CCE, 24 juillet 2002, n° 2003-207
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Gaz industriels et médicaux
LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu le règlement n° 17 du Conseil du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1216-1999 (2), et notamment ses articles 3 et 15, paragraphe 2, vu la décision de la Commission du 9 juillet 2001 d'engager la procédure dans la présente affaire, après avoir donné aux entreprises concernées la possibilité de communiquer leurs observations sur les objections soulevées par la Commission, conformément à l'article 19, paragraphe 1, du règlement n° 17 et au règlement (CE) n° 2842-98 de la Commission du 22 décembre 1998 relatif à l'audition dans certaines procédures fondées sur les articles 85 et 86 du traité CE (3), vu le rapport final du conseiller-auditeur dans la présente affaire (4), après consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, considérant ce qui suit:
PARTIE I - LES FAITS
A. RESUME DE L'INFRACTION
1. INTRODUCTION
(1) La présente décision concerne les entreprises suivantes:
- AGA AB,
- Air Liquide BV,
- Air Products Nederland BV,
- BOC Group plc,
- Messer Nederland BV,
- NV Hoek Loos,
- Westfalen Gassen Nederland BV.
(2) C'est la participation de ces producteurs de gaz à usage industriel et médical à un accord et/ou à une pratique concertée continus contraires à l'article 81, paragraphe 1, du traité qui constitue l'infraction. Ces sociétés ont participé à des accords/pratiques concertées qui portaient sur des augmentations des prix des produits en cause, des périodes de suspension de la concurrence pour permettre l'application de ces augmentations de prix, la fixation de prix minimaux ainsi que différentes autres conditions commerciales concernant ces produits. Les entreprises concernées appartiennent à quelques-uns des plus grands groupes mondiaux du secteur des gaz industriels. Les infractions sont limitées au marché des gaz industriels et médicaux aux Pays-Bas
(3) La Commission a la preuve que les entreprises ont participé aux infractions de 1989 à 1991 et de 1993 à 1997 en ce qui concerne AGA Gas BV, Air Liquide BV, Air Products Europe Inc. et NV Hoek Loos, en 1990/1991 et de 1993 à 1997 en ce qui concerne Messer Nederland BV, de 1994/1995 à 1997 en ce qui concerne Westfalen Gassen Nederland BV et en 1994/1995 en ce qui concerne BOC Group plc.
2. LES PRODUITS
(4) Les gaz industriels, également appelés gaz techniques, sont soit extraits de l'air (gaz atmosphériques: oxygène, azote, argon) dans des unités de séparation de l'air, soit produits dans des installations de production "grande masse" au moyen d'un processus chimique (dioxyde de carbone, hydrogène, acétylène), souvent comme sousproduits. Les principaux produits de ce secteur sont les trois gaz atmosphériques (oxygène, azote et argon), qui doivent représenter ensemble environ 60 % en valeur, et beaucoup plus en volume, de l'ensemble des marchés européens des gaz industriels. Certains gaz atmosphériques et non atmosphériques sont proposés sous des formes extrêmement pures ou en mélanges à des fins médicales ou spéciales, par exemple l'oxygène médicinal.
(5) Les gaz industriels sont utilisés dans la plupart des industries et processus de production. Les gaz médicaux sont utilisés dans les hôpitaux, les cliniques et pour les soins à domicile. Les gaz industriels et médicaux sont essentiellement utilisés pour la production, la découpe et le soudage des métaux, ainsi que dans l'industrie chimique. Les secteurs de l'agroalimentaire, de l'électronique et de la santé représentent chacun environ 10 % du marché des gaz. Chaque gaz est utilisé à des fins spécifiques et possède donc un marché d'utilisateurs qui lui est propre.
(6) Si l'on tient compte des modes de livraison, il existe trois types différents de marchés des gaz: les ventes "grande masse" concernent certains gros clients qui ont besoin de très grandes quantités de gaz, essentiellement de l'oxygène et de l'azote. Ces livraisons se font soit par l'intermédiaire d'unités de production "sur site" ou par pipelines spéciaux. Les contrats, qui couvrent également les investissements nécessaires à la construction de ces unités de production ou de ces liaisons par pipeline, sont conçus en fonction des besoins de chaque client et, compte tenu de l'importance des investissements en cause, ont une durée de validité pouvant aller jusqu'à quinze ans. Les Pays-Bas et la Belgique possèdent des réseaux de pipelines très denses. Les ventes "grande masse" constituent un marché d'utilisateurs distinct, compte tenu du fait que les quelques sociétés qui ont besoin de quantités aussi importantes n'envisageraient pas d'avoir recours à la place à des livraisons en vrac ou en bouteilles, sinon comme solution d'appoint.
(7) En 1989, à la suite d'une enquête de la Commission dans le secteur des gaz industriels et de l'ouverture d'une procédure en vertu des règles de concurrence communautaires (5), les principaux producteurs mondiaux de gaz industriels, c'est-à-dire L'Air Liquide SA, AGA AB, Union Carbide, Air Products Europe Inc, Linde AG et Messer Griesheim GmbH, s'étaient engagés vis-à-vis de la Commission à modifier leurs contrats "grande masse". Tant pour les contrats de production sur site que pour les livraisons par pipeline, les engagements de fourniture et d'achat ne seraient plus exclusifs, mais porteraient sur des quantités se situant dans une fourchette fixe (6).
(8) Les livraisons de gaz atmosphériques et d'autres gaz, tels que le dioxyde de carbone sous forme liquide ("en vrac") à basses températures, sont destinées à des clients de taille moyenne. Le gaz est transporté vers les installations des clients en wagons-citernes ou en camionsciternes. Les clients eux-mêmes sont dotés de réservoirs de stockage et d'un équipement de vaporisation. On utilise des pipelines pour le transport entre les unités de séparation de l'air ou entre les grandes unités de production et les installations de liquéfaction. Celles-ci sont souvent construites sur le même site que les installations de production "grande masse" (unités combinées), ce qui évite d'avoir à investir dans un pipeline reliant ces deux installations.
(9) Les engagements pris en 1989 vis-à-vis de la Commission par les grands producteurs mondiaux de gaz industriels mentionnés au considérant 7 couvraient aussi les ventes d'azote, d'oxygène et d'argon liquides en vrac. Dans ce cas également, les engagements de vente et d'achat doivent porter sur des quantités plafonnées. La Commission a admis qu'un fournisseur puisse disposer du droit exclusif de remplir et d'entretenir les réservoirs de stockage, pour des raisons de sécurité. Un client souhaitant avoir plusieurs fournisseurs doit avoir plusieurs réservoirs de stockage. La durée des contrats relatifs aux gaz liquides a été ramenée à trois ans. Les clients restent libres d'acheter ou de louer des réservoirs cryogéniques à leur fournisseur de gaz. Ils peuvent exiger que les contrats de location des réservoirs soient distincts des contrats de fourniture des gaz. Les contrats de location des réservoirs peuvent avoir une durée maximale de cinq ans.
(10) Le gaz est livré en bouteilles, généralement en acier, aux plus petits consommateurs de gaz atmosphériques ainsi qu'aux acheteurs de gaz de soudage, de mélanges gazeux et de gaz spéciaux ou très purs. Les bouteilles peuvent être remplies dans l'unité de production du fournisseur et livrées à partir de cette unité, mais les gaz liquides peuvent aussi être transportés en camions-citernes vers des centres de remplissage des bouteilles, où les produits sont transformés en gaz comprimés et où les bouteilles sont remplies. A partir de là, des bouteilles de différentes tailles contenant des gaz sous pression sont transportées soit directement chez le client, ou alors vers des dépôts - qui sont parfois des entreprises indépendantes - qui prennent en charge la livraison aux clients de détail. Les gaz de soudage, comme l'acétylène, sont uniquement transportés en bouteilles et sous basse pression.
(11) Bien que les ventes de gaz en bouteilles soient limitées en volume, elles sont très importantes en termes de recettes, en raison des prix élevés et des frais liés à la vente de gaz en bouteilles. Dans ce secteur, les grands fournisseurs opèrent généralement une distinction entre différentes catégories de clients, en fonction de l'importance de ces derniers en termes de quantités achetées au cours d'une période donnée. Les clients les plus importants seront généralement fournis directement par les producteurs, alors que les clients plus petits s'adresseront à un dépôt. Les engagements pris en 1989 envers la Commission par les principaux producteurs mondiaux de gaz industriels mentionnés ci-dessus ne couvraient pas la fourniture de gaz en bouteilles.
(12) Les entreprises du secteur considèrent généralement ces trois modes de distribution différents comme des marchés de produits distincts et la Commission s'est rangée à cet avis dans l'affaire IV/30.869 - Gaz industriels (7) ainsi que dans les décisions relatives aux opérations de concentration Air Liquide/BOC (8) et Linde/AGA (9). Parmi les solutions disponibles pour un gaz donné sur le site d'un utilisateur donné, le client choisira généralement le mode de livraison le plus économique. Cela n'exclut pas qu'un seul et même client puisse acheter plusieurs gaz à la même entreprise avec des modes de livraison différents (par exemple l'oxygène par pipeline, le dioxyde de carbone sous forme liquide et un mélange particulier d'argon en bouteilles).
(13) Pour ces trois modes de livraison, le prix du transport et du conditionnement est très élevé par rapport à la valeur des gaz eux-mêmes. En général, tant les réservoirs que les bouteilles restent la propriété du fournisseur des gaz et sont loués par le client. Le propriétaire doit procéder à des contrôles de sécurité réguliers sur les réservoirs et les bouteilles.
(14) Parce que le transport coûte cher et parce que peu de fournisseurs sont capables de produire eux-mêmes l'ensemble des gaz industriels dans chaque région, les groupes de producteurs de gaz industriels et leurs filiales nationales se livrent souvent mutuellement des quantités importantes de gaz, par pipeline ou sous forme liquide, soit dans le cadre de contrats d'échanges, de contrats "take-or-pay" ou d'autres formes de contrats. Ces livraisons entre groupes sont souvent transnationales. Des dépôts de remplissage appartenant à un fournisseur remplissent parfois aussi des bouteilles pour des concurrents. Ainsi, les clients peuvent obtenir les différents types de gaz industriels dont ils ont besoin auprès d'un seul fournisseur.
3. LES FOURNISSEURS
a) Hoek Loos
(15) La plus importante société de gaz aux Pays-Bas au moment de l'enquête était NV Hoek's Machine en Zuurstoffabriek, dont la raison sociale est aujourd'hui NV Hoek Loos, et qui est dénommée ci-après "Hoek Loos". Elle a été fondée en 1891 et est située à Schiedam. Au 31 décembre 1996, Hoek Loos comptait 1 798 salariés, dont 826 aux Pays-Bas. Sa structure a été modifiée en 1996, la société anonyme étant transformée en holding d'un certain nombre de sociétés d'exploitation, qui comprenaient Hoek Loos BV, Hoek Loos Medische Gassen BV, la société belge Hoek Loos NV et la société américaine Holox Inc.
(16) La société de tête du groupe Hoek Loos est Linde AG, dont le siège se trouve à Wiesbaden, en Allemagne. En 1996, le groupe Linde a réalisé un chiffre d'affaires de 8,801 milliards de marks allemand (DEM) et comptait plus de 30 000 salariés. Linde non seulement produit, commercialise et vend des gaz industriels et médicaux dans de nombreux pays du monde, mais elle conçoit et produit également différents types d'installation dans le secteur chimique, des véhicules de transport, des systèmes hydrauliques et des systèmes de réfrigération. En 1996, les activités de Linde dans le secteur des gaz ont généré un chiffre d'affaires de [...] (*).
(17) [...]
(18) En 2000, Hoek Loos est devenue une filiale à 100 % de Linde, celle-ci ayant acheté l'ensemble des actions Hoek Loos encore échangées en bourse.
(19) Hoek Loos opère aux Pays-Bas, en Belgique et dans le sud-est des Etats-Unis d'Amérique. Elle produit, commercialise et distribue des gaz industriels et médicaux ainsi que les équipements, systèmes et services y afférents. Jusqu'en 1996, elle fabriquait également du matériel médical. Aux Pays-Bas, où sont situées ses propres unités de séparation de l'air, à Ijmuiden et Botlek/Rotterdam, elle fournit des gaz en bouteilles, en vrac et par pipeline, et propose également des unités de production sur site. Hoek Loos est un membre fondateur de l'association qui représente le secteur aux Pays-Bas, la VFIG. Comme elle en est le membre le plus important, elle en a toujours assuré la présidence
b) AGA
(20) Au cours de la période en cause, la deuxième société de gaz industriel des Pays-Bas était AGA Gas BV, créée en 1971 et située à Amsterdam (10). A l'époque, AGA Gas BV était détenue par AGA Invest BV, elle-même propriété de AGA AB de Lidingö, la société de tête suédoise du groupe AGA. En 1996, AGA AB a réalisé un chiffre d'affaires dans le monde de 12,860 milliards de couronnes suédoises (SEK) et comptait plus de 10 000 salariés.
(21) La structure de propriété de AGA Gas BV a été modifiée depuis la période en cause dans la présente procédure et la société n'existe plus en tant que telle aujourd'hui. A la suite de la décision de la Commission sur la concentration de Linde et AGA (11), AGA AB a été acquise par Linde AG, et l'une des mesures correctrices proposées pour que la Commission adopte une décision favorable était la cession du secteur "gaz en bouteilles" d'AGA Gas BV aux Pays-Bas.
(22) En décembre 2000, AGA Gas BV a été scindée en deux sociétés: AGA Gas BV et AGA Transfer BV, rebaptisée AGA Amsterdam BV. AGA Gas BV a essentiellement conservé le secteur "liquide", le secteur "gaz médicaux", le secteur "gaz spéciaux" et le secteur "Mison". AGA Amsterdam a repris le secteur "gaz en bouteilles".
(23) En 2001, AGA Gas BV a été fusionnée avec AGA Invest BV, et cette dernière a alors été vendue par AGA AB à Hoek Loos. AGA Amsterdam BV a été vendue à Air Products Holdings BV et Prodair Corporation.
(24) Tout au long de la période en cause, AGA Gas BV (ci-après dénommée "AGA") a produit, commercialisé et vendu des gaz industriels et médicaux ainsi que les équipements, systèmes et services y afférents. Jusqu'en 1995, AGA et Hoek Loos possédaient une entreprise commune de production dénommée Cryoton, implantée dans la région de Rotterdam. Ensuite, AGA a conservé une unité de production de CO2 liquide, alors que l'unité de séparation de l'air a été attribuée à Hoek Loos.
(25) AGA est un membre fondateur de la VFIG. En tant que deuxième membre par ordre d'importance, elle a traditionnellement exercé les fonctions de trésorier de cette association.
c) Air Products
(26) Air Products Nederland BV (ci-après dénommée "Air Products"), située à Waddinxveen, est un troisième opérateur implanté de longue date aux Pays-Bas. [...]. Air Products est un membre fondateur de la VFIG.
(27) Air Products Europe Inc. est une société enregistrée dans l'Etat du Delaware (Etats-Unis). Elle est chargée des opérations européennes d'Air Products et son siège social se trouve au Royaume-Uni.
(28) La société de tête d'Air Products est Air Products and Chemicals Inc., Allentown, Pennsylvanie (Etats-Unis). En 1998, le groupe comptait 16 700 salariés. [...]
d) Air Liquide
(29) Air Liquide BV (ci-après dénommée "Air Liquide") a été créée en 1988. Elle est actuellement située à Eindhoven.
(30) Sa société de tête est L'Air Liquide SA, France. Air Liquide commercialise et vend des gaz en vrac et en bouteilles aux Pays-Bas. Elle possède également un gros client en Belgique. Les contrats "grande masse" sont gérés par une société intermédiaire au sein du groupe Air Liquide, dénommée Air Liquide Nederland BV. Air Liquide est l'un des membres fondateurs de la VFIG.
(31) En 1996, le groupe Air Liquide comptait environ 27 000 salariés. Il occupe une position de premier plan sur les marchés des gaz industriels en France et en Belgique.
e) Messer
(32) La société mère de Messer Nederland BV, dénommée jusqu'en 1997 Messer Griesheim Nederland BV (ci-après dénommée "Messer"), implantée à Moerdijk, est le groupe Messer de Francfort (Allemagne). En 1996, il a réalisé un chiffre d'affaires de 2,300 milliards de DEM et employait environ 7 200 salariés dans le monde.
(33) Pendant la période en cause, la société de tête était le groupe Hoechst, qui possédait une participation des deux tiers dans le groupe Messer (un tiers étant la propriété de la famille Messer) et qui comptait environ 120 000 salariés en 1996. Messer, qui a démarré ses activités en 1989, est devenu membre de la VFIG en octobre 1991.
(34) Les actionnaires majoritaires actuels du groupe Messer sont Allianz et Goldman Sachs, qui détiennent les deux tiers des actions du groupe Messer, après avoir racheté les parts de Hoechst.
f) Westfalen
(35) Westfalen Gassen Nederland BV (ci-après dénommée "Westfalen") a démarré ses activités aux Pays-Bas en 1989. Elle est implantée à Deventer et sa société de tête est Westfalen Gase AG, M¸nster (Allemagne), dont les effectifs s'élevaient en 1997 à environ 1 100 personnes. Westfalen est devenue membre de la VFIG en juillet 1994.
g) BOC
(36) BOC Group Plc., implanté à Guildford, Surrey (Royaume-Uni), comptait environ 40 000 salariés en 1996. Cette même année, le groupe a réalisé environ 70 % de son chiffre d'affaires dans le secteur des gaz. A l'époque, il opérait également dans les secteurs des semiconducteurs et de la technologie du vide, de la distribution et des soins de santé. Le principal centre d'activité du groupe BOC dans la Communauté européenne est le Royaume-Uni.
(37) Pendant la période en cause, le groupe BOC exerçait ses activités gazières dans le Benelux (à partir de Zaventem, en Belgique) par l'intermédiaire de quatre sociétés: BOC NV (la société belge responsable du siège social de Zaventem), BOC Gas BV [une société néerlandaise responsable du secteur "grande masse" et du secteur "vrac" à Terneuzen (Pays-Bas)], BOC Cylinder Gas NV [chargée des opérations de remplissage des bouteilles à Herenthout (Belgique)] et BOC Gaz SA (une société française responsable des ventes en France). Ces sociétés BOC sont les personnes morales qui constituent ensemble l'entreprise BOC Gases Benelux (ci-après dénommée "BOC"), qui était notamment responsable de la commercialisation des gaz en bouteilles et en vrac en Belgique et aux Pays-Bas, ainsi que dans les régions voisines du nord de la France et de l'ouest de l'Allemagne. BOC Gas BV est devenue membre de la VFIG en mai 1991.
(38) Fin 1998, le groupe BOC a vendu son secteur "gaz" au Benelux et en Allemagne au groupe Air Liquide, pour une somme totale de 112 millions de livres sterling (GBP).
h) NTG
(39) Nederlandse Technische Gasmaatschappij BV (ci-après dénommée "NTG") est une société créée en 1985, dont le siège social se trouve à Tilburg. Elle est devenue membre de la VFIG au milieu de l'année 1989. Jusqu'au moment où l'unité de séparation de l'air détenue par sa société soeur BTG a démarré ses activités en Belgique, fin 1998, NTG achetait la plus grande partie de ses gaz en vrac à d'autres sociétés. Elle ne commercialise et ne vend que des gaz en vrac et en bouteilles, mais n'opère pas sur les marchés "grande masse".
(40) La société de tête de NTG est SOL SpA, Monza (Italie), un groupe multinational créé en 1927 et opérant sur les marchés de la production, de la recherche appliquée et de la commercialisation de gaz industriels, purs et médicinaux. En 1996, le groupe SOL employait environ 900 personnes.
4. AUTRES ACTEURS
a) Hydrogas
(41) Hydrogas Holland BV (ci-après dénommée "Hydrogas") est située à Vlaardingen. Elle a accès à plusieurs installations de production de dioxyde de carbone à Sluiskil et elle est très spécialisée dans la fourniture en vrac de ce gaz particulier à d'autres sociétés de gaz et à des utilisateurs finals. En 1996, elle a réalisé un chiffre d'affaires en gaz liquides de 25,4 millions de florins néerlandais (NLG). La plus grande partie de ces gaz a été vendue à d'autres sociétés de gaz du groupe Norsk Hydro et à des concurrents. Hydrogas est devenue membre de la VFIG en mai 1991.
(42) La société mère d'Hydrogas est Norsk Hydro ASA, Oslo (Norvège), qui opère dans les secteurs des engrais, des produits chimiques industriels, du pétrole et du gaz naturel, de l'aluminium, du magnésium et de la pétrochimie. En 1996, le groupe Norsk Hydro a réalisé un chiffre d'affaires d'environ 70 millions de couronnes norvégiennes (NOK) et employait 32 000 personnes. Le gouvernement norvégien détient 51 % du capital de Norsk Hydro.
(43) La Commission note que, bien qu'Hydrogas ait participé à certaines des réunions de la VFIG mentionnées cidessus, on ne peut tirer aucune conclusion quant à la participation de cette société aux infractions en cause.
b) UCC, Praxair, Indugas
(44) Union Carbide Corporation, Danbury, Connecticut (Etats-Unis), produit, commercialise et vend différents produits chimiques dans de nombreux pays du monde. Jusqu'au 1er juillet 1992, elle opérait aussi dans le secteur des gaz industriels. Sa filiale aux Pays-Bas et en Belgique, Union Carbide Benelux NV (ci-après dénommée: "Union Carbide"), vendait également des gaz industriels. Union Carbide n'est pas, et n'a jamais été, membre de la VFIG.
(45) Le 1er juillet 1992, Union Carbide Corporation s'est séparée de sa division "gaz industriels", qui a pris le nom de Praxair Inc., une société enregistrée dans l'Etat du Delaware. En 1996, Praxair Inc. a réalisé un chiffre d'affaires de 4,449 milliards de dollars des Etats-Unis (USD). Aux Pays-Bas, Praxair opère sous la raison sociale Praxair NV (ci-après dénommée "Praxair"), une société implantée à Olen, en Belgique. En Belgique et aux Pays-Bas, le groupe Praxair détient et exploite un certain nombre d'installations de production de gaz atmosphériques. La plupart sont des unités de production sur site destinées à répondre aux besoins du client sur le site duquel elles sont implantées. Deux de ces unités, situées à Zwijndrecht et Lommel (Belgique), produisent des gaz atmosphériques qui sont vendus sur le marché par pipeline et sous forme liquide. Le groupe Praxair n'exploite pas d'installations de remplissage pour les gaz atmosphériques et médicaux aux Pays-Bas et n'y vend pas non plus de gaz en bouteilles. Praxair n'est pas, et n'a jamais été, membre de la VFIG.
(46) Indugas NV (ci-après dénommée "Indugas"), située à Schoten (Belgique), a été fondée en 1979 par Union Carbide et la société belge Antwerpse Chemische Bedrijven LCB NV, pour assurer la revente et la distribution de gaz industriels et de produits de soudage. Union Carbide (Praxair à compter du 1er juillet 1992) et LCB détiennent chacune 50 % du capital d'Indugas. Indugas achète des gaz atmosphériques en vrac à Praxair, dont elle conditionne ensuite la plus grande partie en bouteilles. De fait, Indugaz est depuis 1979 le distributeur exclusif des gaz atmosphériques et mélanges de ces gaz d'Union Carbide/Praxair, et le 1er janvier 1995, elle est devenue le revendeur exclusif des gaz spéciaux de Praxair aux Pays-Bas. En 1996, Indugas a réalisé un chiffre d'affaires dans la vente de gaz de 16 millions de NLG aux Pays-Bas, par l'intermédiaire de sa filiale Indugas BV. Indugas est devenue membre de la VFIG en septembre 1993.
(47) La Commission note que la communication des griefs n'a pas été envoyée aux sociétés répertoriées à la section A, titre 4, point b), ci-dessus et qu'il n'est donc pas possible de tirer de conclusion en ce qui concerne leur participation à d'éventuelles infractions, bien que certaines d'entre elles soient mentionnées dans des documents évoqués ci-dessous.
c) ACP et IJsfabriek Strombeek
(48) Deux petits producteurs indépendants belges de gaz industriels opèrent également, dans une certaine mesure, sur le marché néerlandais.
(49) L'Acide Carbonique Pur NV/SA (ci-après dénommée "ACP") est située à Heusden-Zolder, en Belgique. Cette entreprise, qui n'appartient pas à l'un des groupes multinationaux de production de gaz industriels, vend des gaz en bouteilles uniquement sur le marché belge. ACP produit également du dioxyde de carbone à Geleen (Pays-Bas), qu'elle vend sous forme liquide, essentiellement en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne et en France. Le chiffre d'affaires total d'ACP dans le secteur des gaz industriels est de 526 millions de francs belges (BEF).
(50) Ijsfabriek Strombeek est une autre société anonyme indépendante située à Meise, en Belgique. En 1996, elle a vendu des gaz en bouteilles au Benelux, en Allemagne et au Royaume-Uni, et des gaz liquides en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, en France et en Grèce. La société a réalisé un chiffre d'affaires total de 567 millions de BEF. Sur le marché néerlandais, Ijsfabriek Strombeek ne détient une position de quelque importance que dans le secteur de l'oxyde nitreux (gaz hilarant), tant en bouteilles qu'en vrac.
5. L'ASSOCIATION PROFESSIONNELLE: LA VFIG
(51) L'association "Vereniging van Fabrikanten van Industriële Gassen" (VFIG) a été créée le 23 mars 1989. Il n'y a pas eu d'acte notarié et l'association n'a pas non plus été inscrite au registre public des associations ("Verenigingenregister"). Conformément à l'article 5 de ses statuts, les membres de la VFIG sont des entreprises qui fabriquent et vendent des gaz industriels aux Pays-Bas. Conformément à l'article 4 de ces mêmes statuts, la VFIG a pour objet de défendre les intérêts de ses membres sur les questions techniques et les questions de sécurité relatives aux gaz industriels dans la Communauté européenne. Le secrétariat de la VFIG est dirigé par Teppema BV, qui est une filiale de Moret Ernst & Young (12) Management Consultants.
(52) Pendant la période en cause dans la présente procédure, les membres de la VFIG étaient les suivants:
<EMPLACEMENT TABLEAU>
(53) Conformément à l'article 7 des statuts, les membres se réunissent au moins une fois par an. Lors de ces réunions, les sociétés sont généralement représentées par leur directeur général et/ou par un autre directeur. Depuis 1990, il y a généralement eu de deux à quatre réunions par an, comme en témoigne la liste figurant au considérant 106 ci-dessous. Cette liste montre également que les sociétés les plus importantes assistent à toutes les réunions, alors que ce n'est pas le cas des sociétés plus petites. Un compte-rendu de chaque réunion est rédigé par le secrétariat; il figure à l'ordre du jour de la réunion suivante pour approbation. Au cours des réunions, les membres peuvent décider de créer des commissions. C'est ainsi qu'une commission technique a été créée en 1991; elle s'est réunie au moins une fois par an depuis lors.
(54) Moret Ernst & Young établit des statistiques trimestrielles sur les quantités de gaz liquides et en bouteilles vendues par les membres sur le marché néerlandais. Les données sont présentées sous forme agrégée, de telle sorte que chaque participant ne peut déterminer que sa propre part de marché. Les membres de la VFIG ne sont pas obligés de participer au système statistique, mais depuis 1993, la plupart d'entre eux le font.
6. LES MARCHES DES GAZ INDUSTRIELS ET MEDICAUX
a) Les marchés de produits en cause
(55) La présente décision ne concerne que les ventes de gaz sous forme liquide (en vrac) et en bouteilles. Les contrats "grande masse" n'entrent pas dans son champ d'application. En ce qui concerne les gaz fournis en vrac, elle s'applique essentiellement aux trois gaz atmosphériques, c'est-à-dire l'azote, l'oxygène et l'argon, ainsi qu'au dioxyde de carbone (CO2). Pour ce qui est des gaz fournis en bouteilles, elle s'applique essentiellement à l'azote, à l'oxygène, à l'argon, au dioxyde de carbone, à l'acétylène et aux mélanges d'argon. Chacun de ces gaz a plusieurs domaines d'application.
(56) L'azote constitue 78 % de notre atmosphère; son point de liquéfaction est de - 196 °C. Ses propriétés sont son inertie et, sous forme liquide, sa capacité d'absorption de la chaleur. Il est utilisé sous forme gazeuse pour protéger les liquides et les solides de la corrosion, des attaques microbiologiques, de la formation de mélanges explosifs et d'autres effets qui peuvent se produire lorsqu'ils sont en contact avec l'air. Il est traditionnellement utilisé dans la sidérurgie et dans les autres industries métallurgiques, dans les industries pétrolières et pétrochimiques et, de plus en plus souvent, dans l'agroalimentaire (congélation et conditionnement) et dans l'électronique. L'azote est fourni par pipeline, en vrac ou en bouteilles.
