-BTP (groupement C) étaient convenues que le groupement B devait apparaître comme moins-disant et que GTM-BTP devait être ensuite " réintégrée " au groupement B après l'obtention du marché ;
Considérant enfin que l'existence de négociations pour la recherche de contreparties en faveur des entreprises ne figurant pas dans le groupement B qui devait être retenu est attestée par le fait que diverses sociétés, en particulier Campenon-Bernard et Quillery, ont réalisé par la suite une partie des travaux en sous-traitance alors qu'elles avaient soumissionné dans des groupements plus-disants ;
Considérant que, quelles que soient les spécificités du marché et la nécessité de constituer des groupements d'entreprises pour répondre à l'appel d'offres, elles ne pouvaient néanmoins justifier l'organisation d'une concertation ayant pour objet, au-delà des impératifs techniques évoqués, de mettre en place à l'insu du maître d'ouvrage une répartition des travaux entre les sociétés intéressées et de présenter des offres faussement concurrentielles;
Sur les sanctions :
Considérant qu'il résulte de l'article L. 464-2 du Code de commerce que la sanction pécuniaire susceptible d'être infligée aux entreprises convaincues de pratiques anticoncurrentielles doit être proportionnée à la gravité des faits, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation des entreprises impliquées ;
Considérant que celles-ci ont dénoncé dans leurs mémoires la disproportion prétendue des sanctions infligées par le Conseil de la concurrence par rapport au montant des travaux, le non-respect par le Conseil de la concurrence du principe de la contradiction pour les sanctions outre, pour certaines, la prise en compte injustifiée d'un état de récidive ;
Considérant cependant que, par l'effet de l'annulation de la décision du Conseil de la concurrence, cette première argumentation est devenue inopérante ; qu'il convient en outre de relever que les débats du recours devant la cour d'appel ont permis aux entreprises de remettre en question et discuter l'ensemble des données applicables à la fixation des sanctions ; que le principe de la contradiction a été ainsi respecté ;
Considérant que les entreprises requérantes font également valoir que l'ancienneté des faits, la durée excessive de la procédure et le comportement des maîtres d'ouvrage doivent entraîner une minoration des sanctions ;
Mais considérant que, si les maîtres d'ouvrage ont pu accepter le principe d'un regroupement d'entreprises pour la réalisation de certains ouvrages importants, ils n'ont pas pour autant incité à la mise en œuvre de pratiques illicites ni renoncé au bénéfice de la concurrence pour l'attribution des marchés ; qu'en outre, la durée de l'enquête, liée à la complexité des faits et à la difficulté de caractériser des pratiques occultes impliquant un grand nombre d'entreprises, n'est pas de nature à atténuer la gravité des faits et le dommage causé à l'économie ;
Considérant qu'en l'espèce, la gravité des faits résulte :
- de l'organisation d'un système d'ententes illicites tendant, par des accords généraux et particuliers, à une répartition des marchés et à l'éviction d'entreprises étrangères à ces concertations ;
- de la mise en œuvre de telles ententes pour des infrastructures d'une importance majeure au titre de l'aménagement du territoire ;
- du nombre et de la qualité des entreprises ou groupes d'entreprises en cause dont la concertation accréditait nécessairement l'idée d'un comportement général et était de nature à inciter les tiers soit à adopter des comportements similaires, soit à renoncer à des marchés relevant pourtant de leurs aptitudes ;
- de la place prépondérante sur le secteur du bâtiment et des travaux publics de certaines des entreprises visées, de l'influence qu'elles ont exercée sur les autres, incitées à s'en rapprocher pour obtenir une part des travaux;
Considérant que l'importance du dommage à l'économie se déduit également :
- du nombre conséquent d'entreprises impliquées et de la place essentielle qu'elles tiennent, pour les principales d'entre elles, dans le secteur d'activité affecté ;
- de la conclusion d'accords généraux de répartition des travaux ayant permis l'organisation de compensations à l'occasion de marchés particuliers ;
- de la possibilité ainsi offerte aux différents participants aux ententes, assurés d'obtenir une part des marchés, de s'affranchir de la pression concurrentielle qui les aurait contraintes à adopter les comportements commerciaux, financiers et industriels propres à améliorer en qualité leurs prestations, leur productivité et leurs coûts ;