(57) L'oxygène constitue 21 % de notre atmosphère; son point de liquéfaction est de - 183 °. En raison de ses propriétés oxydantes, il est utilisé pour améliorer l'efficacité des processus de combustion et des réactions chimiques. L'oxygène technique ou industriel est essentiellement utilisé pour la production d'acier, d'autres métaux, de verre, de céramique, de produits chimiques, de pâte à papier et de papier, ainsi que pour le coupage et le soudage. Parmi les applications plus récentes figurent le traitement de l'eau et l'aquaculture. L'oxygène est fourni en pipeline, en vrac et en bouteilles. Il est également utilisé à des fins médicales sous une forme plus pure et plus chère; il est alors livré en bouteilles ou en vrac.
(58) L'argon est un gaz noble, qui ne constitue que 1 % de notre atmosphère; son point de liquéfaction est de - 186 °. Il est encore plus inerte que l'azote; c'est la raison pour laquelle il est utilisé dans les opérations de couverture, y compris comme gaz de protection pour le soudage et pour certains processus hautement inertes dans l'électronique et dans la métallurgie. L'argon est produit non seulement dans des unités de séparation de l'air, mais également en tant que sous-produit du processus de production de l'ammoniaque. Il est généralement fourni en vrac ou en bouteilles.
(59) Le dioxyde de carbone est essentiellement un sousproduit de processus chimiques, notamment de l'hydrogène. Les sociétés de gaz industriels achètent généralement du CO2 à des sociétés chimiques et pétrochimiques et le vendent en vrac et en bouteilles. Le CO2 est utilisé comme glace sèche pour la congélation, sous forme gazeuse pour la fertilisation en serres et la carbonatation des boissons gazeuses et de la bière, dans les extincteurs, comme gaz de protection pour le stockage des substances inflammables et explosives ainsi qu'à de nombreuses autres fins. Pour certaines applications, il est interchangeable avec l'azote.
(60) Les mélanges d'argon ne sont vendus qu'en bouteilles. Ils sont utilisés pour le soudage et le calibrage.
(61) L'acétylène est un gaz combustible, fabriqué à partir du carbure, avec une flamme très chaude. Il est utilisé pour le soudage, la découpe et à d'autres fins. Il est fourni en bouteilles sous basse pression.
(62) Il est généralement admis, dans ce secteur, que pour chaque gaz, chaque mode de distribution utilisé implique un marché de produits distinct (13). Les coûts supportés par le producteur - dont les principaux facteurs sont la main-d'œuvre, l'énergie, l'amortissement et le transport - varient considérablement selon le mode de distribution. C'est pourquoi les prix facturés aux consommateurs de gaz diffèrent considérablement selon le mode de livraison. Les gaz en bouteilles sont beaucoup plus chers que les mêmes gaz livrés sous forme liquide, qui sont à leur tour plus chers que ceux fournis par pipeline sous forme gazeuse. C'est pourquoi les coûts facturés aux clients pour le transport et la location, et éventuellement pour la sécurité et d'autres postes, varieront en fonction du mode de livraison. En outre, les gaz commercialisés selon les différents modes de livraison sont adaptés à des besoins différents des clients.
(63) Les accords concernés par la présente décision avaient notamment pour objet de fixer les prix de la fourniture de gaz en bouteilles en général. La Commission note que ces accords se sont donc appliqués à la fourniture de tous les gaz en bouteilles, et pas seulement des plus importants d'entre eux, décrits ci-dessus. Parmi ces autres gaz, citons l'hélium, l'oxyde nitreux, l'hydrogène, le tétrène, ainsi que différents autres gaz spéciaux et mélanges gazeux. De même, dans le secteur des gaz en vrac, les accords en cause ont affecté les conditions de livraison d'autres gaz, moins importants, notamment l'oxyde nitreux.
b) Marché géographique en cause
(64) Le marché géographique de la fourniture de gaz industriels est limité par le coût des transports évoquée au point a) ci-dessus et peut donc être considéré comme étant local ou régional. En 1997, dans l'affaire IV/M.926, Messer Griesheim/Hydrogas, la Commission avait basé son appréciation sur un rayon de transport effectif de 200 km.
(65) En 1989, dans le cadre d'une affaire (14) dans laquelle elle examinait les conditions appliquées à leurs clients par des fournisseurs de gaz industriels, la Commission avait établi que les gaz liquides simples, comme l'oxygène et l'azote, ont un rayon de distribution économique de 300 à 400 km, contre 600 à 800 km pour l'argon, un gaz plus coûteux. Les gaz atmosphériques en bouteilles ne sont généralement pas transportés au-delà d'un rayon de 100 km, à l'exception de l'argon, plus coûteux.
(66) Pour les gaz en bouteilles, cette estimation a été confirmée dans la présente affaire par Air Liquide qui, toutefois, a limité le rayon de distribution effectif à 150 km pour l'oxygène et l'azote liquides et à 400 km pour l'argon liquide. Praxair et BOC, en revanche, pensent que les estimations réalisées dans les années 80 sont toujours valables. ACP fixe le rayon de distribution effectif pour le CO2 liquide à 300 km.
(67) Dans le cas du transport par bateau, le rayon peut être beaucoup plus important, tout au moins pour les ventes entre les différents groupes; le dossier contient des informations indiquant que de l'argon liquide est livré des Pays-Bas en Grèce, et que du CO2 liquide peut être livré des Pays-Bas en Pologne et en Russie. Pour l'acétylène, qui est transporté uniquement en bouteilles, le rayon de distribution effectif est évalué de 300 à 400 km.
(68) En 1997, dans l'affaire IV/M.926 Messer Griesheim/Hydrogas, la Commission avait estimé que le marché géographique en cause pour l'entreprise commune concernée était local ou régional, en raison du coût élevé du transport sur de longues distances.
(69) Le fait que certaines sociétés de gaz, comme AGA pour ses gaz liquides et BOC jusqu'en décembre 1998, opèrent dans l'ensemble du Benelux permet de penser que le marché géographique en cause pourrait s'étendre au-delà des Pays-Bas. Toutefois, dans leur réponse aux demandes de renseignements de la Commission, tous les fournisseurs de gaz industriels aux Pays-Bas pensent que le marché géographique des gaz en bouteilles est un marché national. La principale raison qu'ils fournissent à ce propos est la réglementation nationale concernant les bouteilles, qui ne permet pas d'utiliser des bouteilles "belges" pour les ventes aux Pays-Bas, et inversement. L'Allemagne, elle aussi, possède ses propres normes (15). Parmi les autres arguments en faveur de l'existence de marchés nationaux, les sociétés citent également les différences de culture et de langue, ainsi que l'aspect important que constitue le service pour la fourniture de gaz en bouteilles.
(70) Pour les gaz liquides, la situation est moins claire. Il existe des différences entres les réglementations des Etats membres en ce qui concerne les réservoirs de stockage, mais une fois que ceux-ci sont installés, les fournitures transfrontalières ne semblent pas constituer un obstacle. Néanmoins, la plupart des sociétés ont déclaré à la Commission qu'elles considéraient que les marchés des gaz liquides étaient également des marchés nationaux, à l'exception d'AGA, de Praxair et d'ACP, qui estiment que le marché géographique dépend plus du rayon de distribution effectif.
(71) La Commission note que la production et la fourniture de gaz industriels dans la Communauté sont dominées par quelques grands groupes multinationaux, qui ont des filiales nationales dans la plupart des Etats membres. Ces filiales fournissent des gaz en vrac à des gestionnaires de dépôts locaux et à des clients finals, et des gaz en bouteilles à des clients finals, uniquement dans l'Etat membre dans lequel elles sont implantées. Ce sont également elles qui déterminent les prix et les autres conditions commerciales des livraisons dans cet Etat membre.
(72) Un client implanté dans un Etat membre aura des difficultés à obtenir des livraisons de filiales des groupes multinationaux situées dans d'autres Etats membres, et ce non seulement en raison du rayon de distribution effectif limité, mais également à cause de la division des responsabilités géographiques à l'intérieur des groupes (16). C'est pourquoi les prix et les conditions de vente diffèrent d'un Etat membre à l'autre, tant pour les gaz en vrac que pour les gaz en bouteilles, ainsi qu'en témoignent plusieurs documents figurant dans le dossier (17).
(73) Enfin, la Commission note que la structure de l'offre diffère d'un Etat membre à l'autre: Air Liquide est sans conteste le numéro un du marché en France et en Belgique, Messer et Linde détiennent une forte position en Allemagne, alors qu'aux Pays-Bas, Hoek Loos occupe la première place, suivie par AGA.
(74) La Commission en conclut donc que, aux fins de la présente décision, les marchés géographiques en cause pour les gaz en bouteilles et les gaz liquides se limitent aux Pays-Bas (18).
c) Structure du marché
(75) Le tableau 1 indique la taille globale, en 2001, de chacun des destinataires de la présente décision et donne une indication de son importance relative sur le marché néerlandais des gaz industriels et médicaux (en bouteilles et en vrac seulement) en 1996. Les chiffres fournis sont basés sur les réponses des sociétés à la demande de renseignements ainsi que sur des estimations effectuées par la Commission (19).
<EMPLACEMENT TABLEAU>
(76) Estimation des ventes annuelles totales des gaz industriels concernés aux Pays-Bas en 1994-1996:
<EMPLACEMENT TABLEAU>
(77) Les tableaux 3 et 4 donnent une indication des parts de marché des entreprises concernées pour chaque gaz (22) livré en bouteilles et sous forme liquide sur le marché néerlandais, en 1996:
<EMPLACEMENT TABLEAU>
<EMPLACEMENT TABLEAU>
(78) La Commission note que, depuis la fin des années 80, plusieurs nouveaux arrivants ont pénétré sur le marché néerlandais des gaz industriels: Air Liquide, Messer, BOC et Westfalen et - sur le marché du CO2 - Hydrogas. Sur un marché parvenu à maturité, où l'on ne peut s'attendre qu'à une faible croissance au-delà de celle générée par la croissance de l'économie en général, l'arrivée d'opérateurs supplémentaires est de nature à favoriser la concurrence. Les nouveaux arrivants tenteront d'obtenir une part suffisante du marché, alors que ceux en place défendront leur position. Ce renforcement de la concurrence est de nature à entraîner une baisse des prix facturés aux clients.
(79) Les données fournies par Hoek Loos, Air Products et AGA confirment qu'il y a effectivement eu une évolution négative du niveau des prix de tous les grands gaz industriels, tant pour les bouteilles que pour le vrac, depuis 1989. Cette évolution a touché tant les gaz pour lesquels la demande générale était en baisse (comme l'acétylène) que ceux dont les marchés étaient plus stables.
(80) La Commission note que, malgré l'arrivée de nouveaux opérateurs, les marchés des gaz en bouteilles aux Pays-Bas sont restés très concentrés. L'indice Herfindahl-Hirschmann (IHH) (23) a été supérieur à 1 800 pour chacun des gaz en bouteilles mentionné au tableau 3 ci-dessus pour chaque année de la période 1993-1997, et les cinq plus grandes entreprises, c'est-à-dire AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer, ont toujours détenu ensemble une part de marché supérieure à 80 %. Les variations des parts de marché de chaque société ont été faibles.
(81) Les marchés des gaz liquides, c'est-à-dire l'oxygène, l'azote, l'argon et le dioxyde de carbone, étaient également concentrés. Excepté pour l'oxygène, les cinq plus importantes sociétés ont toujours détenu ensemble une part de marché supérieure à 80 % pour chacune des années de la période 1993-1997. Leurs parts individuelles ont toutefois été moins stables que dans le cas des gaz en bouteilles. L'IHH a oscillé autour de 1 800.
(82) Il ressort du dossier de la Commission qu'Air Liquide, Hoek Loos, Air Products et AGA ont tenté de maintenir leurs parts de marché en pratiquant une politique de représailles mutuelles ou envers des sociétés tierces, à chaque fois qu'un de leurs clients était repris par un concurrent (24)
(83) A cet égard, il convient de noter que les fournisseurs de gaz sont très bien informés sur leurs clients respectifs. Du fait que les bouteilles et les réservoirs de gaz appartiennent généralement au fournisseur et portent la marque de cette société, un vendeur qui rend visite à un client ou à un client potentiel peut facilement voir quel est son fournisseur à ce moment-là. Un fournisseur peut donc réagir immédiatement si un client avec lequel il est sous contrat commence à acheter à l'un de ses concurrents. Les gros fournisseurs de gaz industriels conservent certainement, pour chaque concurrent, une liste des clients qu'ils ont acquis et perdus. Cette liste indique également les concessions en matière de prix qu'ils ont d'accepter en raison des offres concurrentielles faites par ce même concurrent (25). Cette connaissance, associée à une liste des clients potentiellement intéressants de ce concurrent, permet au fournisseur en question de dresser des "listes cibles" pour une campagne de représailles (26). Dans des documents AGA, cette politique de représailles est appelée l'"équilibre de la terreur" (27).
(84) Les campagnes de représailles ne sont pas nécessairement limitées au même marché géographique. Plusieurs documents figurant dans le dossier de la Commission font état de représailles transfrontalières, notamment afin de frapper un concurrent agressif sur son marché national, sur lequel il est parfois plus facile de trouver des cibles adaptées (28). D'autres documents mentionnent des campagnes au niveau du Benelux. Les campagnes de représailles transfrontalières sont généralement organisées, ou du moins coordonnées, par le groupe auquel le fournisseur de gaz en question appartient (29).
(85) Il est courant, dans ce secteur, que les prix et les autres conditions de livraison diffèrent selon les clients, tant pour les gaz en bouteilles que pour les gaz en vrac. Les sociétés acquièrent de nouveaux clients en leur offrant des prix bas et des conditions de livraison favorables. Ces prix et conditions sont augmentés chaque année, généralement au début de chaque année civile. Bien que chaque gaz soit un produit homogène et que les clients puissent facilement changer de fournisseur, des études faites par certaines entreprises du secteur des gaz industriels indiquent qu'il existe néanmoins une forte loyauté des clients envers "leur" fournisseur (30). Cela peut s'expliquer par l'importance du service dans le secteur des gaz industriels, qui comprend notamment des livraisons rapides et fiables ainsi que la qualité des conseils donnés aux clients en ce qui concerne l'utilisation du produit en question. Par conséquent, les clients tendent à garder leur fournisseur, en dépit des augmentations de prix régulières auxquelles ils doivent se soumettre. Ce n'est que lorsque la différence entre le prix payé et les prix et conditions beaucoup plus favorables offerts par des concurrents dépasse un certain niveau que les clients envisageront de changer de fournisseur. Le fournisseur en place doit alors soit s'aligner sur le prix proposé ou perdre son client. Dans les deux cas, il est susceptible d'exercer des représailles en offrant des conditions favorables à un client de son concurrent, avec des résultats similaires.
(86) On distingue donc deux niveaux de prix chez chaque fournisseur de gaz industriels en bouteilles: l'un variable, qu'il facture à ses clients existants et un prix minimal qu'il applique pour attirer de nouveaux clients. Cette différence existe aussi pour les prix des gaz industriels en vrac.
B. PROCEDURE
1. LES INSPECTIONS
(87) Les 11 et 12 décembre 1997, des vérifications ont été effectuées simultanément, et sans avertissement préalable, dans les locaux d'AGA, d'Air Liquide, d'Air Products et de Hoek Loos, conformément à l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17
(88) Dans le courant de l'année 1998, des vérifications ont été effectuées dans les locaux de BOC, Hydrogas, Messer et Westfalen, conformément à l'article 14, paragraphe 2, du règlement n° 17.
2. DEMANDES DE RENSEIGNEMENTS
(89) Le 24 juillet 1998, la Commission a adressé des demandes de renseignements, conformément à l'article 11 du règlement n° 17, à AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos, NTG et Praxair.
(90) Des demandes de renseignements, en vertu de l'article 11 du règlement n° 17, ont également été adressées à ACP et à IJsfabriek Strombeek le 14 septembre 1998, à Westfalen, BOC et Indugas le 12 octobre 1998, à nouveau à ACP le 13 octobre 1998, à Messer le 30 octobre 1998, à Hydrogas le 12 novembre 1998 et à nouveau à BOC le 22 décembre 1998.
(91) D'autres demandes, en vertu de l'article 11 du règlement n° 17, ont été adressées à AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer le 7 avril 1999 et à Hydrogas le 12 avril 1999.
(92) Le 20 janvier 1998, une demande de renseignements en vertu de l'article 11 du règlement n° 17 a été envoyée à l'association professionnelle VFIG.
(93) Les dernières demandes de renseignements en vertu de l'article 11 du règlement n° 17 ont été adressées à AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos, Messer, Westfalen, BOC et NTG le 22 février 2002, et à AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos, Messer, Westfalen et BOC le 5 juin 2002.
(94) Dans ces demandes de renseignements, la Commission priait les entreprises de lui fournir des informations sur les réunions qu'elles avaient eues avec leurs concurrents, des clarifications sur les documents trouvés dans leurs locaux au cours des vérifications ainsi que des données sur leurs augmentations générales de prix et autres conditions commerciales. Elle leur demandait également leur opinion sur la définition du marché, une estimation de leurs parts de marché, la valeur totale du marché ainsi que des données complémentaires sur leurs activités commerciales.
3. PROCEDURE ADMINISTRATIVE
(95) Le 9 juillet 2001, la Commission a engagé une procédure dans la présente affaire et a adopté une communication des griefs à l'encontre des huit entreprises suivantes opérant dans le secteur des gaz industriels et médicaux aux Pays-Bas: AGA Gas BV, Air Liquide BV, Air Products Europe Inc., BOC Group plc, NV W.A. Hoek's Machine- en Zuurstoffabriek, Messer Nederland BV, Nederlandse Technische Gasmaatschappij BV et Westfalen Gassen Nederland BV.
(96) Tous les destinataires de la communication des griefs ont fourni des observations écrites en réponse aux objections de la Commission.
(97) Les entreprises ont eu accès au dossier de la Commission par le biais d'un CD-ROM sur lequel ce dossier avait été copié et qui leur a été adressé peu après l'ouverture de la procédure.
(98) Une audition a eu lieu le 10 janvier 2002. Les entreprises suivantes y ont participé: AGA AB en tant que successeur d'AGA Gas BV, Air Liquide BV, Air Products Europe Inc. au nom d'Air Products Nederland BV, BOC Group plc, NV Hoek Loos, Messer Nederland BV et Westfalen Gassen BV.
(99) Ainsi qu'elles l'avaient fait dans leurs réponses écrites, deux des sociétés concernées, Air Liquide et Westfalen, ont contesté les faits exposés dans la communication des griefs, et quatre sociétés, AGA, Hoek Loos, Air Products et Messer, ont déclaré qu'elles ne les contestaient pas sur le fond. BOC a seulement fait quelques petites remarques à propos de sa très faible présence sur le marché pendant la période en cause et NTG n'a pas participé à l'audition.
(100) La plupart des entreprises présentes, qu'elles aient ou non contesté les faits, ont soulevé la question de la prescription. Elles alléguaient le manque de preuves matérielles dans le dossier de la Commission entre 1992 et 1994 et faisaient valoir que les infractions alléguées antérieures à 1992 étaient par conséquent prescrites, compte tenu du fait que les inspections surprises ont eu lieu les 11 et 12 décembre 1997. Ce point sera traité à la partie II, section E.
C. DETAIL DES INFRACTIONS
1. INTRODUCTION
(101) La Commission possède dans son dossier des preuves attestant que, au cours de la période 1989-1997, les principales entreprises fournissant des gaz industriels aux Pays-Bas se sont réunies régulièrement. Au cours de ces discussions, elles ont:
a) examiné et fixé le pourcentage ou le montant des augmentations qu'elles souhaitaient appliquer aux prix, ainsi que d'autres conditions commerciales pour les gaz en bouteilles - et parfois pour les gaz en vrac - fournis à leurs clients au cours de l'année suivante;
b) convenu de ne pas traiter avec les clients des autres sociétés pendant une période de deux à cinq mois chaque année, afin de pouvoir mettre en œuvre ces augmentations de prix;
c) convenu de respecter des prix minimaux dans leurs offres de fourniture de gaz en bouteilles et en vrac à de nouveaux clients, et
d) convenu de respecter d'autres conditions commerciales minimales pour la fourniture de gaz en bouteilles et en vrac. Ces conditions concernaient notamment les prix facturés aux clients pour la location et le transport. Elles ont, en outre, décidé d'introduire des frais de livraison pour les livraisons en vrac ainsi que des frais liés à la sécurité et à l'environnement pour les livraisons en bouteilles.
(102) Bien que tous ces points soient liés et qu'ils aient eu pour objectif commun de faire monter le niveau des prix des gaz industriels aux Pays-Bas, ou du moins d'éviter qu'il ne baisse, ils seront décrits et analysés séparément.
(103) La Commission possède la preuve qu'il y a eu des réunions régulières entre les principales entreprises du secteur des gaz industriels aux Pays-Bas pendant la période 1989-1997. Certains concurrents plus petits ont également participé à certaines d'entre elles. Au cours des réunions, les participants discutaient de diverses questions d'intérêt commun. Elles constituaient pour eux un moyen de discuter et de fixer, sur une base régulière, les augmentations de prix et les conditions commerciales qu'elles souhaitaient mettre en œuvre pour les gaz en vrac et les gaz en bouteilles. Des contacts bilatéraux entre les différentes sociétés ont complété ces réunions anticoncurrentielles.
(104) Au cours des premières années de l'entente, à partir de 1989, les fournisseurs de gaz industriel ont participé à des "réunions sécurité". Ces réunions avaient lieu dans des restaurants, plusieurs fois par an. Elles étaient parfois combinées avec des déjeuners et étaient organisées par l'une des entreprises en cause. Un projet d'ordre du jour était distribué, qui ne mentionnait pas de questions liées aux prix ou à d'autres conditions commerciales. Ainsi que nous le montrerons dans les paragraphes suivent, ces points non mentionnés dans l'ordre du jour étaient néanmoins également abordés au cours de ces réunions. Union Carbide, Hoek Loos, AGA, Air Products and Air Liquide ont participé à une ou plusieurs "réunions sécurité" au cours de la période 1989-1991. Air Products note que son représentant a cessé d'y participé en 1999 et que Union Carbide n'était pas toujours présente aux réunions auxquelles elle a elle-même participé (31).
(105) Les réunions des membres de la VFIG sont ensuite devenues le lieu privilégié pour les discussions et la fixation des prix et autres conditions de livraison. Les réunions officielles de la VFIG ont commencé en 1989 et elles avaient généralement lieu à Utrecht, où est situé le secrétariat de l'association. Le secrétaire invitait les sociétés membres à participer aux réunions en leur envoyant un projet d'ordre du jour avec le projet de compte rendu de la précédente réunion.
(106) A la suite d'une demande de renseignements en vertu de l'article 11 du règlement n° 17, la VFIG a fourni les comptes rendus des réunions qui avaient été organisées. Les participants à ces réunions sont indiqués dans le tableau suivant.
<EMPLACEMENT TABLEAU>
(107) A partir de 1995, les plus importantes entreprises du secteur, c'est-à-dire AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer, ont également commencé à se réunir de façon informelle, en dehors du cadre de la VFIG. Chacune des entreprises organisait à son tour une réunion, dans un restaurant de Breda, et également à Barendrecht en 1997. Il n'y avait aucun ordre du jour officiel pour ces réunions, et aucun compte-rendu officiel n'était rédigé. Elles avaient lieu plusieurs fois par an et se sont poursuivies au moins jusqu'à la fin de 1997 (32). Lors de ces réunions, les sociétés discutaient et fixaient les prix et d'autres conditions de livraison, ainsi que nous le montrerons ci-dessous.
(108) Le tableau ci-dessous indique la participation à ces réunions d'AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer, à Breda ou à Barendrecht. Il a été établi à partir des réponses communiquées par les sociétés.
<EMPLACEMENT TABLEAU>
(109) Au cours de la période 1989-1997, de nombreux contacts bilatéraux ont également eu lieu sous forme de lettres, télécopies et réunions. Ils ont permis de communiquer les décisions prises lors des réunions aux concurrents qui n'y avaient pas participé, mais aussi de discuter de la mise en œuvre des accords conclus. Dans le cadre de ces contacts, les prix et autres conditions de livraison consentis à des clients particuliers ont été évoqués et, dans certains cas, ont également fait l'objet d'un accord (33).
2. FIXATION DES AUGMENTATIONS DE PRIX
a) Résumé
(110) La Commission possède dans ses dossiers la preuve que, à partir de 1989, les concurrents ont régulièrement évoqué et déterminé les augmentations de prix qu'ils appliqueraient l'année suivante à leurs clients existants dans le secteur des gaz en bouteilles, et parfois aussi dans celui des gaz liquides. Les sociétés suivantes au moins ont pris part à ces pratiques illicites: Hoek Loos, Air Products et AGA, de 1989 à 1991 et de 1993 à 1997; Air Liquide et Messer: en 1990-1991 et de 1993 à 1997; Westfalen et BOC: en 1994-1995. b) Réunions des membres du cartel et contacts collusoires
(111) Au 24 novembre 1989, un accord était en vigueur qui avait été conclu par Hoek Loos, AGA et Air Products et qui avait pour objectif une augmentation du niveau des prix de leurs gaz en bouteilles d'environ 5 % en 1990.
(112) Chez AGA, la Commission a trouvé une note interne en anglais, datée du 24 novembre 1989 et portant la mention "confidentiel". Elle concernait une "réunion sécurité" et sa teneur était la suivante:
"Tous les participants se sont mis d'accord sur une augmentation des prix des gaz en bouteilles de +/- 5 %. HL 4,9 %, UC 5 %, AGA 5 %, AP 5 %.
Cette information sera communiquée à AL par [...] de HL.
Nous demanderons à AL de respecter une période de non-concurrence de 4-5 mois, à partir de maintenant. Cela vaut également pour HL, AGA, UC, AP. Cela signifie que nous ne devrons traiter qu'avec nos propres clients à partir de maintenant.
Nous établirons tous une proposition de barème pour les prix des gaz liquides. La réunion pour la discussion finale et l'accord sur ce barème est fixée au 12 janvier. Nous tenterons tous d'améliorer les prix des gaz liquides pour les clients existants.
VEUILLEZ DETRUIRE CETTE NOTE APRES L'AVOIR LUE." (34)
(113) Cet accord a permis à AGA d'augmenter ses prix pour 1990 dans une proportion plus grande qu'elle ne l'aurait fait s'il n'avait pas existé. Un mois seulement avant que l'accord n'ait été conclu, AGA envisageait toujours, selon une note interne datée du 30 octobre 1989 (qui a été trouvée chez Messer), d'augmenter ses prix pour 1990 de 4 % seulement (35).
(114) AGA a appliqué l'augmentation des prix de 5 %, ainsi qu'en témoignent les instructions internes données par la société le 28 novembre 1989, en vue de l'application de l'augmentation de prix de 5 % aux clients existants (36), dont la teneur est la suivante: "Objet: Augmentation des prix et surcoût remplissage ...
1. Prix gaz en bouteilles/location et transport
Seront augmentés de 5 % au 1er janvier.
Ce pourcentage s'applique également au transport. Le prix de la location subira une adaptation de 1 centime pour les bouteilles individuelles et de 2 centimes pour les bouteilles groupées. Ces adaptations du pourcentage sont dues à la nouvelle évolution escomptée pour 1990.
2. ...".
(115) Des représentants de Hoek Loos, Air Products, AGA et Air Liquide se sont à nouveau réunis le 22 novembre 1990 et ont convenu d'une augmentation des prix de 5 à 7 % à compter du 1er janvier 1991.
(116) Chez Air Liquide, la Commission a découvert des notes internes datées du 22 novembre 1990, dans lesquelles les "augmentations de prix" constituaient l'une des questions évoquées (37):
"1. Vrac - frais de livraison
2. Prix minimaux - augmentation
3. Augmentation des prix 1.1.1991 (5 à 7) en ce qui concerne 1:
HL: tous les clients contactés - à partir du 1.11.1990. Env. 30 réactions (c'est-à-dire, peu). 36 NLG
AP: lettre envoyée le 16.11. Tout le monde à partir du 1.12. 36 NLG. Déjà des réactions orales/écrites.
AGA: les gros clients n'acceptent pas (Nedstaal, AKZO); env. 50 % contactés. A partir du 1.12.
AL: Introduction de frais pour files d'attente. Frais de livraison à compter du 1.1. Arguments: législation sur le temps de conduite, files d'attente, carburant, augmentation du coût des assurances, réglementation plus stricte, coût de la formation.
Introduire systématiquement dans les nouveaux contrats. ...".
(117) Air Liquide n'a pas été capable de dire à la Commission dans quel cadre cette réunion avait eu lieu et qui y avait participé, en dehors de son directeur des ventes, [...], dont l'écriture a pu être identifiée (38). Dans sa réponse à la communication des griefs, elle a déclaré que ce document concernait uniquement des notes personnelles rédigées par [...] et n'apportait pas la preuve d'un quelconque engagement ferme pris par la société (39).
(118) La Commission ne juge pas cette réponse crédible, dans la mesure où les notes résument sans équivoque ce que les concurrents avaient l'intention de faire et qu'elles semblent avoir été prises lors d'une discussion.
(119) En 1990/1991, un accord était en vigueur qui avait été conclu au moins par AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos, Messer et concernait des augmentations des prix des gaz et des services de 6 % appliquées entre novembre 1990 et février 1991.
(120) Une note interne d'AGA (en anglais), datée du 27 novembre 1991 (40) et concernant Messer, dit ceci:
"Toutes les sociétés de gaz, y compris MG, ont convenu d'appliquer des prix planchers - prix de la location et du transport (voir annexe).
En réalité, MG applique des prix très inférieurs à ces prix: 20-30 %.
La conséquence en est une forte baisse des prix et/ou des clients perdus. Au cours des années passées, nous avons créé un marché sensible à la qualité du service. Des concurrents tels que MG donnent au marché l'habitude de se limiter à discuter les prix.
MG a également accepté des augmentations de prix de 6 % pour les gaz et les services.
MG a également accepté un cessez-le-feu en novembre décembre-janvier et février, afin que nous puissions avoir des négociations sur les augmentations des prix avec les clients.
Toutes les sociétés de gaz, y compris AGA, souffrent beaucoup de la façon incontrôlée dont MG se comporte sur le marché.
J'ai deux suggestions:
En discuter avec Stephan Messer
Préparer des représailles à court terme en Allemagne."
(121) La note mentionnée ci-dessus montre qu'entre-temps, Messer s'était associée au groupe des entreprises qui organisaient des réunions anticoncurrentielles. La Commission note que sur l'un des deux exemplaires de ce document (41), un représentant d'AGA a écrit à côté de "augmentation de prix de 6 %", "mais Messer a limité cela à chaque fois que c'était possible".
(122) Dans sa réponse à la communication des griefs, Messer estimait que la conclusion tirée à propos de sa participation aux accords sur la base de la note AGA mentionnée ci-dessus était excessive. D'après elle, cette note interne ne reflétait que l'interprétation personnelle d'AGA à propos de l'attitude de Messer et prouvait qu'AGA était consciente du fait que Messer poursuivait sa propre politique (42).
(123) Toutefois, la Commission note que Messer a dû communiquer avec ses concurrents afin de discuter avec eux de ses intentions quant à l'augmentation de prix convenue, ainsi que le montre le commentaire du représentant d'AGA mentionné au considérant 120 ci-dessus.
(124) En outre, la Commission sait que les représentants d'Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et AGA se sont réunis, probablement au début de 1991, afin de discuter du succès de la récente mise en œuvre d'une augmentation de prix de 6 % pour 1991.
(125) Une note manuscrite sur cette réunion, rédigée en néerlandais et découverte dans les locaux d'Air Liquide (43), dit entre autres ceci:
"Augmentation de prix
[...]: tout a augmenté
coût du transport
vrac BOC/Messer
bouteilles Westf./Messer/AL
HL: +/- 6 % pour vrac et bouteilles.
l'indice indique une croissance de 6 %
AGA: 20 % seulement du plan réalisé
l'indice indique une croissance de 6 % ...
Frais de livraison pour le vrac introduits par la plupart des sociétés ..."
(126) Dans sa réponse aux questions de la Commission, Air Liquide a déclaré que le document remontait à "environ 1990" et qu'il s'agissait de "notes personnelles de [...], probablement prises après un contact social" (44). Le représentant d'Air Products à cette réunion semble avoir été le directeur général [...].
(127) Toujours chez Air Liquide, la Commission a découvert une note manuscrite qui, d'après cette société, remonte à début 1991 (45). Elle dit: "AGA a baissé le niveau en dépit d'un accord d'augmentation des prix." (46)
(128) Lors de la réunion des membres de la VFIG du 16 décembre 1993, AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer se sont mises d'accord pour procéder à une augmentation des prix au 1er janvier 1994. Indugas, BOC et NTG ne participaient pas à cette réunion.
(129) La Commission a trouvé dans les locaux d'Air Liquide une note manuscrite relative à cette réunion, rédigée en néerlandais (47), qui dit notamment ceci:
"Augmentation de prix.
HL 4,5 % au 1.10.1994 - MG et AP augmenteront également leurs prix. Apparemment accord sur une augmentation au 1.1, mais pas sur un pourcentage ou un niveau minimal."
(130) Cela est confirmé dans des notes manuscrites remises par AGA (48): "16.12.1993 VFIG.
... ... ...
Augmentation de prix:
H-L: Lettre aux clients début janvier."
(131) Des observations manuscrites en anglais découvertes chez Air Products, et qui concernent cette même réunion, le confirment également:
"AGA 15 janvier
H/L la plupart des contrats au 1er janvier
Période plus longue au 1er février
OK négociations
Négociations déjà en cours avec les clients
a déjà été dit aux principaux clients
Tous les gros clients: + 4,5 %
Devons parfois négocier moins
...
Non-concurrence jusqu'au 1er avril" (49).
(132) Dans sa réponse à la communication des griefs, Air Liquide fait valoir que la note manuscrite découverte dans ses locaux à propos de la réunion VFIG du 16 décembre 1993 montre que son auteur s'est contenté d'écrire ce que les autres avaient dit (ce qu'indique la mention "apparemment") et ne prouve pas qu'il ait pris des engagements au nom d'Air Liquide. Air Liquide fait en outre valoir que la date, c'est-à-dire la mi-décembre, ne semble pas non plus réaliste pour une promesse contraignante d'appliquer une augmentation de prix au 1er janvier 1994 (50).
(133) La Commission note qu'Air Liquide a participé à la réunion mentionnée ci-dessus et a pris des notes précises sur ce que ses concurrents avaient dit.
(134) Dans sa réponse à la communication des griefs, Messer a déclaré que la participation à une réunion ne constituait pas, à elle seule, une preuve de la participation à un accord. Elle affirme que la note manuscrite trouvée chez Air Liquide fait simplement état du fait que Messer prévoyait d'augmenter ses prix (51). Messer n'a fait aucune déclaration sur le montant exact de l'augmentation; en outre, les augmentations de prix constituent une pratique courante à cette époque de l'année, l'inflation imposant alors un réajustement des prix. En outre, les notes trouvées chez AGA et Air Products ne font pas mention de Messer.
(135) Toutefois, la Commission note que Messer a participé à la réunion mentionnée ci-dessus et a fait part de ses intentions quant à un élément de sa politique commerciale, en l'occurrence les augmentations de prix.
(136) Une première discussion sur les augmentations des prix des gaz en bouteilles pour 1995 a eu lieu lors de la réunion VFIG du 14 octobre 1994. Les participants à cette réunion étaient AGA, Air Liquide, Air Products, BOC, Hoek Loos, Hydrogas, Messer, NTG et Westfalen.
(137) Des notes manuscrites sur cette réunion ont été trouvées chez AGA. Elles disent notamment ceci:
"Prix + 6 %
Contrats vrac 4,5 % (indice HL)
Energie + 6-8 %" (52).
(138) AGA a également remis des notes manuscrites datées du 17 octobre 1994, rédigées par un autre membre de son personnel, et qui concernaient cette même réunion :
"VFIG
Augmentation de prix
...
Prix gaz en bouteilles + 6 % + location et transport
Contrats vrac + 4,5 %, formule d'indice?
...
Non-concurrence: 1er décembre + 3-4 mois" (53).
(139) Ces augmentations des prix des gaz en bouteilles pour 1995 ont été élaborées dans le détail par AGA, Air Liquide, Air Products, BOC, Hoek Loos, Messer et Westfalen lors de la réunion VFIG du 18 novembre 1994.
(140) AGA a remis un tableau manuscrit (54) rédigé par son directeur des ventes [...], qui n'avait pas lui-même participé à la réunion. Ces notes avaient été prises lors d'une réunion interne d'information sur les accords conclus. Le tableau se réfère à cette réunion VFIG et contient la liste des augmentations des prix (en pourcentage) des gaz en bouteilles pour 1995, ainsi que les augmentations du prix de la location et du transport, pour Hoek Loos, AGA, Messer, Air Liquide, Air Products, BOC et Westfalen. Le tableau fait également état d'une période de non-concurrence de deux mois pour la mise en œuvre de ces augmentations. Il contient aussi une référence à des augmentations des prix des gaz liquides et des prix de location des réservoirs.
(141) Un deuxième tableau, trouvé chez Air Products (55), semble concerner la même réunion, bien que toutes les mentions des deux tableaux ne soient pas identiques. Air Products a tout d'abord cru que le tableau avait été rédigé lors d'une réunion avec des concurrents qui s'était tenue en 1995, mais a dit par la suite qu'il pouvait se référer à la réunion VFIG de novembre 1994 (56). Ce tableau fait lui aussi état d'augmentations des prix, du transport et de la location, ainsi que d'une période de non-concurrence pour la mise en œuvre de ces augmentations, pour Hoek Loos, AGA, Messer, Westfalen, BOC, Air Liquide et Air Products.
(142) A la lumière de ces preuves, le directeur général de BOC pour le Benelux a fait de sa propre initiative la déclaration suivante, qui a été consignée dans le rapport sur les vérifications et signée par lui:
"M. Celis se souvient qu'à la fin des deux réunions (VFIG) - fin 1994 et en 1995 -, le thème des prix à appliquer au cours de l'année à venir avait été abordé par d'autres, à sa surprise." (57)
(143) Dans sa réponse à la communication des griefs (58), BOC a également souligné que son directeur général, M. Celis, n'avait pas accepté le chiffre de 6 % proposé par les autres lors de la réunion mentionnée au considérant 139 ci-dessus, mais avait seulement indiqué qu'il projetait une augmentation de 5 %.
(144) Toutefois, la Commission note que BOC était représentée à la réunion mentionnée ci-dessus, que son directeur a fourni de son propre chef des informations sur les projets d'augmentation de prix de BOC et n'a à aucun moment pris ses distances par rapport aux discussions relatives à un accord sur une augmentation des prix. Le fait que M. Celis ait été surpris par ce qui s'est produit peut simplement montrer qu'il ne jouait pas un rôle très actif.
(145) Dans sa réponse à la communication des griefs, Westfalen a attiré l'attention sur le fait qu'elle n'avait jamais pris part de façon active à ces réunions et qu'elle ne savait pas que des questions telles que les augmentations de prix seraient évoquées, dans la mesure où elles ne figuraient pas à l'ordre du jour des réunions (59).
(146) La Commission note que Westfalen a participé aux réunions mentionnées ci-dessus et a donné à ses concurrents une indication sur ses intentions à propos d'un élément de sa politique commerciale, à savoir les augmentations de prix (60).
(147) Dans des commentaires manuscrits, trouvés chez Messer, relatifs à l'ordre du jour d'une réunion interne des membres du conseil d'administration qui a eu lieu le 25 octobre 1994, c'est-à-dire avant la réunion VFIG, figure la mention: "VFIG! Augmentation de prix 95?" (61). La Commission a trouvé chez Messer des instructions internes concernant une période de non-concurrence et des augmentations de prix pour janvier 1995 (62), et le rapport sur le premier trimestre de 1995 précise que les augmentations de prix ont été appliquées sans grande difficulté au 1er janvier 1995, avec cette mention: "nous avons reçu plus ou moins les mêmes nouvelles de nos concurrents" (63).
(148) Le 23 novembre 1995, AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer se sont réunies et ont conclu un accord collusoire sur des augmentations de prix pour 1996.
(149) Une note manuscrite trouvée chez Hoek Loos (64), datée du 23 novembre, donne les augmentations de prix de certains concurrents au 1er janvier 1996:
"AP augmente au 1/1/96 4,75 % gaz
0,75 location/mois/bouteilles.
1,50 location/gaz spéciaux/bouteilles.
0,50 transport bouteilles
AGA entre 5 et 8 % pour les produits
location?
transport?
MG gros clients >15 000 7,2 %
0,90 transport
0,02 location
4 groupes de chiffres d'affaires 7,2 % et 15 % petits clients
transport 0,90 et 2,50 par bouteille
location 0,01 et 0,05/bouteilles
Première quinzaine de décembre - lettre avec augmentation de prix
1/10 12,50 NLG 15,00 NLG MVT mention sur la facture
Jusqu'à ± 5 000 NLG - prix minimaux
AL 6-7,5 % produit
transport intérêt
location intérêt
...
BOC augmenterait les prix de 5 %
...".
(150) Dans sa réponse aux questions de la Commission, Hoek Loos a déclaré qu'elle n'était pas en mesure d'indiquer la date, les participants et le cadre de cette réunion et qu'elle doutait même qu'il s'agisse d'un rapport relatif à une réunion. Elle a déclaré qu'il pourrait s'agir d'informations transmises par ses propres vendeurs (65).
(151) La Commission estime que l'interprétation de Hoek Loos n'est pas crédible. Les informations très détaillées sur le comportement futur des concurrents ainsi que la mention d'une lettre qui n'avait pas encore été envoyée permettent de conclure qu'il s'agit d'un rapport relatif à une réunion à laquelle ont participé AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer. La date indique qu'il ne s'agissait pas d'une réunion qui a eu lieu en marge d'une réunion VFIG. La Commission pense qu'il s'agissait de l'une des réunions entre AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer qui ont eu lieu à Breda et à Barendrecht en 1995-1997. Elle note à cet égard que tant Air Products qu'AGA indiquent qu'une réunion a eu lieu le 23 novembre 1995 à Breda.
(152) Bien que BOC soit mentionnée brièvement dans le rapport, cette société n'a pas participé, à la connaissance de la Commission, à ces réunions de Breda et de Barendrecht.
(153) Hoek Loos, Air Products, Air Liquide, AGA et Messer se sont réunies à la fin de 1996, peut-être le 2 octobre 1996, et ont conclu un accord collusoire sur une augmentation du prix des gaz en bouteilles pour 1997.
(154) Un document manuscrit et non daté trouvé chez Air Products (66), que cette société estime avoir été rédigé à la fin de 1996, constitue également un compte-rendu d'une réunion entre concurrents. Après avoir mentionné une discussion sur le marché entre Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et AGA, la note conclut que la VFIG déclarera l'année suivante (= 1997) année du transport et que le transport sera inclus dans l'indice: + 0,2-0,3 %. La Commission pense qu'il s'agit de l'indice Hoek Loos pour les gaz en vrac mentionné dans des documents antérieurs (67). En ce qui concerne les gaz en bouteilles, les prix seraient augmentés de 4,5 % entre novembre et mars. Il y est également fait mention d'une augmentation de 6 à 8 % pour Air Liquide.
(155) Tant la période de novembre à mars que l'augmentation générale des prix de 6 à 8 % mentionnées ci-dessus figurent également dans une "Proposition gaz en bouteilles 1997" datée du 28 septembre 1996 et découverte chez Hoek Loos (68). Cette proposition correspond également complètement, à cet égard, aux notes manuscrites trouvées chez Air Products (69) et chez Messer (70).
(156) En réponse à la demande de renseignements de la Commission, Hoek Loos a affirmé que cette proposition, une fois adoptée, devait être transmise à ses propres vendeurs et n'avait donc qu'un usage exclusivement interne (71).
(157) Compte tenu de ce qui a été exposé ci-dessus, cette déclaration n'est pas crédible. En effet, les prix modifiés ont effectivement été annoncés au personnel de Hoek Loos le 7 octobre 1996 (72), mais il existe de fortes présomptions pour qu'ils aient également été discutés avec la concurrence. La Commission pense que cette discussion a eu lieu à Breda le 2 octobre 1996, une date mentionnée par Air Liquide, Air Products et AGA (73), qui se situe entre la date à laquelle Hoek Loos a rédigé sa proposition et la date à laquelle elle l'a communiquée à son propre personnel.
3. PERIODES ANNUELLES DE NON-CONCURRENCE
a) Résumé
(158) Les mêmes sociétés qui se sont réunies régulièrement à partir de 1989 et qui se sont mises d'accord sur des augmentations de prix annuelles pour leurs clients existants, ainsi qu'il a été dit à la section C, titre 2, ont également convenu, au cours de ces réunions, de respecter des "cessez-le-feu" annuels de plusieurs mois pour mettre en œuvre les augmentations en question. Dans son dossier, la Commission possède la preuve que les sociétés suivantes ont pris part à des accords collusoires concernant ces périodes de non-concurrence: Hoek Loos, Air Products et AGA: de 1989 à 1991 et de 1993 à 1997; Air Liquide et Messer: en 1990/1991 et de 1993 à 1997; Westfalen et BOC: en 1994/1995. La période du 1er novembre 1996 au 1er mars 1997 concernait les clients "vrac" et les clients "bouteilles", alors que les périodes précédentes ne concernaient que les clients "bouteilles".
b) Réunions des membres du cartel et contacts collusoires
(159) Le 24 novembre 1989, un accord conclu entre Hoek Loos, AGA et Air Products sur des augmentations de prix était en vigueur. Afin de mettre en œuvre ces augmentations, les sociétés en cause s'étaient également mises d'accord sur une période de non-concurrence de 4 à 5 mois.
(160) Nous avons cité au considérant 112 une note interne en anglais, trouvée chez AGA, portant la date du 24 novembre 1989 et la mention "confidentiel", et qui concernait une "réunion sécurité". Elle disait ceci:
"Tous les participants se sont mis d'accord sur une augmentation des prix des gaz en bouteilles de +/- 5 %. HL 4,9 %, UC 5 %, AGA 5 %, AP 5 %.
Cette information sera communiquée à AL par [...] de HL.
Nous demanderons à AL de respecter une période de non-concurrence de 4-5 mois, à partir de maintenant. Cela vaut également pour HL, AGA, UC, AP. Cela signifie que nous ne devrons traiter qu'avec nos propres clients à partir de maintenant. (...) VEUILLEZ DETRUIRE CETTE NOTE APRES L'AVOIR LUE." (74).
(161) Ainsi qu'en témoignent les instructions internes déjà citées au considérant 114 ci-dessus, qui ont été données le 28 novembre 1989, AGA a utilisé cette période pour appliquer l'augmentation de prix de 5 % à ses clients existants et leur expliquer que ses concurrents feraient sans doute de même. Toutefois, si des concurrents devaient lancer une offensive entraînant des concessions sur les prix, celles-ci devraient être signalées à la direction (75).
(162) En 1990/1991, un accord conclu au moins entre AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer, et qui concernait une période de non-concurrence pour l'application des augmentations de prix pour 1991, était en vigueur.
(163) Une note interne d'AGA (en anglais) datée du 27 novembre 1991 (76) et qui concernait Messer, a déjà été citée au considérant 120. Elle disait ceci:
"Toutes les sociétés de gaz, y compris MG, ont convenu d'appliquer des prix planchers - prix de la location et du transport (voir annexe).
En réalité, MG applique des prix très inférieurs à ces prix: 20-30 %.
La conséquence en est une forte baisse des prix et/ou des clients perdus.
Au cours des années passées, nous avons créé un marché sensible à la qualité du service.
Des concurrents tels que MG donnent au marché l'habitude de se limiter à discuter les prix.
MG a également accepté des augmentations de prix de 6 % pour les gaz et les services.
MG a également accepté un cessez-le-feu en novembre décembre-janvier et février, afin que nous puissions avoir des négociations sur les augmentations des prix avec les clients.
Toutes les sociétés de gaz, y compris AGA, souffrent beaucoup de la façon incontrôlée dont MG se comporte sur le marché.
J'ai deux suggestions:
En discuter avec Stephan Messer
Préparer des représailles à court terme en Allemagne."
(164) Dans sa réponse à la communication des griefs, Messer a fait valoir que la note AGA du 27 novembre 1991 indique que celle-ci pensait que Messer ne respectait pas les "accords", et a nié avec force avoir jamais pris part à aucun accord (77).
(165) La Commission note toutefois que Messer a d'avoir, à l'époque, la ferme intention d'appliquer la période de non-concurrence, même si elle ne l'a pas effectivement fait.
(166) AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer avaient conclu un accord sur une période de nonconcurrence pour l'application des augmentations de prix, qui allait de décembre 1993 au 1er avril 1994.
(167) Des observations manuscrites en anglais trouvées chez Air Products ont déjà été citées au considérant 131. Elles disent ceci:
"AGA 15 janvier
H/L la plupart des contrats au 1er janvier
Période plus longue au 1er février
OK négociations
Négociations déjà en cours avec les clients
a déjà été dit aux principaux clients
Tous les gros clients: + 4,5 %
Devons parfois négocier moins
...
Non-concurrence jusqu'au 1er avril" (78).
(168) Lors des réunions de la VFIG d'octobre et de novembre 1994, les augmentations de prix pour 1995 ont été évoquées et convenues par AGA, Hoek Loos, Air Liquide, Air Products, Messer, BOC et Westfalen, avec une période de non-concurrence allant du 1er décembre 1994 au 1er janvier 1995.
(169) AGA a communiqué des notes manuscrites, datées du 17 octobre 1994 et déjà citées au considérant 138, rédigées par un autre membre de son personnel et qui concernaient la réunion d'octobre:
"VFIG
Augmentation de prix
...
Prix gaz en bouteilles + 6 % + location et transport
Contrats vrac + 4,5 %, formule d'indice?
...
Non-concurrence: 1er décembre + 3-4 mois" (79).
(170) En ce qui concerne la réunion VFIG du 18 novembre 1994, AGA a remis un tableau manuscrit (déjà cité au considérant 140) (80), rédigé par son directeur des ventes, [...], qui n'a pas lui-même participé à cette réunion. Ses notes ont été prises lors d'une réunion d'information sur les accords conclus. Le tableau se réfère à la réunion VFIG en question et indique le pourcentage des augmentations de prix des gaz en bouteilles pour 1995, ainsi que les augmentations des prix de la location et du transport, pour Hoek Loos, AGA, Messer, Air Liquide, Air Products, BOC et Westfalen. Ce délai fait également mention d'une période de non-concurrence de deux mois, du 1er décembre 1994 au 31 janvier 1995.
(171) Un deuxième tableau, trouvé chez Air Products et déjà mentionné au considérant 141 (81), semble concerner la même réunion, bien que toutes les données des deux tableaux ne soient pas identiques. Air Products a tout d'abord cru que ce tableau avait été rédigé lors d'une réunion avec ses concurrents qui s'était tenue en 1995, mais a ensuite admis qu'il pouvait remonter à la réunion VFIG de novembre 1994 (82). Ce tableau indique des augmentations des prix des produits ainsi que des prix du transport et de la location, et aussi le délai de nonconcurrence applicable, pour Hoek Loos, AGA, Messer, Westfalen, BOC, Air Liquide et Air Products.
(172) Dans sa réponse à la communication des griefs, Westfalen fait valoir que la Commission n'a pas montré que Westfalen avait conclu de propos délibéré un accord avec ses concurrents sur une période de non-concurrence lors de deux réunions VFIG qui ont eu lieu à la fin de 1994. Westfalen estime que rien ne prouve l'existence d'un comportement susceptible d'être qualifié d'accord ou de pratique concertée (83).
(173) Toutefois, la Commission note que Westfalen était présente lors de cette réunion avec ses concurrents et qu'elle a pris part à la discussion sur les augmentations de prix et la période de non-concurrence.
(174) Hoek Loos a d'ailleurs effectivement respecté cette période de non-concurrence qui allait du 1er décembre 1994 jusqu'au 31 janvier 1995.
(175) Cette période est également mentionnée dans un compte-rendu interne de réunion du 15 décembre 1994 trouvé chez Hoek Loos, où il est dit ceci, en réponse à une question:
"D'après certaines rumeurs, il y aura un cessez-le-feu entre les différents fournisseurs de gaz industriels au 1er décembre 1994. HL augmentera ses prix. En décembre et en janvier, nous ne contacterons pas les clients des autres fournisseurs. Si quelqu'un nous attaque, il est évident que nous répliquerons." (84)
(176) Messer a également respecté la période de non-concurrence du 1er décembre 1994 au 31 janvier 1995.
(177) Chez Messer, la Commission a trouvé des instructions internes concernant une période de non-concurrence dans le cadre de la mise en œuvre des augmentations de prix de janvier 1995.
"Information importante: Augmentation de prix leader du marché: 6 %.
Non-concurrence décembre 1994 et janvier 1995." (85)
(178) Plusieurs documents trouvés chez Messer contiennent également des références à des augmentations de prix, à la VFIG et à une période de non-concurrence dans plusieurs documents, parmi lesquels un rapport manuscrit sur la réunion des membres du conseil d'administration du 22 novembre, qui dit ceci: "VFIG - ^P, non-concurrence, "pressions" " (86) et une note datée du 26 janvier, qui porte la mention "non-concurrence + /-?" (87). Dans le rapport d'activité de cette société pour le premier trimestre de 1995, il est dit que les augmentations de prix ont été mises en œuvre sans difficulté majeure à compter du 1er janvier 1995, avec cette mention: "nous avons reçu des nouvelles plus ou moins identiques de nos concurrents" (88).
(179) Air Liquide a également respecté la période de nonconcurrence du 1er décembre 1994 au 31 janvier 1995.
(180) Air Liquide a remis une note interne relative aux augmentations de prix pour 1995 dans laquelle instruction est donnée aux vendeurs de ne s'occuper que de leurs propres clients (afin de respecter la période de nonconcurrence): "Du 1er décembre au 31 janvier, nous nous concentrerons sur les accords de l'année. (gericht bezig houden met de jaarafspraken)" (89).
(181) Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer ont conclu un accord de non-concurrence pour la période allant de novembre 1996 jusqu'à mars 1997. Il s'appliquait non seulement aux clients "bouteilles", mais également aux clients "vrac".
(182) Des références à une période de non-concurrence pour l'application des augmentations de prix de 1997 ont été trouvées chez Messer: "non-concurrence: 1er novembre - 1er mars" (90).
(183) Dans différentes notes manuscrites trouvées chez Messer (91) et datant de la même période (92), il est fait référence à la proposition de Hoek Loos d'augmenter les prix, ainsi qu'à la période du 1er novembre au 1er mars. Cette note contient également les termes "clients vrac: ne pas toucher!" ce qui semble indiquer que la suspension de la concurrence en 1996-1997 ne concernait pas seulement les clients "bouteilles" mais également les clients "vrac".
(184) La Commission prend note de l'affirmation de Messer selon laquelle cette référence n'avait rien à voir avec une période de non-concurrence et la note a été rédigée à l'occasion d'une réunion à laquelle participait uniquement Hoek Loos (93).
(185) Toutefois, des notes manuscrites trouvées chez Air Products et rédigées à l'occasion d'une réunion avec des concurrents, que Air Products situe à la fin de 1996, déclarent également ceci:
"- ne pas toucher aux clients des autres - vrac 1er novembre - 1er mars" (94).
(186) Le compte-rendu d'une réunion interne d'Air Liquide du 8 novembre 1996 déclare ceci à propos des augmentations de prix: "se concentrer sur les clients existants pour les augmentations de prix" (95).
(187) Dans sa réponse à la communication des griefs, Air Liquide fait valoir que la mention "se concentrer sur les clients existants pour les augmentations de prix" figurant dans le compte rendu d'une réunion interne d'Air Liquide constitue uniquement un exemple de la façon dont elle se comportait sur un marché saturé, en soupesant les avantages et les inconvénients de l'option "niveau des prix" par rapport à l'option "parts de marché". Cette note interne indique tout simplement un comportement autonome (96).
(188) Toutefois, la Commission note qu'il est clair que les différents documents sur la concurrence mentionnés aux considérants 182 à 185 et trouvés dans les locaux des sociétés en question, se réfèrent à la même période.
4. FIXATION DE PRIX MINIMAUX
a) Résumé
(189) Les concurrents se sont mis d'accord sur des barèmes successifs de prix minimaux pour les gaz en bouteilles. En 1989/1990, un barème de prix minimaux pour les gaz liquides a été fixé d'un commun accord par Air Liquide, AGA, Hoek Loos et Air Products. En 1990/1991 et de 1994 à 1997, Hoek Loos, Air Liquide, Air Products et AGA ont fixé des barèmes de prix minimaux pour les gaz en bouteilles. Messer s'y est associée en 1994/1997 et Westfalen en 1994/1995. Le principal objectif de ces barèmes était de définir des seuils lorsque les entreprises étaient en concurrence pour le même client.
b) Réunions des membres du cartel et contacts collusoires
(190) Hoek Loos, AGA, Air Products et Air Liquide ont eu des contacts collusoires sur des prix minimaux pour les gaz liquides à partir de la fin de 1989 ou au début de 1990.
(191) Nous avons déjà cité aux considérants 112 et 160, une note interne d'AGA, datée du 24 novembre 1989 et portant la mention "confidentiel", qui concernait une "réunion sécurité" (97). Elle contenait la phrase suivante:
"Nous élaborerons tous une proposition de barème pour les prix des gaz liquides. La réunion pour la discussion finale et l'accord sur ce barème est fixée au 12 janvier."