- du retentissement des concertations sur le coût pour la collectivité des travaux, ces concertations ayant notamment eu pour effet d'augmenter de plus de 40 % le prix du béton en ce qui concerne l'un des principaux chantiers en cause, celui du pont de Normandie (marché de 1,2 milliard de francs sur un total de marchés compris dans ce litige de 5,5 milliards) ou de majorer de 6 % le bénéfice de l'attributaire du marché du pont de Rochefort ;
- des restrictions d'accès aux marchés opposés, notamment à des entreprises étrangères, dont la participation aux appels d'offres aurait permis de favoriser l'obtention par les maîtres d'ouvrages de meilleurs prix;
Considérant qu'indépendamment de ces circonstances opposables à l'ensemble des sociétés requérantes, l'appréciation des sanctions doit également tenir compte des résultats financiers, du chiffre d'affaires et du pouvoir économique de chaque entreprise ;
Considérant qu'à ce point de vue, plusieurs entreprises requérantes soutiennent, d'une part, que seule l'activité à l'occasion de laquelle les faits ont été constatés peut servir de base à la fixation de la sanction, d'autre part, que l'exercice comptable de référence est nécessairement le dernier clos avant la décision de la cour ;
Mais considérant qu'il résulte de l'article L. 464-2 du Code de commerce, même dans sa rédaction applicable avant la loi du 15 mai 2001, qu'aucune distinction ne doit être opérée quant aux branches d'activité de l'entreprise ; qu'on ne saurait dès lors restreindre le chiffre d'affaires de référence aux prestations dédiées à une catégorie de clientèle déterminée ;
Considérant en outre que le chiffre d'affaires ainsi compris permet, non seulement de déterminer le plafond légal de la sanction, mais aussi de fixer concrètement celle-ci en fonction de la dimension et de la situation de l'entreprise concernée ;
Considérant enfin qu'il résulte des dispositions de l'article L. 464-2, alinéa 4, dans sa rédaction applicable en la cause, que le chiffre d'affaires auquel il faut se référer pour la fixation de la sanction ne peut être que celui du dernier exercice clos avant la décision du Conseil de la concurrence, alors même qu'elle a ultérieurement été annulée ; qu'ainsi, en l'espèce, le chiffre d'affaires de référence pour les entreprises en cause est celui de l'exercice 1994 ;
Considérant que c'est au regard de l'ensemble de ces principes et circonstances que doit être examinée la situation particulière de chaque société :
1. La société Bouygues
Considérant que la société Bouygues est l'une des principales sociétés françaises du bâtiment et des travaux publics ; qu'elle a participé aux accords généraux illicites tendant au partage des marchés des ponts et des travaux ferroviaires puis aux ententes prohibées relatives à la plupart des appels d'offres dont l'irrégularité a été constatée ; que ni la fragilité prétendue de ce secteur d'activité ni le poids particulier et les contraintes des commandes publiques ne sont de nature à exonérer la société de sa responsabilité ; qu'il convient de tenir compte, dans l'appréciation de la sanction, non seulement des circonstances générales déjà exposées, mais aussi de l'importance des marchés affectés par les pratiques, en particulier celui du pont de Normandie (1,2 milliard de francs) et de la section 21 du TGV Rhône-Alpes (2,4 milliards de francs), du rôle essentiel pris par Bouygues dans la mise en œuvre des concertations anticoncurrentielles sur ces marchés, de l'absence de toute cause sérieuse de justification susceptible d'être invoquée par la requérante, du montant considérable de son chiffre d'affaires pour 1994 s'élevant à 5 946 941 246 F ; qu'il convient sur ce point de souligner que le secteur d'activité à prendre en considération doit s'entendre des travaux mettant en ouvre des techniques et des matériels identiques, voisins ou complémentaires, par des personnels de même qualification eu égard aux prestations spécifiquement fournies par l'entreprise à l'occasion des marchés concernés ; qu'il ne peut être restreint aux seuls travaux publics qui ne déterminent pas en eux-mêmes une nature spécifique de prestations ; qu'on ne saurait dès lors réduire au seul chiffre d'affaires des travaux publics l'assiette de la sanction ; que les éléments généraux et particuliers d'appréciation précédemment exposés conduisent à fixer à 22 500 000 euros la sanction applicable à Bouygues.