(192) Ce barème a été trouvé lors des vérifications chez Air Liquide (98), il était imprimé sur du papier AGA et était intitulé "Bulkgassen - prijsstaffel gegevens" (gaz en vrac - échelles de prix). Pour deux articles, le barème ne contient pas de prix, mais les mots (en néerlandais) "La proposition Hoek Loos suivra".
Ce barème concerne les gaz suivants: azote, oxygène, argon et dioxyde de carbone, avec des prix différents selon le secteur d'utilisation. Il contient également un mécanisme de prix pour la location de réservoirs [voir section C, titre 6, point e), ci-dessous].
(193) Une note interne d'AGA datée du 26 juin 1990 mentionne également la possibilité d'appliquer des prix planchers pour les gaz liquides. Ces prix "ne seraient applicables que dans les cas dans lesquels les "cinq anciens" sont en concurrence" (99).
(194) En octobre 1990, Hoek Loos, Air Liquide, AGA et Air Products se sont mises d'accord sur un système de prix planchers pour les gaz en bouteilles.
(195) La Commission a trouvé chez Hoek Loos une lettre rédigée en anglais et adressée à Messer Griesheim, à Francfort. Elle était signée par le président-dircteur général, datée du 18 octobre 1990 et avait été envoyée par télécopie le même jour. Sa teneur était la suivante:
"Cher Monsieur Willheim,
Comme suite à notre conversation téléphonique, je vous adresse par la présente notre barème pour les six mois à venir.
Toutes les sociétés de notre pays, à l'exception de MG, ont confirmé qu'elles respecteraient strictement les prix planchers figurant dans le barème ci-joint. Pour les livraisons liquides, nous introduirons des frais de livraison, comme expliqué dans le barème. Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir vous entretenir de ce barème avec M. Messer et de nous faire savoir si MG est disposée à s'y associer.
Si vous avez des questions, n'hésitez pas à me contacter.
Formule de politesse,
J.P. Jager Bruining (100)"
(196) Il y a en annexe un document sans titre et sans date rédigé en néerlandais, ainsi qu'un barème intitulé (en néerlandais) "Barème des prix des gaz en bouteilles au 1er octobre". Il contient des prix pour différentes quantités des gaz suivants (environ 10 prix pour chaque gaz): acétylène, argon, oxygène, tétrène (101) et azote. Il contient également des prix relatifs aux conditions de livraison: location des bouteilles et coût du transport.
(197) Le texte du document sans titre ni date est le suivant:
"A compter d'aujourd'hui, certains accords sont en vigueur.
1. Aucun prix ni aucune condition inférieurs au barème des prix minimaux ci-joint ne seront convenus avec les clients.
2. Dans le courant de 1990, les prix et conditions consentis aux clients qui sont inférieurs à ce niveau seront augmentés de façon à l'atteindre, voire à le dépasser si le pourcentage mentionné au point 4 est supérieur.
3. Au 1er janvier 1991, aucun prix ni aucune condition inférieurs aux prix minimums joints ne seront possibles.
4. Au 1er janvier 1991, les prix et conditions consentis aux clients qui sont supérieurs aux prix planchers seront augmentés de 5 à 7 %.
5. Les offres en cours qui ne respectent pas les conditions mentionnées ci-dessus ne sont plus valables.
6. Pour les livraisons de gaz en vrac et à partir de ce jour: pour les nouveaux clients, frais de livraison de 34,00 à 36,00 NLG. Pour les clients existants, ces frais seront introduits en octobre 1990. Ils ne s'appliquent pas au dioxyde de carbone pour le secteur de l'horticulture. ...
Motifs à l'origine de ces frais: files d'attente, énergie, législation sur le temps de conduite. Motifs du niveau des prix: l'érosion énorme des prix est devenue inacceptable, compte tenu notamment de l'évolution des coûts.
Pour les clients communs, le premier [fournisseur qui est] confronté au problème prendra l'initiative du contact.
PJ: barème.".
(198) Des copies de ce même barème ont été trouvées dans les locaux d'AGA (102), Air Liquide (103) et Air Products (104), chez ces deux dernières sociétés avec le document non titré et non daté mentionné au considérant 197.
(199) La Commission dispose également de preuves montrant qu'AGA a utilisé les prix minimaux convenus pour les gaz en bouteilles en 1991 pour évaluer le comportement des concurrents qui faisaient des offres à des clients AGA (105). Dans une télécopie confidentielle d'AGA à Air Liquide datée du 31 octobre 1990, AGA cite plusieurs cas dans lesquels des vendeurs d'Air Liquide auraient proposé des prix inférieurs aux prix planchers à des clients AGA (106).
(200) Des représentants de Hoek Loos, Air Products, AGA et Air Liquide se sont réunis le 22 novembre 1990 et ont notamment évoqué l'augmentation des prix minimaux.
(201) Au considérant 116, nous avions déjà mentionné des notes internes trouvées chez Air Liquide et datées du 22 novembre 1990, dans lesquelles il était notamment question de "prix minimaux" (107):"
"1. Vrac - frais de livraison
2. Prix minimaux - augmentation
3. Augmentation des prix 1.1.1991 (5 à 7) ..."
(202) Une note interne [en anglais, concernant Messer et datée du 27 novembre 1991 (108)] dont deux exemplaires ont été trouvés chez AGA et qui a déjà été citée au considérant 120, confirme que, en 1990-1991, il existait un accord sur l'application de prix planchers conclu au moins par AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer. Cette note dit ceci:
"Toutes les sociétés de gaz, y compris MG, ont convenu d'appliquer des prix planchers - prix de la location et du transport (voir annexe). En réalité, MG applique des prix très inférieurs à ces prix: 20-30 %. La conséquence en est une forte baisse des prix et/ou des clients perdus. Au cours des années passées, nous avons créé un marché sensible à la qualité du service. Des concurrents tels que MG donnent au marché l'habitude de se limiter à discuter les prix. ... Toutes les sociétés de gaz, y compris AGA, souffrent beaucoup de la façon incontrôlée dont MG se comporte sur le marché.
J'ai deux suggestions:
En discuter avec Stephan Messer
Préparer des représailles à court terme en Allemagne."
(203) Les commentaires manuscrits figurant sur l'un des exemplaires de cette note disent ceci:
"1) Parler à Messer [directeur général de MG] pour qu'il respecte les prix planchers. 2) Si cela ne marche pas, parler à Wielands, avec [...] [AGA Gas GmbH]. Avertir d'une offensive imminente de notre part. 3) Après deux semaines au maximum, offensive."
(204) Ce document montre également que le non-respect des accords sur les prix planchers pouvait entraîner des mesures de rétorsion, qui n'étaient pas nécessairement limitées aux Pays-Bas.
(205) Lors des réunions VFIG de mars et d'octobre 1994, des "échelles de prix" et des "prix minimaux" pour les gaz en bouteilles, à appliquer aux petits clients, ont été évoqués en vue de la conclusion d'un accord, au moins par AGA, Air Liquide, Hoek Loos, Air Products, Westfalen et Messer.
(206) Des notes manuscrites trouvées chez AGA (109) montrent que les "échelles de prix" ont à nouveau été évoquées lors des réunions VFIG de mars et d'octobre 1994 et que, au cours de cette dernière réunion, Hoek Loos a présenté une échelle de prix pour les gaz en bouteilles. Des notes manuscrites datées du 17 octobre 1994 et rédigées par deux personnes différentes chez AGA ont été communiquées par cette société. Elles confirment que des "prix minimaux" ont été discutés lors de la réunion d'octobre (110).
(207) D'après les explications fournies par AGA (111), les échelles de prix pour les petits acheteurs de gaz en bouteilles ont été présentées par Hoek Loos en marge de la réunion VFIG d'octobre 1994 mentionnée ci-dessus. Dans sa réponse à la communication des griefs, AGA souligne que rien ne permet d'affirmer, et encore moins de prouver, qu'il y a eu accord sur ces échelles de prix pour 1994 (112). La Commission note, toutefois, que cette liste a aussi été trouvée dans les locaux de trois sociétés.
(208) Un exemplaire a été trouvé chez Westfalen (113), dans un dossier portant la mention "VFIG 1995". Un autre a été trouvé chez Air Liquide (114), dans un dossier marqué "VFIG 1994", et un troisième chez Messer (115). Tous les trois comportent le même barème imprimé de prix minimaux, daté d'octobre 1994 et intitulé "barème pour les petits clients "bouteilles" ". Le barème trouvé chez Messer contient également un barème manuscrit ajouté en 1996 (considérant 234). Le fait que ces sociétés aient conservé ces propositions dans leurs dossiers pendant plusieurs années signifie qu'elles avaient de l'importance pour elles.
(209) L'existence de l'accord de 1995 est également confirmée par le fait que le barème interne de prix minimaux trouvé chez Air Liquide et daté du 10 mars 1995 (116) correspond aux prix minimaux mis en œuvre par AGA au 1er juillet 1995 (117).
(210) Dans sa réponse à la communication des griefs, Air Liquide souligne que les objectifs pour 1995 mentionnés dans son barème interne sont inférieurs aux prix minimaux également mentionnés dans ce barème. A cet égard, Air Liquide estime que l'on ne peut retenir contre elle le fait que ses concurrents souhaitaient l'informer de leurs intentions (118).
(211) Dans sa réponse à la communication des griefs (119), AGA souligne que les initiatives relatives aux petits clients concernaient un segment du marché des gaz en bouteilles seulement et qu'elles différaient donc des autres tentatives de fixation de prix planchers. Comme les petits clients ne constituaient qu'une partie limitée de la clientèle d'AGA, cela réduit considérablement le champ de l'infraction. AGA reconnaît (120) néanmoins qu'elle a appliqué les prix minimaux convenus pour les petits clients au 1er juillet 1995.
(212) Dans sa réponse à la communication des griefs, Westfalen déclare ne pas savoir comment cette liste est entrée en sa possession. Elle affirme qu'il est très probable qu'elle lui a été remise lors de la réunion VFIG du 14 octobre 1994, mais cela ne signifie toutefois pas qu'elle ait été effectivement d'accord sur les prix figurant dans ce barème. Westfalen affirme également qu'elle pense que son attitude peu coopérative lors des réunions VFIG a incité les grandes entreprises à se réunir en dehors de ce cadre (121).
(213) La Commission possède effectivement des preuves montrant que des réunions ont été organisées en dehors du cadre de la VFIG ultérieurement, et que des accords collusoires sur des prix minimaux pour les gaz en bouteilles destinés aux petits clients ont été conclus à Breda et à Barendrecht, du début de 1995 jusqu'à 1997, par AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer.
(214) Dans sa réponse aux questions de la Commission, AGA a déclaré ceci:
"Début 1995, une réunion a été organisée, en dehors du cadre de la VFIG, dans le but d'approuver des prix minimaux. [... un cadre dirigeant d'AGA] y a participé. Il a ensuite participé à plusieurs autres réunions à Breda, où le nombre des participants était plus restreint. Il s'agissait de Hoek Loos, Air Liquide, Air Products, Messer [et AGA]. Indugas a peut-être été invitée, mais elle n'était pas présente. Lors de cette réunion, des prix minimaux pour les petits clients ont effectivement été fixés." (122)
(215) AGA ajoute que le nombre des réunions organisées à Breda, puis ensuite à Barendrecht, était de deux à trois par an, selon les années. Il n'y avait aucun ordre du jour et peu de notes étaient prises. AGA pense qu'Indugas ou Praxair (qu'elle considère comme une seule et même société) n'y a participé qu'une fois, mais qu'Indugas avait toujours été invitée par la société organisatrice. Son impression générale est que les prix minimaux fixés n'étaient pas acceptés par le marché et n'ont donc pu être appliqués. A la demande de la Commission, AGA a fourni une liste des dates des réunions établie à partir d'agendas, de notes de frais et d'autres données disponibles (123).
(216) Air Products a confirmé à la Commission que des discussions ont eu lieu à des dates autres que celles des réunions VFIG, parfois dans le cadre de la préparation ou du suivi de ces réunions:
"Pour autant que AP puisse s'en souvenir, des réunions informelles au cours desquelles des discussions de ce dernier type ont eu lieu étaient organisées deux à trois fois par an. Ont participé à ces réunions, sur une base plus ou moins régulière, tout au moins au cours des dernières années, des représentants de AP, Hoek Loos, AGA, Messer Griesheim et Air Liquide. Il n'y avait pas d'ordre du jour officiel, les questions évoquées étaient celles auxquelles le secteur était confronté; elles comprenaient des thèmes tels que l'évolution générale du marché, l'évolution des prix et les coûts du secteur."
D'après Air Products, des réunions de ce type ont lieu à Breda en 1995-1997. Elle a fourni à la Commission une liste des dates de ces réunions (124).
(217) La Commission a également interrogé Indugas sur les réunions qui ont eu lieu à Breda et à Barendrecht. Celle-ci a confirmé que son représentant aux réunions VFIG avait été invité oralement à participer à ces réunions, mais qu'il ne l'avait jamais fait. Indugas a également déclaré qu'elle savait que la question des prix minimaux était évoquée, mais que, comme elle n'avait pas assisté à ces discussions, elle ne savait pas si de tels prix avaient effectivement été fixés (125).
(218) Hoek Loos n'a pas été en mesure de confirmer sa participation à des réunions avec ses concurrents à Breda ou Barendrecht. Ni les agendas ni les notes de frais des cadres responsables ne contenaient d'informations utiles.
(219) Messer a confirmé sa participation à des réunions avec ses concurrents, au restaurant Mirabelle, à Breda, en 1995-1997. Elle a également fourni les noms des cadres supérieurs d'AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer qui participaient régulièrement à ces réunions. D'après elle, l'évolution des coûts et des prix des gaz était évoquée, mais elle affirme qu'elle n'a pas participé à des accords sur des prix. Elle n'a pas été en mesure de fournir une liste des dates des réunions (126).
(220) Air Liquide a confirmé qu'elle avait été invitée à participer à des réunions à Breda et à Barendrecht en 1995-1997. Elle n'a elle-même jamais organisé de telles réunions. Elle a fourni les noms de ses cadres supérieurs qui y ont participé en 1996 et 1997, ainsi que les dates des réunions en question. Elle n'a pas pu fournir de données pour 1995, car le cadre responsable à l'époque a quitté la société. Elle a déclaré que les réunions en question étaient informelles, sans ordre du jour ni compte-rendu. D'après elle, des questions générales relatives à l'évolution du marché et de l'économie étaient abordées (127).
(221) Le tableau 6, section C, titre 1, considérant 108, répertorie les dates des réunions fournies par AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer, sur la base des données et des souvenirs de ces sociétés. Les différences qui apparaissent entre certaines dates peuvent s'expliquer par la fait que le restaurant Mirabelle, à Breda, est un lieu où sont organisées de nombreuses réunions et qui est bien situé pour les hommes d'affaires néerlandais qui vont en Belgique ou en viennent. Les dates mentionnées par deux ou trois sociétés sont le 23 novembre 1995, les 5 juin et 2 octobre 1996, les 19 mars, 20 juin et 8 juillet 1997.
(222) La plupart des sociétés qui ont participé à ces réunions ont déclaré qu'il n'y avait eu que des discussions générales. Toutefois, AGA et Air Products reconnaissent que les prix minimaux figuraient parmi les thèmes abordés. Il existe des preuves indiquant que des barèmes de prix minimaux ont effectivement été discutés et fixés par AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer.
(223) Il y a également eu un certain nombre de contacts bilatéraux entre fournisseurs de gaz industriels, au cours desquels les niveaux des prix des sociétés étaient comparés. On peut citer, à titre d'exemple, une réunion entre représentants d'AGA et Messer, qui a eu lieu le 16 juin 1995 et au cours de laquelle des barèmes de prix courants ont été comparés et échangés (128).
(224) La Commission possède des preuves indiquant que, en 1996 et 1997, AGA, Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et Messer se sont mises d'accord sur des prix minimaux pour les gaz en bouteilles destinés aux petits clients.
(225) Des barèmes identiques de prix minimaux pour 1996 et 1997 ont été trouvés chez Air Products (129), AGA (130) et Messer (131). Ces barèmes contiennent des prix minimaux imprimés pour les gaz en bouteilles applicables en 1996, ainsi que des prix minimaux manuscrits pour 1997; l'écriture est différente, les prix mis à jour sont identiques.
(226) La Commission estime que la mise à jour de ces barèmes a eu lieu lors d'une réunion entre concurrents. Elle note à cet égard que sur le barème Air Products, quelqu'un a écrit: "AL les prix ne doivent pas être cassés" (geen slopers) et "HL rien sur papier" (niets op papier), ce qui semble indiquer qu'Air Liquide avait mis en garde contre toute action visant à casser ces prix minimaux et que Hoek Loos se préoccupait de ne pas laisser de traces écrites de l'accord.
(227) D'après AGA, ce barème a été distribué à l'automne 1996, lors d'une réunion avec Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et Messer, "en vue de relever les prix minimaux pour les petits clients pour l'année suivante" (132).
(228) La Commission note que les sociétés en question se sont réunies le 2 octobre 1996, ainsi qu'il ressort du tableau 6, considérant 108.
(229) Air Products a déclaré à la Commission qu'elle avait probablement reçu le barème d'AGA à la fin de 1996, "dans le cadre d'une discussion sur les augmentations de prix" (133). Elle pense que les notes manuscrites figurant dans le dossier de la Commission ont été rédigées au cours de la même réunion (134), et la Commission est d'avis que les notes manuscrites trouvées chez Messer ont également été prises lors de cette réunion, qui a eu lieu au restaurant Mirabelle à Breda (135), probablement le 2 octobre 1996, ainsi qu'il est dit au considérant 228.
(230) AGA elle-même a inclus les prix minimaux pour 1996 et 1997 dans une note interne sur sa politique de prix, datée du 30 octobre 1996 (136).
(231) Air Liquide a également appliqué les prix minimaux en 1997. Les prix minimaux pour 1997 mentionnés cidessus figuraient, à titre de projet pour 1997, dans le compte rendu de sa réunion "bouteilles" du 8 novembre 1996. Ce n'est que pour le CO2 qu'Air Liquide prévoyait d'appliquer un prix plus élevé (137).
(232) La Commission possède dans ses dossiers d'autres preuves de l'existence d'accords sur des prix minimaux pour les petits clients conclus entre AGA, Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et Messer pour 1996 et 1997, et qui ont été communiqués à Westfalen en 1997.
(233) Les mêmes prix minimaux pour 1996 ont été trouvés chez Hoek Loos, sur une proposition imprimée intitulée "Proposition gaz bouteilles 1997" (138). Ce barème contient également une proposition d'augmentation du prix minimal facturé pour le transport, de 10 à 11,25 NLG. D'après les notes manuscrites trouvées chez Air Products, AGA et Messer, mentionnées ci-dessus au considérant 225, cette proposition a effectivement été adoptée. C'est pourquoi, l'explication de Hoek Loos selon laquelle il s'agirait juste d'un document interne (139) n'est pas crédible. Son utilisation en interne montre également que les prix planchers fixés d'un commun accord avec ses concurrents ont en fait été communiqués aux vendeurs de cette société.
(234) Le barème imprimé des prix minimaux pour 1996 trouvé chez Hoek Loos (140) a également été trouvé chez Messer, sous forme manuscrite, sur un "barème pour les petits clients "bouteilles" " daté d'octobre 1994 et déjà mentionné au considérant 208 (141).
(235) Chez Air Products (142), la Commission a trouvé un barème non daté de prix minimaux imprimé sur une petite carte, qui est identique au barème figurant sur une carte trouvée chez Hoek Loos (143). Air Products a déclaré que ce document était un barème Hoek Loos, présenté sous forme de carte plastique de format "portefeuille " et destiné à être utilisé par les vendeurs de Hoek Loos. Air Products avait obtenu cette carte de Hoek Loos au cours d'une réunion avec des concurrents. Selon Air Products cette carte remonte à la fin de 1996 ou au début de 1997 (144).
(236) Certains des prix minimaux fixés d'un commun accord par Hoek Loos, AGA, Air Liquide, Air Products et Messer ont été communiqués à Westfalen au cours d'une réunion bilatérale.
(237) Dans un rapport relatif à une réunion entre Hoek Loos, Westfalen et la société mère de Westfalen, Westfalen Gase AG, qui a eu lieu le 27 mars 1997, il est dit que "pour les petits clients, il ne faudrait pas aller en-dessous de 2,25 NLG p/m3 pour l'O2 et pas en-dessous de 12 NLG pour l'acétylène; location: 0,25 NLG" (145).
(238) Dans sa réponse à la communication des griefs, Westfalen fait valoir que le rapport sur la visite de [...], notamment le point 3 du document (cité au considérant 237), mentionne des prix, mais qu'il ne s'agit pas des prix que Westfalen a appliqués ou était censée appliquer. Il se réfère simplement aux prix Hoek Loos (146).
(239) Toutefois, la Commission estime que les termes utilisés dans le rapport semblent indiquer que les deux parties sont concernées par la discussion et qu'il ne s'agit pas uniquement de la politique de Hoek Loos. En outre, il serait très étrange que le directeur de Hoek Loos prenne la peine de se rendre au siège social de Westfalen pour exposer la propre politique de prix de sa société, d'autant plus que, à plusieurs reprises, c'est Hoek Loos qui avait proposé des prix minimaux aux autres concurrents (voir par exemple les considérants 195, 198, 206 et 207). Il semble donc plus probable que les représentants de Hoek Loos se soient rendus chez Westfalen pour informer cette société de l'accord conclu entre les autres concurrents. Néanmoins, la Commission ne tirera aucune conclusion quant au comportement de Westfalen sur ce point.
5. FIXATION D'AUTRES CONDITIONS COMMERCIALES
a) Frais de transport des bouteilles
i) Résumé
(240) C'est en 1990 que Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et AGA se sont pour la première fois mises d'accord sur la facturation de frais minimaux pour le transport des gaz en bouteilles. En 1994, Air Products, Air Liquide, AGA, Hoek Loos et BOC ont convenu d'appliquer des frais de transport minimaux de 10 NLG. Messer s'est associée à cet accord en 1996. Un accord sur des frais de transport minimaux était toujours en vigueur en 1997 entre AGA, Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et Messer.
ii) Réunions des membres du cartel et contacts collusoires
(241) Un accord conclu par Hoek Loos, Air Liquide, AGA et Air Products sur les frais de transport des gaz en bouteilles était en vigueur le 18 octobre 1990.
(242) Le barème 1990 des prix minimaux pour les gaz en bouteilles décrit aux considérants 196 et 197 (147), comprenait des frais de transport minimaux de 10 NLG en cas de livraison directe par la société de gaz et de 15 NLG en cas de livraison par l'intermédiaire d'un dépôt.
(243) La facturation de frais minimaux pour le transport a été abordée pour la première fois le 15 mars 1993, au cours d'une réunion bilatérale entre Messer et AGA. D'après un document Messer, la stratégie de cette dernière consistait à augmenter ses parts de marché. Toutefois, dans la poursuite de cet objectif, elle respecterait certaines conditions minimales. Elle s'abstiendrait par exemple de livrer sans facturer la location ou le coût du transport (148). Ce document fait également état d'un prix minimal de location à la journée de 0,25 NLG et de frais de transport minimaux de 10 NLG.
(244) Le 23 juin 1994, AGA, Air Products, Air Liquide, Hoek Loos et BOC se sont mises d'accord sur des frais de transport minimaux pour les gaz en bouteilles.
(245) D'après des notes manuscrites trouvées chez AGA (149), il a été décidé, lors de la réunion VFIG du 23 juin 1994, de fixer les frais de transport minimaux pour les gaz en bouteilles à 10 NLG. D'après ces notes, Messer n'était pas d'accord.
(246) D'autres notes manuscrites remises par AGA (150), qui concernent la même réunion, indiquent que les frais de transport minimaux s'appliquent quel que soit le moyen de transport et que "MG s'est réservée le droit d'appliquer des frais de transport inférieurs, parce qu'elle souhaite augmenter sa part de marché. Tous les autres ont accepté, y compris WF et BOC".
(247) En ce qui concerne Westfalen, la Commission note que le compte rendu écrit de la réunion VFIG du 23 juin 1994 remis par AGA et mentionné ci-dessus, précise que Westfalen a accepté les 10 NLG. Toutefois, elle n'était pas présente à cette réunion. D'après les notes manuscrites rédigées par la même personne à propos de la réunion VFIG suivante, qui a eu lieu le 14 octobre 1994 et à laquelle Westfalen a participé, celle-ci déclare ne pas être au courant de l'accord sur les frais de transport: "WF n'a pas été informée?? Pas accepté??" (151). D'autres notes internes trouvées chez AGA et concernant la même réunion vont également dans ce sens (152).
(248) Dans sa réponse à la communication des griefs, BOC fait valoir que la réunion du 23 juin 1994 ("tous les autres ont accepté, y compris WF et BOC") était la toute première réunion VFIG à laquelle elle participait. Ses représentants ont confirmé à cette occasion que BOC facturait 10 NLG par bouteille à l'époque, mais qu'elle ne s'était pas rendu compte que cette question avait été évoquée dans le contexte d'éventuels prix minimaux futurs. Cette confirmation peut avoir été interprétée de façon subjective par le représentant d'AGA comme indiquant que BOC était d'accord pour appliquer ce montant minimal (153).
(249) Air Liquide, Hoek Loos et AGA ont appliqué cet accord. Le prix minimal à facturer pour le transport figurait dans le barème interne des prix minimaux pour 1995 d'Air Liquide (154). Hoek Loos a également inclus le prix de transport minimal convenu de 10 NLG dans son programme commercial pour 1994/1995 (155).
(250) AGA a, elle aussi, inclus les frais de transport minimaux de 10 NLG dans une note interne datée du 29 juin 1995 (156) ainsi que dans des instructions à son personnel de vente - dans un paragraphe concernant les nouveaux clients - datées du 5 juillet 1995 (157). Les frais minimaux figurent également dans des notes manuscrites relatives à des réunions qui ont eu lieu le 19 août et le 13 octobre 1994 (158). AGA souligne que le rapport sur la réunion du 13 octobre 1994 mentionne les initiales [...], probablement [...] de Hoek Loos, ce qui témoigne de contacts bilatéraux entre concurrents sur les conditions commerciales (159).
(251) Qu'il y ait eu accord sur ces conditions commerciales minimales est confirmé par le fait que les concurrents ont évoqué le cas de clients individuels et qu'il y avait menace de représailles. Des documents manuscrits communiqués par AGA, qui concernent une réunion bilatérale AGA - Air Products ([...]-[...]), qui s'est tenue le 11 juillet 1994 (160), disent ceci:
"[...] a compris que nous voulions une compensation pour GEP et Shell, mais ne l'a pas acceptée. Il "pensait" que cela avait été résolu conformément à notre accord sur les prix de location et de transport minimaux et mentionne la dernière réunion d'Utrecht (?) (161). Il a déclaré que si nous prenions des mesures de rétorsion à cause de GEP et Shell, il devrait nous rendre la pareille."
(252) Plus tard, en 1996, Messer a décidé d'appliquer également le prix de transport minimal convenu de 10 NLG. Conformément au compte rendu d'une réunion interne qui s'est tenue le 7 juin 1996, cela fait s'est fait ce même jour. Il est dit dans ce compte rendu que les concurrents seront également contraints d'appliquer ce prix (162).
(253) AGA, Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et Messer se sont mises d'accord sur des frais de transport minimaux pour 1996 et 1997.
(254) D'après des notes manuscrites trouvées chez Air Products (163) et chez Messer (164), qui correspondent à une proposition dactylographiée trouvée chez Hoek Loos (165), ces sociétés ont discuté de l'augmentation du prix minimal du transport qui devait être porté à 11,25 NLG à la fin de 1996.
(255) Cela a été repris dans les barèmes identiques de prix minimal pour 1996 et 1997 trouvés chez Air Products (166), AGA (167) et Messer (168), déjà cités au considérant 225.
b) Location des bouteilles
i) Résumé
(256) En 1990, Hoek Loos, AGA, Air Liquide et Air Products se sont mises d'accord pour respecter un niveau minimal pour le prix de location des bouteilles. En 1994, Hoek Loos, Air Products, AGA, Air Liquide, Messer et BOC ont décidé d'appliquer un prix de location minimal à la journée de 0,25 NLG par bouteille. Cet accord a été confirmé par Hoek Loos, AGA, Air Liquide, Air Products et Messer au cours des années suivantes, et il était toujours en vigueur en 1997. Il a également été communiqué à Westfalen en 1997.
ii) Réunions des membres du cartel et contacts collusoires
(257) Hoek Loos, Air Liquide, AGA et Air Products avaient conclu un accord sur un prix minimal pour la location des bouteilles qui était en vigueur au 18 octobre 1990.
(258) Le barème de 1990 pour les gaz en bouteilles, déjà mentionné aux considérants 196 et 242 (169), prévoyait un prix de location minimal de 0,40 NLG par jour et par bouteille, et de 0,80 NLG pour les bouteilles groupées. Ce barème ne prévoyait pas de suppression de la location pour les bouteilles ni de périodes au cours desquelles ce prix de location ne serait pas facturé.
(259) L'accord sur un prix minimal de location des bouteilles à la journée a à nouveau été abordé le 15 mars 1993 (170), au cours d'une discussion entre AGA et Messer, déjà évoquée au considérant 243. Différentes questions ont été abordées, notamment la possibilité d'appliquer un prix de location minimal de 0,25 NLG par jour pour les gaz livrés en bouteilles. Le compte rendu de cette réunion dit également que "HL a supprimé les journées sans location".
(260) Le 23 juin 1994, AGA, Air Products, Air Liquide, Hoek Loos, Messer et BOC se sont mises d'accord sur un prix de location minimal pour les bouteilles.
(261) Lors de la réunion VFIG du 23 juin 1994, il a été décidé de fixer le prix de location minimal des bouteilles à 0,25 NLG. Les notes d'AGA (171) font expressément état du fait que Messer a accepté cette décision et précisent que le prix minimal de la location serait de 0,25 NLG par jour et que les journées gratuites seraient supprimées.
(262) Hoek Loos et AGA ont également appliqué cet accord. Hoek Loos a inclus le prix minimal de 0,25 NLG dans son programme commercial pour 1994-1995 (172). Des notes manuscrites sur ces discussions, trouvées chez AGA et datées des 19 août et 13 octobre 1994 (173), mentionnent également le prix de location minimal.
(263) Ce prix minimal figure aussi dans une note interne d'AGA datée du 29 juin 1995 (174) ainsi que dans des instructions destinées à son personnel de vente - au paragraphe concernant les nouveaux clients - datées du 5 juillet 1995 (175).
(264) Dans sa réponse à la communication des griefs (176), BOC souligne que la note interne d'AGA ne contient aucune référence au fait que BOC pratique un prix de location fixe et que la note Air Products (177) contient la mention "0,25?", ce qui signifie que M. Celis, qui était alors directeur de BOC, a été vague quant à l'approche adoptée par sa société en matière de location des bouteilles et qu'il n'y a eu aucun accord sur une application de ces prix.
(265) La Commission note que BOC était présente à cette réunion et qu'elle a volontairement échangé certaines informations commerciales sensibles avec ses concurrents.
(266) Messer, AGA, Air Liquide, Hoek Loos et Air Products avaient conclu un accord sur un prix de location minimal des bouteilles qui était en vigueur au 9 janvier 1996.
(267) Une note interne trouvée chez Messer et datée du 9 janvier 1996 dit ceci: "il est regrettable de noter que tant AGA que AL n'ont pas respecté le prix de 0,25 NLG" (178).
(268) Messer, AGA, Air Liquide, Hoek Loos et Air Products avaient conclu un accord sur un prix de location minimal des bouteilles qui était en vigueur en 1997, et en avaient fait part cette même année à Westfalen.
(269) Dans un rapport interne sur une réunion daté du 20 mars 1997 et trouvé chez Messer, quelqu'un affirme que Messer est la seule société qui applique encore un prix de location minimal de 0,25 NLG, ce à quoi le directeur général a répondu que cela ne devrait pas être possible, exception faite pour Westfalen et BOC (179).
(270) Cette réponse montre que les grandes compagnies, AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer, avaient confirmé qu'elles respecteraient le prix de location minimal de 0,25 NLG.
(271) En ce qui concerne la participation de Westfalen, dans un rapport relatif à une réunion entre Hoek Loos, Westfalen et la société mère de Westfalen, Westfalen Gase AG, qui a eu lieu le 27 mars 1997 et a déjà été citée au considérant 237, il est dit que "pour les petits clients, il ne faudrait pas aller en dessous de 2,25 NLG p/m3 pour l'O2 et pas en dessous de 12 NLG pour l'acétylène; location: 0,25 NLG" (180).
(272) Dans sa réponse à la communication des griefs (181), Westfalen fait valoir que le but réel de la visite de [...] était de faire connaissance, et qu'il s'agissait d'une initiative de [...]. Westfalen nie avoir accepté, ni en 1997 ni à aucun autre moment pendant la période en cause, d'appliquer un prix minimal pour la location des bouteilles de 0,25 NLG par jour. Elle affirme que cela est confirmé par la déclaration du directeur général de Messer, qui figure dans les notes internes de Messer datées du 20 mars 1997 et mentionnées au considérant 269 (182). Il ressort de cette note que Westfalen n'avait pas accepté le prix minimal de location de 0,25 NLG par bouteille.
(273) La Commission constate que les notes internes de Messer mentionnées au considérant 269 portent une date antérieure à celle de la réunion bilatérale entre Hoek Loos et la société mère de Westfalen du 27 juillet 1997. Il se pourrait que Hoek Loos ait rencontré Westfalen pour lui communiquer ce qui avait été convenu entre les autres, ainsi que nous l'avons déjà expliqué au considérant 239. En outre, les arguments qui sont exposés à propos de la réunion bilatérale pourraient être repris dans le cas présent. Néanmoins, la Commission ne tirera pas de conclusions quant au comportement de Westfalen sur ce point.
(274) Le fait que, en 1997, un accord conclu par Messer, AGA, Air Liquide, Hoek Loos et Air Products à propos d'un prix de location minimal pour les bouteilles était en vigueur est également corroboré par les éléments suivants.
(275) Dans un compte rendu de réunion interne de Messer, daté du 19 juin 1997, il est dit ce qui suit, sous le titre "concurrence":
"Au cours des derniers mois, plusieurs concurrents ont adopté des conditions contraires à tous les accords. Par exemple, Air Liquide facture un prix de location de 45 NLG par an et AGA, de 0,15 NLG par bouteille. Hoek Loos a manifestement consenti des prix de dumping à trois clients." (183)
(276) Dans un rapport de réunion interne de Messer, daté du 8 septembre 1997, il est fait état d'un nombre de plus en plus grand d'offres de prix de location inférieurs à 0,25 NLG (184). Dans un compte rendu de réunion ultérieur, daté du 18 septembre 1997, instruction est donnée aux vendeurs d'établir une liste des concurrents qui ont proposé moins de 0,25 NLG (185).
(277) Les barèmes identiques de prix minimaux pour 1996 et 1997 trouvés chez Air Products (186), AGA (187) et Messer (188), déjà cités à la section C, titre 4, considérant 225, qui contiennent également le prix de location minimal de 0,25 NLG, confirment, eux aussi, l'existence d'un accord sur un prix de location minimal pour les bouteilles en 1996 et 1997.
c) Frais pour les livraisons en vrac
i) Résumé
(278) En 1990, Hoek Loos, AGA, Air Products et Air Liquide ont décidé ensemble de facturer des frais de livraison de 36 NLG pour les livraisons en vrac. Ces frais sont devenus partie intégrante de leurs conditions commerciales et ont depuis lors été adoptés par d'autres fournisseurs. Ces frais ont à nouveau été évoqués en 1993, lorsqu'il a été proposé de les augmenter.
ii) Réunions des membres du cartel et contacts collusoires
(279) Hoek Loos, Air Liquide, AGA et Air Products ont convenu de facturer des frais de livraison en octobre 1990.
(280) La Commission a trouvé chez Hoek Loos une lettre adressée à Messer Griesheim, à Francfort, signée par le président-directeur général, datée du 18 octobre 1990 et envoyée par télécopieur ce même jour (189), déjà citée à la section C, titre 4, et qui dit entre autres ceci: "pour les livraisons liquides, nous introduirons des frais de livraison comme expliqué dans le barème". Le document non daté et sans titre annexé à cette lettre et déjà décrit à la section C, titre 4, point b), dit ceci:
"Pour les livraisons de gaz en vrac et à compter de ce jour: pour les nouveaux clients, frais de livraison de 34,00-36, 00 NLG. Pour les clients existants, ces frais seront introduits en octobre 1990. Ils ne s'appliquent pas au dioxyde de carbone pour le secteur de l'horticulture: ... Motifs à l'origine de ces frais: files d'attente, énergie, législation sur le temps de conduite."
(281) Il a également été fait référence à une réunion des concurrents qui s'est tenue le 22 novembre 1990 (190), au cours de laquelle les "frais de livraison - vrac" ont été l'un des sujets abordés. Les notes internes en question disent ceci à propos de ces frais:
"HL: tous les clients contactés - à partir du 1er novembre 1990. Environ 30 réactions (c'est-à-dire peu). 36 NLG.
AP: lettre envoyée le 16.11. Pour tout le monde à partir du 1.12, 36 NLG. Déjà des réactions orales/écrites.
AGA: les gros clients n'acceptent pas (Nedstaal, AKZO), environ 50 % contactés. A partir du 1.12.
AL: introduction de frais pour files d'attente. Frais de livraison à compter du 1.1.
Arguments: législation sur le temps de conduite, files d'attente, carburant, augmentation du coût des assurances, réglementation plus stricte, coût de la formation. Introduire systématiquement dans les nouveaux contrats ..."
(282) Il y a eu, probablement en 1991, une réunion entre des représentants d'Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et AGA, au cours de laquelle ils ont évoqué le succès de la récente introduction des frais de livraison pour le vrac, en 1991. Une note manuscrite sur cette réunion, rédigée en néerlandais et trouvée chez Air Liquide (191), déjà citée au considérant 125, dit notamment ceci:
"Augmentation de prix [...]: tout a augmenté
Coût du transport
Vrac BOC/Messer
Bouteilles Westfalen/Messer/AL
HL: 6 % pour vrac et bouteilles
L'indice indique une croissance de 6 %
AGA: 20 % seulement du plan réalisé
L'indice indique une croissance de 6 % ...
Frais de livraison pour le vrac introduits par la plupart des sociétés..."
(283) Dans sa réponse aux questions de la Commission, Air Liquide estimait que ce document remontait à "environ 1990" et qu'il s'agissait de "notes personnelles de [...], probablement rédigées après un contact social" (192). Le représentant d'Air Products à cette réunion semble avoir été le directeur général, [...].
(284) La question des frais de livraison a à nouveau été abordée le 3 septembre 1993. A cette occasion, il a été proposé de les porter à 55-65 NLG.
(285) Les frais de livraison ont été abordés au cours de la réunion VFIG du 3 septembre 1993, ou à une date proche de cette réunion. D'après des notes manuscrites trouvées chez Air Products (193), il a été proposé, au cours de cette réunion, de les porter à 55-65 NLG.
(286) Dans sa réponse aux questions de la Commission, Air Liquide déclare qu'elle n'a jamais introduit de frais de livraison (194). Elle l'a à nouveau confirmé dans sa réponse à la communication des griefs (195).
(287) Hoek Loos a introduit les frais de livraison en octobre 1990 et les a faits passer de 36,00 NLG à 56,00 NLG pour les nouveaux clients et les contrats reconduits, au 1er janvier 1995 (196).
(288) AGA les a introduits en décembre 1990 (36,00 NLG). A compter du 1er janvier 1994, ce montant a progressivement été remplacé par un montant de 56,00 NLG (197).
d) Frais perçus au titre de l'environnement et de la sécurité pour les bouteilles
i) Résumé
(289) En 1993, Hoek Loos, AGA, Air Products, Air Liquide et Messer ont toutes décidé d'introduire des frais au titre de l'environnement et de la sécurité sur les livraisons de gaz en bouteilles, d'un montant de 12,50 NLG.
ii) Réunions des membres du cartel et contacts collusoires
(290) En 1993, Hoek Loos, AGA, Air Products, Air Liquide et Messer ont convenu de facturer des frais d'un montant de 12,50 NLG au titre de la sécurité et de l'environnement.
(291) En 1993, les concurrents ont évoqué la possibilité d'introduire des frais supplémentaires sur chaque livraison de bouteilles, au titre de la sécurité et de l'environnement (milieu- en veiligheidstoeslag - "VMT"). Dans un premier temps, les entreprises ont eu une discussion dans le cadre de la VFIG pour savoir si cette fédération pouvait informer les clients de la nécessité d'inclure dans les prix certains coûts liés à la sécurité et à l'environnement. Il en est fait mention dans le compte rendu officiel de la réunion du 15 juin 1993 (198). Par lettre du 11 août 1993, Hoek Loos a informé la VFIG que ses conseillers juridiques lui avaient fortement déconseillé de faire envoyer ce type d'information par l'intermédiaire de la VFIG. Hoek Loos préférait que chaque société informe ses propres clients. A cette lettre était joint un projet de lettre aux clients annonçant l'introduction de frais "sécurité et environnement" d'un montant de 12,50 NLG (199). Lors de la réunion VFIG du 3 septembre 1993, il a été convenu ("conclusion du président") de retirer ce point de l'ordre du jour (200). D'après des notes manuscrites trouvées chez Air Products, quelqu'un - probablement le président - avait déclaré ceci: "chaque société enverra une lettre pour expliquer la nouvelle situation". La note fait également mention des doutes exprimés par AGA, qui craignait que 12,50 NLG pour la livraison d'une bouteille à un petit client constitue un montant un peu trop élevé (201).
(292) Toutes les sociétés ont introduit ces frais "sécurité et environnement" de 12,50 NLG avant la fin de l'année 1993. Westfalen, qui n'était pas membre de la VFIG à l'époque, les a également introduits, mais leur montant était inférieur, et variable. Il avait également été convenu que ces frais devaient être facturés aux concurrents pour les livraisons entre sociétés.
(293) Une autre réunion de la VFIG a eu lieu le 16 décembre 1993. Une note manuscrite trouvée chez Air Liquide à propos de cette réunion (202) dit ceci: "12,50 NLG accord
12,50 NLG à percevoir également sur les livraisons entre sociétés.
Tout le monde les a introduits, mais Westfalen avec un montant variant entre 3 et 12 NLG."
(294) Des notes manuscrites remises par AGA font également mention de la réunion VFIG du 16 décembre 1993:
"Frais de sécurité: également aux concurrents" (203).
(295) Air Liquide a introduit les frais "sécurité et environnement " de 12,50 NLG au 1er décembre 1993. Par lettre du 26 novembre 1993, Air Liquide a informé AGA que, à compter du 1er décembre 1993, celle-ci devrait payer des frais "sécurité et environnement" de 12,50 NLG sur chaque livraison (204). Air Liquide a confirmé à la Commission qu'elle avait introduit ces frais au 1er décembre 1993 (205).
(296) AGA les a introduits au 15 novembre 1993. Elle a commencé par facturer la somme de 12,50 NLG aux livraisons à BOC à compter de novembre 1993, ce contre quoi BOC a protesté par lettre du 5 janvier 1994 (au motif qu'AGA n'avait effectué aucune livraison, mais avait uniquement repris des bouteilles BOC). Sur cette lettre figure ce commentaire manuscrit, ajouté par un salarié d'AGA:
"Au cours de la dernière réunion VFIG, il a été décidé que toutes les sociétés de gaz devraient également se facturer mutuellement les frais de sécurité. Toutefois, nous acceptons de les supprimer de nos factures à l'avenir " (206).
(297) Air Products, Air Liquide et Hoek Loos ont introduit des frais "sécurité et environnement" de 12,50 NLG à la fin de 1993.
(298) La Commission a trouvé chez Hoek Loos une lettre signée d'Air Products (207) et une lettre type ou un projet de lettre d'Air Liquide (208) à leurs clients dans lesquelles elles annonçaient l'introduction de frais "sécurité et environnement" de 12,50 NLG. Hoek Loos a confirmé qu'elle a elle-même introduit ces frais en novembre 1993 et elle explique la présence des projets de lettres par le fait qu'elle était elle-même un client de ces concurrents (209).
(299) D'après des notes manuscrites trouvées chez AGA (210), les "frais de sécurité/frais environnementaux" ont apparemment été à nouveau évoqués lors de la réunion VFIG du 17 mars 1994.
(300) En 1995 et 1996, les frais "environnement et sécurité" étaient toujours facturés par les sociétés à leurs clients.
(301) Air Liquide a fait passer ces frais à 15,00 NLG au 1er janvier 1996 (211), et Messer les a augmentés dans les mêmes proportions au 1er octobre 1995. Bien que le dossier contienne plusieurs indications selon lesquelles Hoek Loos avait l'intention de faire de même en 1995, cela ne s'est jamais fait (212). AGA n'a, elle non plus, pas augmenté les frais "sécurité et environnement" (213).
(302) En réponse à une demande la Commission, Westfalen a reconnu avoir introduit, au 1er janvier 1994, des frais environnementaux de 3 NLG pour les bouteilles livrées ou reprises et de 12,50 NLG pour chaque livraison de gaz liquide. Ces montants pouvaient différer selon les clients (214).
(303) Dans sa réponse à la communication des griefs, Westfalen nie avoir jamais participé à un accord avec les fournisseurs de gaz industriels néerlandais sur des frais au titre de la sécurité et de l'environnement. Elle affirme que le fait qu'elle ait également imposé de tels frais ne permet pas de conclure qu'il y a eu accord. Cela indique simplement que les coûts avaient augmenté en raison de dispositions légales qui rendaient la facturation de tels frais inévitables. Les frais facturés par Westfalen étaient très inférieurs à ceux de ses concurrents. Ils étaient également d'un montant variable, contrairement aux frais forfaitaires imposés par les concurrents. Westfalen a annoncé l'introduction de ces frais au 1er janvier 1994, en en indiquant le motif (215).
(304) La Commission note que Westfalen n'a pas participé aux réunions VFIG de juin et de septembre 1993 mentionnées au considérant 291, puisqu'elle n'était pas encore membre de cette association à l'époque.
(305) BOC est la seule société de gaz qui n'ait pas introduit des frais au titre de la sécurité et de l'environnement en 1993 et 1994. Ce n'est qu'au début de 1996 qu'elle a annoncé l'introduction de ces frais à ses clients, tant aux Pays-Bas qu'en Belgique (216). La Commission note à cet égard que BOC n'était pas représentée aux deux réunions de la VFIG qui ont joué un rôle important à ce propos, c'est-à-dire celles de juin et de septembre 1993.
e) Location de réservoirs
i) Résumé
(306) Le calcul du prix de location des réservoirs pour les clients du secteur "gaz liquides" a fait l'objet de nombreuses discussions entre fournisseurs de gaz industriels. AGA, Air Liquide et Hoek Loos sont parvenues à un accord à ce propos en 1990, et en 1996, AGA, Air Liquide, Air Products, Hoek Loos et Messer ont discuté d'une proposition d'accord pour 1997.
ii) Réunions des membres du cartel et contacts collusoires
(307) A compter de la fin de 1989 ou du début de 1990, Hoek Loos, AGA, Air Products et Air Liquide se sont mises d'accord sur les prix de location des réservoirs pour produits en vrac.
(308) Une note interne en anglais, datée du 24 novembre 1989 et portant en italique la mention "confidentiel", trouvée chez AGA et déjà citée à la section C, titres 2, 3 et 4, qui concernait une "réunion sécurité" (217), disait notamment ceci: "nous établirons tous une proposition de barème pour les prix du gaz liquide. La réunion pour la discussion finale et l'accord sur ce barème est fixée au 12 janvier."
(309) Ce barème, déjà mentionné à la section C, point 4, a été découvert lors des vérifications chez Air Liquide (218). Il était imprimé sur papier AGA et intitulé "Bulkgassen - prijsstaffel gegevens" (gaz en vrac - échelle des prix). Il contenait également les prix de location des réservoirs.
(310) La Commission possède la preuve que le prix de location des réservoirs a été discuté lors de la réunion VFIG du 14 octobre 1994. D'après des notes manuscrites relatives à cette réunion communiquées par AGA, il a notamment été question de la location des réservoirs, de la location à long terme, qui devait être évaluée, et des prix minimaux (219). D'autres notes manuscrites concernant cette même réunion et trouvées chez AGA déclarent que "les gaz liquides constitueront le prochain thème abordé" (220). Ces notes mentionnent également un prix de location minimal pour les réservoirs.
(311) Une proposition visant un accord sur le prix de location des réservoirs payé par les clients "gaz liquides" devait faire l'objet d'une discussion entre AGA, Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et Messer.
(312) Des barèmes identiques de prix minimaux pour 1996 et 1997, déjà décrits à la section C, titre 4, ont été trouvés chez Air Products (221), AGA (222) et Messer (223). Ces barèmes contiennent également des références explicites à la location des réservoirs, évaporateurs et mélangeurs "Huur tanks/verdampers/mixers ROI 10 %; ROI 15 %". Initialement, la Commission pensait que le terme ROI pouvait se référer à un indice de calcul des augmentations du prix de location des réservoirs.
(313) Dans sa réponse à la communication des griefs, Messer a fait valoir que la Commission était parvenue à la conclusion qu'il existait, en 1996, un accord relatif à un indice d'augmentation des prix de location des réservoirs pour les clients "gaz liquides", en s'appuyant uniquement sur une phrase d'un document Messer (224). Or, Messer a nié que cette phrase puisse permettre de tirer ce genre de conclusion. Elle estime que le terme "ROI" signifie "return on investment" (retour sur investissement) et que les prix de location mentionnés étaient ceux qu'il fallait appliquer pour obtenir un retour sur investissement de 10 à 15
(314) En ce qui concerne AGA, elle a nié, dans sa réponse à la communication des griefs, que l'indice des prix de location des réservoirs mentionné sur le barème des prix minimaux de 1997 remis à Breda par le représentant d'AGA, le 2 octobre 1996, ait fait l'objet d'un accord. Ainsi qu'il est dit sur ces mêmes pages, il y a eu une proposition concernant les petites quantités en vrac, mais AGA souligne qu'elle a été ignorée et qu'il n'en a pas été question. AGA fait valoir que le prix de location des réservoirs ne devrait pas être traité autrement que le "petit vrac", à propos duquel la communication des griefs reconnaît qu'il n'y a pas eu accord (225).
(315) Dans sa réponse à la communication des griefs (226), Air Products ne nie pas avoir été partie à un accord sur le calcul d'une augmentation du prix de location des réservoirs pour les gaz liquides en vigueur de 1996 à la fin de 1997, ainsi que la Commission l'affirmait dans sa communication des griefs.
(316) La Commission estime que les barèmes évoqués au considérant 312 montrent que le prix de location des réservoirs a au moins fait l'objet d'une proposition en 1997, comme cela a aussi été le cas pour les prix minimaux mentionnés.
PARTIE II - APPRECIATION JURIDIQUE
D. APPLICATION DE L'ARTICLE 81 DU TRAITE
1. ARTICLE 81, PARAGRAPHE 1, DU TRAITE
(317) L'article 81, paragraphe 1, du traité dispose que sont incompatibles avec le Marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun, et notamment ceux qui consistent à fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction, à limiter ou contrôler la production et les débouchés et à répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.
2. ACCORDS ET PRATIQUES CONCERTEES
(318) On peut considérer qu'il y a accord lorsque les parties s'entendent sur un plan commun qui limite ou est susceptible de limiter leur comportement commercial individuel en déterminant les lignes de leur action ou de leur non-action sur le marché. L'accord ne doit pas nécessairement être établi de façon formelle ou par écrit, et aucune sanction contractuelle ou mesure de contrainte n'est requise. L'accord peut être exprès ou ressortir implicitement du comportement des parties.
(319) Dans son arrêt rendu dans les affaires jointes T-305-94 et autres, Limburgse Vinyl Maatschappij NV et autres contre Commission (PVC II) (227), le Tribunal de première instance a précisé que "selon une jurisprudence constante, pour qu'il y ait accord, au sens de l'article [81, paragraphe 1] du traité, il suffit que les entreprises en cause aient exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d'une manière déterminée".
(320) Si l'article 81, paragraphe 1, du traité distingue la notion de "pratiques concertées" de celles d'"accords entre entreprises " ou de "décisions d'associations d'entreprises", c'est dans le dessein d'inclure dans les interdictions de cet article une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu'à la réalisation d'une convention proprement dite, substitue sciemment une coopération pratique entre elles aux risques de la concurrence (228).
(321) Les critères de coordination et de coopération définis dans la jurisprudence de la Cour, loin d'exiger l'élaboration d'un véritable plan, doivent être compris à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du traité relatives à la concurrence, selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu'il entend suivre sur le Marché commun. S'il est exact que cette exigence d'autonomie n'exclut pas le droit des entreprises de s'adapter intelligemment au comportement constaté ou anticipé de leurs concurrents, elle s'oppose cependant rigoureusement à tout contact direct ou indirect entre elles, ayant pour objet ou pour effet, soit d'influencer le comportement sur le marché d'un concurrent actuel ou potentiel, soit de dévoiler à un tel concurrent la ligne de conduite qu'elles ont décidé ou qu'elles envisagent de tenir ellesmêmes sur le marché (229).
(322) C'est pourquoi un comportement peut relever de l'article 81, paragraphe 1, du traité en tant que "pratique concertée", même si les parties ne se sont pas entendues au préalable sur un plan commun définissant leur action sur le marché, mais si elles adoptent ou se rallient néanmoins à des mécanismes collusoires qui facilitent la coordination de leurs politiques commerciales (230).
(323) Bien que, conformément à l'article 81, paragraphe 1, du traité, la notion de pratique concertée implique, outre la concertation entre les entreprises, un comportement sur le marché faisant suite à cette concertation et un lien de cause à effet entre ces deux éléments, il y a lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire, que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché. Il en sera d'autant plus ainsi lorsque la concertation a lieu sur une base régulière au cours d'une longue période (231).
(324) Il n'est pas nécessaire, particulièrement dans le cas d'une infraction complexe de longue durée, que la Commission la qualifie exclusivement de l'une ou l'autre de ces formes de comportement illicite. Les notions d'accord et de pratique concertée sont fluides et peuvent se chevaucher. De fait, il peut même être impossible, dans la pratique, d'opérer une telle distinction, dans la mesure où une infraction peut comporter simultanément des éléments relevant de l'une ou de l'autre forme de comportement prohibé, alors que considérées isolément, certaines de ses manifestations pourraient être considérées à juste titre comme relevant de l'une plutôt que de l'autre. Toutefois, il serait artificiel de subdiviser ce qui constitue manifestement une entreprise commune continue, caractérisée par un seul et unique objectif global, en plusieurs infractions distinctes. Une entente peut donc être à la fois un accord et une pratique concertée. L'article 81 ne prévoit pas de catégorie spécifique pour une infraction complexe de ce type (232).
(325) Dans l'arrêt PVC II, le Tribunal de première instance a déclaré que "dans le cadre d'une infraction complexe, qui a impliqué plusieurs producteurs pendants plusieurs années poursuivant un objectif de régulation en commun du marché, on ne saurait exiger de la Commission qu'elle qualifie précisément l'infraction, pour chaque entreprise et à chaque instant donné, d'accord ou de pratique concertée, dès lors que en toute hypothèse, l'une et l'autre de ces formes d'infraction sont visées à l'article [81] du traité" (233).
(326) Aux fins de l'article 81, paragraphe 1, du traité, un "accord" peut aussi ne pas présenter le degré de sécurité requis pour l'exécution d'un contrat commercial en droit civil. De plus, dans le cas d'un cartel complexe de longue durée, la notion d'"accord" convient non seulement pour désigner un plan global ou les conditions expressément convenues, mais aussi la mise en œuvre de ce qui a été convenu, reposant sur le même mécanisme et poursuivant le même objectif commun.
(327) Comme la Cour de justice, confirmant l'arrêt du Tribunal de première instance, l'a souligné dans l'affaire C-49-92 P, Commission contre Anic (234), il découle des termes de l'article 81, paragraphe 1, du traité que l'accord peut consister non seulement en un acte isolé, mais également en une série d'actes ou bien encore en un comportement continu.
(328) Un cartel complexe peut donc être considéré à juste titre comme une seule infraction se poursuivant pendant toute la durée de son existence. L'accord peut être modifié, et ses mécanismes peuvent être adaptés ou renforcés pour tenir compte de faits nouveaux. La validité de la présente appréciation n'est en rien affectée par la possibilité qu'un ou plusieurs éléments d'une série d'actes ou d'un comportement continu puissent, individuellement et intrinsèquement, constituer une infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité.
(329) Même si un cartel est une entreprise menée en commun, chaque participant peut jouer un rôle qui lui est propre. Un ou plusieurs d'entre eux peuvent exercer le rôle dominant de meneur. Il peut y avoir des conflits ou des rivalités internes. Certains membres peuvent même aller jusqu'à tricher. Cependant, aucun de ces éléments n'empêche l'arrangement de constituer un accord ou une pratique concertée aux fins de l'article 81, paragraphe 1, du traité, lorsque les parties s'entendent en vue d'un objectif unique, commun et permanent.
(330) Le simple fait que chaque participant au cartel joue un rôle qui lui est propre n'exclut pas sa responsabilité pour l'infraction dans son ensemble, y compris les actes commis par les autres participants, mais qui ne partagent pas le même objectif illicite et le même effet anticoncurrentiel. Une entreprise participant à une telle infraction par des comportements qui contribuent à la réalisation de cet objectif commun est également responsable, pour toute la période de sa participation à ce système commun, des comportements d'autres entreprises dans le cadre de la même infraction. Tel est, en effet, le cas lorsqu'il est établit que l'entreprise en question connaissait les comportements infractionnels des autres participants, ou qu'elle pouvait raisonnablement les prévoir ou en avoir connaissance et qu'elle était prête à en accepter le risque (235).