2. La société Vinci Construction
Considérant que la société Vinci Construction est aussi l'une des principales entreprises du même secteur d'activité ; qu'elle a pris part aux ententes générales de répartition pour les marchés ferroviaires et à tous les marchés particuliers visés dans le présent dossier ; qu'outre les circonstances générales et particulières déjà exposées qui répondent aux écritures de la requérante, il y a lieu de relever que son chiffre d'affaires pour 1994 s'est élevé à 1 584 770 616 F ; que l'absence prétendue de profit sur les marchés litigieux n'étant pas de nature à dispenser de sanction l'entreprise pour ses actions illicites, cette sanction sera fixée à 4 700 000 euros.
3. La société Eiffage TP
Considérant que cette société s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles prohibées par sa participation à la concertation ou aux échanges d'informations constatés, d'une part, sur l'ensemble des marchés des ponts visés par l'enquête, d'autre part, sur le plus important des marchés ferroviaires affectés par les pratiques ; que son chiffre d'affaires pour 1994 s'est élevé à 1 230 420 053 F ; que le secteur d'activité doit s'entendre des travaux mettant en ouvre des techniques et des matériels identiques, voisins ou complémentaires, par des personnels de même qualification eu égard aux prestations spécifiquement fournies par l'entreprise à l'occasion des marchés concernés ; qu'il ne peut en aucun cas être réduit aux seuls travaux publics qui ne déterminent pas en eux-mêmes une nature spécifique de prestations ; qu'il n'y a pas lieu ainsi de restreindre au seul chiffre d'affaires des travaux publics l'assiette de la sanction ; que compte tenu des éléments généraux et particuliers d'appréciation précédemment exposés, cette sanction doit être fixée à 3 400 000 euros.
4. La société Fougerolle
Considérant que cette société, l'une des plus importantes de la profession, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en participant activement à la concertation générale sur les marchés de travaux ferroviaires et aux ententes de répartition des chantiers du pont de Normandie et du pont de Gennevilliers ; que son chiffre d'affaires pour 1994 s'est élevé à 1 857 187 968 F ; qu'aucune disposition légale n'autorise la déduction de l'assiette de la sanction du chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise au titre de diverses sociétés en participation dont elle est la gérante ; que les éléments généraux et particuliers d'appréciation déjà précisés conduisent à fixer la sanction pécuniaire pour la société Fougerolle à 2 400 000 euros.
5. La société Quille
Considérant que celle-ci a participé aux échanges d'informations illicites sur la répartition des marchés des ponts, ainsi qu'en attestent les documents saisis dans ses locaux ; que son chiffre d'affaires pour 1994 s'étant élevé à 2 250 292 368 F, le montant de la sanction doit, en fonction de l'ensemble des circonstances précédemment exposées, être fixée à 1200 000 euros.
6. La société Sogea
Considérant que cette société, l'une des plus importantes de la profession, a pris part aux ententes illicites portant sur la répartition de l'ensemble des marchés ferroviaires et sur l'attribution particulière des marchés du pont de Normandie et de la section 21 du TGV Rhône-Alpes ; que Sogea a contribué, par son implication dans les pratiques, à causer le dommage économique précédemment caractérisé ; que, compte tenu de son chiffre d'affaires pour 1994 qui s'est élevé à 547 368 000 F, Sogea doit être condamnée à une sanction de 650 000 euros.