3. NATURE DE L'INFRACTION DANS LA PRESENTE AFFAIRE
(331) La Commission a réuni des preuves de l'existence d'une collusion entre concurrents au cours des périodes 1989-1991 et 1993-1997.
(332) Les éléments sur lesquels les concurrents se sont mis d'accord au cours des réunions sont pour l'essentiel restés les mêmes tout au long des périodes en cause. En 1989, Hoek Loos, AGA et Air Products ont convenu d'augmenter les prix des gaz en bouteilles pour l'année suivante et d'interrompre toute concurrence pendant une certaine période pour pouvoir mettre ces augmentations en œuvre. Ces deux éléments - augmentations de prix et période de non-concurrence pour les mettre en œuvre - qui sont décrits en détail à la partie I, section C, de la présente décision, ont constitué un thème récurrent au cours des réunions ultérieures de cadres dirigeants des entreprises concurrentes, jusqu'à ce que la Commission commence son enquête, en décembre 1997.
(333) Le cadre de ces réunions a varié. Dans les premières années, à partir de 1989, elles ont eu lieu dans le cadre de ce que l'on appelait les "réunions sécurité". Ensuite, elles ont eu lieu à l'occasion des réunions VFIG. A partir de 1995, Hoek Loos, Air Products, AGA, Air Liquide et Messer ont organisé des réunions distinctes, en dehors du cadre de la VFIG. Des contacts bilatéraux ont complété ce réseau anticoncurrentiel.
(334) Les ordres du jour et les comptes-rendus des "réunions sécurité" et des réunions VFIG ne faisaient pas état de discussions ou d'accords relatifs aux prix et aux autres conditions commerciales, à une exception près: l'introduction de frais "environnement et sécurité" pour les gaz en bouteilles en 1993. Dans sa réponse aux questions de la Commission, la VFIG a déclaré que les comptes rendus reflétaient l'ensemble des sujets évoqués au cours des réunions (236). Ni les projets d'ordre du jour ni les comptes rendus des réunions VFIG n'ont jamais fait état de discussions ou de décisions concernant les prix. Exception faite de l'introduction de frais au titre de l'environnement et de la sécurité, décrits en détail à la section C, titre 5, point d), de la présente décision, les ordres du jour et les comptes-rendus ne faisaient pas non plus état de discussions ou de décisions concernant d'autres conditions commerciales. Les réunions complémentaires organisées par les grandes sociétés à partir de 1995 n'avaient pas, quant à elles, d'ordre du jour officiel.
(335) La VFIG a déclaré à la Commission que son secrétariat n'avait jamais été prié de quitter une réunion ni d'omettre de mentionner certains thèmes dans le compte-rendu. Elle a également déclaré que le secrétariat n'avait pas connaissance de discussions qui auraient eu lieu en marge des réunions VFIG (237). Toutefois, des observations "confidentielles" ont été découvertes dans une note interne d'AGA concernant la réunion VFIG du 17 février 1993 (238).
(336) La Commission en conclut que les contacts collusoires en question ont eu lieu en marge de ces réunions officielles. Aucun compte-rendu officiel n'a été rédigé à leur propos, bien que des accords détaillés sur les prix aient été conclus au cours de certaines de ces réunions (voir par exemple la réunion VFIG du 18 novembre 1994).
(337) Le fait que les entreprises concernées étaient conscientes de la nature illicite de leur comportement est confirmé par certains des documents mentionnnés ci-dessus ("après lecture, prière de détruire", "rien sur papier"), dont certains portent d'ailleurs la mention "confidentiel" et ont été traités comme tels.
(338) Plusieurs documents prouvent que les entreprises concernées ne se sont pas contentées d'utiliser régulièrement ces occasions pour échanger des idées sur leurs intentions respectives en matière d'augmentation des prix et de concentration de ces augmentations sur leurs clients existants, mais qu'elles ont réellement conclu un accord en ce sens. Les entreprises ont exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d'une manière déterminée en matière de prix, à savoir de faire en sorte que les prix convenus lors des réunions en cause soient atteints (239). Le fait que les augmentations de prix convenues puissent différer d'une entreprise à l'autre, de même que la date exacte de leur mise en œuvre, ne change rien à ce fait.
(339) La note AGA sur l'accord conclu en 1989 contient les expressions "tous les participants sont d'accord sur l'augmentation de prix" et "nous demanderons à AL une suspension de la concurrence pendant 4 à 5 mois" (240). La note AGA de 1991 relative à Messer déclare ceci: "MG est également d'accord sur les augmentations de 6 % des prix des gaz et des services" et "MG est également d'accord pour un cessez-le-feu en novembre, décembre, janvier et février, afin que nous puissions mener des négociations sur les augmentations de prix avec les clients" (241). La note Air Liquide de 1993 déclare qu'il y a "accord apparent sur une augmentation de prix au 1/1, mais pas sur le pourcentage ni sur le niveau minimal " (242). La note Air Products sur la réunion VFIG de novembre 1994 décrit en ces termes la position d'Air Liquide à propos du "cessez-le-feu": "quatre mois, sauf pour les sociétés qui ne participent pas". Cette même note décrit comment les sociétés devraient se comporter au cours du cessez-le-feu: "traiter uniquement avec ses propres clients" et "l'un des collègues P/soutien" (243). Cette dernière remarque montre que chaque société devait non seulement s'abstenir de contacter les clients de ses concurrents, mais devait également soutenir activement l'augmentation des prix lorsqu'elle-même était contactée par ces clients (244). Le compte rendu interne de réunion de Hoek Loos exprime cela en ces termes: "d'après certaines rumeurs, il y aurait un cessez-le-feu entre les différents fournisseurs de gaz industriels au 1er décembre 1994" (245). La note Air Products de 1996 déclare ceci: "ne pas contacter les clients des autres - vrac 1er novembre-1er mars" (246).
(340) Toutes ces notes décrivent un accord et pas uniquement un échange d'informations. Le fait que, à certaines occasions, des producteurs ne s'en soient pas tenus à leurs résolutions initiales et aient consenti des concessions à certains clients, ou créé des exceptions pour certaines catégories de clients, n'empêche pas qu'il y ait eu accord illicite au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité.
(341) Il y a également eu des accords sur des prix minimaux. Un barème des prix des gaz liquides devait être préparé, avec "discussion finale et accord" (247) pour janvier 1990. Cette même année, des prix minimaux pour les gaz en bouteille ont également été convenus. Ils ont été mis à jour au cours des années suivantes, mais pas nécessairement sur une base annuelle. La lettre de Hoek Loos à Messer de 1990 déclare que "toutes les parties dans notre pays reconnaissent que MG a confirmé qu'elle respecterait strictement les prix planchers mentionnés dans le barème joint" (248). La note AGA sur Messer de 1991 déclare que: "toutes les sociétés de gaz, y compris Messer, sont d'accord pour appliquer des prix planchers - prix de la location et du transport"; cette note contient également un commentaire manuscrit: "demander à Messer de respecter les prix planchers" ainsi qu'un ordre de représailles en Allemagne au cas où les discussions n'auraient pas une issue favorable (249). Hoek Loos, AGA, Air Products, Air Liquide et Messer se sont également mises d'accord sur des prix minimaux pour les gaz en bouteilles livrés aux petits clients pour 1995, 1996 et 1997.
(342) Les entreprises en cause sont aussi parvenues à un accord sur d'autres conditions commerciales au fil des années, tant pour les gaz en bouteilles que pour les gaz en vrac.
(343) Un prix minimal pour le transport et un prix minimal pour la location des bouteilles figuraient également dans le barème des prix planchers que Hoek Loos a envoyé à Messer, à Francfort, en 1990, et que toutes les parties aux Pays-Bas ont déclaré adopter. D'autres "décisions " (250) ont été prises en 1994 sur ces prix minimaux pour le transport et la location des bouteilles. Ces accords ont été confirmés dans le barème des prix minimaux adopté pour 1995, 1996 et 1997.
(344) L'introduction d'un supplément au titre de l'environnement et de la sécurité pour les bouteilles a été décidé lors des réunions VFIG. Il avait tout d'abord été envisagé que ce soit la VFIG qui en informe les clients. Sur l'avis de conseillers juridiques, il a ensuite été décidé que chaque entreprise devrait informer ses propres clients. Cette modification du projet initial ne change rien au fait que les frais "environnement et sécurité" ont été fixés par les entreprises en cause.
(345) Le dossier de la Commission contient plusieurs références au fait que l'un ou l'autre des concurrents a proposé des gaz à des prix et des conditions commerciales inférieurs à ceux qui avaient été convenus. Dans certains cas, il peut s'agir de mesures de rétorsion, dans d'autres, de l'action de vendeurs trop zélés. Ces différences relatives à des clients spécifiques ont été discutées de façon bilatérale. Il existe également certains documents contenant des instructions sur des augmentations de prix ou des prix planchers qui ne sont pas tout à fait conformes à ce qui avait été décidé entre concurrents. Toutefois, les instructions données à la fin des années civiles en vue d'appliquer les augmentations de prix convenues et de se concentrer sur leur application plutôt que sur les contacts avec des clients des concurrents sont beaucoup plus fréquentes. Cela vaut également pour la nécessité du respect des prix minimaux et d'autres conditions commerciales minimales.
(346) Outre les exemples déjà cités ou mentionnés, il existe des instructions internes d'Air Liquide concernant les gaz en bouteilles, datées du 29 juillet 1993 (251), qui rappellent ceci au personnel de vente: "il y a quelque temps, il a été convenu que seul le prix de location à la journée serait calculé, ce qui signifie qu'il n'y aura plus de périodes pendant lesquelles la location sera gratuite. Ces conditions doivent être respectées... Transport (frais de livraison): aucun écart ne peut être autorisé en ce qui concerne le coût du transport. Nos prix sont déjà faibles et les autres conditions doivent donc être maintenues. Location: récemment, le prix à la journée proposé semble être en baisse: il tombe souvent à 0,10. Il y a eu accord sur un prix plancher et celui-ci devra être respecté. "
(347) Bien qu'Air Liquide affirme que l'"accord" auquel il est fait référence soit de nature interne, la Commission estime que ces instructions ne peuvent pas être considérées indépendamment des accords sur les prix planchers et sur les autres conditions commerciales conclus par les concurrents en 1990 et 1993.
(348) Dans sa réponse à la communication des griefs (252), Air Liquide argue du fait que la Commission est parvenue à la conclusion tout à fait injustifiée qu'Air Liquide avait conclu des accords ou des pratiques concertées anticoncurrentiels autres que ceux concernant les frais "environnement et sécurité". Elle fait valoir que les documents utilisés par la Commission soulignent en réalité le fait qu'Air Liquide était un concurrent dur sur le marché, qui agissait de façon indépendante et ne voulait pas que sa politique soit influencée par des accords avec ses concurrents. Air Liquide souligne également que, dans ses allégations, la Commission se base essentiellement sur des documents provenant de concurrents d'Air Liquide.
(349) Air Liquide mentionne également à plusieurs reprises le fait qu'elle n'a jamais appliqué ces soi-disant accords, mais que sa politique commerciale a toujours été élaborée sur la base de décisions parfaitement autonomes. A l'appui de son argument, la société fait valoir qu'elle avait à l'époque une position très particulière sur le marché, qui justifiait une politique d'augmentation des parts de marché et se traduisait par des prix inférieurs à ceux de ses concurrents (253).
(350) En réponse à la communication des griefs (254), Westfalen fait valoir qu'elle n'a pas pris part à des accords anticoncurrentiels et que la Commission n'a pas prouvé qu'elle l'ait jamais fait. Elle affirme n'avoir jamais appliqué aucun accord et insiste sur le fait qu'elle n'a participé à aucune des "réunions sécurité" à Breda/Barendrecht, mais que, au contraire, elle a toujours pratiqué une politique commerciale agressive à l'encontre de ses concurrents.
(351) La Commission note que le fait qu'Air Liquide et Westfalen ont participé à plusieurs réunions qui avaient pour objet de restreindre la concurrence est attesté par les preuves matérielles qui figurent dans le dossier qu'elle a constitué. Même si l'on pouvait établir que l'un ou l'autre participant n'avait pas l'intention d'appliquer les intentions communes exprimées lors de ces réunions, les comportements n'en constitueraient pas moins des accords au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité. Compte tenu de la nature manifestement anticoncurrentielle des réunions au cours desquelles ces intentions ont été exprimées, les entreprises concernées, en y prenant part sans prendre publiquement leurs distances par rapport à ce qui y était dit, ont donné l'impression aux autres participants qu'elles souscrivaient à l'objet des discussions et se comporteraient en conséquence. La notion d'"accord" est, de par sa nature même, une notion objective. Les motifs réels (et les intentions cachées) qui soustendent le comportement adopté sont sans objet (255).
(352) Compte tenu de la régularité des réunions au cours desquelles les prix et les conditions commerciales évoqués ci-dessus ont été discutés et fixés, et compte tenu aussi de la similitude des méthodes utilisées pour parvenir à un accord sur les différents points, souvent abordés au cours des mêmes réunions, la Commission considère que le comportement en cause a constitué une seule infraction continue à l'article 81, paragraphe 1, du traité, pour chacune des périodes mentionnées au considérant 331.
(353) NTG, qui était un très petit opérateur sur le marché concerné, a dû être isolée aux fins de l'analyse reprise cidessus, pour les raisons suivantes. En effet, NTG n'a jamais participé à aucune réunion sur les augmentations de prix, les périodes de non-concurrence, les prix minimaux ou d'autres conditions commerciales, sauf dans un cas, et elle ne peut donc pas être considérée comme ayant participé au même ensemble d'accords que les autres sociétés destinataires de la présente décision. NTG n'a participé qu'à une seule des réunions (la réunion VFIG de septembre 1993) au cours desquelles les frais "environnement et sécurité" ont été abordés et supprimés de l'ordre du jour. Contrairement à ce qui est dit dans la communication des griefs, cette société n'a pas participé à la réunion de juin 1993, au cours de laquelle cette question a été abordée pour la première fois. En outre, NTG fait valoir que le fait qu'elle ait appliqué ces frais, après les autres membres du cartel, est d° au fait qu'elle s'est elle-même vu appliquer ces frais par ses propres fournisseurs, ce dont elle a apporté la preuve. C'est pourquoi aucune infraction ne sera retenue contre NTG.
4. RESTRICTION DE LA CONCURRENCE
(354) L'article 81, paragraphe 1, du traité stipule expressément que restreignent la concurrence les accords qui consistent à:
a) fixer de façon directe ou indirecte les prix de vente ou d'autres conditions de transaction;
b) limiter ou contrôler la production;
c) répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.
(355) Parmi l'ensemble des accords et des arrangements considérés dans la présente affaire, les éléments suivants sont pertinents aux fins de l'établissement d'une infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité:
a) accord sur des augmentations concertées de prix;
b) accord sur des périodes de non-concurrence pour mettre ces augmentations de prix en œuvre;
c) accord sur des prix minimaux;
d) accord sur d'autres conditions commerciales;
e) participation à des réunions régulières et autres contacts afin de parvenir à des accords sur ces restrictions et de les appliquer et/ou modifier le cas échéant.
(356) La finalité des réunions régulières et de la collusion continue des entreprises en cause était de mettre sur pied une série d'augmentations concertées des prix et d'autres conditions commerciales. En planifiant une action commune sur les prix, avec des augmentations de prix, des prix minimaux et la fixation d'autres conditions commerciales pour une période donnée, les entreprises visaient à éliminer les risques qu'impliquerait toute tentative unilatérale d'augmentation des prix, notamment le risque de perte de parts de marché. C'est pourquoi, les accords mentionnés ci-dessus avaient pour objet la restriction de la concurrence au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité. Cette restriction doit être jugée appréciable, compte tenu de la nature manifestement anticoncurrentielle des accords et de la puissance des entreprises sur le marché en cause.
(357) De tels accords ont pour objet la restriction de la concurrence au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité. Le prix étant le principal facteur de concurrence, les différents accords et mécanismes collusoires adoptés par les fournisseurs avaient pour objectif ultime une inflation des prix (ou du moins une limitation de leur baisse) à leur profit et au-dessus du niveau qui aurait été le leur s'ils avaient été déterminés dans le cadre d'une libre concurrence.
(358) Pour pouvoir établir que l'article 81, paragraphe 1, du traité est d'application, il n'est pas nécessaire de prendre en considération les effets réels d'un accord sur la concurrence, dès lors qu'il est établi que cet accord avait pour objet de restreindre la concurrence.
(359) Il semble que certains des accords en cause aient été plus efficaces que d'autres. L'érosion générale des prix moyens des gaz en vrac et en bouteilles entre 1989 et 1997 pourrait donner l'impression que les accords annuels d'augmentation des prix et la fixation de prix minimaux n'ont eu aucun effet. Toutefois, il est probable que cette érosion aurait évolué plus rapidement en l'absence de ces accords. Le simple fait que, année après année, les entreprises continuaient à planifier et à fixer ensemble leurs augmentations de prix, et aussi à se mettre d'accord sur une période de suspension de la concurrence, prouve que cela leur était utile. La succession des barèmes de prix planchers et d'autres conditions commerciales minimales doit également avoir été jugée importante au moins par les sociétés qui mettaient ces barèmes à jour au cours de leurs réunions. La remarquable stabilité des parts sur le marché des gaz en bouteilles d'une année sur l'autre peut également être le fait, du moins en partie, des accords sur les prix et les périodes de non-concurrence.
(360) En ce qui concerne l'accord relatif à l'introduction de frais au titre de l'environnement et de la sécurité pour les ventes de gaz en bouteilles, il doit être considéré comme très réussi, compte tenu du fait que ces frais sont rapidement devenus une caractéristique acceptée du marché, et le sont toujours à ce jour. L'introduction de frais de livraison pour le vrac semble avoir été acceptée par la plupart des clients et doit donc également être considérée comme une réussite.
5. EFFETS SUR LES ECHANGES ENTRE ETATS MEMBRES
(361) Les accords et/ou les pratiques concertées continus entre producteurs décrits dans la présente décision, et qui concernent les prix ainsi que d'autres conditions commerciales aux Pays-Bas, étaient susceptibles d'avoir, ou ont eu, des effets sensibles sur les échanges entre les Etats membres de l'Union européenne.
(362) L'article 81, paragraphe 1, du traité interdit certains accords entre entreprises et certaines pratiques concertées susceptibles d'affecter les échanges entre Etats membres. Cet article vise les accords susceptibles de porter préjudice à la réalisation d'un marché unique entre les Etats membres de l'Union européenne, soit en cloisonnant les marchés nationaux ou en affectant la structure de la concurrence dans le Marché commun.
(363) Selon une jurisprudence constante, "un accord entre entreprises, ou une pratique concertée, pour être susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres, doit, sur la base d'un ensemble d'éléments objectifs de droit ou de fait, permettre d'envisager, avec un degré de probabilité suffisant, qu'il ou elle puisse exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échange entre Etats membres, dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d'un marché unique entre les Etats membres" (256).
(364) Toutefois, l'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité, ne se limite pas à la partie des ventes de membres impliquant effectivement le transfert de biens d'un pays à un autre. Il n'est pas non plus nécessaire, pour que ces dispositions soient applicables, de démontrer que la participation individuelle de chacun, par opposition au cartel dans son ensemble, a affecté les échanges entre Etats membres (257).
(365) Dans la présente affaire, il convient de noter que les gaz industriels sont des produits faisant l'objet d'échanges entre Etats membres, ainsi que le confirment les statistiques officielles sur les échanges entres les Pays-Bas, l'Allemagne et l'Union économique belgo-luxembourgeoise (UEBL).
(366) En dépit du rayon économique effectif limité des livraisons de gaz industriels aux utilisateurs, les statistiques commerciales montrent que les importations et les exportations de gaz industriels à destination et au départ des Pays-Bas sont considérables. Il s'agit presque exclusivement de ventes et d'échanges au sein de groupes gaziers ou entre de tels groupes.
(367) En 1994-1996, les exportations d'argon (code NC 2804 21 00) des Pays-Bas vers l'Allemagne et vers l'UEBL ont varié de 12 000 à 21 000 tonnes, et les importations de 20 000 à 27 000 tonnes; en ce qui concerne l'azote (code NC 2804 30 00), les exportations ont varié de 34 000 à 70 000 tonnes et les importations de 28 000 à 72 000 tonnes; pour l'oxygène (code NC 2804 40 00), les exportations ont varié de 88 000 à 258 000 tonnes et les importations de 212 000 à 268 000 tonnes; pour le dioxyde de carbone (code NC 2811 21 00), les exportations ont varié de 201 000 à 207 000 tonnes, et les importations de 155 000 à 191 000 tonnes.
(368) Cette tendance a été confirmée par les entreprises de gaz industriels des Pays-Bas, dans leur réponse aux demandes de renseignements de la Commission en vertu de l'article 11 du règlement n° 17. Certaines d'entre elles achètent des gaz atmosphériques (azote, oxygène et argon) en vrac auprès de sociétés soeurs ou de concurrents situés en Belgique ou en Allemagne. D'autres, qui exploitent des unités de séparation de l'air aux Pays-Bas, vendent une partie de leur gaz en vrac à des sociétés soeurs en Belgique ou en Allemagne, ou bien à des concurrents. Les gaz achetés en vrac dans d'autres Etats membres sont ensuite mis en bouteilles aux Pays-Bas ou livrés aux clients sous forme liquide dans le même pays. L'acétylène est souvent acheté pour plusieurs sociétés soeurs dans le cadre d'un seul contrat.
(369) Ces accords d'échange et de soutien entre sociétés de gaz industriels aux Pays-Bas leur garantissent que leurs livraisons aux clients ne seront pas interrompues par des fermetures d'unités, prévues ou non. Les accords entre fournisseurs englobent souvent des sources de gaz dans d'autres Etats membres, qui sont la propriété des groupes auxquels les fournisseurs appartiennent.
(370) L'effet des infractions sur les échanges entre Etats membres est encore plus appréciable lorsque, comme c'est le cas dans la présente affaire, toutes les entreprises en cause font partie de groupes multinationaux qui possèdent des installations de production de gaz industriels et médicaux, et vendent ces gaz dans plusieurs Etats membres, dont la Belgique et l'Allemagne.
(371) Cela est dû au fait que les groupes multinationaux en question constituent une unité économique, et c'est pourquoi, toute modification de leur position concurrentielle dans un Etat membre aura des répercussions sur la position de l'intégralité du groupe.Si l'on raisonne uniquement en termes de flux monétaires à l'intérieur d'un groupe, toute amélioration de la rentabilité de sa filiale néerlandaise est susceptible d'affecter les échanges, en raison des modifications des versements de ou des capitaux nécessaires aux investissements que cela entraînera (258). La vente du département "gaz en bouteilles" belge d'AGA à la filiale belge d'Air Liquide en 1994 et la vente du département "gaz en bouteilles" autrichien d'Air Liquide à AGA, cette même année, indiquent l'importance des répercussions de la rentabilité des filiales pour le groupe dans son ensemble et la nécessité de l'apprécier sur l'ensemble de l'Europe. On peut également citer, à titre d'exemple, les instructions données par les sièges des groupes à leurs filiales néerlandaises, dans lesquelles ils soulignent l'importance stratégique des livraisons aux gros clients néerlandais pour la situation des groupes dans leur ensemble. En effet, certains très gros clients coordonnent leurs achats de gaz industriels liquides à l'échelle européenne.
(372) La dimension multinationale des groupes de gaz industriels constitue également un élément important. En effet, ainsi que nous l'avons indiqué à l'occasion de l'analyse de la structure du marché, à la partie I, section A, titre 5, point c), le dossier de la Commission contient de très nombreuses informations attestant que les représailles contre les concurrents qui "volent" des clients en faisant baisser les prix, constituent une pratique courante dans ce secteur. Il existe également des preuves montrant que ces représailles ne sont pas nécessairement limitées à l'Etat membre ou à la région dans lesquels l'"agression" a été commise. Au contraire, de nombreuses entreprises estiment que les représailles sont beaucoup plus efficaces si elles sont exercées sur une vaste échelle, de préférence sur le marché national de l'"agresseur". C'est pourquoi, une entreprise de gaz industriels aux Pays-Bas ayant participé aux infractions et n'ayant pas respecté les accords décrits dans la présente décision, risquait d'être la victime de représailles non seulement aux Pays-Bas, mais également dans les autres Etats membres.
(373) Dans sa réponse à la communication des griefs (259), Air Liquide fait valoir que le fait que les parties appartiennent à des groupes multinationaux n'influe en rien sur les effets des infractions alléguées sur les échanges entre Etats membres. C'est pourquoi la Commission doit prouver que le soi-disant comportement anticoncurrentiel a affecté les échanges entre Etats membres, ce qu'elle n'a pas réussi à faire. En outre, Air Liquide estime que le fait que des représailles contre des concurrents aient même été exercées sur d'autres marché nationaux montre que les entreprises concernées se sont comportées dans une optique de concurrence.
(374) La Commission n'est pas tenue de prouver que les accords ont eu des effets sur les échanges entre Etats membres, mais elle doit établir que le comportement incriminé est susceptible d'avoir eu de tels effets. Or, le fait que les gaz industriels fassent l'objet d'échanges entre Etats membres, que ce soit entre concurrents ou entre sociétés soeurs appartenant au même groupe, a une influence directe sur le fait qu'un comportement anticoncurrentiel sur un marché est susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres.
(375) Outre les arguments relatifs à la dimension multinationale des groupes en cause, la Commission note également que la grande majorité des acheteurs de gaz industriels sont des entreprises manufacturières qui, soit exportent leurs produits, soit sont en concurrence sur le marché néerlandais avec leurs importations. Elles opèrent dans des secteurs tels que la construction navale, l'agroalimentaire, les produits chimiques, l'électronique, etc. Pratiquement toutes les entreprises manufacturières néerlandaises qui dépendent des gaz industriels sont susceptibles d'être atteintes par des infractions telles que celles décrites dans la présente décision, en raison du fait que les entreprises qui y ont participé représentent plus de 80 % de l'offre de ces gaz aux Pays-Bas. Du fait que ces entreprises appartiennent à des groupes multinationaux possédant des filiales nationales, même les clients situés dans des régions frontalières des Pays-Bas ne peuvent pas s'adresser à des fournisseurs d'un Etat membre voisin appartenant aux mêmes groupes. C'est pourquoi, les effets de l'infraction sur les échanges entre les Pays-Bas et les autres Etats membres doivent également être considérés comme s'étendant aux secteurs dans lesquels opèrent les acheteurs de gaz industriels.
(376) Enfin, la Commission note que deux fournisseurs indépendants de gaz industriels, plus petits, sont implantés en Belgique: ACP et IJsfabriek Strombeek. Tous deux vendent de petites quantités de CO2 liquide et de gaz en bouteilles aux Pays-Bas, en concurrence avec les entreprises destinataires de la présente décision (260).
(377) Pour toutes ces raisons, il est possible de conclure que les infractions décrites dans la présente décision avaient, ou étaient susceptibles d'avoir, des effets significatifs sur les échanges entre Etats membreset qu'elles entrent donc dans le champ d'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité.
E. APPLICABILITE DE LA PRESCRIPTION
(378) Conformément à l'article 1er du règlement (CEE) n° 2988-74 du Conseil du 26 novembre 1974 relatif à la prescription en matière de poursuites et d'exécution dans le domaine du droit des transports et de la concurrence de la Communauté économique européenne (261), le pouvoir de la Commission de prononcer des amendes et sanctions pour le type d'infractions en cause dans la présente affaire est soumis à un délai de prescription de cinq ans. La prescription court à compter du jour où l'infraction a été commise. Pour les infractions continues, la prescription ne court qu'à compter du jour où l'infraction a pris fin.
(379) Conformément à l'article 2 du règlement (CEE) n° 2988-74, la prescription est interrompue par tout acte de la Commission visant à l'instruction et à la poursuite de l'infraction. La prescription court à nouveau à partir de chaque interruption. La poursuite de l'infraction par la Commission a commencé avec les vérifications surprises réalisées le 11 décembre 1197, conformément à l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17.
(380) Ainsi que nous l'avons démontré à la partie I de la présente décision, la Commission possède un ensemble de preuves matérielles pour la plupart des sociétés en cause de 1989 à 1991 et de septembre 1993 à la date des vérifications, en décembre 1997.
(381) Dans leur réponse à la communication des griefs, AGA, Hoek Loos, Air Products, Air Liquide et Messer ont fait valoir que la Commission manquait de preuves matérielles pour la période située entre 1991 et 1992-1993. Par conséquent, les infractions qui auraient eu lieu avant décembre 1992 devraient être prescrites, dans la mesure où elles sont antérieures de plus de cinq ans à la date des vérifications.