7. La société Bec Frères
Considérant que cette entreprise a participé, avant le dépôt des offres, à un accord général de répartition des marchés ferroviaires ; que même si aucun autre grief n'a été retenu contre elle, son implication à l'entente susvisée suffit à établir un lien entre les faits qui lui sont ainsi reprochés et le dommage à l'économie imputable à l'entente ; qu'il importe peu en outre que l'entreprise comporte un actionnariat familial et qu'elle n'ait pas de lien capitalistique avec les grands groupes du bâtiment et des travaux publics ; que son chiffre d'affaires pour 1994 s'est élevé à 834 162 000 F ; que l'autonomie de son activité " grands travaux " n'étant pas établie dans des conditions permettant d'isoler le chiffre d'affaires correspondant, il convient de fixer une sanction pécuniaire de 90 000 euros.
8. La société DTP Terrassement
Considérant que cette société est l'une de celles ayant conclu un accord général de répartition de l'ensemble des travaux relatifs aux lignes de TGV ; qu'elle a ainsi personnellement pris part aux faits dont la gravité et les conséquences économiques dommageables ont été précédemment constatées ; qu'au regard de son statut d'entreprise n'ayant pas une influence nationale, de son chiffre d'affaires pour 1994 s'élevant à 629 174 126 F, il convient de prononcer contre elle une sanction de 80 000 euros.
9. La société Chagnaud
Considérant que cette société a participé à la même concertation que l'entreprise précédente ; que, compte tenu de son statut comparable également à celui de DTP Terrassement et d'un chiffre d'affaires pour 1994 de 562 935 362 F, la sanction pécuniaire doit être fixée à 75 000 euross ;
10. La société Demathieu et Bard
Considérant que cette entreprise, impliquée dans la même concertation, présente des caractéristiques comparables à celles des deux précédentes et a réalisé en 1994 un chiffre d'affaires de 557 679 791 F ; qu'il y a lieu, dès lors, de fixer à 75 000 euros la sanction la concernant.
11. La société Deschiron
Considérant que cette société, comme les précédentes, a participé à l'entente générale relative aux travaux ferroviaires ; que ses caractéristiques d'entreprise régionale n'ayant pas pris l'initiative des pratiques en cause et son chiffre d'affaires pour 1994 s'élevant à 344 164 909 F justifient à son égard l'application d'une sanction de 60 000 euros.
12. La société Entreprise Jean Spada
Considérant que la société Spada a participé volontairement à la même concertation illicite organisée pour limiter les effets de la concurrence ; que, si elle n'en a pas été l'instigatrice, aucune circonstance précise n'établit pour autant qu'elle ait été contrainte de prêter son concours à l'entente ; qu'il y a lieu, en tenant compte de sa situation financière caractérisée par un chiffre d'affaires pour 1994 de 376 060 911 F, de fixer à 60 000 euros sa sanction pécuniaire.
13. La société Muller TP
Considérant que cette société a participé à la même concertation illicite ; qu'elle n'en a pas cependant été l'instigatrice et présente les caractéristiques d'une entreprise aux dimensions et influence modestes ; que son chiffre d'affaires pour 1994 ayant été de 594 347 422 F, il y a lieu de fixer une sanction de 60 000 euros ;
Par ces motifs, LA COUR, Déclare recevables les recours des sociétés requérantes ; Rejette le moyen de prescription soulevé par les sociétés requérantes ; Rejette les moyens relatifs à la nullité de la procédure ; Annule la décision du Conseil de la concurrence, en ce qui concerne les treize entreprises requérantes ; Statuant à nouveau à leur égard : Prononce à leur encontre les sanctions suivantes :- la société Bouygues : 22 500 000 euros ; - la société Vinci Construction : 4 700 000 euros ;- la société Eiffage TP : 3 400 000 euros ;- la société Fougerolle : 2 400 000 euros ; - la société Quille : 1 200 000 euros ; - la société Sogea : 650 000 euros ;- la société Bec Frères : 90 000 euros ; - la société DTP Terrassement : 80 000 euros ; - la société Chagnaud : 75 000 euros ; - la société Demathieu et Bard : 75 000 euros ; - la société Deschiron : 60 000 euros ; - la société Entreprise Jean Spada : 60 000 euros ; - la société Muller TP : 60 000 euros ; Rejette tous autres demandes et moyens ; Met les dépens, y compris ceux afférents à la décision cassée, à la charge des sociétés requérantes.