(382) AGA, en particulier, affirme (262) que la prescription devrait s'appliquer non seulement au barème de prix minimaux pour le vrac de 1990, ainsi que la Commission l'a déjà admis dans la communication des griefs, mais également aux prix de location des réservoirs pour le vrac de 1990, aux prix minimaux du transport pour les gaz en bouteilles de 1990, à l'accord de 1990 sur la location des bouteilles, à l'accord initial sur les prix minimaux ainsi qu'aux accords relatifs à des augmentations de prix de 1990, 1991 et 1992.
(383) Hoek Loos affirme (263) qu'il existe des lacunes dans les preuves pour la période 1992-1994 en ce qui concerne les accords sur les augmentations de prix, pour la période 1991-1993 en ce qui concerne la suspension de la concurrence, pour la période 1992-1994 en ce qui concerne les prix minimaux pour les bouteilles et pour la période 1991-1993 en ce qui concerne les autres conditions contractuelles. C'est pourquoi, selon Hoek Loos, il devrait y avoir prescription pour la période antérieure à décembre 1992.
(384) Air Products, elle aussi, affirme (264) que la Commission n'a pas apporté la preuve que toutes les infractions avaient eu lieu et s'étaient poursuivies au cours de l'intégralité de la période 1989-1997. Le dossier de la Commission ne contient aucune preuve attestant la participation d'Air Liquide de 1992 à fin 1993. D'une manière générale, il y a à nouveau des preuves à partir de décembre 1993. C'est pourquoi Air Products affirme également que, conformément à la réglementation sur la prescription, la Commission ne peut pas infliger d'amendes pour les infractions qui ont eu lieu de 1989 à 1991.
(385) Air Liquide est d'accord avec le délai de prescription accepté par la Commission en ce qui concerne le barème des prix des gaz liquides de 1990. Elle souligne (265) également qu'il y a une absence de preuves matérielles pour la période allant de juin 1991 à juin 1993.
(386) Messer affirme (266) qu'il n'est pas possible d'apporter la preuve qu'il y a eu infraction continue, et que toutes les infractions distinctes antérieures au 11 décembre 1992 peuvent être prescrites. La Commission ne peut donc infliger une amende que pour la période 1993-1997.
(387) La Commission prend note des arguments avancés par les parties en ce qui concerne la prescription. Elle reconnaît que celle-ci s'applique dans la présente affaire, dans la mesure où elle ne possède pas suffisamment d'éléments pour établir l'existence d'une seule infraction continue de 1989 à 1997.
(388) C'est pourquoi, en dépit du fait que la Commission a établi l'existence d'une infraction pour la période 1989-1991, elle ne prendra en considération, pour le calcul des amendes, que la période allant de septembre 1993 jusqu'à décembre 1997.
F. DUREE DE L'INFRACTION
(389) Compte tenu que la position qu'elle a adoptée à propos de la prescription dans la présente affaire, la Commission considérera, aux fins de la détermination des amendes, que les infractions ont commencé en septembre 1993.
(390) Il n'est pas possible d'établir à quelle date le cartel lui-même a cessé d'exister, mais la Commission possède un bon ensemble de preuves matérielles allant jusqu'à décembre 1997, date à laquelle les vérifications ont été effectuées. Après les vérifications, la plupart des entreprises ont donné l'assurance à la Commission qu'elles avaient diffusé des instructions internes donnant l'ordre de mettre fin à toutes les formes d'infraction au droit de la concurrence, quelles qu'elles soient. Aux fins de la détermination des amendes, la Commission considérera que l'entente a pris fin en décembre 1997.
(391) La participation de chaque société à l'infraction a donc été établie comme suit:
1. HOEK LOOS, AGA, AIR LIQUIDE, AIR PRODUCTS ET MESSER
(392) Hoek Loos, AGA, Air Liquide, Air Products et Messer ont pris part aux accords et/ou pratiques concertées suivants:
a) fixation d'augmentations de prix de décembre 1993 à décembre 1997, qui est le dernier mois de l'année au cours de laquelle les dernières augmentations de prix devaient être appliquées;
b) détermination de périodes de non-concurrence de décembre 1993 à mars 1997, afin d'appliquer les augmentations de prix mentionnées ci-dessus;
c) fixation de prix minimaux de mars 1994 à décembre 1997, qui est le dernier mois de l'année pour laquelle les derniers prix minimaux ont été convenus;
d) fixation du prix de transport des bouteilles de juin 1994 (Messer à compter de juin 1996) jusqu'en décembre 1997, qui est le dernier mois de l'année pour laquelle les derniers prix de transport des bouteilles ont été convenus;
e) fixation du prix minimal de location des bouteilles de juin 1994 à décembre 1997, qui est le dernier mois de l'année pour laquelle les derniers prix minimaux de location des bouteilles ont été convenus;
f) fixation d'un supplément de prix pour les bouteilles au titre de l'environnement et de la sécurité de septembre 1993 à octobre 1995, qui est le mois au cours duquel une première société (Messer) a augmenté ce supplément de façon autonome par rapport au niveau convenu en 1993;
g) accords collusoires concernant le prix payé par les acheteurs de gaz liquides pour la location des réservoirs, de janvier 1997 à décembre 1997, qui est le dernier mois de l'année pour laquelle une proposition d'accord sur la location des réservoirs a été faite.
2. WESTFALEN
(393) Westfalen a pris part aux accords et/ou pratiques concertées suivants:
a) fixation d'augmentations de prix d'octobre 1994 à décembre 1995, qui est le dernier mois de l'année au cours de laquelle les dernières augmentations de prix devaient être appliquées;
b) détermination de périodes de non-concurrence d'octobre 1994 à janvier 1995, afin d'appliquer les augmentations de prix mentionnées ci-dessus;
c) fixation de prix minimaux de mars 1994 à décembre 1995, qui est le dernier mois de l'année pour laquelle les derniers prix minimaux ont été convenus.
3. BOC
(394) BOC a pris part aux accords et/ou pratiques concertées suivants:
a) fixation d'augmentations de prix d'octobre 1994 à décembre 1995, qui est le dernier mois de l'année au cours de laquelle les dernières augmentations de prix devaient être appliquées;
b) détermination de périodes de non-concurrence d'octobre 1994 à janvier 1995, afin d'appliquer les augmentations de prix mentionnées ci-dessus;
c) fixation du prix de transport des bouteilles de juin 1994 à décembre 1994, qui est le dernier mois de l'année pour laquelle les derniers prix de transport des bouteilles ont été convenus;
d) fixation du prix minimal de location des bouteilles de juin 1994 à décembre 1994, qui est le dernier mois de l'année au cours de laquelle BOC a au moins participé à l'accord.
G. DESTINATAIRES DE LA DECISION
(395) Afin d'identifier les destinataires de la présente décision, il convient de déterminer quelles sont les personnes morales responsables de l'infraction
(396) Les faits exposés à la partie I prouvent que NV Hoek Loos, Air Liquide BV, Air Products Nederland BV, Messer Nederland BV et Westfalen Gassen Nederland BV ont directement participé aux accords collusoires relatifs aux gaz médicaux et industriels aux Pays-Bas. Par conséquent, chacune de ces sociétés assumera la responsabilité de ses infractions respectives et sera donc destinataire de la présente décision.
(397) En ce qui concerne Air Products Nederland BV, la Commission note que la défense de cette société a été assumée par Air Products Europe Inc., qui a expressément demandé à recevoir toute la correspondance relative à la présente affaire et qui a également répondu à la communication des griefs et participé à l'audition au nom d'Air Products Nederland BV. En outre, par lettre du 13 juin 2002, Air Products Nederland BV a formellement renoncé à ce que la Commission lui adresse directement une communication des griefs dans la présente affaire.
(398) En ce qui concerne BOC, c'est le groupe BOC qui est jugé responsable de l'infraction de ses filiales faisant partie de l'entreprise BOC Gases Benelux, citée dans la présente décision. La communication des griefs avait déjà été adressée au groupe BOC, qui est également destinataire de la présente décision.
(399) Dans sa réponse à la communication des griefs (267), BOC fait valoir que BOC Benelux était la seule entreprise du groupe BOC responsable de la production et de la vente de gaz industriels aux Pays-Bas, et que rien ne prouve que le siège social du groupe, au Royaume-Uni, avait connaissance à l'époque des infractions alléguées. BOC affirme également que BOC Benelux a agi de façon autonome au cours de la période 1989-1997 et que, compte tenu de ce fait, il aurait été plus approprié d'adresser la communication des griefs à Air Liquide, qui a racheté le secteur "gaz" du groupe BOC au Benelux fin 1998, et est donc le successeur de cette entreprise.
(400) Au cours de l'audition, Air Liquide a souligné que la Commission avait eu raison d'adresser la communication des griefs au groupe BOC, dans la mesure où la période sur laquelle a porté l'enquête de la Commission était antérieure à la date à laquelle BOC Benelux a été vendue à Air Liquide.
(401) A cet égard, il convient de noter que, au cours de la période en cause, BOC Gases Benelux et les sociétés qui en faisaient partie, ainsi qu'il est dit aux considérants 36 à 38, étaient des filiales à 100 % du groupe BOC. Au cours des vérifications effectuées chez BOC NV, le 24 mars 1998, par les services de la Commission, conformément à l'article 14, paragraphe 2, du règlement n° 17, un membre du service juridique du groupe BOC était présent (268) et son nom figurait également sur toute la correspondance adressée par les services de la Commission à BOC Gases Benelux. Lorsque le directeur général de BOC Gases Benelux, M. Celis, a quitté son poste, le conseiller juridique externe de BOC Benelux a informé les services de la Commission que M. Celis n'était plus responsable des activités de BOC Benelux et que c'est à lui-même que toute la correspondance relative à l'enquête devait désormais être adressée. Ce conseiller juridique, qui avait agi au nom de BOC Gases Benelux pendant et après les vérifications de la Commission, représentait également le groupe BOC dans le cadre des réponses à la communication des griefs. En outre, la Commission note que ce même M. Celis, qui avait participé personnellement à certaines des réunions du cartel identifiées dans la présente décision, a ensuite assumé d'autres fonctions au sein des sociétés du groupe BOC.
(402) En outre, après la vente à Air Liquide du secteur "gaz" du groupe BOC au Benelux, le groupe BOC est resté le seul interlocuteur de la Commission en ce qui concerne les infractions alléguées de BOC Gases Benelux sur le marché néerlandais (269). C'est également le groupe BOC qui a répondu sur le fond aux objections de la Commission relatives au comportement de ses filiales pendant la période en cause.
(403) Compte tenu de ce qui précède, la Commission estime que le groupe BOC peut être tenu pour responsable du comportement de ses filiales tout au long de la période en cause.
(404) En ce qui concerne AGA, la Commission tient AGA Gas BV pour responsable des infractions identifiées dans la présente décision et c'est à elle qu'elle a adressé la communication des griefs. Ainsi qu'il a déjà été dit à la partie I, section A, titre 2, point b), AGA Gas BV a connu une série de modifications structurelles qui ont abouti à sa scission en deux entités distinctes, en 2000. Ensuite, ce qui restait de ses activités aux Pays-Bas a été acquis, en 2001, par Hoek Loos pour le secteur "liquide" et par Air Products pour le secteur "gaz en bouteilles". Cette dernière opération n'a été achevée qu'en août 2001, après l'envoi de la communication des griefs aux parties.
(405) Compte tenu du fait qu'AGA Gas BV avait cessé d'exister en droit, c'est AGA AB qui a répondu sur le fond à la communication des griefs, au nom de son ancienne filiale. Dans sa réponse, AGA AB a expressément déclaré qu'elle était disposée à assumer la responsabilité des infractions d'AGA Gas BV (270), du fait qu'il était impossible de ne pas trouver de responsable pour le comportement de cette société. Compte tenu des éléments propres à la présente affaire, la Commission partage l'approche d'AGA AB à cet égard. En outre, par lettre du 13 juin 2000, AGA AB a formellement renoncé à ce que la Commission lui adresse directement une communication des griefs dans la présente affaire. C'est pourquoi, la présente décision est adressée à AGA AB en tant que successeur d'AGA Gas BV.
H. MESURES CORRECTRICES
1. ARTICLE 3 DU REGLEMENT N° 17
(406) Lorsque la Commission constate une infraction aux dispositions de l'article 81, paragraphe 1, du traité, elle peut obliger les entreprises intéressées à mettre fin à l'infraction constatée, conformément à l'article 3 du règlement n° 17.
(407) Si certaines entreprises ont informé la Commission que des mesures avaient été prises pour faire en sorte que leurs représentants ne participent plus à des réunions anticoncurrentielles, la Commission ne sait pas si ces réunions, ou d'autres formes de collusion entre les sociétés, ont en fait jamais cessé.
(408) La Commission a donc l'intention non seulement de constater qu'une infraction a été commise, mais aussi d'obliger les entreprises à y mettre fin.
2. ARTICLE 15, PARAGRAPHE 2, DU REGLEMENT N° 17
a) Généralités
(409) Conformément à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises des amendes de 1 000 euros au moins et d'un million d'euros au plus, ce dernier montant pouvant être porté à 10 % du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction, lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles ont commis une infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité.
(410) Pour déterminer le montant de l'amende, la Commission doit tenir compte de tous les éléments pertinents, en particulier de la gravité et de la durée de l'infraction, qui sont les deux critères expressément mentionnés à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17.
(411) Le rôle joué par chaque entreprise partie à l'infraction sera déterminé individuellement. La Commission tiendra notamment compte, lors du calcul de l'amende, d'éventuelles circonstances aggravantes ou atténuantes, et elle appliquera, le cas échéant, la communication sur la non-imposition d'amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (271).
b) Montant des amendes
(412) L'entente a constitué une infraction délibérée à l'article 81, paragraphe 1, du traité. En pleine connaissance de la nature restrictive de leurs actes et, qui plus est, de leur illégalité, les principaux fournisseurs du secteur se sont entendus pour fixer les prix et tout un ensemble de conditions commerciales, dans le but de restreindre la concurrence dans un secteur industriel important.
i) Montant de base
(413) Le montant de base est déterminé en fonction de la gravité et de la durée de l'infraction.
Gravité
(414) Pour apprécier la gravité de l'infraction, la Commission tient compte de sa nature, de ses effets réels sur le marché, lorsqu'ils peuvent être déterminés, ainsi que de la taille du marché géographique en cause.
Nature de l'infraction
(415) Il ressort des faits décrits que la présente infraction a porté sur la fixation d'augmentations de prix, de prix minimaux et d'autres conditions commerciales, qui constituent, de par leur nature même, les plus graves types d'infractions à l'article 81, paragraphe 1, du traité.
(416) Les participants à l'entente étaient les principaux opérateurs du marché néerlandais, et les accords ont été conçus au plus haut niveau de la hiérarchie de chaque société en cause. De par sa nature même, la mise en œuvre d'une entente de ce type entraîne automatiquement d'importantes distorsions de la concurrence au bénéfice exclusif des producteurs en cause, et elle est extrêmement préjudiciable aux clients et, en dernier ressort, au grand public.
(417) C'est pourquoi, la Commission considère que les accords en cause constituent une infraction très grave à l'article 81, paragraphe 1.
Effets réels de l'infraction
(418) Dans leurs réponses à la communication des griefs, AGA et Hoek Loos ont fait valoir qu'il y avait eu une érosion des prix des gaz en bouteilles et des gaz liquides aux Pays-Bas au cours de la période 1990-1999, et elles ont fourni une étude (272) qui confirme généralement cette tendance. En outre, ces sociétés font valoir qu'il y a toujours eu une forte concurrence sur le marché néerlandais et que les parts de marché des opérateurs en place ont fluctué, ainsi que le confirme l'autorité néerlandaise de la concurrence (NMa) dans sa décision relative au transfert Air Products/AGA du 6 août 2001, annexée aux réponses d'AGA, Hoek Loos et Messer à la communication des griefs.
(419) AGA et Hoek Loos affirment (273) en outre que le fait qu'elles aient cessé de prendre part aux activités anticoncurentielles n'a eu aucune influence sur l'évolution des prix et la fluctuation des parts de marché, contrairement à ce qu'affirmait la Commission dans la communication des griefs, ce qui prouve que le soi-disant comportement anticoncurrentiel n'a pas eu d'effets sur le marché.
(420) La Commission note qu'il n'est pas nécessaire de quantifier en détail la mesure dans laquelle les prix étaient différents de ce qu'ils auraient pu être en l'absence des accords en cause. En effet, cela ne peut pas toujours être mesuré de façon fiable, dans la mesure où un certain nombre de facteurs extérieurs peuvent avoir affecté simultanément l'évolution des prix du produit, ce qui rend extrêmement difficile toute conclusion sur l'importance relative de tous les facteurs possibles.
(421) La Commission est parvenue à la conclusion qu'il est inconcevable que les parties aient accepté de se réunir de façon régulière pour fixer des augmentations de prix, des prix minimaux et des conditions commerciales minimales sur une aussi longue période, compte tenu des risques qu'elles encouraient, si elles avaient estimé que l'entente n'avait aucun effet, ou seulement des effets limités, sur le marché des gaz industriels et médicaux aux Pays- Bas.
Taille du marché géographique en cause
(422) L'infraction a été commise par des entreprises qui, au cours de la période en cause, couvraient en moyenne 90 % du marché néerlandais des gaz industriels et médicaux en bouteilles et en vrac. Toutefois, comme ils se sont limités aux Pays-Bas et à un secteur d'importance économique moyenne, les accords n'ont eu des effets que sur une partie limitée du Marché commun.
(423) Compte tenu de ces éléments (portée géographique limitée du marché et secteur d'importance économique moyenne), la Commission est parvenue à la conclusion que les accords et/ou pratiques concertées en cause dans la présente procédure constituent une infraction grave aux règles de concurrence communautaire, et non une infraction très grave.
(424) La présente affaire est comparable à d'autres affaires récentes d'une portée géographique limitée qui portaient sur la fixation de prix, dans lesquelles la Commission a décidé de qualifier les infractions de "graves" plutôt que de "très graves". Dans l'affaire British Sugar (274), la Commission a admis que la dimension géographique limitée du marché en cause (Grande-Bretagne) constituait un argument recevable pour amoindrir la gravité de l'infraction. La Commission a également tranché en ce sens dans l'affaire des transbordeurs grecs (275), dans laquelle elle a statué que l'infraction avait eu des effets sur un marché (toutes les liaisons Grèce-Italie dans l'Adriatique), qui restait limité par rapport à d'autres marchés communautaires.
(425) Néanmoins, il convient de noter que la Commission n'est pas tenue de déroger à la règle selon laquelle une entente portant sur les prix constitue, de par sa nature même, une "infraction très grave" si la dimension géographique du marché en cause est limitée. Dans l'affaire SAS-Maersk (276), la Commission a estimé qu'il y avait une différence importante par rapport à l'affaire des transbordeurs grecs, dans la mesure où le partage du marché entre SAS et Maersk Air affectait non seulement les trois liaisons sur lesquelles les infractions ont été établies, mais restreignait la concurrence sur l'ensemble des liaisons à destination, au départ et à l'intérieur du Danemark, y compris les liaisons entre le Danemark et les autres Etats membres et entre le Danemark et les membres de l'Espace économique européen (EEE). C'est pourquoi la Commission a estimé que l'infraction aurait des répercussions dans l'ensemble de l'EEE et au-delà, ce qui n'est pas le cas dans l'affaire des transbordeurs grecs ni dans la présente affaire.
(426) Dans l'affaire des bières belges (277), la Commission a également décidé de conserver la qualification "très grave", bien que l'accord de fixation des prix et de partage des marchés conclu entre Interbrew et Danone/Alken-Maes ait été limité au secteur de la bière en Belgique. Parmi les caractéristiques spéciales de cette affaire, il y avait les menaces de Danone de prendre des mesures de rétorsion contre Interbrew en France (considérées comme circonstance aggravante) ainsi que la participation personnelle des dirigeants d'Interbrew, d'Alken-Maes et de Danone du moment. Les présidents-directeurs généraux eux-mêmes, et d'autres cadres dirigeants des sociétés, se sont réunis régulièrement pour mettre en place et surveiller les accords illicites. Le fait qu'Interbrew soit le deuxième brasseur mondial et que la société mère d'Alken-Maes, Danone, soit l'un des leaders mondiaux de l'agroalimentaire, a donné une dimension plus mondiale à cette affaire. Dans la présente affaire, en revanche, la Commission suppose que les accords illicites entre les sociétés ont été décidés essentiellement au niveau des filiales néerlandaises des groupes concernés. En outre, le secteur belge de la bière est économiquement beaucoup plus important (un marché de produits de consommation finale dont la valeur équivaut à plusieurs fois celle du marché néerlandais des gaz industriels) que le marché en cause dans la présente affaire, et tous les segments du secteur étaient concernés (tous les types de bières, les hôtels et les restaurants tout autant que la distribution), les accords ayant porté sur de nombreux facteurs de concurrence (prix, promotions, investissements, publicité, structure des prix et échange de chiffres sur les ventes).
(427) De même, dans l'affaire des banques autrichiennes (278), le cartel a été qualifié de "très grave" bien que l'accord de fixation des prix entre les huit banques autrichiennes (Club Lombard) fût limité au secteur bancaire autrichien. Dans la classification de cette affaire, la Commission a pris en considération que le secteur bancaire a une importance exceptionnelle pour les consommateurs et le monde des affaires et par conséquent pour l'économie en général. De plus, le réseau du cartel couvrait l'ensemble des produits et services bancaires - fixation des taux d'intérêt des prêts et de l'épargne pour les ménages et les enreprises ainsi que les commissions que les clients devaient payer pour certains services -, il était hautement institutionnalisé et il couvrait l'intégralité du pays jusqu'au plus petit village. Enfin, l'importance économique du marché en cause était encore plus grande dans cette affaire que dans l'affaire des bières belges mentionnée ci-dessus.
Conclusion de la Commission en qui concerne la gravité de l'infraction
(428) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est parvenue à la conclusion que les accords et/ou pratiques concertées en cause dans la présente procédure constituaient une infraction grave aux règles de concurrence communautaires. Classification des membres du cartel
(429) Compte tenu des caractéristiques de la présente affaire, dans laquelle plusieurs entreprises sont impliquées, il faudra, lors de la détermination du montant de base des amendes, tenir compte de l'importance spécifique du comportement illicite de chaque entreprise, et donc de son impact réel sur la concurrence. A cet effet, les entreprises concernées peuvent en principe être subdivisées en quatre catégories, en fonction de leur importance relative sur le marché concerné.
(430) Dans la présente affaire, la Commission estime approprié de prendre le chiffre d'affaires réalisé aux Pays-Bas avec les produits en cause comme base de comparaison de l'importance relative des entreprises sur le marché concerné. Cette approche est corroborée par le fait que l'entente est limitée aux Pays-Bas et que son objectif principal était de parvenir à un accord sur des augmentations de prix, des prix minimaux et certaines conditions commerciales, pour les gaz en bouteilles et les gaz liquides, sur ce marché. La comparaison a été effectuée sur la base du chiffre d'affaires réalisé aux Pays-Bas en 1996, qui est la dernière année complète avant les vérifications. Les chiffres concernés figurent au tableau 1, considérant 75
(431) Hoek Loos et AGA sont de loin les deux principaux opérateurs sur les marchés concernés et elles seront donc classées dans la première catégorie. Air Products et Air Liquide, qui étaient des opérateurs moyens sur ces marchés, seront placées dans la deuxième catégorie, et Messer et BOC, dont l'importance sur le marché en cause est bien moindre, dans la troisième. Dans la quatrième, on trouvera Westfalen, qui ne détient qu'une part extrêmement faible sur ces marchés.
(432) Sur cette base, les montants calculés par la Commission au titre de la gravité des infractions sont les suivants:
- AGA: 10 millions d'euros,
- Air Liquide: 2,6 millions d'euros,
- Air Products: 2,6 millions d'euros,
- BOC: 1,2 million d'euros,
- Hoek Loos: 10 millions d'euros,
- Messer: 1,2 million d'euros,
- Westfalen: 0,45 million d'euros.
Durée de l'infraction
(433) La Commission estime que Hoek Loos, AGA, Air Products, Air Liquide et Messer ont enfreint l'article 81, paragraphe 1, du traité de septembre 1993 à décembre 1997, Westfalen de mars 1994 à décembre 1995 et BOC de juin 1994 à décembre 1995.
(434) La Commission en conclut que l'infraction a été de durée moyenne (de un à quatre ans) pour chaque entreprise concernée.
Participation de chaque société individuellement
(435) Hoek Loos, AGA, Air Liquide, Air Products et Messer ont participé aux accords et/ou pratiques concertées suivants:
a) fixation des augmentations de prix: de décembre 1993 à décembre 1997;
b) détermination des périodes de non-concurrence: de décembre 1993 à mars 1997;
c) fixation de prix minimaux, de mars 1994 à décembre 1997;
d) fixation des prix du transport des bouteilles: de juin 1994 (Messer de juin 1996) à décembre 1997;
e) fixation du prix de location minimal des bouteilles: de juin 1994 à décembre 1997;
f) fixation d'un supplément de prix au titre de l'environnement et de la sécurité pour les bouteilles: de septembre 1993 à octobre 1995;
g) accords collusoires relatifs au prix de location des réservoirs payé par les acheteurs de gaz liquides: de janvier 1997 à décembre 1997.
(436) Westfalen a participé aux accords et/ou pratiques concertées suivants:
a) fixation des augmentations de prix: d'octobre 1994 à décembre 1995;
b) détermination des périodes de non-concurrence: d'octobre 1994 à janvier 1995;
c) fixation de prix minimaux: de mars 1994 à décembre 1995.
(437) BOC a pris part aux accords et/ou pratiques concertées suivants:
a) fixation des augmentations de prix: d'octobre 1994 à décembre 1995;
b) détermination des périodes de non-concurrence: d'octobre 1994 à janvier 1995;
c) fixation du prix de transport des bouteilles: de juin 1994 à décembre 1994;
d) fixation du prix de location minimal des bouteilles de juin 1994 à décembre 1994.
Conclusion sur les montants de base
(438) La Commission a donc fixé les montants de base des amendes comme suit:
- AGA: 14 millions d'euros,
- Air Liquide: 3,64 millions d'euros,
- Air Products: 3,64 millions d'euros,
- BOC: 1,38 million d'euros,
- Hoek Loos: 14 millions d'euros,
- Messer: 1,68 million d'euros,
- Westfalen: 0,51 million d'euros.
ii) Circonstances atténuantes
Rôle exclusivement passif dans l'infraction
(439) BOC affirme qu'elle n'a joué qu'un rôle passif dans les infractions et n'a pas organisé de réunions bilatérales. A cet égard, le directeur de BOC Gases Benelux pendant la période concernée a déclaré qu'il avait été surpris lors de la réunion d'octobre 1994, lorsque le thème des augmentations de prix avait été abordé (279).
(440) La Commission a tenu compte du fait que BOC n'avait joué qu'un rôle passif dans l'infraction et qu'elle n'avait pas pris part à tous ses aspects. C'est pourquoi, elle estime que ces circonstances atténuantes justifient une réduction de 15 % du montant de base de l'amende imposée à BOC.
(441) Westfalen fait valoir qu'elle n'a joué qu'un rôle passif dans l'infraction et nie aussi avoir su à l'avance que des questions anticoncurrentielles seraient soulevées lors des réunions VFIG d'octobre et de novembre 1994, ces questions ne figurant pas dans les projets d'ordre du jour. Westfalen affirme qu'elle n'a pas participé activement à ces discussions et que le fait qu'elle ait exprimé des doutes quant à la coordination des prix lors des réunions VFIG a incité les principales entreprises à l'origine de l'entente à se réunir en dehors du cadre de la VFIG, ce qu'elles ont fait à compter du début de 1995.
(442) La Commission a tenu compte du fait que Westfalen n'avait joué qu'un rôle passif dans les infractions et qu'elle n'avait pas pris part à tous leurs aspects. C'est pourquoi, la Commission estime que ces circonstances atténuantes justifient une réduction de 15 % du montant de base de l'amende imposée à Westfalen.
Absence de mise en œuvre des accords illicites
(443) Dans sa réponse à la communication des griefs, Air Liquide a affirmé avoir poursuivi une politique commerciale autonome sur le marché, qui n'était pas influencée par les accords conclus avec ses concurrents, envers lesquels elle n'avait jamais pris aucun engagement. Cette société a apporté la preuve que, à différentes reprises, elle avait appliqué des prix ou des conditions différents de ceux qui avaient été convenus, ou qu'elle n'avait pas respecté les périodes de suspension de la concurrence.
(444) Messer a affirmé que, du fait qu'elle était à l'époque un nouvel arrivant, elle subissait les pressions de ses concurrents et qu'elle leur a donné l'impression qu'elle se ralliait à certaines pratiques anticoncurrentielles (280). Elle devrait donc être considérée comme victime des circonstances qui prévalaient alors. En outre, elle n'a jamais appliqué les accords et a toujours poursuivi une politique autonome très concurrentielle sur le marché.
(445) BOC fait valoir qu'il n'existe aucune preuve attestant qu'elle ait appliqué aucun des accords en cause et elle affirme qu'elle a en fait appliqué des augmentations de prix et des conditions commerciales différentes de celles évoquées et qu'elle n'a pas respecté la période de suspension de la concurrence en 1994-1995.
(446) Westfalen affirme qu'elle a toujours été un opérateur très concurrentiel, qui ne souhaitait pas s'entendre avec les autres acteurs, et que les déclarations qu'elle a faites à propos de futures augmentations de prix ou prix/conditions commerciales minimales ne constituaient pas des promesses contraignantes et n'ont pas été mises en œuvre sur le marché.
(447) La Commission note que la mise en œuvre d'accords sur des augmentations de prix ou des prix/conditions commerciales minimales ne nécessite pas obligatoirement l'application rigoureuse de ces prix/conditions. Le fait que des entreprises dont il est avéré qu'elles ont participé à des accords collusoires sur les prix/conditions commerciales avec leurs concurrents ne se soient pas comportées sur le marché ainsi qu'il avait été convenu avec ceux-ci, ne doit pas nécessairement être considéré comme une circonstance atténuante lors de la détermination du montant de l'amende. Des entreprises qui poursuivent, malgré la concertation avec leurs concurrents, une politique plus ou moins indépendante sur leur marché peuvent simplement tenter d'utiliser l'entente à leur profit (281).
(448) La Commission note en outre que, à la partie I de la présente décision, elle a cité des éléments de preuve attestant que plusieurs accords ont été effectivement mis en œuvre par les participants à l'entente.
iii) Conclusion relative aux montants des amendes avant application de la communication de la Commission sur la non-imposition d'amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (communication sur les mesures de clémence)
449) La Commission a fixé comme suit les montants des amendes avant application de la communication sur les mesures de clémence:
- AGA: 14 millions d'euros,
- Air Liquide: 3,64 millions d'euros,
- Air Products: 3,64 millions d'euros,
- BOC: 1,17 million d'euros,
- Hoek Loos: 14 millions d'euros,
- Messer: 1,68 millions d'euros,
- Westfalen: 0,43 million d'euros.
(450) Toutefois, comme le montant définitif des amendes calculé à l'aide de cette méthode ne peut en aucun cas être supérieur à 10 % du chiffre d'affaires mondial des destinataires (conformément à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17) (282), les amendes seront les suivantes:
- AGA: 5,54 millions d'euros,
- Air Liquide: 3,64 millions d'euros,
- Air Products: 3,64 millions d'euros,
- BOC: 1,17 million d'euros,
- Hoek Loos: 14 millions d'euros,
- Messer: 1,12 million d'euros,
- Westfalen: 0,43 million d'euros.
iv) Application de la communication sur les mesures de clémence
(451) Les destinataires de la présente décision ont collaboré avec la Commission à différents stades de l'enquête sur l'infraction, afin de pouvoir bénéficier du traitement de faveur décrit dans la communication sur les mesures de clémence. Afin de répondre aux attentes légitimes de ces entreprises en ce qui concerne la non-imposition d'amendes ou la réduction de leur montant, du fait de la coopération qu'elles ont apportée à la Commission, celle-ci examinera à la section suivante si les parties concernées répondent aux conditions définies dans la communication.
Non-applicabilité des sections B et C de la communication
(452) Si une entreprise remplit l'ensemble des conditions énoncées à la section B de la communication, elle bénéficiera de la non-imposition d'amende et d'une réduction très importante de son montant. Or, ces conditions ne sont pas remplies dans la présente affaire, dans la mesure où aucun des destinataires de la présente décision n'a informé la Commission de l'existence de l'entente avant que celle-ci n'ait procédé à une vérification auprès des entreprises concernées.
(453) Si une entreprise remplit l'ensemble des conditions énoncées à la section C de la communication, elle bénéficiera d'une réduction importante du montant de l'amende. Or, ces conditions ne sont pas remplies dans la présente affaire, dans la mesure où la vérification sur décision auprès des entreprises parties à l'entente a permis de recueillir des preuves suffisantes pour engager la procédure.
Réduction significative d'une amende
(454) Conformément à la section D de la communication, une entreprise qui ne répond pas à l'ensemble des conditions énoncées aux sections B et C peut malgré tout bénéficier d'une réduction significative, de 10 à 50 %, du montant de l'amende qui lui aurait été infligée en l'absence de coopération. Tel peut notamment être le cas si:
- avant l'envoi d'une communication des griefs, elle fournit à la Commission des informations, des documents ou d'autres éléments de preuve qui contribuent à confirmer l'existence de l'infraction commise,
- après avoir reçu la communication des griefs, elle informe la Commission qu'elle ne conteste pas la matérialité des faits sur lesquels la Commission fonde ses accusations.
(455) Outre le fait qu'elle a répondu avec une grande exactitude aux demandes de renseignements de la Commission, AGA a fourni des preuves remontant à la période en cause dans la présente affaire et a admis que l'un de ses cadres avait participé à des réunions avec des concurrents à Breda et à Barendrecht (283), et ce avant l'envoi de la communication des griefs.
(456) Air Products a également fourni des explications exhaustives sur les documents recueillis par la Commission lors de son inspection et a reconnu que des contacts inappropriés avaient été pris entre concurrents sur le marché néerlandais (284), et ce avant l'envoi de la communication des griefs.
(457) En outre, après avoir reçu la communication des griefs de la Commission, AGA, Air Products, Hoek Loos et Messer ont demandé à bénéficier d'une réduction significative de leurs amendes pour ne pas avoir contesté les faits.
(458) Les considérations qui précèdent justifient une réduction du montant des amendes de 25 % pour AGA et Air Products, et de 10 % pour Hoek Loos et Messer.
Conclusion relative à l'application de la communication sur les mesures de clémence
(459) En conclusion, compte tenu de la nature de leur coopération et conformément aux conditions définies dans la communication sur les mesures de clémence, la Commission accordera aux destinataires de la présente décision les réductions suivantes du montant de leurs amendes respectives:
- AGA: réduction de 25 %,
- Air Products: réduction de 25 %,
- Hoek Loos: réduction de 10 %,
- Messer: réduction de 10 %.
v) Montants définitifs des amendes imposées dans la présente procédure
(460) En conclusion, les amendes qui seront imposées conformément à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 sont les suivantes:
- AGA: 4,15 millions d'euros,
- Air Liquide: 3,64 millions d'euros,
- Air Products: 2,73 millions d'euros,
- BOC: 1,17 million d'euros,
- Hoek Loos: 12,6 millions d'euros,
- Messer: 1 million d'euros,
- Westfalen: 0,43 million d'euros,
A ARRETE LA PRESENTE DECISION:
Article premier :
AGA AB, Air Liquide BV, Air Products Nederland BV, BOC Group plc, Messer Nederland BV, NV Hoek Loos, Westfalen Gassen Nederland BV ont enfreint l'article 81, paragraphe 1, du traité, en participant à des accords et/ou pratiques concertées continus dans le secteur des gaz industriels et médicaux aux Pays-Bas.
La durée de l'infraction était la suivante:
- AGA AB de septembre 1993 à décembre 1997,
- Air Liquide BV de septembre 1993 à décembre 1997,
- Air Products Nederland BV de septembre 1993 à décembre 1997,
- BOC Group plc de juin 1994 à décembre 1995,
- Messer Nederland BV de septembre 1993 à décembre 1997,
- NV Hoek Loos de septembre 1993 à décembre 1997,
- Westfalen Gassen Nederland BV de mars 1994 à décembre 1995.
Article 2 :
Les entreprises citées à l'article 1er mettent fin sans délai à l'infraction mentionnée audit article, si elles ne l'ont pas déjà fait. Elles s'abstiennent de tout acte ou comportement ayant un objet ou un effet similaires ou équivalents à ceux de l'infraction en cause.
Article 3 :
Les amendes suivantes sont infligées pour l'infraction mentionnée à l'article 1er:
- AGA AB 4,15 millions d'euros,
- Air Liquide BV 3,64 millions d'euros,
- Air Products Nederland BV 2,73 millions d'euros,
- BOC Group plc 1,17 million d'euros,
- Messer Nederland BV 1 million d'euros,
- NV Hoek Loos 12,6 millions d'euros,
- Westfalen Gassen Nederland BV 0,43 million d'euros.
Article 4 :
Les amendes mentionnées à l'article 3 sont payables, dans un délai de trois mois à compter de la date de notification de la présente décision, au compte bancaire de la Commission européenne n° 642-0029000-95 (code Swift: BBV ABEBB - code IBAN BE76 6420 0290 0095), Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (BBVA) SAA, Avenue des Arts 43, B-1040 Bruxelles.
A l'expiration de ce délai, des intérêts sont automatiquement dus au taux pratiqué par la Banque centrale européenne pour ses principales opérations de refinancement au premier jour ouvrable du mois au cours duquel la présente décision a été arrêtée, majoré de 3,5 points de pourcentage, c'est-à-dire 6,75 %.
Article 5 :
Les sociétés:
AGA AB, S-181-81 Lidingö
Air Liquide BV, De Witbogt 1, 5652 AG Eindhoven, Nederland
Air Products Nederland BV, Klaprozenweg 101, Noordpoort 1033 NN, Amsterdam, Nederland
BOC Group plc, Chertsey Road, Windlesham, GU20 6HJ - Surrey, United Kingdom
Messer Nederland BV, Middenweg 17, 4782 PM Moerdijk, Nederland
NV Hoek Loos, Havenstraat 1, Postbus 78, 3100 AB Schiedam, Nederland
Westfalen Gassen Nederland BV, Rigastraat 20, 7415 EW Deventer, Nederland
sont destinataires de la présente décision.
Notes :
(1) JO 13 du 21.2.1962, p. 204/62.
(2) JO L 148 du 15.6.1999, p. 5
(3) JO L 354 du 30.12.1998, p. 18.
(4) JO C 78 du 1.4.2003.
(5) Affaire IV/30.869.
(6) Communiqué de presse IP (89) 426 du 7 juin 1989.
(*) Des parties de ce texte ont été omises afin de garantir qu'aucune information confidentielle ne soit communiquée. Ces parties sont indiquées par des points de suspension entre crochets.
(7) Communiqué de presse IP (89) 426 du 7 juin 1989.
(8) COMP/M.1630, décision en vertu de l'article 8, paragraphe 2, du 18 janvier 2000.
(9) COMP/M.1641, décision du 9 février 2000.
(10) Toutefois, AGA était présente aux Pays-Bas depuis 1917.
(11) COMP/M.1641, décision du 9 février 2000.
(12) Devenue Ernst & Young en 1999
(13) Cela a également été confirmé dans les décisions relatives à des concentrations M.1630 Air Liquide/BOC et M.1641 Linde/AGA.
(14) Affaire 30.869, voir communiqué de presse de la Commission IP(89) 426 du 7 juin 1989.
(15) La directive n° 99-36-CE du Conseil sur les équipements sous pression transportables n'a été adoptée et publiée qu'en mai 1999 (JO L 138 du 1.6.1999) pour transposition par les Etats membres en juillet 2001 au plus tard.
(16) Voir dossiers, AGA, p. 852; AL, p. 5609; HL, p. 2788.
(17) Voir dossier AGA, p. 290, 6755 et 1056.
(18) Egalement confirmé dans les décisions relatives aux concentrations M.1630 Air Liquide/BOC et M.1641 Linde/AGA.
(19) Les ventes pour 1996 sont indiquées à titre d'exemple. L'importance relative des ventes annuelles de gaz en bouteilles et en vrac de chaque entreprise peut avoir varié d'une année sur l'autre au cours de la période sur laquelle a porté l'infraction. Les estimations relatives aux parts de marché sont dérivées directement des données transmises par les entreprises et sont fournies à titre purement indicatif. Ces estimations reposent sur l'hypothèse selon laquelle les sociétés mentionnées au tableau 1 ont couvert, ensemble, plus de 90 % du marché néerlandais en 1996.
(20) A la suite de la liquidation d'AGA Gas BV en 2000/2001, AGA AB a accepté d'assumer la responsabilité des actes de cette dernière, et c'est donc à elle que la décision est adressée.
(21) 2000 est le dernier exercice complet pour lequel des données sur le chiffre d'affaires sont disponibles pour AGA Gas BV.
(22) Sur la base de leurs réponses aux demandes de renseignements de la Commission.
(23) Indice calculé en additionnant les carrés des parts de marché. Un IHH inférieur à 1 000 indique un marché dispersé, alors qu'un IHH entre 1 000 et 1 800 indique l'existence d'un marché modérément concentré et un IHH supérieur à 1 800, l'existence d'un marché très concentré.
(24) Voir dossier AGA, p. 189 et 4960.
(25) Voir dossiers AL, p. 2104 à 2111 et 2152; AL, p. 2161; AGA, p. 368; AP, p. 1563 à 1565.
(26) Voir dossiers AGA, p. 4938; BOC, p. 3614; MG, p. 7294; AGA, p. 919.
(27) Voir dossiers AGA, p. 4954.
(28) Voir dossiers HL, p. 2651 et 3041; BOC, p. 3762 à 3772; AGA, p. 867 et 877; MG, p. 4814.
(29) Voir dossiers AL, p. 2161; BOC, p. 3762 à 3773; HL, p. 3041; AP, p. 1503 et 1508.
(30) Voir dossiers AP, p. 1645; AGA, p. 6557.
(31) Dossier AP, p. 5964 bis.
(32) Dossiers AGA, p. 5169; AP p. 5965; MG p. 5280.
(33) Exemples: AL-AGA (dossiers AL, p. 2159; AGA, p. 4987); AGA-HL (dossier AGA, p. 4944, 4960, 4963, 4972 et 4988); AGA-MG (dossiers AGA, p. 4952 et 4961; MG, p. 7247, 4814 et 4815); AGA-AP (dossier AGA, p. 4979).
(34) Dossier AGA, p. 782.
(35) Dossier MG, p. 4816.
(36) Dossier AGA, p. 5193.
(37) Dossier AL, p. 2112 (traduit par nos soins).
(38) Dossier AL, p. 5612.
(39) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point 52, p. 10.
(40) Dossier AGA, p. 867 et 877.
(41) Dossier AGA p. 877.
(42) Dossier MN, réponse non confidentielle à la communication des griefs point 61, p. 17; point 62, p. 18.
(43) Dossier AL, p. 2096 (traduit par nos soins).
(44) Dossier AL, p. 5612 (traduit par nos soins).
(45) Dossier AL, p. 5612 (traduit par nos soins).
(46) Dossier AL, p. 2098 (traduit par nos soins).
(47) Dossier AL, p. 2171 et 2172 (traduit par nos soins).
(48) Dossier AGA, p. 4964.
(49) Dossier AP, p. 1761 et1762.
(50) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point 53, p. 10 et 11.
(51) Dossier MN, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point 63, p. 18.
(52) Dossier AGA, p. 453.
(53) Dossier AGA, p. 4983.
(54) Dossier AGA, p. 4990.
(55) Dossier AP, p. 1755.
(56) Dossier AP, p. 6336.
(57) Dossier BOC, p. 3576.
(58) Dossier BOC, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 9.
(59) Dossier WF, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 42 à 52, p. 8 à 10.
(60) Dossier AGA, p. 4990.
(61) Dossier MG, p. 4786 (traduit par nos soins).
(62) Dossier MG, p. 4833 (traduit par nos soins).
(63) Dossier MG, p. 4782 (traduit par nos soins).
(64) Dossier HL, p. 2904 et 2905 (traduit par nos soins).
(65) Dossier HL, p. 5551.
(66) Dossier AP, p. 1724 et 1725.
(67) Dossier AGA, p. 453 et 4983.
(68) Dossier HL, p. 2653.
(69) Dossier AP, p. 1724 et 1725.
(70) Dossier MG, p. 4834.
(71) Dossier HL, p. 5549.
(72) Dossier HL, p. 3532.
(73) Dossiers AL, p. 5642 et 5643; AP, p. 5965; AGA, p. 5169 et 5170.
(74) Dossier AGA, p. 782.
(75) Dossier AGA, p. 5193; voir également p. 5196.
(76) Dossier AGA, p. 867 et 877.
(77) Dossier MN, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point 68, p. 19.
(78) Dossier AP, p. 1761 et 1762.
(79) Dossier AGA, p. 4983.
(80) Dossier AGA, p. 4990.
(81) Dossier AP, p. 1755.
(82) Dossier AP, p. 6336.
(83) Dossier WF, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 53 à 60, p. 10 et 11.
(84) Dossier HL, p. 2984 (traduit par nos noins).
(85) Dossier MG, p. 4833 (traduit par nos soins).
(86) Dossier MG, p. 4785 (traduit par nos soins).
(87) Dossier MG, p. 4783.
(88) Dossier MG, p. 4782 (traduit par nos soins).
(89) Dossier AL, p. 2525 (traduit par nos soins).
(90) Dossier MG, p. 4836.
(91) Dossier MG, p. 4834 (traduit par nos soins).
(92) Dossier MG, p. 5268.
(93) Dossier MG, p. 5268.
(94) Dossier AP, p. 1725.
(95) Dossier AL, p. 2571.
(96) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point 61, p. 12.
(97) Dossier AGA, p. 782.
(98) Dossier AL, p. 2150 et 2151 (traduit par nos soins).
(99) Dossier AGA, p. 1003 à 1005.
(100) Dossier HL, p. 2655 à 2660 (en partie traduit par nos soins).
(101) Le tétrène est un gaz de soudage vendu par AL, AGA et d'autres.
(102) Dossier AGA, p. 868 à 870.
(103) Dossier AL, p. 2394 à 2397.
(104) Dossier AP, p. 1559 à 1562.
(105) Dossier AGA, p. 887.
(106) Dossier AL, p. 2116 et 2117.
(107) Dossier AL, p. 2112 (traduit par nos soins).
(108) Dossier AGA, p. 867 et 877.
(109) Dossier AGA, p. 453 et 454.
(110) Dossier AGA, p. 4983.
(111) Dossier AGA, p. 7011 et 7012.
(112) Dossier AGA, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 12.
(113) Dossier WF, p. 5224.
(114) Dossier AL, p. 2183.
(115) Dossier MG, p. 4779 (traduit par nos soins).
(116) Dossier AL, p. 2348.
(117) Dossier AGA, p. 369 et 370.
(118) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 69 et 70, p. 14.
(119) Dossier AGA, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 13.
(120) Dossier AGA, p. 7013.
(121) Dossier WF, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 76 et 77, p. 13.
(122) Dossier AGA, p. 7011 et 7012.
(123) Dossier AGA, p. 5169 et 5170.
(124) Dossier AP, p. 6333 et 5965.
(125) Dossier Indugas, p. 5717.
(126) Dossier MG, p. 5280.
(127) Dossier AL, p. 5642 et 5643.
(128) Dossier MG, p. 7247, 7248 et 4806 à 4812.
(129) Dossier AP, p. 1723.
(130) Dossier AGA, p. 292.
(131) Dossier MG, p. 4835.
(132) Dossier AGA, p. 6995.
(133) Dossier AP, p. 5883.
(134) Dossier AP, p. 1724 et 1725, et p. 5884.
(135) Dossier MG, p. 4834.
(136) Dossier AGA, p. 348.
(137) Dossier AL, p. 2572.
(138) Dossier HL, p. 2653.
(139) Dossier HL, p. 5549.
(140) Dossier HL, p. 2653.
(141) Dossier MG, p. 4779 (traduit par nos soins).
(142) Dossier AP, p. 1820.
(143) Dossier HL, p. 2906.
(144) Dossier AP, p. 5886.
(145) Dossier WF, p. 7625 (traduit par nos soins).
(146) Dossier WF, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point 78, p. 13.
(147) Dossier HL, p. 2655 à 2660 (traduit en partie par nos soins).
(148) Dossier MG, p. 4814 et 4815 (traduit par nos soins).
(149) Dossier AGA, p. 453.
(150) Dossier AGA, p. 4977.
(151) Dossier AGA, p. 4983.
(152) Dossier AGA, p. 453.
(153) Dossier BOC, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 2.26 et 2.27, p. 15 et 16.
(154) Dossier AL, p. 2348 et 2360.
(155) Dossier HL, p. 2907.
(156) Dossier AGA, p. 369-370.
(157) Dossier AGA, p. 363.
(158) Dossier AGA, p. 4980 et 4982.
(159) Dossier AGA, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 6.
(160) Dossier AGA, p. 4979 (traduit par nos soins).
(161) Probablement la réunion VFIG du 23 juin 1994, qui a eu lieu à Utrecht et au cours de laquelle les participants se sont mis d'accord sur des prix minimaux pour la location et le transport.
(162) Dossier MG, p. 4832.
(163) Dossier AP, p. 1725.
(164) Dossier MG, p. 4834.
(165) Dossier HL, p. 2653.
(166) Dossier AP, p. 1723.
(167) Dossier AGA, p. 292.
(168) Dossier MG, p. 4835.
(169) Dossier HL, p. 2655 à 2660 (traduit en partie par nous).
(170) Dossier MG, p. 4814 et 4815.
(171) Dossier AGA, p. 453 et 4977.
(172) Dossier HL, p. 2907.
(173) Dossier AGA, p. 4980 et 4982; voir également considérant 250.
(174) Dossier AGA, p. 369 et 370.
(175) Dossier AGA, p. 363.
(176) Dossier BOC, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 16 et 17.
(177) Dossier AP, p. 1755.
(178) Dossier MG, p. 7246.
(179) Dossier MG, p. 7273.
(180) Dossier WF, p. 7625 (traduit par nos soins).
(181) Dossier WF, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 62 à 64, p. 11.
(182) Dossier MG, p. 7273.
(183) Dossier MG, p. 7211 (traduit par nos soins).
(184) Dossier MG, p. 7297.
(185) Dossier MG, p. 7270.
(186) Dossier AP, p. 1723.
(187) Dossier AGA, p. 292.
(188) Dossier MG, p. 4835.
(189) Dossier HL, p. 2655 à 2657.
(190) Dossier AL, p. 2112 (traduit par nos soins).
(191) Dossier AL, p. 2096 (traduit par nos soins).
(192) Dossier AL, p. 5612 (traduit par nos soins).
(193) Dossier AP, p. 1758 à 1760.
(194) Dossier AL, p. 5615.
(195) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point 78, p. 15.
(196) Dossier HL, p. 5554.
(197) Dossier AGA, p. 7010.
(198) Dossier VFIG, p. 4079.
(199) Dossier VFIG, p. 4082 et 4083; figure également dans les dossiers de plusieurs autres sociétés.
(200) Dossier VFIG, p. 4093.
(201) Dossier AP, p. 1758.
(202) Dossier AL, p. 2171 (traduit par nos soins).
(203) Dossier AGA, p. 4964.
(204) Dossier AGA, p. 1059.
(205) Dossier AL, p. 5615.
(206) Dossier AGA, p. 1063.
(207) Dossier HL, p. 2986.
(208) Dossier HL, p. 2996.
(209) Dossier HL, p. 5554.
(210) Dossier AGA, p. 453.
(211) Dossier AL, p. 5614 et 5615.
(212) Dossier HL, p. 5554.
(213) Dossier AGA, p. 7009.
(214) Dossier WF, p. 5250.
(215) Dossier WF, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 67 à 71, p. 12.
(216) Dossier BOC, p. 6450.
(217) Dossier AGA, p. 782.
(218) Dossier AL, p. 2150 et 2151 (traduit par nos soins).
(219) Dossier AGA, p. 4983.
(220) Dossier AGA, p. 454.
(221) Dossier AP, p. 1723.
(222) Dossier AGA, p. 292.
(223) Dossier MG, p. 4835.
(224) Dossier MN, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 24.
(225) Dossier AGA, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 35 à 39, p. 10-11.
(226) Dossier AP, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 13.
(227) Affaires jointes T-305-94 et autres, Limburgse Vinyl Maatschappij et autres contre Commission, (PVC II), Rec. 1999, p. II-931, point 715.
(228) Affaire 48-69, Imperial Chemical Industrie contre Commission, Rec. 1972, p. 619, point 64.
(229) Affaires jointes 40-48-73 et autres, Suiker Unie et autres contre Commission, Rec. 1975, p. 1663.
(230) Voir également affaire T-7-89, Hercules Chemicals contre Commission, Rec. 1991, p. II-1711, point 256.
(231) Voir affaire C-199/92 P, H¸ls contre Commission, Rec. 1999, p. I-4287, points 158 à 166.
(232) Affaire T-7-89, Hercules Chemicals contre Commission, point 264.
(233) Affaires jointes T-305-94 et autres, Limburgse Vinyl Maatschappij et autres contre Commission (PVC II), Rec. 1999, p. II-931, point 696.
(234) Voir l'arrêt de la Cour de justice dans l'affaire C-49-92 P, Commission contre Anic Partecipazioni SpA, Rec. 1999, p. I-4125, point 81.
(235) Affaire C-49-92 P, Commission contre Anic, Rec. 1999, p. I-4125, point 83.
(236) Dossier VFIG, p. 3798.
(237) Dossier VFIG, p. 3797 et 3798.
(238) Dossier AGA, p. 126 à 128.
(239) Arrêt rendu dans l'affaire T-141-94, Thyssen contre Commission, Rec. 1999, p. II-347, point 262 des motifs.
(240) Dossier AGA, p. 782.
(241) Dossier AGA, p. 877.
(242) Dossier AL, p. 2171 et 2172 (traduction par nos soins).
(243) Dossier AP, p. 1755 (traduction par nos soins).
(244) Il est également question d'un soutien actif dans le dossier AGA, p. 4982 (réunion bilatérale AGA-MG).
(245) Dossier HL, p. 2984 (traduction par nos soins).
(246) Dossier AP, p. 1725.
(247) Dossier AGA, p. 782.
(248) Dossier HL, p. 2655.
(249) Dossier AGA, p. 877.
(250) Dossier AGA, p. 453.
(251) Dossier AL, p. 2068 (traduction par nos soins).
(252) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points IV et V.
(253) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point 1.4, entre autres.
(254) Dossier WF, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 3 et 4.
(255) Arrêt de la Cour dans l'affaire T-142-89, Usines Gustave BoÎl, Rec. 1995, p. II-867, point 60. Confirmé en dernier lieu par la Cour de justice le 8 juillet 1999, dans l'affaire C-199-92P, H¸ls contre Commission, Rec. 1999, p. I-4287, points 155 à 168.
(256) Arrêt du Tribunal de première instance du 12 juillet 2001 dans les affaires jointes T-202-98, T-204-98 et T-207-98, British Sugar et autres contre Commission, point 78.
(257) Arrêt l'affaire T-13-89, Imperial Chemical Industries contre Commission, Rec. 1992, p. II-1021, point 304.
(258) Voir à cet égard l'arrêt de la Cour dans l'affaire 45-85, Verband der Sachversicherer contre Commission, Rec. 1987, p. 447, point 48.
(259) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point V.4.
(260) Voir, par exemple, dossier AGA, p. 4934.
(261) JO L 319 du 29.11.1974, p.1.
(262) Dossier AGA, réponse non confidentielle à la communication des griefs, point V, p. 15 à 24.
(263) Dossier HL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 5 à 9.
(264) Dossier AP, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 20 à 21.
(265) Dossier AL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 20 à 21.
(266) Dossier MN, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 32.
(267) Dossier BOC, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 18.
(268) Voir considérant 88 et dossier BOC, p. 3576.
(269) Le conseiller juridique externe de BOC a informé les services de la Commission de la réalisation de la vente à Air Liquide du secteur gazier du groupe BOC au Benelux par lettre du 20 janvier 1999, dossier BOC, p. 6487.
(270) Dossier AGA, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 4.
(271) JO C 207 du 18.7.1996, p. 4.
(272) Analyse du marché des gaz en bouteilles aux Pays-Bas, 1990-1999, annexe 14 à la réponse non confidentielle d'AGA. (273) Dossier AGA, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 27 à 29, et dossier HL, réponse non confidentielle à la communication des griefs, points 35 à 37.
(274) Décision de la Commission du 14 octobre 1998 (JO L 76 du 22.3.1999, p. 1).
(275) Décision de la Commission du 9 décembre 1998 (JO L 109 du 27.4.1999, p. 24).
(276) Décision de la Commission du 18 juillet 2001 (JO L 265 du 5.10.2001, p. 15).
(277) Décision de la Commission du 5 décembre 2001 (non encore publiée au Journal officiel).
(278) Décision de la Commission du 11 juin 2002 (non encore publiée au Journal officiel).
(279) Voir considérant 142.
(280) Dossier MN, réponse non confidentielle à la communication des griefs, p. 30.
(281) Affaire T-308/94 Cascades SA contre Commission, Rec. 1998, p. II-925, point 230.
(282) Vu que AGA AB est considérée comme responsable pour le comportement de sa filiale de l'époque, AGA Gas BV, le montant de l'amende est réduit à 10 % du chiffre d'affaire de cette dernière; voir note 20 de bas de page.
(283) Dossier AGA, p. 6987 à 7014.
(284) Voir lettre AP du 24 avril 1998, dossier AP, p. 5818.